Bienvenue à Paradise

A la fin des années 90, dans l'État de l'Iowa au Midwest des États-Unis, se trouvait la petite ville de Paradise. Si cette bourgade n'avait rien d'exceptionnelle, elle pouvait en revanche se vanter d'avoir une bonne situation géographique : elle était située entre la frontière voisine du Nebraska et la capitale de Des Moines. Ici, chaque habitant s'attelait à chérir ses libertés tout en maintenant leurs droits. Car tel était la devise du coin. En bref, c'était une ville où il ne se passait pas grand-chose et où il ne se passerait sûrement jamais rien.

Aujourd'hui était une de ces journées banales. Le soleil se levait de son court sommeil, et déjà, ses rayons lumineux tapaient sur tout le panorama. C'était les prémices de la chaleur de l'été qui se faisaient ressentir pour le plus grand bonheur des enfants et des adolescents. 

D'ailleurs, sous le prétexte de la canicule naissante, une joyeuse bande de copines en avaient profité pour ressortir leurs tenues légères et affriolantes mettant en valeur leurs longues jambes interminables, leur décolté provocateur et leur ventre plat. Pour sûr, ces filles là aimaient se faire remarquer, elles vivaient dans un monde où l'apparence était reine -comme la majorité des lycéens de la ville-.

Elles sillonnaient le bitume dans le superbe 4x4 à toit ouvert bleu métallisé offert par le généreux paternel de la cheerleader en chef du lycée Reiss, lorsque la nouvelle musique à la mode du moment se lança à la radio. Sans se concerter, elles abaissèrent au maximum chaque vitre du véhicule afin de gracieusement partager le morceau à chaque résident qu'elles croisaient sur leur route. Très vite l'écho de leur voix se mêla à l'entraînante mélodie, résonnant dans tout l'habitacle et s'exportant même au dehors, jusqu'à finalement masquer la musique originale.

La conductrice, Christa, s'arrêta alors à un feu rouge dans un carrefour passant près du centre-ville. Elle profita de cette brève accalmie pour se trémousser et se dandiner sur son siège, très vite rejointe par ses deux compères, Ymir et Rico. Enivrées, elles se déhanchèrent sans complexes en s'esclaffant et en s'échangeant des regards complices. 

Soudain un vieux pick-up rouge s'immobilisa à leur gauche, attendant à son tour que la pastille verte débarque pour l'autoriser à redémarrer. Les filles jetèrent un rapide coup d'œil et lorsqu'elles reconnurent le propriétaire de ce tas de ferrailles ambulant, leur visage se décomposa et elles cessèrent aussitôt de chanter et de danser pour adopter une attitude sérieuse. A partir de ce moment, toute leur bonne humeur matinale venait officiellement de s'envoler.

Le fameux chauffeur n'était autre qu'Eren Jäger, un garçon en terminale fréquentant le même bahut qu'elles, et si elles n'étaient pas en joie de le voir débarquer c'est parce que celui-ci n'avait clairement pas une bonne réputation. Elles avaient beau être en première, elles savaient bien qu'il valait mieux ne pas côtoyer le brun de trop près, au risque de perdre leur saint Graal de la superficialité.

Pour Eren, qui se savait très bien catalogué ''différent'' par le reste des lycéens à cause de sa préférence de genre, il avait depuis longtemps compris que la ville n'avait rien d'un paradis. Et c'était donc de son propre chef qu'il avait décidé de rester en marge des autres, à l'écart de ceux qu'il estimait jouer un rôle. Il ne voulait plus être dans une case bien définie, il voulait être lui. Ainsi, si avant l'exposition de son ''secret'' sa côte de popularité était à son paroxysme et son physique faisait tourner de nombreuses têtes, il avait dorénavant fait le choix de ne plus s'occuper de l'avis des autres, jusqu'à se délaisser lui-même -selon les autres-. Les deux exemples les plus flagrants de se laisser-aller soudain étaient ses cheveux qu'il refusait de couper et qui aujourd'hui descendait en cascade le long de ses épaules carrées mais aussi de son corps svelte camouflait sous des couches de vêtements fades et uniformes. Aussi étonnant que ce fut, jamais il se s'était senti aussi bien. Il se sentait presque... Libre.

A son tour, Eren zieuta le trio infernal qui restait irrémédiablement figé sur le feu tricolore, chacune priant intérieurement pour que cette situation gênante prenne vite fin. Mais c'était bien mal le connaître. Car voyant qu'il avait troublé leur petite fête improvisée, Eren décida d'enfoncer le clou en les taquinant un peu. Pour se faire, il tourna le volume du son de sa radio et fit gronder Bad Reputation de Joan Jett dans toute sa caisse, écrasant aisément la musique des trois adolescentes qui n'osèrent exprimer leur contrariété grandissante. Son véhicule n'était peut-être qu'une épave bonne à aller à la casse (comme le lui assurait sa charmante sœur), pourtant, à cet instant, il avait une nouvelle fois la preuve que son engin était encore des plus performants face au colosse à quatre roues de modernité.

Finalement, le feu passa au vert, et les deux voitures démarrèrent de concert, pouvant enfin poursuivre leur chemin. Au soulagement des demoiselles, Jäger tourna à gauche, prenant un tout autre itinéraire alors qu'ils étaient censés se rendre tous au même endroit. Cependant, elles ne s'interrogèrent pas plus que ça et reprirent leur danse en oubliant ce malencontreux incident.

La vérité était qu'étant natif du coin, le jeune homme connaissait absolument tous les raccourcis et de ce fait, il pouvait parier qu'il atteindrait son lycée avec une bonne longueur d'avance sur elles.

C'est donc sans grande surprise qu'il ne tomba pas sur le 4x4 bleu lorsqu'il arriva aux abords de l'établissement scolaire. Satisfait d'avoir remporté la course -qu'il s'était lui-même inventé-, il se gara à sa place habituelle sous l'ombre d'un grand arbre. Puis, il sortit de son auto et c'est là qu'il vit l'énorme bolide apparaître en haut de la rue. Son sourire en coin victorieux s'effaçant progressivement, il prit ses affaires, envoya son sac à dos sur une de ses épaules et marcha d'un pas nonchalant dans l'immense allée extérieure du lycée Reiss.

Là, accrochée sur le mur près de la porte principale, une affiche fraîchement posée attira son attention. Celle-ci annonçait en gros caractère d'impression noir le bal de fin d'année. Consterné à l'approche de cet événement qu'il estimait des plus idiots, Eren l'arracha sur son passage.

« - Hey ! » S'écria une petite brune qui venait tout juste de la mettre en place.

Et c'est ainsi que commença le début d'une nouvelle journée paradisiaque dans ce très cher lycée Reiss. 



Si l'État de l'Iowa existe bel et bien, la ville de Paradise en revanche, elle, est une ville fictive. Donc si un jour vous avez la chance d'aller dans l'Iowa, ne cherchez pas à vous rendre à Paradise, le nom est juste un clin d'œil au manga !

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