➳ Chapitre 2-2

Mon guide m'avait emmenée à Myeongdong, un quartier purement touristique, il y avait de quoi faire du shopping à foison, entre petites boutiques et centre commerciaux à la taille démesurée, tou pour trouver son bonheur. Enfin presque, mon physique n'était clairement pas le même que celui des coréennes – et je pouvais sentir des regards curieux sur moi –, c'était donc plutôt compliqué de trouver des vêtements à ma taille, surtout au niveau des pantalons. Mais je m'étais rabattue sur des habits amples que je trouvais particulièrement stylés ou des vêtements pour hommes tout aussi charmant, à mes yeux, que ceux pour les jeunes femmes. Cela avait surpris Min-Ki au début et je l'avais vu me dévisager longuement dans les allées des boutiques, mais il s'était finalement pris au jeu, se permettant même de me conseiller certains vêtements ou me donner son avis sur d'autres. On passait un bon moment, il y avait une certaine complicité entre nous et j'en étais heureuse, j'aimais bien Choon-Hee, mais je me sentais un peu « insignifiante » à côté d'elle, elle avait l'air tellement sûre d'elle en permanence. Il alors qu'avec Min-Ki, s'était bon enfant, l'épisode stressant survenu un peu plus tôt avait été balayé de nos esprits comme si il ne s'était jamais produit.

Les bras chargés de sacs, nous nous rendions dans un restaurant du nom de « Yoogane », je faisais confiance au frère de ma correspondante, jusqu'ici, je n'avais pas été déçue. Il était aux alentours de onze heure trente, ça pouvait paraître tôt pour manger, mais apparemment si on y allait pas un peu en avance, il y avait la queue jusque sur le trottoir. Min-Ki se stoppa un instant devant un salon de coiffure, je l'imitai, et observa la photo d'un des modèles. Mon regarda passa de la photo à lui à plusieurs reprise avant que je n'oblique légèrement la tête sur le côté.

— Qu'est-ce qu'il y a ? lui demandai-je.

— Hum ? Oh non, ce n'est rien, c'est juste que ça fait un moment que j'aimerai me faire une permanente, mais j'ose pas.

Ça pouvait paraître étrange d'entendre un homme parler de permanente, mais en Corée du Sud, c'était quelque chose de parfaitement normal. Les homme prenait autant soin d'eux que les femmes, ce qui passerait pour des comportements d'efféminés en Europe était normal dans ce pays. Mon regard retourna sur la photo que je contemplai quelques secondes avant de reprendre la parole.

— Et bien si je peux me permettre de donner mon avis, je suis sûre que ça t'irait très bien. Tu devrais essayer.

Ses yeux sombres se posèrent sur moi et je vis une leur de joie, mêlée à quelque chose que je n'arrivais pas à décrypter, y briller plus fort que jamais. Un large sourire se peignit sur son beau visage et il approuva vigoureusement de la tête avant de se remettre en route, son sourire ne semblant pas vouloir le quitter. Ça me réchauffait le coeur de le voir comme ça, il avait un sourire magnifique alors il fallait le montrer. Nous arrivâmes au restaurant peu après, il y avait un peu de monde, mais encore bien assez de place pour nous, Min-Ki demanda une place pour deux personnes, on nous indiqua une table ou nous prîmes ensuite place. Ça faisait du bien de s'asseoir après une matinée aussi mouvementée. La spécialité des lieux c'était le riz et le poulet, j'espérais tout de même que ce ne soit pas trop épicé, parce que même si j'aimais bien cela, la nourriture coréenne était réputée pour être particulièrement chargée en piment. Assis l'un en face de l'autre, mon regard détaillait l'établissement, c'était plutôt sobre, mais ça avait tout de même un côté chaleureux. Terminant ma petite inspection des lieux, mon regard revint se poser en face de moi et je vis Min-Ki m'observer avec le sourire, ce qui fit légèrement chauffer mes joues.

— Hum, j'ai quelque chose sur le visage ? demandai-je en portant ma main à ma joue par réflexe.

— Oh, non, pas du tout !

Le frère de ma correspondante se mit à rougir et il détourna le regard, même si son sourire ne l'avait pas quitter, il était vraiment très mignon. Mais j'allais gâcher ce moment, il y avait quelque chose qui me trottait dans la tête depuis que nous étions partis de la maison. J'ouvris une ou deux fois la bouche sans rien dire avant de finalement me lancer.

— Dis, commençai-je un peu hésitante, ce garçon, c'est qui ?

Comme prévu, le sourire de Min-Ki mourut et le sang, qui rougissait ses joues, quitta son visage, le rendant légèrement livide. Il me fixa quelques instants en silence avant de se reprendre, il s'éclaircit la gorge avant de répondre à ma question.

— Il s'appelle Jang Tae-Oh, m'apprit-il, il vit dans la maison d'en face. Mais sincèrement, il vaut mieux que tu l'évites.

La maison d'en face.

Je me rappelai alors du soir de mon arrivée, il y avait quelqu'un qui fumait sur le balcon de la maison en face de celle des Oh. Tae-Oh sentait légèrement la cigarette, donc c'était forcément lui, les mots de Choon-Hee me revinrent eux aussi, elle m'avait adressé la même mise en garde que son cadet.

— Ta sœur m'a dit la même chose. Ce type est dangereux ?

— On peut dire ça oui, enfin tu as bien vu la réaction qu'il a eu ce matin. Je crois que c'est... une espèce de sadique, enfin je sais pas trop, il est bizarre.

— Et personne ne dit rien ? Enfin il ne se comporte peut-être pas toujours comme ça...

— Non, ce n'est pas ça le soucis, c'est juste que...

Il ne termina pas sa phrase, pourtant, je pouvais voir dans ses yeux qu'il avait envie de m'en révéler plus, mais quelque chose semblait l'en empêcher. Ce fut suffisant pour piquer ma curiosité, j'étais à ce moment-là, persuadée que quelque chose clochait avec Jang Tae-Oh, mais qu'il ne fallait pas en parler. Si je n'étais pas si respectueuse, j'aurais insisté pour en savoir un peu plus. Et puis, la mine de Min-Ki me disait qu'il valait mieux ne pas remuer le couteau dans la plaie, il semblait très mal à l'aise de parler de leur voisin. Je pris la décision de changer de sujet pour pouvoir détendre l'atmosphère.

— Ne t'en fais pas, je ne m'approcherai pas de lui. Sinon dis-moi, qu'est-ce que tu fais dans la vie ? Je veux dire, tu ne sembles pas être à l'université alors je suis un peu curieuse.

— Je suis graphiste freelance, me dit-il avec entrain, je pourrais te montrer ce que je fais si tu veux !

— Oui, j'aimerai beaucoup voir ton travail. Tu as une spécialité ou tu touches un peu à tout ?

— Je fais surtout des couvertures de romans et des sites internet, mais de temps en temps je fais aussi quelques affiches ou des choses du genre. Mais ma clientèle est surtout étrangère, avec les réseaux sociaux, c'est « plus facile » de trouver des clients.

Je hochai la tête à ses dires, il avait retrouvé tout son entrain et aimait, visiblement, beaucoup parler de ce qu'il faisait.

— Tu as vraiment l'air d'adorer ton boulot.

— Oui, ça a toujours été ma passion, même si ça ne plait pas trop à nos parents. Ils auraient probablement préférés que j'aille à l'université comme ma sœur avec un petit boulot à côté. Mais c'est pas pour moi ça, je préfère travailler tranquillement dans mon coin, ça me permet d'être un peu indépendant et ne pas avoir besoin de toujours demander à nos parents. Et toi, qu'est-ce que tu fais ?

Ah, nous y voilà.

— Moi, je ne fais rien, répondis-je avec franchise, je ne sais pas ce que j'ai envie de faire. Il n'y a rien qui m'attire vraiment pour être honnête. Donc mon frère me rabâche sans cesse qu'il faut que je travaille, que je ne peux pas rester sans rien faire de ma vie.

Je guettai la réaction de mon guide, je savais qu'en Corée le travail était quelque chose de particulièrement important, alors ce n'était pas impossible qu'il me fasse des reproches. Mais une fois de plus, Min-Ki parvint à me surprendre.

— Chuis sûr que tu trouveras ce qui te plait un jour, je ne m'en fais pas pour toi. Au pire, je pourrai t'apprendre le graphisme, qu'est-ce que tu en dis ?

Je restai muette. C'était si surprenant que j'en avais la chique coupée, peut-être que je me faisais trop d'idée sur les coréens au final ou alors Min-Ki était tout simplement le mec parfait. En soixante-douze heures, je ne lui avais trouvé aucun défaut, même pas un tout petit truc, je ne pensais pas que ce genre de personne pouvait exister. J'eus un léger rire avant de me frotter la nuque comme pour masquer le léger moment de blanc que j'avais imposé.

— Oui, peut-être bien que ça me plaira, dis-je avec un léger sourire.

— Je rendrai ça amusant pour être sûr que ça te plaise ! Et qui sait, si c'est le cas, on pourra peut-être monter une boîte ensemble, qu'est-ce que tu en penses ?

— Oh là, doucement, il faudra déjà voir si ça me plait, on parlera de s'associer ensuite.

Il me fit un de ces sourires rectangles dont il avait le secret, ce qui étira un peu plus mon propre sourire. Oui, ce garçon, était parfait.


▪▪▪▪▪▪▪▪▪▪▪▪▪▪▪

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top