Chapitre 18
J'émerge progressivement. Les rayons du soleil éclairent déjà la pièce lorsque je tente, tant bien que mal, d'ouvrir les yeux. Eblouie, je me retourne et enfouis mon visage dans l'oreiller. Je n'ai aucune foutre envie de me lever. En plus, tous mes muscles me tiraillent comme s'ils avait gelés durant la nuit. Les souvenirs de la veille, eux, me reviennent en mémoire, décidés à me rappeler le désastre que fut cette journée, sans oublier la soirée tout aussi atroce. Comment ai-je pu me retrouver paumée au milieu de la place dans le noir ? Puis, je me souviens à quel point je me sentais affreusement mal bien que je ne puisse pas l'expliquer. Ce fut juste trop pour mon cerveau qui ne savait plus sur quoi se concentrer ; j'avais besoin d'une pause avec moi-même pour souffler. Et j'ai blessé John en fuyant. En parlant de lui, j'espère qu'il ne m'en veut pas de trop. Cette pensée me suffit pour que je finisse de m'éveiller et que je m'assure de sa présence à mes côtés. Le lit est vide, mais j'entends la douche couler. Je peux souffler, rassurée. Après avoir guetté l'heure tardive, je me décide à rejoindre mon dulciné sur la pointe des pieds. Je me dénude sur le pas de la porte, puis me glisse dans la cabine embuée. Alors qu'il se trouve dos à moi, mes bras s'enroulent autour de sa taille et mes paumes se pose sur son ventre. J'appuie mon crâne contre lui, laissant l'eau ruisseler sur mon visage.
— Bonjour toi !
Il détache mes mains, et pivote afin de me faire face.
— Bien dormi, Belle-au-bois-dormant ?
Un sourire étire mes lèvres. Les surnoms dès le matin – enfin, dès le réveil –, il y a de quoi fondre. Je me dresse sur la pointe des pieds, avide de gouter à un baiser.
— Merci d'avoir pris soin de moi quand je suis rentrée cette nuit !
Je sais qu'il l'a fait naturellement, mais j'ai aussi conscience que ne pas me voir rentrer plus tôt à mis ses nerfs à rude épreuve, avec raison. Dieu sait ce qu'il peut se passer dehors et, pour le même prix, j'étais tombée inconsciente ou, pire encore, j'aurais pu être agressée. Je suis assez bien placée pour savoir à quel point la vie peut s'avérer une garce qui s'acharne sur une seule personne.
— Evite de me refaire une frayeur pareille ; je ne suis pas sûr d'y survivre, me supplie-t-il presque.
Il attrape le shampooing, en verse dans sa main, puis commence à masser mon cuir chevelu. Ses pupilles me charment, me font tomber d'autant plus amoureuse, me séduisent lorsqu'elles me scrutent ainsi, sans se détacher des miennes. Il est au petit soin alors que je lui en fait vivre des vertes et des pas mures. Décider à lui rendre ses petites attentions, je le savonne en insistant sur ses épaules que je masse, sur ses fesses, mais aussi sur ses abdominaux. Aucun de nous deux ne parle, nous nous contentons de laisser l'odeur florale du gel douche nous enivrer. Des baiser et des caresses se perdent par moments. Nos corps communiquent à notre place, en symbiose totale, comme s'ils savaient ce dont nous avons mutuellement besoin. Finalement, c'est naturel entre nous, inutile de réfléchir, de se poser des questions ou de se prendre la tête. Nous savons. Il suffit de laisser nos envies nous porter ; nos désirs, eux, finissent par se rejoindre. Ainsi, le destin cherche à nous réunir. Enfin, c'est ce que je pense, mais j'y crois dur comme fer.
— Tu veux que je te les démêle ?
J'acquiesce avec plaisir. Nous nous enroulons dans une serviette, puis je m'installe sur le bord de la baignoire. John s'arme du démêlants, de ma brosse et de son indispensable patience. Le vent ne m'a pas épargnée hier. Mèche par mèche, il défait chaque nœud à la main dans un premier temps et, seulement après, il utilise la brosse. Je ferme les paupières. Quand j'étais petite, je détestais ces moments où ma mère s'occupait de ma crinière rousse. Elle tirait en me répétant qu'il fallait souffrir pour être belle. Quel dicton à la con ; on peut être jolie sans douleur ! C'est, d'ailleurs, malheureux de mettre de telles idées dans la tête d'enfants encore innocents. Mais, avec John, c'est différent ; seul le partage, la douceur et l'amour règnent. Parfois, ça tiraille un peu, mais nous sommes bien loin de la douleur de mon enfance.
— Voilà, Mademoiselle : votre chevelure de princesse est domptée ! s'exclame-t-il en glissant ses doigts dans mes cheveux, maintenant, sec.
— Bien le merci, Servant !
— Servant ? Mais je t'emmerde, poufiasse.
Son essui m'atterrit en pleine figure et, je m'empresse à lui renvoyer sans aucune pitié. Une rapide bataille s'ensuit, bataille que je perds en quelques minutes. Il m'arrache mon arme, m'empoigne par la taille et me balance sur son épaule avant de me lancer, telle un vieux sac à patate, sur le lit. Hilare, je me débats afin de lui échapper, mais il domine mon corps.
— Tu ne peux pas t'attaquer à une pauvre fille nue comme un vers, gémis-je.
— Je suis tout aussi à poils que toi donc, j'ai tous les droits, me nargue-t-il en réponse.
Je le regarde, lèvres pincées, regard malicieux. Il a plus de force, mais je suis plus maligne. Le jeu innocent s'évapore pour laisser place à l'insolence, au jeu d'adulte. Le temps se suspend dans les airs, tandis que nos respirations se calent sur le même tempo. J'effleure sa joue du dos de la main. Il humidifie sa bouche. Je sens mon cœur s'emballer dans ma poitrine. Cet homme, j'ai de la chance de l'avoir dans la vie et, je doute qu'il puisse en dire autant à propos de moi. Pourtant, je veux tout faire pour le rendre aussi heureux qu'il me rend heureuse. Il est mon héros du quotidien ; n'oublions jamais qu'ils ne portent pas toujours de capes, pour ne pas dire jamais.
— Allonge-toi sur le ventre, murmuré-je dans le creux de son oreille.
— Pour que tu en profites pour m'attaquer ? J'suis pas naïf.
— Promis, pas de mauvais coups ! Non, mais comment tu me vois aussi ?
Il obtempère sans oublier de me prévenir que sa vengeance sera terrible si je me joue de lui. Je m'assois sur ses fesses et, glissent mes mains sur son dos. Je m'arrête, fascinée, sur chacun de ses points de beauté. Il en a plein : cinq sur la colonne vertébrale, deux dans la nuque, à moitié caché par ses petits cheveux, un sur l'épaule droite et quatre dans le bas, presque sur son petit cul. Déjà la première fois où il m'a dévoilé son corps, ils m'obnubilaient. Nous étions quasiment dans la même position qu'aujourd'hui, allongés sur son lit. Je n'oublierai jamais à quel point j'étais anxieuse lorsqu'il s'est débarrassé de sa chemise. Si j'avais su que, des années plus tard, je serais toujours aussi folle de lui, de son corps et de ses particularités, j'aurais peut-être pu dédramatisée. John s'agite sous moi, réclamant mes papouilles. J'effectue de petits cercles dans sa nuque, puis descends sur ses omoplates, et de chaque côté de son dos pour finir ma course dans le creux de ses reins.
—Tu es tout tendu, soupiré-je. C'est ma faute ?
Ma question n'en est pas vraiment une. Dans le fond, je connais la réponse, mais n'ose l'admettre. Je me sens déjà si coupable.
— Je ne t'en veux pas tu sais...
— Moi si, John, soupiré-je la gorge nouée.
— Rosie, non, d'accord ? Se tracasser pour l'autre, ça fait aussi partie intégrante de la vie de couple et ce sont de choses qui arrivent. Alors, crois-moi, si on s'en veut pour ça, on ne va pas y arriver !
Tout en me parlant, il me bascule sur le côté pour que je me retrouve couchée face à lui. Il attrape ma main et la presse en douceur.
— Tu me le dirais si tu m'en voulais ?
— Oui, je te le promets !
Je secoue la tête rassurée. Un des poids qui pesaient sur mes épaules s'envolent. Je veux que l'honnêteté prime entre nous quoiqu'il arrive, même si ça nous déchire. Au moins, je sais que je peux me sentir en confiance.
— Tu m'as ouvert ton cœur sur la façon dont tu as souffert à notre rupture, alors que j'ai enchainé les reproches à ton égard et celui de ta mère...
Mon souffle reste coincé dans ma poitrine. Ses paupières se ferment, mais mon pouce les soulève dans l'espoir qu'il les rouvre. J'aimerais qu'il me parle les yeux ouverts, sans me fuir. Bon, c'est un peu l'hôpital qui se fout de la charité, me direz-vous, mais j'en ai besoin pour y arriver à mon tour. J'esquisse un sourire. Je n'ai pas peur de ce qu'il va me dire. D'un geste brusque, je remonte la couette au-dessus de nous.
— Plus rien ne peut nous atteindre, maintenant, lui souris-je.
Je perçois sa pomme d'Adam remonter lentement le long de sa gorge.
— Lola et moi... Quand je l'ai embrassée pour la première fois, je pensais que tu t'en fichais de moi, que tu avais tourné la page, et elle était la seule fille avec qui j'avais un minimum de lien depuis notre rupture.
Ses prunelles reflètent la douleur qu'il a ressenti. Il ne se confie que rarement. Ses sentiments restent bien à l'abris dans son jardin secret, en général, alors voir qu'il se laisse aller m'émeut. Je tente de refouler les larmes qui menacent de jaillir. La mâchoire serrée, je lui adresse un sourire empli de nostalgie. Sa main toujours dans la mienne, je la pose sur mon cœur, qu'il l'entende battre pour lui et, l'encourage à poursuivre.
— Nous avions des points communs donc, je me disais que je pouvais l'aimer, mais malgré tous mes efforts, ça m'était impossible. Pas comme ça. Si je dois être honnête, je la qualifierais comme une simple amie. Je n'aurais pas dû sortir avec durant trois si longues années. Mais j'avais peur de finir ma vie seule avec pour unique compagnie des chats.
J'intercepte la larme qui glissent sur sa joue, l'essuie et dépose mes lèvres à l'endroit même où je l'ai recueillie.
— Nous avons tous les deux étés aveuglés par notre propre souffrance pour apercevoir celle de l'autre, puis le temps a couler et revenir l'un vers l'autre fut un trop grand risque de sombrer à nouveau, supposé-je la voix tremblante.
— Certainement, oui. Si seulement, nous avions réfléchis un peu...
— C'est trop tard pour les regrets, non ? En plus, je suis là, tu l'es aussi, alors tout va bien, constaté-je.
Je cadenasse nos lèvres dans un baiser. J'ai besoin de le sentir. Mon cœur me souffle que je le veux, que je veux recevoir son amour en moi, mais la raison me rappelle que j'en aurais mal. Putain de corps, pensé-je. Alors je me satisfais de sa bouche, niant la frustration qui tambourine dans mon estomac.
— Tu penses que Lola me pardonnera ? Après tout, je l'ai maintenue prisonnière alors qu'elle aurait pu trouver l'amour de sa vie...
— Si elle l'a croisé, ils se retrouveront ! Regarde-nous, John.
— Tu as raison, souffle-t-il en me tirant contre lui. Mais je ne cesse d'y penser...
Son nez se niche contre mon cou. Nous enlaçons nos corps, créant des nœuds, afin que personne ne puisse nous séparer cette fois. Ça m'aura servi de leçon ; on ne m'y prendra plus. John est le seul amour de ma vie et rien n'y changera rien.
— As-tu de bons souvenirs avec elle ?
— Oui, évidemment ! Ils ne sont pas aussi intenses qu'avec toi, mais oui, nous avons eu des moments heureux. Beaucoup, au fait, parce que sans amour, il est plus facile d'échapper aux dispute...
— Alors ni elle, ni toi avez perdu votre temps ! conclus-je en haussant un sourcil.
— Depuis quand es-tu si mature ?
Il me pince les côtes ce qui me propulse davantage contre son torse, manquant de nous fracasser le crâne l'un contre l'autre. Je me tortille dans un éclat de rire. Mais le silence gagne la pièce doucement. Nous avons, tous deux, besoin d'une minute de calme pour digérer la discussion que nous venons d'avoir. Je suis soulagée de savoir que nous pouvons discuter dans la quiétude, sans que les esprits s'échauffent. Mais bientôt, mon ventre crie famine, laissant un gargouillement résonner entre nous. Je retiens mon sourire, mi-gênée, mi-stupéfaite par le boucan que mon estomac fait. Je suis affamée.
— Room service ?
— Tu ne pouvais pas avoir une meilleure idée.
03/11/2020
Bonsoir mes loulous !
Troisième jour du Nano, troisième chapitre ! Je garde le rythme jusqu'ici et, je pense avoir trouvé ma méthode de travail.
Que pensez vous du chapitre ? De John ? De Rosalie ? De leur relation et de leur passé ?
Si vous aimez votre lecture, n'hésitez plus à voter, commenter et même partager ❤
MERCI DE ME LIRE ❤
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