Chapitre 14 : Les Ferguson
Beaucoup de choses traversèrent l’esprit de Nergal, en observant cette photo. Aucune ne toucha Barbatos, mais toutes se regroupèrent autour de Blanche. Sœur des Ferguson ? Un clan puissant, qui cherchait un de leurs membres jusqu’ici, en Exil ?
Pourquoi maintenant ?
Il n’avait aucune envie de la perdre, surtout au profit d’une famille qui l’avait laissé entre les mains de Lucifer toutes ces années. Pas après avoir fait tous ces efforts, pas alors qu’il se vidait de son sang.
-Cassandra et elle avaient besoin de parler, fit Alastor, décidé à pallier à son silence sonné. Elles sont un peu plus bas sur le chemin.
Les deux Ferguson se regardèrent. Nergal ne fut pas dupe. Ils étaient pleins d’un espoir fou, d’un espoir perdu et déçu à de trop nombreuses reprises. Il y avait de la peur, aussi. Celle de s’être trompé. Celle de ne pas revoir leur sœur, de voir quelqu’un d’autre à sa place.
-Allons dans le Hall de la Souffrance, pour les attendre. Nergal, tu restes ici, pour voir Blanche. Svenn, Silke… Vous me suivez. Vous allez me raconter ce qui c’est passé.
-Je n’ai aucune intention de vous suivre, cingla Hell.
Le Bourreau posa sur elle ses yeux rouges.
-Je ne vous ai pas demandé votre avis, Ferguson.
Nergal ne prit pas le peine de les regarder partir, laissant ses clones encadrer leur départ. Il descendit le chemin en quatrième vitesse, le cœur serré. Il était peut être blessé, mais cela ne diminuait en rien son sentiment d'urgence. Avec une affreuse impression de perte prochaine.
Assises sur un gros rocher, les deux femmes discutaient à bâtons rompus. Elles s’arrêtèrent net en le voyant débouler, les yeux écarquillés.
-Tu n’es toujours pas allé te faire soigner !? s’exclama Blanche.
-Nous avons été interrompu. Cass, Alastor va avoir besoin de toi.
La nymphe secoua la tête en souriant, peu dupe sur sa demande. Malheureusement, il disait vrai, aussi l’escorta-t-il d’un autre double. Blanche observa son manège, les bras croisés. Pourtant, une fois seuls, il ne sut quoi dire.
-Nergal, tu dois aller voir Rebecca sur-le-champ.
-Ce n’est pas ma priorité, pour le moment.
Elle fronça ses jolis sourcils, ses yeux verts le détaillant de la tête aux pieds.
-En dix minutes, qu’est-ce qui a changé ?
-Tu es une Ferguson ?
Mince. Il n’avait pas pensé commencer par cela.
-Une Fergu… Comment tu sais ça, Nergal ? Oh non… Ne me dis pas…
Elle se tourna vers les remparts d’Exil, en haut du chemin. L’espoir brilla dans ses yeux, identique à celui de son frère et de sa sœur. Pourtant, si elle fit un pas en avant, elle s’arrêta aussitôt. Silencieux, il glissa sa main dans la sienne. Il ne pouvait pas se montrer égoïste. Pas maintenant. Elle avait besoin de tout son soutient.
-Ils vont m’en vouloir, murmura-t-elle. Après ma mort, je ne leur ai jamais donné de mes nouvelles.
-Ils ne t’en voudront pas, Blanche. Ils seront trop heureux de te voir.
Un peu rassérénée, elle consentit à remonter vers Exil. Songeur, Nergal attendit. Elle avait besoin de temps pour retrouver ses esprits. Pour parler.
-Lors de mon asservissement par Lucifer, les Ferguson étaient encore humains. Nous sommes des vikings pure souche. Caractériels et très combatifs. D’ailleurs, je suis morte sur le champ de bataille. C’est là que Lucifer a récupéré ma dépouille.
Il se demanda ce qu’elle avait bien pu faire à l’ange déchu, pour qu’il prenne la peine de ruiner l’après-vie d’une humaine. Néanmoins, il ne posa pas la question. Ils arrivaient au Hall de la Souffrance, où des bruits de voix raisonnaient.
-Il n’y a pas pire déshonneur pour notre famille, que de se retrouver réduit à l’état d’esclave, ajouta-elle. Je devais reconquérir ma liberté, avant de pouvoir me présenter de nouveau devant eux.
En la voyant resserrer ses doigts autour du sac, contenant les restes de sa dépouille, il eut un petit sourire.
-Tu y es parvenue. Tu peux te présenter devant eux la tête haute, petite lare insoumise.
*
Quand la porte du Hall s’ouvrit, Alastor était à deux doigts d’arracher la tête de Hell Ferguson. C’était fichue pimbêche refusait de lui dire ce qui était arrivé à Barbatos, et son frère, lui, tournait en rond, entendant à peine la dispute. Svenn restait dans son coin avec Silke, visiblement épuisé.
Puis la porte s’ouvrit. La jeune fille bondit sur ses pieds, pour se ruer dans les bras de la nouvelle venue. Blanche éclata d’un rire un peu tendu en la serrant contre elle, Nergal à ses côtés. En l’étudiant, le Bourreau ne retint absolument pas son grognement exaspéré. Il avait un air d’amoureux transit à vomir.
-Blanche ?
Contre toute attente, le nom prononcé d’un timbre tremblant émanait de Hell. A l’instar de son frère, elle s’était statufiée, les yeux écarquillés. Pour une fois, leurs espoirs n’avaient pas été déçus, les laissant sans voix. Alors, quand Silke daigna lâcher sa servante, ce fut une explosion… Inattendue.
Hell sauta dans les bras de sa sœur avec un couinement larmoyant, tandis que Fergus les enlaçait toutes les deux, les soulevant littéralement du sol. S’en suivit un torrent de paroles dans un dialecte mort depuis des lustres.
Mit à l’écart, Nergal le rejoignit avec un sourire contrit.
-Elle nous a rapporté un paquet d'ennuis, ta copine, grommela Alastor.
-Arrête. Elle n’y est pour rien.
-Mouais. Tu es allé te faire soigner, toi ?
-J’y vais tout de suite. Au fait, Al ? Merci.
Le démon lâcha un grondement mécontent.
-Tu peux me remercier. Maintenant, nous sommes officiellement entrés dans la guerre démoniaque.
Nergal haussa les épaules, peu affecté par sa soudaine mauvaise humeur. Car il avait raison. Avec un tel pied de nez à Lucifer, le Roi des Mouches les croirait ralliés au parti de Satan, qui, lui, ne tarderait pas à leur casser les pieds. Les morts allaient pleuvoir…
-De toute façon, nous aurions été impliqué tôt ou tard. Tu le sais aussi bien que moi.
-Je sais. Nous avons contrarié bien trop de personnes sur tous les plans de ce monde.
Ils regardèrent les Ferguson, puis Silke et Svenn, à moitié endormit l’un contre l’autre.
-D’un autre côté, ça valait le coup.
*
Le destin des Ferguson avait radicalement changé lors de cette fameuse bataille, des siècles plus tôt. Si elle était morte, Blanche n’avait pas été la seule à subir de grands changements. De mortels, les Ferguson étaient devenus des métamorphes, mettant par là un pied dans le monde des Invisibles.
Mais ils n’étaient pas devenus de simples loups, ou des renards. Non. Ils avaient revêtu la peau de créatures de légendes, afin d’accomplir leur vengeance sur les démons. Tout cela à cause de son décès. Ils savaient Lucifer responsable, aussi avaient-ils décidé de prendre leur revanche. Sans jamais y parvenir. Tous leurs affrontements avec le Déchu c’étaient soldés par de cuisants échecs, les conduisant finalement à se tourner vers la seule arme capable de le tuer : Excalibur.
A ce moment-là, par un concours de circonstances incroyables, ils avaient découvert qu’elle était toujours de ce monde. Aussi étaient-ils venus pour la délivrer, sans savoir qu'Exil était son refuge.
-Je suis désolé, souffla Fergus, accablé par la honte. Si j’avais imaginé que… J’aurais tout fait pour te sortir de là. Par Odin… Je te le jure, Blanche…
-C’est de ma faute, mon frère. J’aurais dû vous contacter... Mais mon nouveau statut me dégoûtait.
-Surtout que les lares sont censés être soumises, ajouta Hell, assise sur le canapé. Ton sale caractère a transpercé même cette malédiction, dirait-on.
Blanche rit doucement. Encadrée de son frère aîné et de sa petite sœur, elle avait l’impression de rajeunir d’un millénaire. Même si le salon était en ruines, à cause de l’affrontement de tantôt, il n’en restait pas moins son nouveau foyer. Silke dormait à l’étage, Svenn s’était écroulé dans la chambre d’amis. Quant à Nergal, elle n’avait pas eu de nouvelles.
-Je tuerai Lucifer.
Fergus avait parlé d’une voix assurée. Ses serments avaient toujours été tenu, jusqu’à présent. Preuve était son statut de chef des Ferguson. Un clan réputé pour ses chasses aux démons, pour sa violence et sa protection envers les siens.
-Tu n’en as pas besoin, mon frère. Ce que je veux, c’est vivre en paix, pas me lancer dans une vendetta pour les dix prochains siècles.
-Et tu mérites cette paix, Blanche. D’ailleurs, ta journée a dû être difficile. Où se trouve ce démon, Nergal ? Je dois le remercier de t'avoir sauvé.
-Un démon ! cracha Hell. Nous sommes tombés bien bas, pour en arriver à les remercier.
-Ne dis pas ça. Alastor et Nergal sont des hommes bons. Tu le découvriras bien assez tôt, soupira-t-elle.
-Hein ? Pourquoi, tu as l’intention de rester ici ?
-Mmh… Nous en discuterons demain. J’ai des choses à vous expliquer.
Elle se releva, réalisa soudain qu’elle portait toujours sa robe de soubrette, tachée de sang, réduite en lambeaux pour panser les plaies de Nergal. Elle devait sentir le fennec.
-C’est à propos de Silke ?
Ha, son frère. Un homme intelligent et perspicace, comme toujours. Une chose rare, au siècle de sa naissance. Et même à cette époque, son physique ne collait pas avec son intellect.
-Entre autre. Prenez les lits, je reviendrai plus tard.
-Hein ? Mais tu vas…
Fergus fit taire sa sœur, d’une main sur l’avant-bras. Blanche en fut soulagée, car en sortant, elle avait un sentiment d’urgence. Par chance, elle n’eut qu’à traverser la rue, la porte de la maison d’en face étant ouverte. Guidée par le bruit de la douche, elle défit les attaches de sa robe, la jeta dans un coin, soulagée du poids du sang. Elle traversa la chambre vide, trouva la salle de bain. Derrière la porte transparente, au milieu de la vapeur d’eau, elle reconnut le dos de Nergal, ses muscles jouant délicieusement au grès de ses mouvements. Elle n’eut pas le temps de faire un pas en avant qu’un bras s’enroulait autour de sa taille, la plaquant contre un corps chaud, humide.
-Nue et offerte… Je ne m’attendais pas à te revoir cette nuit, Blanche…
Elle émit un léger gémissement quand il glissa son érection contre ses fesses, faisant grimper en flèche les battements de son cœur.
-Je… Heu…
Le double dans la douche en ouvrit la porte, dégoulinant d’eau et de savon. Un sourire érotique illuminait son visage barré de cicatrices, tandis que celui dans son dos la poussait dans la cabine.
-Viens par là. Je vais t’aider à te décrasser.
Elle grimaça en se glissant sous le jet d’eau chaude.
-Tu n’étais pas obligé de préciser mon état de saleté.
A sa grande surprise, le double ne disparut pas. Il rentra avec eux, la coinçant entre deux Nergal, deux formes parfaites du démon. Elle eut soudain très, très chaud.
-Tu as tout d’une guerrière, chuchota-t-il à son oreille.
-Les guerrières sont sales ?
Le premier versa du savon dans sa main, apparemment fermement décidé à les passer sur son corps. A cette simple idée, elle se cambra, l'anticipation s'épanouissant en elle. Alors, quand le second prit ses seins en coupe, son pénis prêt appuyé contre elle, elle crut s’évanouir de plaisir.
-Dis-moi, Blanche… Es-tu prête à me laisser t’occuper de toi, cette nuit… Deux fois plus que d’habitude ?
Son couinement approbateur se mua bien vite en une autre musique, bien plus douce aux oreilles du démon.
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