Chapitre 1

Une voix tremblante de jeune fille résonna faiblement dans le lieu désert. Un cadavre de petite taille animé se remuait à terre, la seule âme en détresse qui vive dans le paysage de blanc immaculé.

— Aidez-moi...Je...je vous en prie. Quelqu'un ? S'il vous plaît...J'ai besoin d'aide.

Ses mains frêles tentèrent d'agripper le manteau de neige où elle était allongée, pour avancer entre les érables morts de la forêt. Seul le souffle du vent répondit à ses appels désespérés tandis qu'elle rampait vers une destination inconnue, ne sachant pas où elle se trouvait. Du sang écarlate s'écoulait depuis les blessures, chair à vif qui parsemait son visage et ses membres dénudés. Des picotements et la douleur intense la poussaient à s'abandonner à la mort qui l'attendait de pied ferme, mais elle résista. Elle cria encore et encore. Enfin, elle essaya du moins. Sa voix se volatilisait petit à petit et sa gorge lui faisait un mal de chien.
Ses sens la quittaient eux aussi à petit feu, sa vision devenant trouble et ses oreilles ne captant presque plus les sons alentours. Malgré cela, elle réussit à entendre des bruits infimes de pas s'approcher, elle continua alors d'appeler à l'aide.

— Wyome ? Que fais-tu là ? Que t'est-il arrivé ?

Elle tenta de se redresser pour faire face au jeune homme qui avait prononcé ces mots. De suite, il l'empêcha de faire un quelconque mouvement par peur qu'elle ne se fasse mal et retira son manteau pour couvrir le corps amoché et parsemé de piètres lambeaux de l'enfant.

— Yo...Yoru.

Des larmes se mirent à couler sur les joues de Wyome et lui brûlèrent le visage. Ses lèvres gercées frémissaient, et elle leva lentement ses bras apostrophés vers le visage blême du dit Yoru. Le jeune homme poussa les longs cheveux en bataille de Wyome, laissant apercevoir un fasciés squelettique. Il ferma les yeux.
Qui aurait pu faire ça à une enfant de 11 ans ?

Il fallait la faire soigner par un docteur !
Mais, il réfléchit.
Il ne pouvait pas la laisser là pour appeler de l'aide, alors qu'elle était aux portes de la mort et jusqu'à des dizaines de kilomètres de la civilisation. Mais s'il la portait sur son dos, il risquerait d'élargir ses blessures, et d'empirer son état.
Peu importe, il faut faire vite !
Il attrapa doucement Wyome et l'encouragea à monter sur son dos. Celle-ci fit de son mieux et posa enfin sa tête sur l'épaule du garçon. Il rassembla toute ses forces, et enfonça à chaque pas ses pieds bottés dans la marrée de neige.

— Tiens bon Wyome, on rentre à l'académie et on pourra s'occuper de toi. Tout ira mieux.

Il ne l'entendit plus. Son cœur s'arrêta.
Non, elle respirait toujours, mais sa bouche demeura close. Et cela durant tout le trajet.
Combien de temps marchait-il pour traverser la forêt menant à l'école ? 15 minutes ? Trois quarts d'heure ? Une heure et demi ?
Le temps importait peu, seuls ses pieds se mouvaient alors que ses sens restaient à l'affût pour vérifier que la petite Wyome soit bien avec lui. Vivante. Il calculait le moindre de ses gestes pour éviter de blesser son corps meurtri et tenta de mettre en sourdine son cœur battant à mille à l'heure.

Après une éternité de marche, il arriva à l'orée de la forêt en face du bâtiment en pierre sombre et au caractère orgueilleux, dominant voire condescendant envers tout être pénétrant à l'intérieur. La neige récemment tombée faisait l'équilibre sur les toits en pic typiques de l'art gothique, menaçant de s'écrouler sur un pauvre élève sortant de cours d'algèbre ou de littérature.

Personne à l'horizon. Il passa l'énorme portail et le referma d'un coup de pied arrière. 

— Et toi le déchu du Soleil ! Qu'est-ce que tu fous avec cette gosse sur le dos ?

Il tourna son regard vers la voix qui l'avait interpellé. Juste un élève senior un peu trop colérique et qui ne cherchait qu'à l'embêter. Il l'ignora, son seul but étant d'arriver au plus vite à l'infirmerie.

— Eh j'te cause le déchu !

Yoru continua son chemin en silence, ses jambes commençant à trembler sous le poids de Wyome. Sa carrure assez fragile ne supportait pas.
L'autre élève sentit le coup passé pour son égo, il serra ses poings, voulant le tabasser pour son insolence. Mais très vite, il contint sa colère après avoir reconnu l'enfant sur le dos de Yoru. Il courut vers le jeune homme en lui ordonnant de s'arrêter. Le garçon ne l'entendit pas, son subconscient lui criant de faire au plus vite pour la sauver.
Son aîné, de deux ans attrapa Wyome de derrière et la prit dans ses bras sans que Yoru n'eut le temps de réagir. Ce dernier écarquilla les yeux et s'avança pour récupérer la petite fille alors que l'autre garçon faisait des pas à reculons.

— Tu vas lui faire mal ! Lâche-là ! Je dois l'emmener à l'infirmerie, elle peut mourrir. »

D'autres élèves interpellés par le raffut, formèrent instantanément un troupeau autour des deux garçons et de Wyome en ne se privant pas de commérer. Tous ces écoliers en uniforme sombre se demandèrent ce qu'il se passait et le plus grand ne tarda pas à répondre à leurs interrogations.

— Yoru ! J'ai trouvé Yoru avec la jeune Pourfendeuse gravement blessée sur son dos.

Des regards de dédain, tout ce qu'il y a de plus méprisant fixèrent le « Déchu du soleil », l'accusant d'être le coupable de l'état de Wyome.
Trois adolescents, aux visages menaçants se rapprochèrent dangereusement de Yoru en rehaussant leurs manches, de la lumière ambrée entourant leurs bras veinés.
Le garçon pria pour ne pas se faire violenter comme la semaine dernière parce qu'il avait soutenu son regard trop longtemps sur une élève.

On l'avait traité de voyeur, pervers et autre alors qu'il ne faisait que réviser ses cours, le regard dans le vide.

Soudain, deux femmes, accompagnées d'un homme à l'allure imposante en uniforme militaire, arrivèrent et séparèrent la foule en un instant.
Tous les élèves se mirent en ligne sur le côté et en garde-à-vous. Ils levèrent leur main près de leur tempe en signe de respect, sans dire un mot.
Le militaire s'avança dans une démarche bien connue des personnes de son rang, avec un air renfrogné sur le visage. Il s'arrêta devant un élève et ce dernier déglutit, prêt à s'enterrer sous terre devant la prestance de ce haut gradé.

— Dis-moi ce qu'il se passe.

Le mana de cristal et d'Ombre mélangé, en plus de l'odeur de sang se dégageant de sa corpulence faisait frissonner chaque élève, et son ton ferme qui ne le quittait jamais inspirait la droiture et le respect. Le jeune adolescent ne se fit pas prier pour répondre à l'homme.

— Oui, m'sieur. L'élève Yoru de première année a soi-disant retrouvé Wyome dans la forêt, totalement mutilée. Jack en troisième année l'a récupéré dans ses bras, le considérant comme un danger pour cette dernière. Yoru a ensuite essayé de l'agresser, ce pourquoi nous nous sommes tous réunis ici. C'est tout m'sieur.

Yoru n'en croyait pas ses oreilles. Habitué à ce genre de mensonges à son égard, il ne s'en serait pas préoccupé en général, mais devant le colonel Lee. Quel honte !

En parlant du colonel, celui-ci se tourna vers le jeune garçon, non sans le toiser du regard. Il ne prononça pas un mot faisant planer la tension dans la cour.
Après quelques secondes qui paraissaient être une éternité, il exigea à la femme qui devait être l'infirmière d'emmener Wyome à la clinique, puis il s'en alla, laissant un soupir de soulagement traverser la bouche des élèves.
Cet ancien combattant était connu pour être un vrai sadique, et il ne ménageait jamais les jeunes gens dans ses entraînements.

La deuxième femme, restée en retrait jusque là, pouffa en jetant un regard discret mais étrangement perfide à Yoru.
Elle ne portait pas d'uniforme, mais une robe décolletée rouge à petit pois, avec au-dessus une légère veste. La température hivernale ne l'affectait point, son mana lumineux étant là pour la réchauffer à toute occasion.
Une mage jeune et assez coquette mais possédant une grande puissance en terme de pouvoir : la définition parfaite de la professeure de magie de cette académie. Mademoiselle Jeane.

— Tu devrais aller voir Père Adrastos pour te refaire purifier, mon pauvre déchu...chuchota-t-elle au garçon d'un ton doucereux avant de se tourner vers les autres en haussant le ton. Allez, retournez à vos occupations ou allez travailler si vous n'avez rien d'autre à faire.

L'infirmière revenue avec une civière, prit Wyome en charge et s'en alla vers la clinique, mademoiselle Jeane à ses pieds. Petit à petit, le troupeau se décomposa et chacun partit de son côté. L'élève de troisième année se fit un plaisir de donner un coup d'épaule à Yoru lorsqu'il passa près de lui.

— Tu ne perds rien pour attendre, cracha-t-il en s'arrêtant près du plus jeune. Tu vas te faire lyncher pour ce que tu as fais Dévoreur d'Ombre. Les démons dans ton genre ne seront jamais des exorcistes, et ce que tu as fais en est la preuve.

Une boule de lumière composée de fines particules noires flotta dans la paume de sa main. Il menaçait son cadet et cela, pour la énième fois depuis le début de l'année.
Yoru ne dit rien, se contentant de fixer le pouvoir de ce mage. Un pouvoir qui le fascinait grandement, lui qui ne savait pas maîtriser la lumière comme les autres exorcistes.
Il n'était pas comme les autres exorcistes.
Il était un Dévoreur d'Ombre.

Quand l'autre fut partit, ses pensées se tournèrent vers Wyome.

— Je dois avertir Rowan, elle saura sûrement quoi faire, se dit-il en serrant les poings.

— Oh, dommage pour toi, elle est en épreuve d'exorcisme avec Darius.

Yoru avait pensé à voix haute et quelqu'un l'avait entendu !
Il aurait rougi de honte avant d'avoir reconnu la voix et l'odeur de suie du concierge Francis, le doyen adoré de cette académie.
D'un fin sourire, il salua le vieil homme, toujours accompagné de son balai rustique.
Un outil pas très efficace pour un si grand endroit, mais une véritable arme pour botter le derrière des élèves en retard, ou qui salissaient délibérément les couloirs.

— Ah Yoru ! Pourquoi cette tête ? Tu es tombé du lit ce matin ? Blagua le vieux en tapotant l'épaule du jeune homme.

— J'ai retrouvé Wyome, dans un état si terrible que je n'ai pas de mots assez forts pour le qualifier.

Le rire guttural de Francis s'arrêta net, son faciès ridé en pleine décomposition. Il voulut lâcher un soupir de soulagement puisque la petite a été retrouvée. Mais, dans un sale état, dit-il ?
Ses lèvres ne bougèrent pas, de même pour son corps embonpoint. Yoru baissa la tête, bien plus attristé encore.
Les quelques cheveux du vieux épargnés par l'âge se remuaient en rythme avec le vent et se fondaient à merveille dans le décor blanc. Un paysage magnifique contrastant lui, avec les cheveux corbeau de l'adolescent.

Après des minutes dans un mutisme mortel, Francis demanda plus de précision sur cette après-midi mouvementé. Yoru répondait à chacune de ses questions, alors que d'autres beaucoup plus sombres se formaient dans son esprit. Au fil de la conversation, le vieil homme se mit à regarder sa montre. Encore et encore, l'air de vouloir partir au plus vite, ce que l'adolescent remarqua.

— Je dois retourner au boulot, toi va voir la p'tite. Elle doit sûrement avoir besoin de soutien après une telle expérience.

Yoru acquiesça d'un hochement de tête, sceptique, puis tourna les talons pour aller à l'infirmerie. Francis lui, alla dans la direction opposée, menant au portail de l'école. L'adolescent tenta de garder ses questions pour lui, mais il n'y arrivait pas.

— Qu'est-ce que vous ne me dites pas ? Demanda le jeune garçon en se stoppant dans sa marche. Vous disparaissez depuis plusieurs semaines on ne sait où sans l'annoncer à qui que ce soit.

Le doyen s'arrêta lui aussi et afficha un petit rictus sur ses lèvres en tenant fermement son balai sur l'épaule. Dos à dos, les deux hommes ressemblaient à deux adversaires, dans un duel, prêts à se tirer dessus avec des revolvers.

— Je devrais te retourner la question, Yoru.

Lentement, le soleil se coucha derrière les arbres de la forêt, couvrant de sa lumière orangée le visage pâle et froid de Yoru.
Il ne savait plus quoi faire. Deux semaines, même plusieurs mois, dans une mascarade qui ne finissait pas. Francis le savait aussi bien que l'adolescent. Ils s'entendaient bien et pourtant, le secret persistait.
Dans cette académie, le proverbe « le silence est d'or » n'avait jamais autant paru aussi réel. Dans une période de guerre continue où complot et espionnage faisaient rage, les mots ne possédaient aucune valeur, et seules les actions définissaient celle d'une personne.

— Si tu n'as rien d'autre à me demander, j'y vais et si tu as besoin de moi, fais-moi signe. Et dernière chose, si la p'tite est réveillée, dis-lui bonsoir de ma part. Elle m'a beaucoup manqué.

Après ces mots, le vieille homme s'en alla, traversant le seuil de cette cage d'oiseau. Les arbustes avalèrent son corps, et il se volatilisa dans les branchages enneigés. L'aura apaisante et remplie de vie disparut elle aussi avec lui.

Yoru retomba dans les tourments et alla au plus vite vers l'infirmerie pour retrouver Wyome. Il entra dans le bâtiment principal et longea les couloirs à peine éclairés par la lumière naturelle. Arrivé devant la salle, il ralentit et souffla. Des auto-portraits gigantesques d'anciens mages, accrochés au mur, le jaugeaient du regard.
Jamais il ne s'était habitué à ces yeux. A cet endroit qu'il fréquentait depuis quatre mois.

« Interdiction d'user de la magie » étaient inscrits en lettres majuscules près de la porte qu'il décida enfin d'ouvrir.

Yoru vit une femme de grande taille, droite et imperceptible, habillée d'une veste et d'un large pantalon noirs. Son chignon brun qu'elle arborait toujours sur le haut de sa tête démarquait son visage anguleux et sévère.

La directrice de l'académie.

Cette dernière menait une discussion des plus tumultueuses avec l'infirmière, dans un coin de la salle. De l'autre côté, deux jeunes indigènes étaient réunis autour du corps allongé de Wyome et l'observaient avec peine.

Le cœur de Yoru se réchauffa à cette image: les trois Pourfendeuses de l'académie de nouveau au complet après deux semaines d'inquiétude monstre.
Une d'entre elles, aux longs cheveux noirs constellés de belles plumes de faucon, pleurait à chaudes larmes en posant ses mains englobées de mana sur le plexus solaire de l'alitée, espérant pouvoir la guérir grâce à ses pouvoirs. En vain.

— Il faut qu'un chaman vienne pour la soigner madame la proviseure !

La deuxième, qui ne réagissait pas ou qui du moins semblait plus calme, fronça les sourcils puis donna une pichenette sur le front de la pleurnicharde en s'énervant.

— Ne crie pas dans ses oreilles Cheyenne, tu ne vois pas qu'elle dort ?

— Désolé, répliqua-t-elle encore plus fort en reniflant.

Wyome ouvrit subitement les yeux comme réveillée d'un cauchemar, et la plus grande aux cheveux tressés se retint de frapper ladite Cheyenne pour avoir interrompu son somme.

— Excuse-moi Nokomis ! Ne me frappe pas !

— Épargne-nous tes cris de coyote. A moins que tu ne veuilles que je hante tes nuits.

Totalement désintéressée par ces deux-là, Wyome tourna sa tête vers Yoru. Les autres qui n'avaient pas remarqué sa présence jusqu'alors, firent de même. L'enfant le pointa du doigt en le fixant de ses yeux vairons et embués. Elle semblait brisée.

— Pourquoi...Pourquoi tu as fait ça ?

Le cœur de Yoru rata un battement et il se figea à l'entrée. Qu'avait-il fait ?
Tous les regards le paralysèrent sur place alors que sa respiration se faisait de plus en plus saccadée.
Pourquoi l'accuser tout d'un coup ? Il ne comprenait pas.
Il désirait plus d'explications aux dires de la jeune fille, mais elle s'était rendormie. L'électrocardiographe bipa incessamment et l'infirmière courut vers la patiente en demandant à tout le monde de partir.

La directrice se tourna vers le garçon alors que Nokomis et Cheyenne approchaient, non sans être préoccupées. La cheffe de l'établissement leur lâcha deux trois mots que Yoru n'entendît pas, puis elles hochèrent la tête.

— Monsieur Yoshida Yoru, venez me voir dans un quart d'heure, dans mon bureau.

Sans un mot de plus, la directrice sortit de la pièce, suivie des deux Pourfendeuses de l'école. Cheyenne n'hésita pas à lui lancer des éclairs avec ses yeux, tandis que Nokomis l'ignorait tout simplement quand elle passa près de lui.
Yoru, épuisé par toute cette série d'événements, inspira et expira en desserrant sa cravate qui commençait à l'étouffer.

Pourquoi Wyome avait-elle dit cela ?

Il lança un dernier regard à l'enfant qui peinait elle aussi à respirer sous toutes ces machines. Puis, il referma la porte.
Il se retrouva de nouveau dans les couloirs obscurs, faiblement illuminés par les appliques victoriennes. 
Plongé dans ses pensées à l'image du lieu où il était, son ventre cria famine.
Il était l'heure du diner au réfectoire.
Mais l'appétit n'y était pas, une envie de vomir lui passa quand il revit les images d'une enfant mutilée, sale et saccagée, rampant dans la neige.
Il ne valait mieux pas y penser.
D'une démarche lente et hésitante, Yoru avança vers le bureau de la directrice.

Le mana, les meubles colorés et les lampes de sol aux couleurs vives, donnaient un air chaleureux à la pièce brunâtre. Mais, l'ambiance qui y régnait était tout autre.
Glaciale, intimidante.
Malgré la lumière prédominante aux quatre coins de la pièce faisant briller les trophées et autres merveilles, la face de la femme assise sur son trône, demeurait sombre. Sur le meuble central trainait un chevalet de bureau sur lequel était gravé « Nathalie Jefferson ».

— Installe-toi.

Elle indiqua du menton le siège devant elle. Timidement, Yoru s'avança et s'assit sans dire un mot. Cette chaise en bois massif  lui rappelait les chaises électriques où l'on électrocutait le condamné. La proviseure l'inspecta pendant de longues secondes et remarqua que le garçon évitait son regard.

— Lève la tête et regarde-moi dans les yeux.

Tel un automate, il s'exécuta. La femme maintînt un regard froid à son égard, tandis qu'il se retenait de détourner le sien une fois de plus.

—Où est ta broche ? Les élèves ont pour obligation de porter leur broche au sein de l'établissement sous peine de conséquences.

La fameuse broche que chaque élève arborait sur son manteau pour identifier leur appartenance à un groupe de mage. Il l'avait passé à Wyome et avait complètement oublié de le récupérer. Désormais, il n'était vêtu que de sa chemise blanche et mal boutonnée. 

Un habit incomplet était un habit incorrect.

— Madame, je...

Elle leva la main pour faire taire le garçon, ne désirant pas écouter ses excuses. Elle se leva tout en défroissant ses vêtements et se plaça devant la vaste fenêtre, dos à Yoru.

— Comment savais-tu qu'elle se trouvait dans cette forêt ? Que faisais-tu là-bas à un moment pareil ? Et comment expliques-tu les propos de Wyome à l'infirmerie ?

— Madame, tout n'était que coïncidence, j'étais en pleine épreuve de magie lorsque je l'ai retrouvé dans la forêt. Pour ce qu'elle a dit à l'infirmerie, cela ne prouve absolument rien.

— Tu n'as pas tort, mais beaucoup d'évidences incriminent ta personne. Une en particulière, répondit-elle en lui faisant face. Jamais nous n'envoyons d'élèves en épreuve dans la forêt. Alors que faisais-tu là-bas quand tu as retrouvé Wyome ?

Yoru ne répondit pas. Un courant froid traversa la pièce, et une fois de plus, il desserra le col de sa chemise. Il n'arrivait presque plus à respirer.
La directrice attendit une réponse mais ce fut le silence qui parla à sa place. Elle soupira lasse, puis annonça :

— Yoru Yoshida, Dévoreur d'Ombres, vous êtes suspecté pour la torture et la séquestration de Wyome, Pourfendeuse de Cauchemars et élève prodige de l'académie Hanton.

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