Chapitre 20 : Soumise à la Question
Il fallut quelques minutes de négociations pour que Lev accepte de lâcher sa femme. Éléazar voulait l'examiner, en raison du sang qui la recouvrait. Lorsqu'ils découvrirent le cadavre coupé en deux dans la chambre, Lev et lui se regardèrent, avant de la transporter dans une autre pièce. Il brulerait ce putain de lit et le ferait remplacer par un autre, dès que ses employés seraient remis de leurs émotions.
Pour lors, il allongea délicatement une Flavia inconsciente dans une chambre d'amis.
-Elle n'a pas l'air d'être blessée, déclara El en l'examinant rapidement. Pas de trace de violences sexuelles non plus.
La nausée envahit Lev en même temps que le soulagement. En voyant le corps dans leur lit, il y avait pensé, tout comme le Mage. En cet instant, une main dans celle de Flavia, il avait l'impression d'être sur le point de s'écrouler tant il était épuisé nerveusement.
-Tamir a recommencé, tu penses ? soupira-t-il.
-Pour qu'il se trouve encore une fois au mauvais endroit au mauvais moment ? Il y a de fortes chances.
-Je devrais le remercier, plus tard. Il a sauvé Flavia.
Les deux hommes hochèrent la tête. Éléazar s'occupa des quelques menues blessures de la Duchesse, avant de poser sa main sur son front, afin de la plonger dans un sommeil réparateur. Il devait aller s'occuper de Tamir, puis des employés de la maison.
Vingt minutes plus tard, Lev était toujours incapable de lâcher la main de Flavia. Il refusait de la laisser seule dans sa chambre, même si elle s'était roulée en boule sous la couette pour dormir. Véra vint. S'asseyant dans un coin, elle lui ordonna d'aller se changer. Elle garderait sa sœur pendant ce temps. Ils discuteraient plus tard.
S'il rechignait à laisser son épouse, il dut se rendre à l'évidence : il était couvert autant du sang des humains que des démons. Néanmoins, il n'alla pas tout de suite se changer. Faisant le tour de ses hommes, il vit qui était mort, qui était vivant, qui était soigné par Éléazar. En dépit de la violence de l'attaque, ils n'avaient que peu de pertes. Mais tous lui expliquèrent, avec fierté, le courage de leur maitresse. Et sa puissance !
En voyant la porte explosée, il avait plus ou moins soupçonné qu'elle avait fait usage de son Arc pour protéger la forteresse. En discutant, il se rendit compte de l'effet que produisait Flavia sur les gens de la maison. Et sa détermination à protéger Tamir les avait impressionnés. Ils avaient entendu les explosions à l'étage, dues à ses tirs. Il avait tout intérêt à aller voir de quoi il en retournait.
Dans les cuisines, tout le monde allait bien. Cara couvait son fils d'un œil inquiet, avec la cuisinière et ses enfants. Mais Tamir allait très bien, comme à son habitude dans ce genre de situation. Il trouva Rainier dans la cour extérieure, en pleine nuit. Il surveillait les assaillants survivants, mis au pilori. Il y en avait trois au total.
Il se sentait mieux, à savoir ses amis là pour l'aider. Le Duc de Hastam lui fit un signe de tête, avant de lui dire de retourner voir sa femme. Ce qu'il fit, une fois son armure enlevée et ses vêtements du dessous changés. Il fronça le nez en voyant le cadavre coupé en deux dans son lit. Il s'en occuperait plus tard.
En retournant dans la chambre d'amis, il découvrit son épouse réveillée.
-Flavia ! s'exclama-t-il.
-Lev ! Tout va bien ?
Souriante, elle prit ses mains dans les siennes alors qu'il se mettait à genoux à côté du lit. Véra, installée dans un coin, les pieds sur un tabouret, haussa un sourcil. Elle avait du mal avec l'air niais que pouvait afficher ce grand con face à sa sœur.
-On s'en fout de moi. Dis-moi plutôt pour toi.
-Je pense que c'était le trop-plein d'émotions, et la peur que j'ai eue pour Tamir, fit-elle d'un air contrit. Je ne voulais pas qu'il lui arrive quelque chose. Et... heu... Nos hommes... Les gens de la maison ?
-Quelques pertes, mais minimes étant donné l'ampleur de l'attaque. Vous avez limité la casse. Dis-moi, qu'est-ce qui s'est passé ?
Flavia réfléchit un instant en se calant plus confortablement contre les coussins. S'asseyant en tailleur à côté d'elle dans le lit, Lev l'écouta, avec Véra. Elle leur relata son inquiétude pour Tamir. Son intuition surprenante. L'attaque. Le petit qui avait coupé le premier attaquant en deux. Puis le hall, Tamir qui était intervenu, puis cet instant troublant dans le couloir, où tout était devenu noir. Et enfin, l'arrivée de Lev.
Son récit les laissa pantois. Mais quand, épuisée par sa nuit, Flavia se rendormit, il se leva pour aller dans les couloirs. Il ne doutait pas de la véracité des paroles de sa femme. Néanmoins, il devait vérifier quelque chose.
Non loin de la chambre ducale, il y avait toujours les corps des hommes éventrés. Mais ce n'était pas eux qui intéressaient Lev. Les yeux furetant autour de lui, il fronça les sourcils. De profondes lacérations recouvraient les murs. Fait de marbre, ces derniers étaient très résistants. Personne, à part quelqu'un doté de la force d'un Protecteur, n'était capable de faire cela.
Passant les doigts sur les entailles larges d'une paume, il fronça les sourcils.
Qui avait donc bien pu faire une telle chose ? Dans un temps si court ?
-Lev.
Éléazar. Le Mage regarda lui aussi les marques dans le mur, avant de dire :
-A priori, aucun des attaquants ne nous a échappés.
-Parfait. Ils ne sauront donc pas pour les pouvoirs de Flavia.
-Tout à fait. Maintenant, bouge tes fesses, qu'on aille interroger les gars au pilori. J'ai la dalle, au plus tôt ce sera fait au plus tôt on pourra manger.
Autant dire que les assaillants avaient intérêt à parler vite.
*
Elle avait l'impression d'avoir été virée de chez elle.
Assise derrière le bureau de Véra, Flavia boudait très clairement. Non seulement elle devait se coltiner tous les papiers en retard de sa sœur, même si elle ne le lui avait pas demandé, mais en plus elle n'était pas chez elle !
Voilà deux jours que Lev l'avait expédiée dans la forteresse de l'Ouest ! Sous le fallacieux prétexte que Gaston et Béa devaient changer intégralement leur chambre, en raison du cadavre ouvert en deux sur le lit ! Elle aurait pu aller dans une autre pièce, mais non ! Le rustre refusait de le laisser à la maison !
Bien entendu, elle comprenait pourquoi elle se trouvait là. Devenue cible, elle se devait de se mettre à l'abri. Or, Véra avait triplé le nombre de gardes dans la maison, et les avait si bien chapitrés qu'elle ne pouvait bouger une oreille sans qu'ils s'en rendent compte.
Avec un profond soupir, elle se laissa glisser le front sur la table. Ce fut cet instant que le majordome choisit pour rentrer. Les deux gardes en faction dans la pièce tiraient déjà leur épée lorsqu'elle leur dit de s'arrêter. Les yeux ronds, le vieil homme lui remit une lettre, avant de rapidement déguerpir.
Une lettre ?
Une lettre violète !
Déjà !?
Le rouge aux joues, elle regarda les deux gardiens, avant de se dire qu'ils ne pourraient pas lire par-dessus son épaule. Et puis, quand bien même ! C'était son mari qui lui écrivait. Elle réfléchit rapidement à sa réponse de la dernière fois, avant d'ouvrir l'enveloppe. À l'intérieur, les mots étaient déliés, bien qu'écrits d'une main fébrile.
« Ma tendre épouse,
Comment ça, tu n'es pas une coquine pour m'avoir proposé des roses oranges ? C'est comme si tu m'avais envoyé ta petite culotte en dentelle par la poste. Sais-tu à quel point j'ai rêvé de toi ces dernières années ? Jamais je n'aurais cru pouvoir un jour t'épouser. Jamais je n'aurais cru un jour que tu le souhaites.
Sais-tu ce que j'ai pensé en te découvrant, devant l'autel ce jour-là ?
Je me suis dit que c'était la plus belle journée de ma vie. Car j'avais la chance de pouvoir me marier à la seule femme que je désirais avoir à mes côtés, jusqu'à la fin de mes jours. T'avoir par le biais des lettres me suffisait de moins en moins. Alors, pouvoir t'embrasser ? Te toucher ? Oh, ma femme, ce n'est pas pour rien que je me suis permis certaines privautés avec toi dans la calèche.
D'ailleurs, sais-tu que j'ai toujours la culotte de ce jour-ci dans la poche de mon pantalon de mariage ? Je devrais la faire encadrer, tiens... qu'en penses-tu ? Au lieu d'un tableau formel, ceci conviendrait mieux aux débuts de notre mariage, non ?
Ton tendre et coquin conjoint,
Lev ».
Flavia éclata de rire à la fin de la lettre. Joyeuse, elle alla chercher du papier sous l'œil intrigué des gardes, avant de commencer à répondre à son mari. Étrangement, elle se trouvait en verve. Une fois sa plume posée, elle alla donner tout ça au majordome de Véra, afin qu'il le poste au plus tôt. Manque de chance pour elle, elle tomba sur Lev au moment où elle lui donnait l'enveloppe verte.
Les yeux rivés dessus, Lev resta un instant coi.
-Vous pouvez poster ça tout de suite, déclara Flavia avec un grand sourire pour son époux.
-Heu... Mais je suis là, fit ce dernier en pointant sa propre tête de l'index.
-Qui a dit que c'était pour toi ?
Il écarquilla les yeux, avant de prendre un air outré. Si Flavia ne l'avait pas retenu, il aurait réussi à prendre l'enveloppe avec laquelle le majordome s'enfuit, très clairement interloqué par le comportement des époux.
-Je veux savoir ! s'exclama Lev.
-Non ! C'est ta punition.
-Ma punition !? Mais pourquoi !?
-Pour être un vilain cachottier.
Il haussa un sourcil, avant de lui faire un sourire machiavélique. Oh, ce sourire...
-Moi, je suis un vilain cachottier ? Voulez-vous vraiment parler de ça, madame la Duchesse ?
-Je ne t'ai jamais rien caché, crâna-t-elle. Tu ne m'as simplement jamais posé les bonnes questions.
-Mmh... Je vais te soumettre à la question, alors ! déclara-t-il en la prenant en poids, en un porté romantique en règle.
Flavia fit mine de se débattre, sous le regard amusé des gardes et du personnel, tandis que son mari l'entrainait à l'étage. Jetée sur son lit de jeune fille, elle roula sur le ventre, en regardant par-dessus son épaule. Déjà à quatre pattes au-dessus d'elle, Lev saisit les liens retenant le dos de sa robe avec les dents. Les yeux rivés aux siens, il tira lentement dessus. Très lentement, tout en faisant sauter les premiers boutons de sa chemise.
L'excitation flamba en elle.
Se retrouvant dos nu, elle frissonna lorsqu'il embrassa son dos, ses épaules, sa nuque. Ses dents la mordillèrent. Il ne lui en fallut pas plus pour lui arracher sa chemise et faire sauter les boutons de son pantalon. Lev ne fut pas plus tendre avec sa robe. Depuis l'attaque sur le manoir, ils n'avaient plus fait l'amour, l'état d'alerte compliquant les choses. Les nuits seule ici étaient froides, la solitude était devenue désagréable.
Même si elle habitait encore ici quelques semaines plus tôt, elle se sentait loin de chez elle quand elle était loin de Lev.
À son empressement à lui faire l'amour, elle sentait qu'il en était de même pour lui. Dormir séparés, sans l'obligation des batailles au milieu, leur pesait.
Enfoncé en elle jusqu'à la garde, Lev la fit se redresser sur le lit. À genoux, il supportait son poids en empoignant son postérieur, tandis qu'elle nouait les bras autour de son cou. Dans cette position, elle ne voyait que lui. Elle ne sentait que lui. Elle ne voulait que lui.
-Flavia... haleta-t-il en lui mordant le cou.
Ses mains immobilisèrent ses fesses, ses hanches allèrent plus vite. Plus fort.
-Ah ! Lev ! Lev !
Qu'on l'entende était bien le cadet de ses soucis. De toute façon, il y avait probablement des gardes derrière la porte. Alors, qu'ils répandent les rumeurs sur leur vie sexuelle, eux qui n'étaient pas censés se marier, eux qui étaient regardés par toute la bonne société. Et si on apprenait que son mari avait la fougue pour la prendre plusieurs fois de suite, qu'est-ce que ça changeait ?
Ce qu'elle ignorait, c'était que ça changeait beaucoup de choses pour Véra. Cette dernière hésitait très clairement entre leur dire de la fermer et tuer Lev pour oser culbuter sa sœur.
Elle choisit la fuite.
Le lendemain matin, Flavia fut surprise de voir sa sœur rentrer de bonne heure. Main dans la main avec Lev, elle accompagnait son époux vers la salle du portail. Véra regarda la chemise sans boutons du Bouclier de Gentem, ainsi que son pantalon aux attaches arrachées. Elle poussa un profond soupir, avant de partir en se massant les tempes.
-Il va falloir régler vite fait le problème, sinon je vais te trucider.
Oups.
Une fois Lev partit, elle s'attaqua de nouveau aux papiers.
Tout se passa bien, jusqu'à ce qu'elle tombe sur son père.
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