Chapitre 10

Il n'existe pas de meilleur réveil que celui des rayons du soleil réchauffant ma peau. La baie vitrée nous offre une vue hors-norme sur la forêt. De grands pins filtrent la lumière. Les oiseaux chantent et le vent siffle dans les branches. Je pourrais observer ce majestueux spectacle durant de nombreuses heures. Une main sur mes hanches attire mon intention ; je pivote vers John qui s'éveille en douceur. Mon index trace un chemin depuis son front jusqu'à son nombril. Il frémit à mon contact alors que je cède à l'irrésistible envie de l'embrasser. Je scelle nos lèvres en un tendre baiser. La paume de John se déplace jusque dans la chute de mes reins. Je niche mon nez à la base de son cou tandis que mes cheveux viennent chatouiller son visage.

— Bon matin, toi !

— J'veux des réveils comme ça tous les matins, marmonné-je la voix encore endormie.

— Eh bien, je ne sais pas si je peux t'offrir une vie au milieu de la forêt. En revanche, tu peux passer toutes tes nuits dans mes bras sans aucun problème !

Son étreinte se referme autour de ma taille laissant ses ongles taquiner mon épiderme. Je frissonne à ce contact empli de rudesse et de légèreté. Le contraste entre les différentes émotions qu'il fait naitre en moi se montre explosif. Je trésaille lorsqu'il s'empare de mes lèvres. Je bascule au-dessus de lui niant ma nudité que je lui expose.

— S'il n'y a pas de sangliers dans les environs de nos appartements, ça me convient aussi, tu sais, confessé-je alors que mon ventre crie famine.

— Je pense qu'on ne risque pas grand-chose en pleine ville, ne t'inquiète pas !

Je ricane doucement, mais il s'empresse de m'administrer une petite claque sur les fesses. Je lui adresse un faux regard sévère en retenant mon sourire.

— Un petit-déjeuner nous attend, Mademoiselle, et j'ai faim !

Sous mes protestations, il se défait de ma poigne, puis s'habille d'un simple boxer accompagné d'un t-shirt. Contre mon grée, je m'exécute à mon tour afin de ne pas passer la journée nue comme un ver. Je ne prendrais pas le risque de tomber malade en plein périple. Mes yeux profitent amplement de la vue et tombent sur son fessier, qui, je l'avoue, tente de me charmer sans pitié.

— Et on mange quoi ? Je ne vois ni frigo, ni...

— Tadam, s'exclame John en ouvrant la porter avant de la clore dans son dos.

Il apparait face à moi, un plateau plein de pancakes, de fruits et de café. J'en bave, rien qu'à le regarder. Si une fois fini, j'ai encore faim, alors je serai officiellement une gloutonne. Je suis certaine que mes prunelles brillent alors que je me précipite sur le repas qui m'attend.

— Merci, soufflé-je, rieuse en picorant une fraise.

Mais, alors que je m'apprête à l'enfourner dans ma bouche, John me la pique. Furieuse, je m'écrie tandis qu'il se moque de ma réaction disproportionnée, d'après ses dires. Nous finissons par nous partager ces petites merveilles en se chamaillant dans une ambiance frivole, voire, enfantine. C'est alors que je distingue cette pépite de chocolat, déposée sur le coin de sa lèvre. Alors, telle une prédatrice, je viens lui voler grâce à un baiser, mi-sensuel, mi-provocateur. Je me sens électrisée par le feu qui se consume entre nous. Jamais, je n'aurais pu croire que le retrouver serait si revigorant, comme si l'on m'avait rendu ma moitié, enfin.

— Le meilleur déjeuner, regarde ! m'exclamé-je. Un pancake, une couche de chocolat, puis une seconde de spéculoos et on trempe dans le café.

Bon, la recette initiale se compose d'un lait chaud, mais les goûts changent en grandissant. Puis, je crains que la société accepte de voir une enfant consommer de la caféine, soi-disant, il s'agit d'une boisson exclusivement conçue pour les adultes.

— Tiens, ma chérie ; un vrai repas de championne pour un jour de rentrée !

— Merci, Maman ! m'écrié-je en m'installant dans le canapé.

J'allume la télévision tandis qu'elle soupire dans mon dos, en secouant de la tête. L'impatience me dévore ; aujourd'hui, c'est la rentrée et, je rentre en première primaire. A moi, la cour des grands avec les balançoires et les toboggans. Le dessin animé défile à l'écran, mais je ne me concentre pas dessus ; j'en suis incapable. Je sautille partout en oubliant presque de manger.

— Rosie, tu en mets partout ; évite de faire des tâches de chocolat sur ta jolie robe, tu veux !

— Mais je veux aller à l'école ! gémis-je.

Tant bien que mal, j'essaye d'enfiler mes chaussures comme une grande pour la première fois. Heureusement qu'elles se ferment avec des scratchs et non des lacets.

— Tu as mis le pied droit dans la gauche, ma Chérie. Viens t'asseoir sur la chaise !

Je suis, enfin, parée, le cartable sur le dos, vêtue de ma plus belle tenue. Ma maman me dépose un doux baiser sur mon front tandis que je proteste en essuyant le gloss qui brille, maintenant, sur ma peau.

— Arrête euh !

John agite sa main devant moi afin de réattirer mon attention.

— Allô le papillon, tu reviens avec moi !

Je lui tire la langue pour seule réponse. Je sens que je vais passer par toutes les espèces animalières d'ici la fin du séjour. Il est incroyable, incroyablement fatiguant, surtout. Je lui administre une claque sur la cuisse avant de tremper mon pancake dans ma tasse chaude. John me dévisage, dégouté, ce qui provoque mon hilarité. Une idée derrière la tête, je cadenasse rapidement nos lèvres dans un chaste baiser.

— John, tu comptes jusque cent et tu viens me chercher, m'écrié-je en m'encourant à l'extérieur.

— Tu veux vraiment jouer cache-cache ?

— Absolument, je garde mon âme d'enfant, mon cher Monsieur !

Je zigzague entre les arbres, puis quittent les chemins balisés. Tant que je distingue notre chambre vitrée, je ne risque rien, du moins, je n'encoure pas le danger de me perdre au milieu de la forêt. Un sapin, digne d'une cachette de compétition, s'érige devant moi. Les branches sont parfaites pour que j'y grimpe tel un chimpanzé, bien que je ne me sois jamais sentie à l'aise avec la hauteur. Ce matin, je prends sur mes épaules afin de le surprendre. Avec un peu de chance, il va galérer un petit moment avant de me trouver. Mes doigts se crispent dès que je monte d'un minuscule mètre qui me semble, en réalité, une montagne. Je ne m'aventure pas à atteindre le sommet. Dès que je trouve une place relativement cachée par les feuilles, je m'assis en osant jeter un coup d'œil vers le bas. Mauvaise idée ; une vague de vertige me transperce. Je me dépêche de fermer les yeux un instant en respirant profondément. Je ne céderai pas à la panique. Je souffle l'air par ma bouche lentement jusqu'à me débarrasser de mes palpitations. A travers le bruissement du vent, je perçois la voix de John qui m'appelle. Ça me rassure ; au moins, il n'est pas trop loin. Ses réflexions m'arrachent un rire, mais je ne tomberai pas dans le panneau ; il ne m'aura pas aussi facilement. Cela-dit, il s'agit d'une belle tentative pour que je rigole ou lui réponde. Lorsque je le vois passer pas très loin de moi, sur les sentiers, je retiens ma respiration afin de rester silencieuse. Je ne sais pas d'où m'est venue l'envie de jouer, mais cette partie de cache-cache m'amuse beaucoup. Quant à John, je pense que je le désespère un peu. Appuyée sur le tronc, l'odeur de sève m'envahit, la même que celle diffusée par ma bougie à l'automne. Si j'oubliais l'altitude à laquelle je me trouvais, je pourrais, sans aucun doute, m'offrir une séance de méditation. Ça ne me ferait certainement pas de mal !

— Rosalie, montre le bout de ton nez !

Un « non » manque de passer la barrière de mes lèvres. Je parviens à me raviser au dernier moment tandis qu'il marche juste en-dessous de mes pieds. Il ne me voit pas et continue sa route. La partie va, peut-être, s'avérer longue. Et si je lançais une pomme de pin pour attire son attention ? Ça impliquerait le fait de me pencher afin d'en attraper une. Puis, faire durer le plaisir encore un peu ne me déplait pas, au contraire. Alors, je me contente de l'observer s'éloigner, slalomé entre les arbres en me hélant à tout va. De mon trône, je le vois sûr de lui, avec ses petites manies, comme passer sa main dans ses courts cheveux châtains. Mais, soudain, un grattement animalier me tire de mes pensées. Ma réaction est immédiate ; j'hurle à m'en casser les cordes vocales. Mon pire cauchemar se déroule, là, sous mes yeux.

— John, à l'aide ! Putain ! Putain ! Putain !

Je tremble, les doigts crispés sur l'écorce. Mon pouls s'accélère. Si je n'étais pas sous l'emprise du vertige, j'escaladerais encore quelques branches. Merde, ça montes aux arbres ces bêtes-là ?

— Rosie ? Tout va bien ? T'es où ?

John semble inquiets tandis que l'animal déguerpit. Ces quelques secondes m'ont parue éternelle. Je ne suis définitivement pas une femme de la forêt !

— Là, en haut ! sangloté-je.

— Tu as vu un fantôme ? m'interroge-t-il en arrivant aux racines de mon perchoir.

— Non, pire, un sanglier !

— Tu as vraiment un karma magistral, ma belle ! Allez, descend !

Mon regard effectue plusieurs aller-retours de ma branche à John. Je me rappelle que, à l'école, redescendre me terrorisait bien plus que monter. Et les choses ne semblent pas avoir changée des années après. C'est alors que je l'entends rire franchement en me tendant la main.

— J'ai peur, avoué-je en me rongeant les ongles.

— Je m'en doutais ; j'arrive, Maligne !

Je proteste à son tacle, mais retiens toute remarque. Je ne prendrai pas le risque qu'il s'en aille en me laissant me débrouiller. Tandis que je suis tétanisée, il me rejoint un brin moqueur et, n'oublie pas de me charrier sur mes mésaventures. D'après lui, ma vie est le scénario parfait d'une série.

— Mets-toi debout sur la branche et, pose tes mains sur le tronc, me conseille-t-il alors que j'essaye de m'exécuter tremblante.

Sa paume vient soutenir mon poids alors qu'il la pose dans le bas de mon dos. J'ai l'impression qu'à tout moment, je vais dégringoler pour m'étaler comme une quiche sur le sol. Finalement, l'odeur apaisante de la forêt peut tout aussi bien se révéler angoissante, quel paradoxe !

— Okay, je vais prendre ton pied pour le descendre d'un étage, alors fais-moi confiance et laisse-toi faire !

Les dents serrées, je me force à lui donner libre cours à ses stratagèmes afin de retrouver la terre ferme. Quelle stupide idée de m'être cachée au milieu des feuilles, et surtout, aussi haut ! Etape par étape, je finis par retrouver les bras protecteurs de John.

— Plus jamais, j'irai me cacher-là ! promis-je en le remerciant.

Mes lèvres viennent effleurer les siennes alors que je récupère, doucement, mes esprits. Mon cœur menace de me lâcher lorsque John me soulève d'un coup tel une véritable princesse.

— Direction la chambre ; au moins, je suis certain que tu n'iras pas t'empêtrer dans une situation cocasse !

J'affiche une fausse moue grincheuse face à sa réflexion, puis lui claque l'arrière du crâne.

— Cesse d'être méchant, tu veux.

— Enfin, Rosie, tu sais bien que c'est mon passe-temps numéro un !

Il continue, en plus, ce qui l'amuse et provoque, à contrario, mon agacement. Je ne me fais, d'ailleurs, pas prier pour lui manifester.

— Salopard va, grogné-jepour sa plus grande satisfaction. 

07/10/2020
    Hello,

    Encore un chapitre que j'ai adore écrire ! Je ne sais pas vous, mais John et Rosie me font beaucoup rire.

   Comme d'habitude, n'hésitez pas à me laisser votre retour, ne fusse qu'un vote pour me dire si vous avez aimé.

    MERCI DE ME LIRE ❤

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