Day 0
Clouée à ma chaise, je fixais mon reflet dans le miroir et me retint d'ajouter une autre couche de blush tant mon teint me semble pale. La maquilleuse en a mis assez. Ma main descendit machinalement de ma joue vers ma robe blanche pour lisser des plis inexistants. Je ne savais pas si j'étais en train de prendre la meilleure ou la pire décision de ma vie.
-"Il est trop tard pour s'enfuir ?"Demandais-je à Lois. Son regard attendri voyageait entre mon reflet et ma personne.
-"Et priver tous les invités de cette beauté ? Tu n'es pas si cruelle."
-"Je stresse."
-"C'est normal, mais n'oublie pas, on est ensemble. On s'en sortira."
Un nouveau soupir m'échappa. Probablement le dernier de la soirée, car il était temps de sortir.
-"On y va ?"demandai-je à Lois qui me répondit par un sourire rassurant et me tendit le bras. Je m'y accrochais comme à une planche de salut.
Heureusement pour moi, j'avais encore un peu de temps avant de devoir faire face aux invités. Il était temps de revoir tous les aspects techniques de la chose. Je me retrouvais enfin en terrain familier, entre le staff et l'équipe qui, depuis le temps, m'étaient devenus plus familiers que mes voisins.
Et après un bon moment, on nous signala qu'il était temps de faire notre entrée.
Lois serra tendrement ma main avant de disparaître dans la grande salle, un tonnerre d'applaudissements l'accueillant. Puis j'entendis mon nom, et ce fut mon tour.
Il vint m'aider à monter les marches jusqu'à la petite estrade dressée au milieu de la scène pour un effet plus dramatique, et je savais déjà que des clichés de ce court instant allait faire la une d'une dizaine d'articles le lendemain. Ce n'était pas la première fois qu'une de nos interactions était analysée à la loupe.
-"Rappelle-moi pourquoi on a accepté ça ?"lui demandais-je en faisant mine de remettre une mèche derrière mon oreille alors qu'en réalité, je couvrais le micro.
Sérieusement, maîtres de cérémonie ? Pourquoi avions-nous cru que c'était une bonne idée ?
Ah, probablement car ce n'était pas notre première fois.
Il me répondit par un sourire éclatant qu'il conserva en se tournant vers les caméras. Je profitais de ce dernier moment où je leur tournais le dos pour me mordre la joue avant de me retourner également, une expression radieuse sur le visage.
-"Mesdames et messieurs, je vous souhaite la bienvenue dans la treizième édition du Grand prix national ! Là où les personnalités phares de l'année sont mises à l'honneur !"Commençais-je.
-"Et ma chère [t/p], je suis sûr que vous trouvez aussi que cette année, nous avons eu une sacrée dose de personnalités qui ont brillé plus qu'avant sur la scène national."
-"En effet, que ce soit dans le domaine du sport, de l'art, de la politique ou dans les médias, derrière un écran ou face aux gens, tant de femmes et d'hommes ont su attirer les regards par leurs accomplissements."
-"Et vous réussissez sûrement à attirer les regards ce soir ! Vous êtes sublime ma chère !"
-"N'essayez pas de me soudoyer, ce n'est pas moi qui décide de qui remporte chaque prix, mais bien nos spectateurs ! Je vous rappelle que les votes sont encore ouverts jusqu'à vingt et une heure trente."
Faisant faussement l'air d'être vexé, Lois essuya une fausse larme avant de prendre la parole et de présenter le premier chanteur qui allait faire une performance ce soir, pour éviter de se jeter trop tôt dans le bain.
J'en profitais pour disparaître dans les coulisses, repassant le programme dans ma tête. Je détestais les événements live autant que je les aimais. Le stress qui nouait les tripes mêlé à la fierté quand tout se déroulait sans accros. L'adrénaline, l'excitation, la peur. Je vivais pour ces sensations fortes.
Pendant une grande partie de la soirée, notre rôle fut réduit à la présentation des célébrités qui allaient discerner les divers prix. Il y'en avait un tas, ce qui ne donnait pas beaucoup de temps entre chaque séquence, et pas mal de trophées étaient donnés dans une seconde cérémonie beaucoup moins extravagante. Celle-ci était réservée aux catégories les plus proéminentes.
C'était dans cette seconde fête où j'allais être présente non pas sur l'estrade, mais parmi les nominés.
Présentatrice télé de l'année. Je n'en aurais jamais rêvé. Même maintenant, aussi proche de recevoir un tel honneur, mon esprit refusait de percevoir ceci en temps qu'autre chose qu'un rêve éveillé.
-"Oï, ma belle, il est temps que tu y ailles."
C'était presque bizarre de monter sur scène sans Lois, mais c'était mon tour, après lui, de récompenser l'un ou l'une des nominés. Après tout, nous étions les chouchous des spectateurs. N'importe quel excuse était bonne pour nous mettre à l'avant.
-"Souhaite-moi bonne chance. Puta*n, imagine que je casse le trophée..."
-"Je suis sûr que tu vas cartonner. Espérons au moins que tu ne feras pas tomber le tien quand on te le donnera."
Malgré ses paroles, il s'approcha de moi pour m'étreindre rapidement. S'il m'avait accordé quelques secondes plus tard, j'aurais refusé de quitter ses bras.
Je lui répondis d'une tape dans le dos, et rouge d'embarras, je me dirigeais vers la scène après qu'une voix pressante ait retenti dans le moniteur.
Me voici, devant tous ces gens, à leur faire face en tenant entre mes doigts une énième enveloppe dont tout le monde connaissait le contenu. C'était le hic avec ce genre d'événements. Les gagnants étaient trop prévisibles.
-"Et le prix du sportif de l'année revient à..." Mes doigts tremblèrent en ouvrant l'enveloppe. Tous les yeux étaient sur moi, et si mon sourire fanait ne serait-ce qu'une seconde, on allait le remarquer. Je risquais pourtant un rapide coup d'œil vers Lois en faisant semblant de chercher le gagnant du regard. Il leva un pouce dans ma direction, "Livaï Ackerman ! "
Je me sentais mal pour les autres nominés qui avaient pris la peine de se déplacer. C'était douloureusement clair qu'il allait les laminer. Livaï n'était pas le sportif de l'année, mais plutôt de la décennie, voire plus.
Je le fixais pendant qu'il se levait, accordant une rapide accolade à Erwin assis à ses côtés et échangeant une poignée de main avec certains de ses coéquipiers. Au fond de lui, il devait mourir d'envie d'aller se laver et de s'éloigner de cette foule. Mais la célébrité venait avec ses contraintes, et il avait une image à maintenir.
Puis ses yeux tombèrent sur moi.
Je ne frémis pas, ne reculais pas, soutenant son regard comme si nous n'avions pas un passé commun. Comme si je ne lui avais pas tendu mon cœur de jeune femme pour qu'il le piétine. Comme si je ne l'avais jamais aimé et que le seul sentiment que j'éprouvais pour lui était une profonde admiration, à l'image de tous les autres, et pas une répulsion.
Il escalada les marches avec une assurance à couper le souffle. Et en parlant de choses qui te saisissaient à la gorge, il était tout simplement sublime. Il était tiré à quatre épingles, comme d'habitude. Si beau que, l'espace de quelques instants, je redevins cette fille à l'âme brisée, marquée à jamais par une trahison qu'elle n'avait pas vu venir. J'en eu envie de l'insulter de tous les noms avant de le pousser de cette scène.
Mais je n'étais plus la même personne. Le temps n'avait pas été indulgent envers moi, ne me permettant pas de l'oublier. Je l'avais eu constamment sous les yeux : au lycée, puis plus tard quand il commença sa carrière de footballeur professionnel, avant que mon propre métier ne me force à épier le moindre de ses geste. Je n'étais plus aussi sensible à son charme. Il avait beau ensorcelé toutes les paires d'yeux qui suivaient chacun de nos gestes, je lui étais immunisée. Je m'étais entrainée dur pour le devenir, pour bâtir ce mur qui l'empêchera de voir la cicatrice qu'il avait laissé de son sillage.
Et ce mur se fissura à son contact.
J'avais tendu la main. Je m'étais préparé mentalement à ce moment où je devrais lui serré la main. J'avais profité du fit qu'on m'ait enlevé le micro pendant ces quelques instants pour me chuchoter des paroles encourageantes. De l'autre côté de l'estrade, Lois me rassurait du regard depuis que j'avais posé un pied dehors sans lui.
Mais je ne m'étais pas préparée à ce qu'il profite de notre poignée de main pour me tirer vers lui. Ses doigts frôlèrent avec la légèreté d'une plume ma hanche tandis que ses lèvres caressèrent mes joues.
Avec ironie, je me souvins de la première fois où il m'avait fait la bise, et je m'insultais intérieurement de m'en être souvenue avec une telle clarté.
C'était le même déluge de confusion, d'embarras et de douce chaleur, sauf que cette fois, je n'avais pas une écharpe derrière laquelle me cacher. Des caméras nous mitraillaient de tous les côtés, et si cette étreinte durait une seconde de plus, ou si je n'avais retrouvé mon masque d'indifférence joyeuse en m'éloignant de lui, ce n'était pas juste les articles sur une potentielle relation entre Lois et moi qui allaient inonder la toile.
Il s'éloigna comme si de rien n'était, et je m'interdis de réagir d'une quelconque façon, même en m'énervant. J'aurais dû m'y attendre. C'était plus que normal de prendre quiconque allait nous présenter un tel trophée dans ses bras. Je n'aurais pas dû m'attendre à ce qu'il me serre simplement la main.
Alors qu'il prenait le prix, je lui envoyais un sourire aussi faux que sa prétendue sociabilité. Je le lui jetais presque, essayant de m'en débarrasser au plus vite pour ne pas le fracasser au sol, ou contre son crâne.
-"Félicitations."dis-je en m'approchant suffisamment du micro pour qu'on l'entende comme un murmure et qu'on croit que je ne faisais pas tout ceci juste pour conserver les apparences.
-"Merci."répondit-il avec cette fausse politesse qui me mettait presque hors de moi.
Il s'approcha à son tour du micro, balançant des conneries et rendant hommage à je ne sais combien de personnes. Tout ceci, ce n'était pas lui, et ça m'énervait, car c'était un douloureux rappel du fait que je ne l'ai jamais réellement connu.
Je me tins derrière lui, à deux doigts de déchiqueter l'enveloppe que je tenais devant moi pour contenir la tension grimpante. Je devais être bien sage, un sourire fier sur le visage comme si j'étais la mère de ce foutu con.
Car c'était le rôle que je me devais de jouer ce soir. La gentille présentatrice qui aimait tout le monde et qui, en retour, était aimée par tout le monde.
Il déblatéra encore je ne sais quelles conneries avant de saluer les autres personnes sur cette scène que je n'avais même pas remarqué monter, avant qu'on n'ait à se diriger vers un coin pour une photo collective, comme si j'avais envie de me retrouver à moins de cent kilomètres de lui.
Il garda son expression stoïque tandis que j'adressais un sourire splendide à la caméra. Un sacré doigt d'honneur pour la réalité car il était celui heureux en ce moment, et j'étais celle qui en avait marre de devoir conserver cette façade.
Un nouveau regard dans sa direction me fit presque ricaner. Il portait un tuxedo signé Prada, comme s'était empressés de le signaler les journalistes à peine quelques secondes après son passage sur le tapis rouge.
-"It seems like the devil really does wear Prada after all."murmurais-je sans pouvoir m'en retenir.
On dirait que le diable s'habille réellement en Prada après tout.
Je ne sus s'il s'était retenu de me répondre ou si le flash des caméras avait couvert ma petite provocation, mais je m'empressais de prendre la pose une dernière fois avant de prendre cette fois les devants et de lui serrais la main en la couvrant de mes deux paumes dans une poignée qui se voulait chaleureuse, mais qui en réalité n'était qu'une excuse pour l'empêcher de me troubler à nouveau avec sa proximité.
En me dirigeant vers les coulisses où Lois m'attendait, les bras grands ouverts pendant les quelques secondes avant que la cérémonie ne reprenne, je laissais mes doigts caresser le tissu délicat de ma robe.
Il n'était pas le seul habillé en Prada. Et si sur scène j'étais un petit ange, j'étais tout aussi prête à me montrer vicieuse en dehors de celle-ci.
ET JE SUIS DE RETOUR (après à peine deux mois. C'est limite le temps que je mettais à sortir un nouveau chapitre mais je n'en pouvais plus d'attendre.)
Livaï est réapparu (sans blague) et l'action démarre directement. Une idée sur ce qui pourrait se passer par la suite ?
Merci pour tous les commentaires bienveillants concernant la fin du premier tome ! Je sais que c'était inattendu et pas vraiment joyeux comme fin, mais je voulais quelque chose de réel, de déchirant et d'original hehe.
Avant de démarrer cette nouvelle aventure, n'hésitez pas à me laisser vos remarques, conseils, ou questions à propos des mystères du premier tome. Je tenterais de répondre à tout dans celui ci.
Merci beaucoup et à bientôt pour la suite !
~Caporal Neko
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