Chapitre 2

Inerita

Jour 3.
Le chaos initial est passé. Les gens en parlent encore et il y a des hypothèses. Mais on s'est tous calmés. C'est notre quotidien maintenant. C'est pire non?
Je rentre du supermarché qui a été presque vidé, toujours dans cette obscurité permanente. Pourtant il ne fait pas encore froid. C'est drôle parce que j'aime tellement la nuit, plus que le jour. Mais les gens ici ça commence à les rendre cinglés. J'entends les voisins se disputer plus que d'habitude. Sans parler des gens à la caisse tout à l'heure, qui ont commencé à s'insulter. Pour la dernière bouteille de lait. Mon sourire retombe quand à la lumière des lampadaires je vois la chevelure blonde illuminée d'Elias.
En souriant il me lance un:
-Salut.

Je marmonne:
-Salut.

Ça devient répétitif là, je lui demande:
-Je comprends pas, tu vis pas vers ici non?

-Non. C'est vers l'autre supermarché, le plus grand. Sinon ça va toi? L'éclipse te rend pas folle?

-Non pas vraiment, ça va. Toi?

Il dit: 
-Non pas trop...il y a d'autre choses trop distrayantes

Il me sourit. Maintenant je commence à comprendre, et franchement c'est surprenant et choquant. Si j'ai raison. Justement il m'informe:
-Tu sais j'ai rompu avec ma copine y'a pas longtemps.

Ok et? J'ai failli dire presque automatiquement "cool", comme si je m'en foutais. Mais c'est un peu le cas-là. Le monde ne tourne plus rond, carrément, et lui là... 
Au lieu de ça je réponds:
-Désolé.

Il rit ce qui égaye son regard, à l'air sérieux les rares fois où il ne sourit pas, avant de me dire:
-Hey tranquille. Elle est pas morte.

Hmmm. Il s'attendait à ce que je saute de joie, et me jette sur lui, pour faire je ne sais quoi? Je lui dis en bougeant:
-Je dois y aller

Il me prend un sac et le contact avec sa peau, me rend plus confuse que je le voudrais. Pourquoi je suis aussi bizarre? Il me propose:
-Laisse-moi t'aider.

-Si ma mère te voit elle sera pas contente.

Il me demande amusé:
-T'as pas le droit d'avoir des potes garçons?

Je lui dis trop sèchement:
-J'ai pas d'amis.

Je m'en vais dans un silence gênant.

***

Jour 4.
Le lendemain j'ouvre la boîte aux lettres en espérant encore recevoir mon bébé ventilo au milieu de tout ce bordel. À la place je tombe sur une note bizarre avec écrit "Inerita". C'est une belle écriture. Je réussis à décoder le message et hésite. Mais je finis par me rendre vers l'endroit indiqué. Avec ma lacrymo. Quand j'arrive au champ à côté du lycée, mon faisceau améliore ma vision d'Elias. Je lui dis:
-Tu pouvais pas trouver autre chose?

Il m'explique:
-J'avais juste ton Insta vide et tu réponds même pas dessus et y'a rien avec ton nom en ligne.

C'est une info rassurante. Je ne veux pas qu'on me retrouve. Je lui réponds:
-Mais tu connais mon adresse...

Il admet plus bas:
-Je t'ai suivi...

Eh ben. Je lui dis:
-Super

Je soupire et continue:
-Pourquoi tu voulais venir ici? Je déteste cet endroit.

Il me répond sur un ton gêné:
-Oh désolé.

Puis il sourit et ajoute en se levant:
-Je vais te montrer un endroit mieux que ça.

Je recule. Il m'a pisté hier et là dans le noir il veut que je le suive. Il me dit:
-Eh je vais rien te faire, tu me connais un peu non? Ou ta mère va te tuer? Je crois...

C'est pas vraiment le cas vu qu'elle n'est pas là et que je suis pas une gamine. Même si ça l'enchanterais pas que je sorte. En plus on m'a déjà dit que je pouvais me fier à quelqu'un avant qu'il ne me fasse des choses horribles. Elias sapproche en demandant concerné:
-Eh, ça va? Tu peux rentrer aussi. Je peux te raccompagner...ou pas.

Je ne sais pas pourquoi je vais faire ça et j'espère ne pas le regretter, mais j'ai espoir comme si je n'avais pas compris la leçon. Pourtant on m'a bien dit que je ne devais pas mettre tout le monde dans le même sac. J'éclaire à nouveau Elias et lui réponds:
-On y va.

Ses lèvres s'étirent et je lui fais un signe de tête pour qu'il se mette à marcher. Je
finis par reconnaître le chemin et lui dis:
-Si c'est l'ancienne usine, je connais déjà cet endroit. Je vivais dans la maison en travaux, juste là avant. Et j'aimais beaucoup cette maison. Le truc c'est que j'ai découvert l'usine, après avoir déménagé...désolé je raconte ma vie.

Il me sourit et je me rends compte que, j'aimerais voir ce sourire en couleur. Au lieu de ce foutu filtre sombre. Même si c'est beaucoup plus clair que dans le champ. Elias me dit de sa voix suave:
-On peut quand même y aller.

Ma logique et mon instinct de survie reviennent donc je lui réponds:
-Avec l'obscurité et les gens cinglés, vaut mieux pas y aller. Je sais même pas pourquoi je suis venue seule avec toi

Il me dit en riant:
-Vraiment?

Il monte la butte dissimulant le terrain géant abritant l'usine en-dessous et me dit:
-Aller viens, on va juste rester dans le champ de plantes bizarres

Je lui fais confiance et prends la main qu'il me tend.

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