𝙾𝚜𝚖𝚘𝚜𝚎

Lorsque son réveil sonna, Izuku ne put réprimer un grognement. Encore groggy de sommeil, il enfouit sa tête dans son oreiller, dans l'espoir d'atténuer le bruit strident qui résonnait dans sa chambre, et qui l'agressait littéralement après sa nuit passée bien trop rapidement à son goût. Il aurait tellement voulu profiter du confort de son lit encore un peu, quelle idée avait-il eu de mettre un réveil un samedi... Alors qu'il s'insultait intérieurement pour ce geste, brusquement, tous les souvenirs de la veille resurgirent dans son esprit encore brumeux, lui faisant ouvrir les yeux en grand.

Il avait rendez-vous avec Katsuki.

Cette simple pensée suffit à le faire se redresser d'un seul bond, si vite qu'il en fut étourdi pendant quelques secondes. Perdus quant à ce qu'il devait faire, il tourna finalement la tête vers la table de nuit où trônait son téléphone, toujours en train de sonner d'ailleurs. Il se saisit de cet objet de malheur, et soupira de soulagement lorsqu'il le fit enfin taire. Par réflexe, il cliqua directement sur l'icône de sa messagerie. Il devait vérifier. Vérifier qu'il n'avait pas rêvé, qu'il avait vraiment passé la soirée à discuter avec Katsuki et qu'il l'avait bel et bien invité à boire un verre aujourd'hui, vérifier que tout ceci n'était pas encore un fantasme élaboré par son subconscient. Un sourire incontrôlable illumina son visage lorsqu'il vit son nom dans son fil de discussions, et ses joues prirent une jolie couleur rosée lorsqu'il relut les derniers messages de leur conversation, ceux où le blond lui donnait rendez-vous. Il jeta un coup d'œil au cadran.

"12h47. Tout va bien, j'ai encore le temps."

Il établit alors une liste de priorités. Vu l'état d'excitation dans lequel il se trouvait, s'il ne reprenait pas rapidement ses esprits, il n'y arriverait jamais. Un café, une douche, choisir des vêtements convenables. Mon Dieu, qu'allait t-il mettre ? Et ses cheveux ? Qu'allait-il bien pouvoir faire de sa tignasse ? Il fonça dans la salle de bain, pour constater les dégâts, et effectivement, la bataille s'annonçait rude. Dépité d'avance, il se passa un peu d'eau sur son visage marqué des stigmates du manque de sommeil pour tenter d'en chasser la fatigue, et se dirigea vers sa cuisine pour boire un café, qui ne serait définitivement pas de trop. Une fois la machine lancée, alluma également la télévision, pour se créer un fond sonore, puis récupéra sa tasse à présent pleine pour prendre sa place habituelle, sur la petite terrasse. Elle n'était pas grande, mais lui suffisait amplement, lui offrant une vue agréable sur la vie alentour. Profitant de la chaleur de sa boisson, il regardait distraitement les passants profiter de cette belle journée, imaginant mille scénarii sur son après-midi, ne réalisant toujours qu'à moitié à quel point une seule soirée de messages échangés avait pu à nouveau chambouler son cœur et son esprit.

Alors qu'il rêvassait, le bruit d'un klaxonne le fit revenir sur terre, réalisant que s'il voulait effectivement que ce rendez-vous ait lieu, il allait devoir se dépêcher un petit peu, car s'il ne devait retrouver Katsuki qu'à quatorze heure trente, il est hors de question qu'il soit en retard.

C'est précisément cinquante-trois minutes plus tard, dont un bon quart d'heure à batailler pour tenter de se coiffer, pour finalement abandonner soit dit en passant, et un autre passé devant sa penderie à remettre tous ses goûts vestimentaires en question, qu'il fut fin prêt. Il avait bien failli annuler une ou deux fois, le stress prenant doucement le dessus au fur et à mesure que l'heure avançait. Mais au final il était là, devant sa porte, à peu près satisfait du reflet que lui renvoyait le miroir de son entrée. Il vérifia une dernière fois qu'il n'avait rien oublié, que ce ce soit ses clefs, son téléphone ou son courage, car il en aura définitivement besoin, et souffla un grand coup en refermant la porte derrière lui.

C'est les mains moites et le souffle court qu'il arriva finalement au petit café où ils devaient se rejoindre. Au premier abord, l'endroit semblait charmant. La devanture était fleurie, les quelques tables de la terrasse étaient baignées de soleil, et malgré le monde qu'il y avait, ils n'auraient sûrement pas trop de mal à trouver une place. Mais à cet instant, Izuku était bien loin de s'inquiéter pour ça. Il avait bien autre chose en tête. Et cette chose était un certain jeune homme blond qui accaparait ses pensées depuis maintenant bien trop longtemps. L'idée de le revoir dans quelques minutes le faisait bouillir de l'intérieur. Ce mélange d'appréhension et d'impatience qui l'envahissait lui donnait réellement l'impression d'être une cocotte-minute sur le point d'exploser d'une seconde à l'autre.

Au moment où il voulut fouiller sa poche pour prendre son téléphone, il entendit distinctement la voix chaude se Katsuki par-dessus l'agitation qui l'entourait.

"Bonjour Izuku"

Relevant la tête d'un coup sec, il fut directement happé par ce regard qui lui avait tant manqué, ces iris si caractéristiques dans lesquelles il ne pouvait, même avec la meilleure volonté du monde, que se noyer.

"Bon-Bonjour Katsuki", babilla-t-il, râlant intérieurement contre lui de ne plus être apte à prononcer deux syllabes correctement.

Katsuki lui sourit, sûrement amusé de la maladresse dont il faisait preuve, mais Izuku était bien trop absorbé par l'homme en face de lui pour s'en offusquer. Il était beau. Tellement beau. Il n'en n'avait jamais douté, mais désormais débarrassé de son masque, il pouvait en prendre pleinement conscience. S'il avait eu du mal à décrocher son regard de Katsuki le soir de la fête, la tâche ne serait définitivement pas plus aisée aujourd'hui.

Ayant perdu le fil des secondes qui s'égrainaient inéluctablement, c'est le blond qui reprit la parole, lui souriant toujours, en indiquant le café d'un mouvement de tête.

"On y va ?

— Oh oui, bien sûr, je te suis !"

Tandis qu'ils marchaient les quelques mètres qui les séparaient d'une table libre, Izuku ruminait sa honte en regardant ses pieds. Ça ne faisait même pas cinq minutes qu'il étaient ensembles qu'il avait déjà perdu une bonne partie de ses moyens. Heureusement que le ridicule ne tuait pas. Il était définitivement plus facile de tenir une discussion par écrans interposés qu'en devant affronter son regard de braise, à son grand désespoir.

Assis à une petite table en bout de terrasse, Izuku cherchait désespérément quelque chose à dire pour lancer la conversation. Il s'était tellement interdit ne serait-ce que d'imaginer revoir Katsuki un jour, qu'à présent devant le fait accompli, il ne savait plus où se mettre. En face de lui, le blond le regardait fixement, ne semblant pas le moins du monde gêné du silence qui s'éternisait, faisant par là même augmenter son rythme cardiaque d'une manière incroyable. Raclant sa gorge une fois, puis deux, c'est finalement le serveur venu prendre leur commande qui, en attirant l'attention du blond, lui accorda quelques secondes de répit.

"Bonjour messieurs, vous avez fait votre choix ?"

Sans surprise, ce fut Katsuki qui répondit en premier.

"Un café frappé pour moi, s'il vous plaît, et..."

Il laissa sa phrase en suspens en posant une nouvelle fois son regard sur Izuku, ce qui le fit paniquer de plus belle lorsqu'il réalisa qu'il n'avait absolument aucune idée de ce qu'il allait commander.

— Et.. euh.. un thé glacé pour moi ! Merci beaucoup !"

Même commander une simple boisson devenait une réelle épreuve de force. Il en était certain, il ne sortirait pas vivant de ce rendez-vous, il serait mort de honte bien avant ça.

Il observa le serveur qui s'éloignait en triturant ses mains, puis posa son regard sur ces dernières, devenues tout à coup tout à fait passionnantes.

"Je suis heureux de te revoir. J'espère que tu ne regrettes pas d'avoir accepté mon invitation."

C'était à présent la culpabilité, plus que la honte, qui commençait à grignoter peu à peu l'esprit d'Izuku. Non, grand Dieu non, il ne regrettait pas. Il était simplement aussi stressé que s'il devait sauter dans le vide, mais regretter, ça, jamais. Il releva alors la tête, et planta son regard dans les rubis de Katsuki, dans lequel il fut surpris d'apercevoir le voile d'une sincère inquiétude.

"Oh non, non absolument pas, dit-il en levant les mains devant lui, comme pour appuyer ses paroles. C'est même tout l'inverse.. Je suis tellement nerveux, c'est à moi de m'excuser si mon comportement te semble étrange..

— Les messages étaient bien plus faciles hein ? répondit Katsuki, son sourire malicieux à nouveau greffé au visage.

— Je ne te le fais pas dire.." souffla Izuku.

Ils se regardèrent pendant quelques secondes jusqu'à ce que Katsuki brise ce petit silence avec un gloussement moqueur, aussitôt rejoint par le rire franc et mélodieux d'Izuku, dissipant instantanément toute l'anxiété qui l'étouffait depuis le début de leurs retrouvailles. Ils passèrent un long moment au café, désormais libérés de cette première approche maladroite. Ils passèrent d'un sujet à un autre, approfondissant leurs discussions de la veille, en engageant de nouvelles, et cela pendant quasiment deux heures, sans que ni l'un ni l'autre ne voit le temps passer, chacun appréciant simplement le fait de découvrir la personne en face de lui.

Ce n'est que deux boissons plus tard qu'ils décidèrent de passer à la suite du programme prévu par Katsuki. Comme convenu, il allèrent dans le parc non loin du café, pour continuer d'apprendre à se connaître, tout en se dégourdissant les jambes et en profitant de cette superbe journée, pour finalement ne se séparer qu'au moment où le soleil commençait à tirer sa révérence derrière les buildings de la capitale. C'est galvanisé par la fantastique après-midi qu'ils avaient passé qu'Izuku entama en premier les au revoir, non sans un pincement au cœur, il devait bien l'avouer.

"Merci pour cette après midi, c'était vraiment agréable. J'espère qu'on pourra se revoir bientôt, si tu le souhaites bien sûr.."

Le blond devant lui plongea son regard dans le sien, avec ce sourire en coin qui faisait battre le cœur d'Izuku un peu plus vite qu'à l'accoutumé, bien malgré lui.

"Je ne comptais pas vraiment te laisser le choix."

C'est alors que Katsuki, sans crier gare, se pencha et posa ses lèvres sur la joue d'Izuku. Ce dernier, les joues aussi rouge que les yeux du blond, sentit soudain tout son corps s'ébranler, frémissant sous la douceur de ce geste qui le chamboula du bout des pieds jusqu'à la pointe de ses cheveux.

"A très vite Izuku", glissa le blond, fort de son petit effet, en s'éloignant de lui.

Incapable de dire un mot, c'est avec un sourire béat sur le visage qu'il le salua de la main, seul geste que son corps accepta de faire, encore envahit par un émoi bien trop soudain pour lui.

"Oh oui, je l'espère Katsuki.."

Ce n'est que lorsque la silhouette du blond disparu dans la foule qu'il se décida lui aussi à rentrer. Tout à coup en proie à un sentiment d'urgence irrépressible, il n'avait qu'un objectif, appeler Shoto. Il devait lui dire. Il en crevait d'envie. Et puis, c'était grâce à lui que tout cela avait été possible, il n'y avait donc personne de mieux placé que son meilleur ami pour comprendre et partager l'état d'euphorie dans lequel il se trouvait.

Enfin chez lui, il se débarrassa de ses chaussures, sortit rapidement une bière fraîche de son frigo, s'empara de son téléphone et s'installa sur son canapé, fin prêt à l'appeler. Il resta un long moment au téléphone, lui racontant la discussion par messages de la veille, sa nuit si apaisée, le rendez-vous, et bien sûr, les au revoir qui lui avaient bouleversé le cœur et l'esprit. Puis, après un bon quarante-cinq minutes à se confier sur toutes les émotions qui l'avaient traversé ces dernières vingt-quatre heures, un détail, et pas des moindres, lui revint soudain en mémoire.

"Au fait Sho, je voulais.. Je voulais te remercier, parce qu'avec tout ça, je n'ai même pas pris le temps de te le dire.. Si tu n'avais pas eu le courage qui m'a manqué pour le retrouver, tout ça, quoique ça puisse être, ça n'aurait jamais pu arriver.

— Le retrouver ? Comment ça ?

— Eh bien, si tu n'avait pas cherché à le contacter pour lui donner mon numéro, je ne l'aurais jamais fait moi même et-

— Mais Izu, je.. Je n'ai jamais cherché à retrouver Katsuki. C'est lui qui m'a envoyé un message.

— Hein ?" répondit Izuku, tout à coup droit comme un "I" dans l'assise de son sofa. "Comment ça ?

— Il ne t'as rien dit ? C'est lui qui m'a demandé si je pensais que tu serais d'accord pour qu'il te contacte. Apparemment il avait tout aussi envie de te revoir que toi. Et vu l'état dans lequel tu étais... Tu sais, tu as changé depuis cette soirée. Tu étais maussade, t'avais perdu le sommeil, ta joie de vivre.. Tout ce qui fait que tu es toi. J'avais l'impression de te voir dépérir à petit feu, je te jure. Je me suis tellement inquiété. Et têtu comme tu es, tu refusais de m'écouter quand je te parlais de lui, en me répétant à chaque fois que vous étiez trop différents, que jamais il ne pourrait s'intéresser à, je cite "un petit journaliste minable comme toi". Et pourtant je l'ai vu, j'ai vu la manière dont il te regardais, même si ce n'est que quelques minutes, et surtout, je te connais. Alors quand il m'a demandé ça, je dois avouer que je n'ai pas vraiment hésité et lui ai directement donné ton numéro. Et vu ce que tu me dis aujourd'hui, je ne regrette pas le moins du monde.

— Alors.. Ça voudrait dire que-

— Que depuis tout ce temps ce Katsuki mourait autant d'envie que toi de te revoir ? T'en a la preuve non ?

— J'aurais jamais pensé que... jamais... jamais j'aurais imaginé qu'il puisse vouloir..., marmonna-t-il, alors qu'il commençait à maltraiter nerveusement l'étiquette de sa bouteille, vide depuis longtemps, avec sa main libre.

— Et qu'est ce que tu vas faire ?

— Je n'en ai aucune idée..

— Tu vas arrêter de le voir ?

— Quoi ? Non bien sûr que non ! Pourquoi ?! Tu crois que je devrais ?

— Non Izu, au contraire, se moqua gentiment Shoto à travers le combiné, mais maintenant, au moins, tu sais ce dont tu as vraiment envie.

— C'était un coup bas ça Sho, même venant de toi.

— Je suis une personne horrible, tu devrais le savoir, pouffa-t-il, fier de lui. Mais plus sérieusement, qu'est ce que tu comptes faire ?

— Je ne sais pas je-

— Non, attends, laisse moi reformuler : qu'est ce que ton cœur te dit de faire ?

— Je..." commença-t-il, réfléchissant sérieusement à la question. Mais finalement, tout son être ne lui criait qu'une seule et même réponse. "Je veux le revoir Sho. C'est absurde, et complètement fou, mais je veux absolument le revoir.

— Ça n'a rien d'absurde. Je t'aurais torturé jusqu'à ce que tu craques et que tu l'appelles si tu m'avais dit le contraire de toute façon.

— Je réitère, tu es un monstre."

Le rire de son meilleur ami décontracta instantanément ses épaules, et il prit une grande inspiration, comme s'il avait arrêté de respirer depuis bien trop longtemps, sans s'en rendre compte.

"Tu sais avec tout ce que tu me dis par rapport à Katsuki, je peux pas m'empêcher de penser que t'es en train de tom-

— Non, non non non, s'il te plaît Sho, je pense avoir eu assez de révélations pour aujourd'hui, je préfère ne pas y penser.

— Quelle tête de mule.. Comme tu voudras, mais tu ne me l'enlèveras pas de la tête ! répondit Shoto sur un ton taquin.

— Et après c'est moi qui suis têtu, rigola Izuku. Passe une bonne soirée Sho, on se voit vite !"

C'est sur cet échange qu'il mit fin à l'appel, un sourire non dissimulé greffé au lèvres.

Alors comme ça, tout cela était à l'initiative de Katsuki ? Il se pourrait donc qu'il ne soit pas fou ? Qu'il n'ait pas juste fantasmé toutes ses sensations, tous ces sentiments qui le submergent et font faire des montagnes russes à son cœur ? Ce pourrait-il que Katsuki ressente la même chose envers lui ?

Qu'est ce qu'il ressentait d'ailleurs ? Il ne voulait pas mettre de mots dessus, il en avait bien trop peur. Il préférait se conforter dans l'étreinte rassurante du déni, bien moins effrayante. Alors bien sûr, il se doutait, la chaleur dans son ventre étant bien trop forte et explicite pour qu'il n'y pense pas, mais donner un nom à cela rendait les choses bien trop concrètes, et le confrontait à une désillusion bien trop douloureuse, si cette dernière n'était pas partagée. Alors il avait simplement fait le choix de profiter. Profiter de cette chaleur, de l'euphorie s'emparant de son corps en la présence de Katsuki, et ce, à chaque fois qu'il le pourrait. Une décision certes dangereuse pour son esprit, mais affreusement nécessaire à son cœur.

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