3. Dans un avion, Atlantique
Dans un avion, Paris √
15 h 25
Finalement, Emma avait un vol de prévu. Le vol tant espéré pour gagner les Etats-Unis et fuir pendant quelques jours sa petite contrée, laissant derrière elle un appartement misérable et aucun ami cher à ses yeux. Camille, elle aussi, faisait partie du vol et elle en était heureuse. Toutefois, ce n'était pas une surprise pour Emma car elle partait souvent avec celle-ci. Elle se sentait moins seule et moins fragile. Et quand elle eut expliqué gentiment les consignes de sécurité aux passagers qu'elle répétait pour tous les vols (sans pour autant s'en exaspérer), l'avion mit les gaz et décolla. Une fois que les roues ne touchaient plus la piste, elle se trouvait dans son élément. Elle ne doutait jamais de son travail. De toute façon, c'était la seule chose qu'elle eut de bien dans sa vie.
Camille discutait joyeusement avec un steward dénommé Nick. C'était un jeune homme de trente ans, beau à regarder, avec de petits yeux bleus que toutes les hôtesses aimaient observer. Un visage long, anguleux, aux formes parfaitement proportionnées. Nick aimait plaisanter avec les femmes, savait les manier avec son charme et elles finissaient toutes dans son lit. Il avait inventé un jeu avec deux autres stewards, ses amis. Il devait remplir un tableau et cochait chaque case quand il avait fini son travail. Dans son équipe, il comptait vingt hôtesses, il s'en était fait dix-neuf. La dernière, lui semblait-il, serait la plus dure à atteindre vu que c'était Emma. Il se doutait bien que la jeune femme, malgré son jeune âge, était plus intelligente que les autres et qu'elle serait plus dure à avoir. Mais Nick n'abandonnait jamais. Il allait jusqu'au bout.
Emma reconnaissait que ce garçon était magnifique mais elle n'était pas dupe. Elle semblait lire en lui comme s'il eut été un livre ouvert et savait pertinemment bien ce qu'il voulait : elle. Mais Emma était différente des autres, elle ne se donnait pas au premier venu pour qu'il puisse griser une case de son stupide tableau. Elle n'avait aucun souci à se faire : dans toutes les situations, elle s'en sortait. Enfin seulement dans les situations qu'elle contrôlait.
« Salut Emma, comment vas-tu ? » Prononça poliment Nick et elle lui répondit, non sans lui faire remarquer qu'elle n'appréciait pas sa compagnie. Il n'avait pas l'air d'avoir remarqué le visage fermé qu'elle lui dédiait ou il ne voulait pas s'en rendre compte. Elle haussa les épaules et sortit quelques bouteilles qu'elle entreprit de poser sur un plateau à roulettes. Nick suivait des yeux tous les gestes qu'elle faisait. Elle eut envie de lui crier méchamment qu'elle ne participerait pas à son jeu minable qu'elle avait deviné le jour où il avait posé les yeux sur elle.
« Veux-tu que je t'aide ? » Persista-t-il. Elle savait que quoi qu'elle dise, il ferait ce que bon lui semblait. Alors, elle préféra se taire. Il vint la rejoindre comme elle s'en doutait et, tandis qu'il était proche l'un de l'autre, il essaya de lui caresser l'épaule mais elle s'empressa de s'écarter. Elle le fixa ensuite froidement.
« J'ai la vague impression que tu ne m'aimes pas » Elle faillit rire de sa phrase. Bien sûr qu'elle ne l'aimait pas, comment ne pouvait-il pas le remarquer ? Elle emmena le plateau dans l'allée principale de l'avion et proposa une boisson aux voyageurs, sous les yeux furieux de Nick. Elle servit joyeusement des verres à des passagers souvent excédés, surtout que ceux-ci avaient dû attendre la fin de la tempête et le déneigement des pistes. Elle essaya de discuter avec certains d'entre eux pour rendre leur voyage un peu plus agréable. Cependant, quelques-uns n'étaient pas enclins à la discussion et elle laissa bien vite tomber. Elle était d'humeur massacrante à cause de Nick.
« Tu ne m'aimes pas, n'est-ce pas ? » Lui demanda Nick et cette fois-ci, c'en était trop. Elle était même énervée que son vol dure huit heures.
« Nick, depuis le jour que je te connais, j'ai très bien compris ton petit jeu. Sache seulement que je ne veux pas en faire partie. » Elle le laissa hébété, au milieu de l'allée et fit demi-tour, heurtant au passage un voyageur. Elle tomba en arrière à cause du choc tandis que lui restait debout à la regarder d'un œil sévère. L'homme ne lui tendit pas la main alors elle se releva seule et se rangea dans une allée pour laisser passer le monsieur qui retrouva sa place sans encombre. Elle le toisa méchamment (enfreignant ainsi toutes les règles de politesse que les hôtesses et stewards doivent envers les clients de la compagnie) puis rejoignit Camille qui mangeait une barre de fruits sans sucre, commençant un régime alors qu'elle avait déjà une taille de mannequin.
« J'ai accroché un passager» Emma dit tout en se massant la nuque « Il ne m'a même pas aidé à me relever » Camille lui demanda curieusement qui était cet homme si malpoli et Emma pointa discrètement du doigt un jeune homme aux cheveux bruns qui, assis quelques fauteuils plus loin, lisait attentivement un journal. Sous l'excitation, Camille bondit de son siège, mâcha rapidement une bouchée de sa barre et chuchota à l'attention d'Emma.
« Ne le reconnais-tu pas ? » Emma observa plus distinctement l'homme mais elle ne l'avait jamais vu. Elle en était sûre. Ou presque.
« Bordel Emma ! » Elle sautillait nerveusement sur ses pieds comme une petite fille de six ans. Ses cheveux retombaient doucement sur son uniforme bleu de travail. Emma pensa à quel point Camille avait de la chance. Niveau physique, elle avait été gratifiée par la nature. Elle devait être certainement la plus belle femme de toutes les hôtesses de l'air même si elle n'avait pas l'air de s'en rendre compte.
« Je... Je ne le connais pas » balbutia Emma comme si elle se trouvait de nouveau au collège et qu'un professeur lui demandait de réciter sa leçon qu'elle n'avait malheureusement pas apprise. Elle se sentait aussi nerveuse que si des milliers de regards s'étaient tournés vers elle pour l'observer.
« Bien sûr que si que tu l'as déjà vu » S'exclama Camille sans se préoccuper des autres passagers qui avaient sursauté de surprise « Ce n'était pas avec toi que nous étions allés à une conférence sur... Je ne sais plus mais je me rappelle de l'avoir vu là-bas »
En effet, maintenant elle se souvenait de ce jour où Camille et elles avaient décidé de participer à une conférence qui s'était révélée ennuyeuse. Il était là lui aussi, à quelques mètres d'elles, assis sur une chaise dans un grand amphithéâtre. La seule différence entre lui et les jeunes femmes c'est qu'il semblait vivement intéressé par le sujet et qu'il prenait des notes, le front plissé dans son effort de concentration tandis qu'Emma gribouillait la tête d'un gnome sur le coin d'une feuille déjà froissée, sortie de son sac. Pourtant, ce moment semblait remonter à loin dans l'esprit d'Emma. Elle jeta de nouveau un coup d'œil à l'homme qui lui paraissait maintenant plus mature, plus beau que la première fois qu'elle l'avait vu.
« Si tu le reconnais de vue, cela veut-il dire qu'il est connu ? » Emma demanda d'une voix curieuse et sa meilleure amie lui lança un petit sourire discret.
« Voyons Emma, tout le monde connaît cet homme. La Terre dans sa globalité a entendu parler de lui. J'exagère un peu c'est vrai mais je te promets que l'Amérique entière le connaît » Emma était perdue dans le flot discontinue de paroles de son amie. Elle voulait juste connaître son nom et non pas son taux de popularité.
« Dave Sherley. C'est son nom. Il est devenu un grand entrepreneur très jeune et je pense que c'est surtout ce point qui explique pourquoi il est tant connu. En plus d'être riche comme Crésus, cet homme est beau comme un dieu...» Emma se retourna de nouveau dans le but d'observer ce jeune homme qui l'intriguait mais elle ne put le faire longtemps. En effet, Dave leva les yeux de son journal et croisa le regard soutenu d'Emma. Prise d'une gêne, elle détourna les yeux pour les poser sur sa meilleure amie qui, le portable dans les mains, pianotait silencieusement un message.
« Il est tellement admirable, n'est-ce pas ? » Camille décrocha les yeux de l'écran et plongea ses prunelles dans celles de son amie. Troublée encore par le regard de ce jeune homme qui était déjà haut placé dans la société, elle acquiesça tandis que sa collègue essayait d'avoir l'attention de Dave. Emma voulait tirer le bras de son amie et lui demander de bien se tenir mais elle passerait pour une coincée. Alors, elle ouvrit le livre qu'elle avait déjà commencé. Mais soit les mots ne semblaient plus former de phrases cohérentes, soit son esprit divaguait pour s'évader dans un monde parallèle.
« Si je n'avais pas Luke, je crois que je serais tombée éperdument amoureuse de lui » Annonça Camille et elle lâcha le livre, le posant sur mes genoux.
Luke était le fiancé de Camille depuis peu. Démocrate de père en fils, il représentait l'Amérique dans toute sa splendeur. Ils s'étaient rencontrés par hasard en allant faire les courses dans un supermarché américain. Elle lui avait donné les détails de ce qui s'était passé avec des étoiles plein les yeux. Camille avait rempli son chariot à ras-bord et étant seule, elle prenait le temps de ranger soigneusement chaque paquet sur le tapis roulant. Un jeune homme derrière voyant son petit manège l'avait apostrophée. C'était Luke, de forte mauvaise humeur car son patron ne cessait de le rabaisser au travail. Et depuis, ils étaient ensemble comme deux aimants, comme deux pièces d'un puzzle qui s'accorderaient ensemble. Grâce à ce jour, Camille avait finalement cru au destin, elle qui pensait qu'aucun garçon ne s'intéressait à elle. Emma avait failli la prendre par les épaules et la secouer. Cela aurait dû être elle à la place de Camille, c'était elle qui n'était jamais sortie avec un garçon et qui ne connaissait rien aux sentiments. Certes, Emma avait déjà aimé des tas de personnes. Mais elle n'attendait jamais rien en retour, ayant trop peur d'être blessée. Cette dernière s'interdisait même de tomber amoureuse quand elle savait que la situation était perdue d'avance. Est-ce qu'un jour elle rencontrait son âme sœur au rayon bio ?
« Il ne m'aurait sûrement pas remarqué » Camille ajouta pour elle-même et Emma fronça les sourcils. Les propos mensongers de sa meilleure amie l'exaspéraient quelques fois. Elle savait que si elle avait rencontré Mr. Sherley, elle aurait été une personne quelconque à ses yeux, une goutte d'eau dans l'océan. Pas Camille. Cette dernière connaissait toujours les fins heureuses.
« Pourquoi ne me laisses-tu pas un garçon sur cette Terre ? Traîner avec toi est mauvais pour moi. Je fais contraste à ta beauté » Dit Emma avec de la jalousie dans la voix que Camille ne décela pas.
« Vraiment Emma, combien de fois t'ai-je dit de ne pas te sous-estimer ? Si tu n'as pas de petit-ami dans moins d'un an alors je veux bien croire que tous les garçons sont des idiots »
« Même Luke ? » Emma lui demanda, mi-rieuse.
« Sauf Luke » Répondit d'une voix sonnante Camille.
Emma jeta un coup d'œil au hublot pour apercevoir les nuages cotonneux qui couvraient le ciel. Quelque chose semblait avoir changé. Un petit rien infime était apparu, venu de nulle part. Un détail qui aurait été insignifiant dans n'importe quelle vie. Pas dans celle d'Emma.
Dans un avion, au-dessus de l'Océan Atlantique
19 h 00
Dave sortit une tonne de paperasse de sa sacoche et entreprit de faire du tri. A côté de lui se trouvait un homme d'une maigreur stupéfiante qui ronflait bruyamment près de l'oreille de Dave. S'il avait été beau dans sa jeunesse, cette beauté d'antan avait dû se faner rapidement. En effet, son crâne était dégarni, son front rassemblait tous les petits boutons qu'il n'avait pas eu durant sa période d'adolescence, un nez court s'étalait sur la majeure partie de son visage. Sa bouche semi-ouverte laissait apparaître le bout de dents déjà jaunes et Dave paria que ce monsieur fumait comme un pompier. Il tenait dans ses mains d'homme endormi un sandwich à demi terminé qui dégoulinait de mayonnaise et tâchait son pantalon en jean. De l'autre côté du fumeur, une vieille femme était collée contre le hublot poussant des « oh » et « ah » exclamatif. Elle ne cessait de parler à un personnage imaginaire et la conversation avait quand même l'air animée. Elle serrait contre son frêle corps un sac en peau de crocodile et sortait de temps en temps un mouchoir en tissu pour essuyer le liquide jaunâtre qui coulait abondamment de son nez.
Dave soupira : il aurait dû demander une place en classe affaire. Pourquoi avait-il fait une telle erreur ? Il devint plus en colère quand il se rendit compte que ce n'était pas lui qui avait acheté le billet mais sa secrétaire. Sa nouvelle secrétaire. Il allait falloir qu'il règle cette histoire dans les plus brefs délais.
Il avait été surpris quand une hôtesse de l'air insignifiante lui avait désigné un siège donnant sur l'allée où déjà deux personnes prenaient place. Il n'avait jamais voyagé en classe économique (ou une fois quand il était encore un lycéen et que sa classe avait organisé un voyage à Paris) et il détestait se sentir trop près des personnes. Il n'avait pas la place de sortir son ordinateur de sa pochette. S'il faisait un geste, il semblait à Dave que le maigre à côté se réveillerait.
Il n'avait maintenant plus envie de trier ses papiers et les entassa pêle-mêle dans le porte-document. Il observa l'allée et les autres passagers de la classe économique. On lui avait déjà proposé une boisson mais il y avait une grande différence entre un jus d'orange bon marché et une coupe de champagne. S'il était en classe affaire, il aurait la place d'étendre ses jambes et de faire des exercices d'aérobics. Il se sentait compressé ici.
Une hôtesse de l'air passait de nouveau dans l'allée, donnant gentiment des plats préparés et exécrables aux passagers. Il la reconnut parce que c'était la fille qui l'avait bousculé en voulant échapper à la discussion d'un steward. Sa chevelure rousse et ses petites taches de rousseur sur ses joues lui donnaient une image de petite fille. Son uniforme compressait son corps maigre. Elle ne cessait de sourire et Dave décela bien vite qu'il n'y avait rien derrière ce sourire. Bientôt, elle se trouva devant lui et elle rougit tant que ses taches de son passèrent inaperçues. D'une voix légèrement tremblante, elle lui demanda ce qu'il voulait. Dave se prit un malin plaisir à faire durer la conversation, savourant toujours l'effet qu'il avait sur le sexe opposé.
« Qu'avez-vous à proposer ? » Il scruta les prunelles couleur caramel de la jeune fille avec attention.
Emma faillit lui répondre avec un ton moqueur. Mon dieu, il avait beau être un entrepreneur riche et connu en Amérique, il ne pouvait la prendre de haut. Se croyait-il au Plazza ? Pensait-il qu'elle allait lui sortir la carte du chef spécialement pour lui ? Elle voulut lui rappeler qu'il se trouvait à bord d'un avion et non dans un restaurant étoilé mais elle se retint. De toute façon, elle savait que rien n'allait sortir de sa gorge tellement cette dernière était sèche. Dire qu'elle perdait ses moyens pour expliquer le choix du menu.
« Bœuf bourguignon ou poisson » Finalement, elle put enchaîner quelques mots. Elle pensa qu'il allait choisir entre l'un des deux mais apparemment, il avait un caractère difficile à cerner pour la jeune fille.
« Je suis végétalien » Elle faillit s'étouffer avec sa propre salive. Avait-elle bien entendu ses propos ?
« Pardon ? » Elle demanda, troublée devant Dave Sherley, le grand entrepreneur qui l'observait, un sourcil plus haut que l'autre.
« Je ne mange pas de poisson ni de viande » Il ne put s'empêcher de dire et elle lui jeta un regard froid qui ne sembla rien signifier pour lui.
« Merci, je sais ce que ça veut dire » Elle lui répondit d'une voix glaciale « Je n'ai rien à vous proposer d'autre. Voyez-vous, je crois bien qu'il n'y a pas de piste d'atterrissage au milieu de l'Atlantique. Vous devrez patienter si vous voulez manger autre chose » Elle n'était désormais plus intimidée par cet homme tant la colère bouillait en elle. Elle se sentait comme un volcan près à exploser. Le pire c'est qu'elle ne savait pas pourquoi. Était-ce à cause des yeux perçants de l'homme qui la scannait si impudemment?
Elle laissa l'entrepreneur seul avec ses pensées et se dirigea dans le petit compartiment où toutes les bouteilles de jus de fruit, de vin et les plateaux de nourriture étaient rangés. Alors qu'elle tirait du frigo miniature quelques sodas, Nick vint la déranger.
« Emma, peut-on discuter un moment ? » Elle espérait que ses nerfs ne la lâcheraient pas.
« Non merci Nick, je crois qu'on s'est déjà tout dit » Nick ouvrit de grands yeux, surpris. Était-ce la première fois qu'il se faisait remballer par une fille ? Se demanda-t-elle, s'appuyant nonchalamment sur le chariot gris qui supportait toute la nourriture, et tenant toujours dans ses mains une cannette de limonade.
« Bordel Emma pour qui me prends-tu ? » Il attrapa sa main mais d'un geste brusque elle la retira. Elle ne renchérit pas, préférant laisser Nick s'empêtrer dans sa propre histoire. Il l'agaçait fortement parce qu'en plus de s'immiscer dans son travail et de la perturber, il jouait la comédie.
« Je ne veux pas coucher avec toi, juste apprendre à te connaître » Nick tenta une approche plus neutre mais Emma savait qu'elle ne pouvait lui faire confiance. Elle n'était pas sûre de vouloir apprendre à le connaître. Elle ne désirait pas qu'ils couchent ensemble dans une chambre d'hôtel à New York et qu'il s'en aille tôt le matin. Ou qu'il ait le culot d'appeler ses amis devant elle pour leur annoncer qu'il avait rempli tous ses objectifs. Elle ne souhaitait pas devenir un stupide objet, son stupide objet. Coucher avec quelqu'un était pour Emma une preuve d'amour et non une envie qui la traversait tous les jours. Un jour, devant le miroir elle s'était jurée de rester telle qu'elle était. Mais le jeune homme la poussait tellement à bout que, pour s'octroyer un moment de liberté mais surtout par exaspération, elle lâcha malgré tout un petit « ok » qu'elle savait pertinemment bien qu'elle regretterait.
« Combien de jours restes-tu à New York ? » Demanda Nick tandis qu'il ne cessait de chercher le regard fuyant d'Emma. Elle observa le sol de l'avion d'un air intéressé et se mit à s'insulter silencieusement d'avoir accepté si facilement une sortie en compagnie de son collègue. Elle était tombée dans le piège. Nick souriait tandis que la jeune hôtesse de l'air esquissa une moue triste, vaincue.
« Je ne sais pas » Fut sa seule réponse et elle aurait voulu qu'il la laisse tranquille mais il ne semblait pas de cet avis. Il l'attrapa prestement, maintenant son avant-bras dans la paume gigantesque de sa main. Autrefois, elle aurait aimé qu'un beau jeune homme la rattrape et lui demande de venir à tout prix à un rendez-vous. Elle n'espérait plus cela depuis longtemps. Depuis le bal du lycée. Depuis que son dénommé petit-ami l'avait abandonnée à la soirée. Depuis qu'elle avait été la risée de tous les lycéens. Elle avait été déçue, tellement déçue qu'elle n'attendait plus rien de la part de qui que ce soit. Alors, elle était restée dans son coin, seule et perdue au milieu de ces couples qui virevoltaient au son d'une musique lente. Elle s'était laissée tomber sur une chaise en plastique et elle les avait observés, triste et intriguée. Elle était partie tôt ce soir-là et elle s'était jurée de ne plus participer à une seule fête. Jusqu'ici, elle avait tenu sa promesse.
« Quand es-tu libre ? » Il osa demander et elle voulut répondre jamais. Mais, à la place, elle répéta d'une voix faible qu'elle ne savait pas.
« Je t'enverrai un message ? » Nick continua son approche et Emma, au lieu de plonger ses yeux dans les siens, se mit à déplisser sa jupe. Il n'avait de toute façon pas son numéro de portable, se disait-elle.
« Oui, si tu veux. Maintenant j'ai du travail. » Elle abandonna la lutte et se désigna perdante.
« J'ai ton numéro » Il dit « Je t'appellerai » Où avait-il eu son numéro ? Était-ce Camille qui le lui avait donné gentiment en pensant faire plaisir à son amie ?
Bien sûr qu'elle avait envie de sortir un soir et d'être invitée au restaurant mais pas avec Nick !
Nick, satisfait de lui-même, retourna à sa place, fier comme un paon. Elle le détestait parce qu'elle vouait une aversion particulière aux personnes qui se savaient belles et qui usaient de leur charme à leur aise. Elle aurait pu détester Mr. Sherley mais il ne faisait pas partie de ses préoccupations premières. Sans un regard vers Nick, elle continua la distribution des plateaux repas dans un silence sorti tout droit d'un monastère. Ensuite, elle regagna son siège et se remit à la lecture de son bouquin.
___________________________________________
N'hésitez pas à voter, commenter et/ou devenir fan!
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top