Chapitre 8 : Les Enfants des Protecteurs
-Je vous remercie, monsieur le Duc.
Lev hocha la tête pour la jeune femme devant lui. Enceinte, elle était livide, avec les yeux rouges et les joues creuses. Pourtant, elle lui fit un pâle sourire, avant de repartir avec la vieille dame qui partageait son logis.
Le Bouclier en avait le ventre noué. Ça, c'était un envers du décor que les citoyens de Gentem ne voyaient jamais.
Ceux laissés derrière par les victimes des terres désolées. Les femmes, les enfants, les parents... Les Bataillons du Sud, de l'Est, de l'Ouest et du Nord avaient des pertes. Toutes les années, ils perdaient des soldats d'élite, en dépit de leur vigilance, de leur prudence et de leur compétence. Les Protecteurs mettaient un point d'honneur à assister aux funérailles de chacun d'entre eux.
À prendre soin de chaque personne laissée derrière, comme cette femme avec son enfant à naitre.
Voilà pourquoi, avec l'accord du roi Oktar, les Ducs et Duchesses avaient mis en place deux villages. L'un à la frontière entre le Nord et l'Est, Tranquillitas, l'autre à celle du Sud et de l'Ouest, Serenitas. Ils se trouvaient actuellement au premier, avec Rainier.
Les villages existaient depuis huit ans maintenant. Les femmes, les époux, les concubins, les enfants et les parents des morts vivaient en harmonie ici, avec l'aide des Duchés. Si les premiers temps avaient été durs, les nouveaux venus étaient désormais accueillis avec bienveillance par les plus anciens résidents de Tranquillitas. Ici chacun avait perdu quelqu'un, chacun savait pourquoi ils étaient là.
Tous avaient un travail en arrivant, l'économie des villages était réelle, mais elle ne servait pas à enrichir les lieux. Tout était réinjecté dans les paies des habitants, dans la gestion de l'orphelinat, des hôpitaux, de la garnison, bref, dans ce qui faisait que la vie ici était possible.
Et si les revenus n'étaient pas suffisants, Lev et Rainier s'occupaient de combler le vide dans la caisse. Le tourisme thermal, montagnard et hivernal chez Lev générait d'importants revenus permettant de gérer tout cela, tandis que Rainier était imbattable sur le commerce maritime.
À eux deux, ils pouvaient subvenir aux besoins de la famille de leurs soldats tombés au combat.
-Messieurs, fit la doyenne, une vieille dame dont le fils était mort trop jeune. Je vous remercie pour votre aide.
-Il n'y a pas de quoi, répondit Lev avec un grand sourire.
-Si je peux me permettre... L'orphelinat serait ravi de recevoir votre visite. En avez-vous le temps ?
-Bien sûr ! Rainier ? On a de la marge avec tes petits ?
Le colossal Duc leva le nez vers le ciel pour évaluer l'heure, avant de hocher la tête.
-Oui. Dana s'occupera de leur repas. Mais j'aimerais rentrer à temps pour l'histoire du soir.
Cela fit sourire la doyenne.
-Ah, monsieur... Vous êtes un père exemplaire !
À ces mots, Rainier rougit légèrement. Il fallait bien le connaitre pour le voir, avec sa peau sombre.
-Je... Je fais de mon mieux, murmura-t-il en se passant une main gênée sur la nuque.
-Comme tous les parents, gloussa la vieille dame. Allez, venez ! Ne perdons pas de temps, alors !
Si Rainier fut flatté par cette remarque, Lev discerna les ombres dans son regard. Lui tapotant le dos, le Bouclier ne dit rien. Il se contenta d'être un soutien silencieux.
Après tout, Rainier ne pouvait rien y faire si sa femme était comme elle était.
*
L'anniversaire de la Duchesse du Sud était quelque chose d'exceptionnel. Des centaines d'invités, venus de tout Gentem, se réunissaient pour y assister. On y chantait, dansait, on y mangeait les productions locales, étant donné que le duché était le grenier du royaume. Tout y poussait de façon prolifique, pour la plus grande fierté de Cara Malleus.
Oui, c'était absolument grandiose.
Alors, quand Lev lui avait annoncé qu'il n'y aurait que Cara, son fils, Rainier, ses enfants, Éléazar et eux, elle resta pantoise. À vrai dire, la grande réception était une façade politique. La véritable fête d'anniversaire se passait toujours ainsi, avec Véra en plus. En vérité, Cara ne supportait pas ce faste qui lui coutait une fortune et l'obligeait à côtoyer tous les hypocrites du royaume.
À croire que les deux Ducs et les deux Duchesses avaient tous le même caractère !
Même si le printemps commençait à peine, il faisait déjà chaud dans le sud. Et Cara était dans une forme éblouissante dans son pantalon simple et son haut ample. Très... Maison. Comme tous les invités, en fait.
-Salut ! s'exclama-t-elle, ses longs cheveux noirs volant dans les airs lorsqu'elle se tourna vers eux. Flavia ! Tu es venue aussi ! Oh, je suis contente !
Sautillant vers eux, le Marteau de Gentem souriait comme une enfant.
-Flavia, viens, je vais te présenter les petits !
Dans les jardins parfaitement entretenus de la forteresse du Sud, un immense espace gazonné permettait de jouer à toutes sortes de jeux. Une table et quelques chaises avaient été installées, tandis que trois petits garçons jouaient joyeusement. Éléazar courrait sans cérémonie après eux, jouant un monstre qui les faisait hurler en souriant.
Une petite fille, au vu de sa petite robe et de ses couettes blondes, se trouvait sur les épaules de Rainier, le géant à la peau d'ébène. La fillette, qui devait avoir tout au plus un an, s'amusait à tirer ses cheveux tout en les mâchouillant.
Une vision assez unique des redoutables Protecteurs de Gentem.
-Ah, bonjour, Flavia, fit la Lance en lui souriant.
Les petits en train de courir s'arrêtèrent, pour foncer vers elle avec de nouveau cris, Éléazar à leurs trousses.
-C'est toi la femme de tonton Lev !? s'exclama un petit garçon blond à la peau pâle.
-Évidemment, décréta un deuxième, presque identique. Ils se tiennent la main. Y a que les amoureux qui se tiennent la main.
-Il faut être amoureux pour se marier !?
La réflexion venait d'un petit à la peau chocolat, aux cheveux d'un noir soyeux et aux grands yeux rouges. Lui, c'était indéniablement le fils de Cara. D'ailleurs, à la façon dont elle lui ébouriffa sa tignasse désordonnée, c'était évident.
-Flavia, je te présente mon fils, Tamir.
-J'ai dix ans ! déclara-t-il d'un ton très fier, les poings sur les hanches.
-Enchantée, Tamir.
-Et voici Autem, dix ans aussi, et Eorum, six ans. La petite sur les épaules de Rainier, c'est Ena.
Oh... Mais de qui était donc ces trois petits blonds ? Soudain, Flavia se souvint d'une chose. À part la Lance et Cara, nul autre ici n'était parent. Donc... Les trois blonds à la peau blanche étaient les enfants de Rainier ?
Ce dernier l'observait, visiblement en attente de sa réaction.
-Mmh... Vous avez l'air aussi forts que votre papa, déclara-t-elle pour les deux petits blonds devant elle.
Ils lui sourirent de toutes leurs dents, avant de partir en courant vers leur père.
-Papa ! Papa ! Tu as entendu ça !? Elle a dit qu'on était aussi fort que toi !
-Ah, oui ? Elle a un bon œil, alors !
Tout en tenant sa fille sur ses épaules, Rainier accueillit ses fils sur ses genoux. Flavia ne put s'empêcher de sourire. Il y avait probablement une histoire derrière cela. Mais ce n'était pas le moment de la raconter.
-Dana n'a pas pu venir ? s'étonna Lev.
Dana était, apprit Flavia, la nourrice des trois enfants de Rainier. En général elle assistait à l'anniversaire de Cara avec tout le monde. Mais en l'occurrence, elle était malade. Rainier était donc venu seul. Elle n'osa pas demander où se trouvait la mère des enfants.
Tout en conversant avec chacun, Flavia fut de nouveau surprise par l'ambiance familiale qui régnait entre les Protecteurs. Ils déplorèrent l'absence de Véra, avant de se promettre de faire un repas de rattrapage à son retour.
Les enfants courraient en tous sens pendant que les adultes discutaient et mangeaient, tout en s'occupant de la petite Ena.
-Comment se fait-il que votre femme ne soit pas venue, Rainier ? demanda innocemment Flavia, au bout d'un moment.
-Ma femme ? Pourquoi viendrait-elle ? s'étonna le Duc de Hastam.
Oups. Flavia jeta un coup d'œil à Lev, qui vint à sa rescousse. Plus ou moins.
-Sa femme est une connasse, déclara-t-il. Son absence est une bénédiction.
-Oh, heu...
-Ne t'en fais.
Rainier lui sourit.
-Tu ne peux pas être au courant. Mais... On va dire que ma relation avec ma femme n'est pas au beau fixe.
-C'est le moins qu'on puisse dire, persifla Lev en buvant un verre de jus d'orange.
-Lev, tu veux vraiment faire craquer notre petit Hastam ? ricana Cara en passant un bras autour de son cou. Tu veux qu'il te tape ?
-Je ne suis pas violent avec mes amis, intervint le « petit » Rainier. Au fait, Cara, ta fête d'anniversaire officielle aura lieu quand ?
-Demain soir. Mais j'ai le secret espoir qu'une soudaine attaque dans les terres désolées me pousse soudainement à disparaitre.
Flavia haussa les sourcils, surprise. On pouvait réellement espérer ce genre de choses ? Quand Éléazar éclata de rire, elle comprit. Visiblement, ce n'était pas la première fois qu'elle faisait le coup à ses invités ! Un simple appel du Mage sur le bijou de communication, et elle devrait partir aussitôt. Néanmoins, comme le lui rappela Rainier, elle ne pouvait pas laisser son fils seul.
Tamir, juste à côté, affirma que si. Il pouvait se débrouiller avec toute la bande de rats venus profiter du banquet à la place de sa mère. Les deux têtes blondes ajoutèrent qu'ils le soutiendraient dans cette épreuve.
Une belle cohésion de groupe pour un si jeune âge.
Quoi qu'il en soit, Cara les remercia tous les trois, tout en leur rappelant que le rôle des parents était de protéger les enfants, et non pas l'inverse.
-Rainier, Dana n'est pas trop malade, tout de même ? demanda Éléazar. Tu veux que je vienne la soigner ?
Ah, la nounou. Visiblement, elle devait faire partie du groupe d'une façon ou d'une autre.
-Elle m'a affirmé que ça irait, mais je te le dirai si besoin est.
Les choses se passèrent en douceur. Tellement que Flavia oublia toutes ses inquiétudes, toutes ses craintes. Elle oublia ses cicatrices, son passé, tout comme son inquiétude pour Lev. Jouant avec les enfants, elle ne vit pas le regard de son mari posé sur elle. Elle ne vit pas son sourire, ni son air songeur. Ni même le regard rassuré qu'échangèrent les trois autres Protecteurs.
*
Lev ôta sa chemise, avec un grondement appréciateur en regardant sa femme. Venant à sa rencontre, elle perdit au passage sa robe déboutonnée... enfin, dont il avait arraché tous les boutons courant sur le devant. Il avait oublié sa force. L'embrassant sauvagement, le Duc l'attrapa par les fesses, la poussant à nouer les jambes autour de sa taille et les bras autour de son cou. Sa force inhabituelle lui permettait de la tenir sans problème, même à genoux sur le lit.
Cela faisait trois bonnes heures qu'ils se tournaient autour. Le temps de réussir à quitter l'anniversaire de Cara... Ils avaient commencé à s'embrasser dans la salle des portails, et le retour jusqu'à la chambre avait été quelque peu compliqué.
-Tu te sens prête, murmura-t-il contre ses lèvres, ou tu veux attendre ?
Le fait qu'elle glisse la main entre eux pour faire sauter les boutons de son pantalon était une réponse en soi. La faisant tomber sur le dos, Lev plaqua son bassin contre le sien, en appui sur un bras. Plus pratique pour glisser la main sous la lingerie couvrant sa fesse délicate... Il la trouva si humide que son sexe chercha à s'échapper de son pantalon. Que sa femme le désir au point de mouiller autant le rendait fou.
-Flavia, gémit-il tout contre ses lèvres.
-Lev...
Insérant un doigt en elle, il la fit se cambrer contre lui dans un gémissement voluptueux. Oh... il ne pourrait jamais se lasser de ce doux bruit. Flavia passa une main derrière sa tête, pour l'embrasser tandis qu'il imprimait des mouvements d'allée retour. Réceptive comme elle l'était, elle frôlait déjà les sommets... Mais il s'arrêta, lui arrachant une plainte rauque de frustration. Il avait envie de la taquiner. Néanmoins, il ne s'attendait pas ce qu'elle le fasse rouler sur le côté, pour se mettre à califourchon sur lui.
Ah... Il aimait bien ça.
Les mains sur ses cuisses, il avait une magnifique vision sur sa poitrine qui se balançait, tandis que son sexe venait coulisser le long du sien. Le regard torride de Flavia... Il ne tint pas longtemps à ce rythme. Elle le rendait fou. Reprenant le dessus, il attrapa ses fesses à pleines mains. Sa moiteur rencontra son gland, et...
Et... La porte de la chambre vola en éclats.
Stupéfaits, ils se figèrent, à un millimètre de la pénétration.
-Lev Clypeus, tu es un homme mort !
Oh merde ! Véra était rentrée de mission !
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