Me réveillant en sursaut, j'eus du mal à identifier l'endroit où je me trouvais, ce fut seulement quand je vis les livres qui m'entouraient que je me rappelai ma position. J'avais surement dû m'endormir en lisant. Naima devait déjà être en train de me chercher dans tout le château. Ayant laisser mon téléphone dans ma chambre, je n'avais aucun moyen de la contacter, elle allait devoir se contenter de m'attendre.

Les fêtes de la veille ne tardèrent pas à ressurgir dans mon esprit comme un lointain souvenir. Je ne reverrais surement jamais Hélios, ce qui n'était pas si mal. Ce garçon avait beau être charmant, il restait tout de même étrange. Je doutais d'ailleurs du fait qu'il ait été invité a cette soirée.

Soudain, la porte de la bibliothèque s'ouvrit, me faisant sursauter, laissant tomber le livre que j'avais sur mes genoux. Je ne fus pas étonné de voir arriver Laurie, habillé d'un simple jogging et d'un pull gris en guise de haut.

—  Je leur ai dit que tu serais là !

Surprise, je le regardais, un peu mal à l'aise, consciente que je devais avoir la tête du réveil, ce qui n'était pas très glamour.

—  Ton frère, Naima et moi te cherchons depuis trente minutes ! s'exclama-t-il en reposant le livre que j'avais fait tombé dans l'allée.

En me levant, je me souvint que la robe que j'avais sur moi était toujours la même depuis hier soir, et je n'étais toujours a a l'aise dedans. J'enviais le jogging de Laurie. Je portais d'ailleurs rarement des pantalons, c'était "inconvenable" pour une princesse. Mais quand je sortais en douce en ville avec lui, je n'hésitais pas une seconde à troquer mes robes pour des pantalons. C'était bien plus confortable, et puis peu importe le protocole, mes parents n'étaient plus là pour me le reprocher, et mon frère...

Laurie me regarda de ses grand yeux et dit :

—  Tu devrais aller voir ton frère... pour tu  sais... discuter ?

—  Je n'ai aucune envie de discuter avec lui. Qu'il retourne baratiné la duchesse de Nether en complotant ses prochains massacres, répondis-je en sortant de la bibliothèque sans même attendre Laurie.

—  Tu sais bien qu'il fait ça pour protéger le royaume...

Sans répondre, je me dirigeai vers ma chambre pour me changer et prendre un bon bain. Thésée attendra. Ma robe frôlait le sol du  couloir, et à coté de moi Laurie regardait par les fenêtres l'extérieur en me suivant.

—  D'ailleurs, hier je m'occupais du buffet pour aider mon père et je t'ai vu danser avec ce garçon...

—  Je vais prendre un bain ! Préviens Naima, qu'elle arrête de s'inquiéter ! déclarais-je pour changer de sujet en entrant dans la salle de bain de ma chambre.

J'entendis Laurie pester un "Tu ne fuiras pas le sujet !".

Je savais bien qu'il n'allait pas lâcher l'affaire, mais là ce n'était pas le moment.

Ma salle de bain était plutôt grande ; la baignoire en marbre blanc était surement l'élément le plus beau de cette pièce. Une télé y avait été installée, me permettant de suivre l'actualité même depuis mon bain, mais je préférais bien mieux regarder une film ou des dessins-animés. Laissant l'eau couler dans la baignoire,  je me mis à retirer avec difficulté ma robe. Une fois la tonne de tissu retiré je pris la mousse de bain et en mis dans l'eau que j'avais coupée, entrant doucement dans l'eau, je m'adossai à la baignoire.

La mousse du bain dégageait une odeur de rose qui me chatouillait les narines, j'avais envie de rester là pour toujours. Pas de responsabilité, juste moi.
La mousse chatouillait ma peau quand je me penchai pour attraper la télécommande étanche de la télé. Une fois allumée, je me rassis contre la baignoire en mettant la chaîne d'info du royaume. La plupart du temps elle diffusait en boucle les mêmes choses, et là je n'étais pas étonnée de tomber sur le témoignage d'un habitant sur les violences faites lors des tensions qui avait eu lieu hier. Je ne voulais pas écouter mais je voulais en savoir plus. L'homme âgé d'une trentaine d'années se disait libraire à la frontière du royaume. Il décrit d'abord les mots qu'avaient utilisé les deux groupes de soldats, puis les coups avaient commencé à voler.

Je détestais cette violence.

Soudain, l'homme fut coupé. La présentatrice annonça le discours du roi de Caelfall. Je savais que pour ce genre de discours, les chaîne stoppaient tout pour écouter et retranscrire en direct.
M'enfonçant plus dans mon bain j'étais inquiète, pour le royaume et pour mon frère. Peut-être allait-il simplement dire que c'est de notre faute et que c'étaient les soldats d'Eddilas les fautifs. Le rois de Caelfall est un grand homme brun au regard noir cerné. Il était intimidant et charismatique, rien que mon frère n'ait encore vraiment acquis. Je ne lui avais jamais parlé, et heureusement, car il me faisait peur. Je me demandais d'ailleurs comment sa femme faisait pour vivre avec un homme pareil. Il avait deux enfants, une fille et un garçon, la fille étant née avant il lui fallait un garçon pour le trône. J'avais entendu dire qu'elle était traitée comme une domestique. Ce n'étaient que des dires mais j'avais le sentiment incertain que c'était sûrement vrai. Une femme dans un royaume d'hommes n'était rien.

Voilà pourquoi Maia me fascinait tant.

La caméra se posa sur le roi, assis à son bureau, une pile de feuilles à côté de lui. Il avait le visage fermé et son costume était parfaitement ajusté.

« J'ai deux informations à vous communiquer aujourd'hui » commença il sans même une politesse.

M'enfonçant encore dans mon bain je mordis ma lèvre, attendant qu'il parle.

« La première concerne ce petit conflit qui a eu lieu aux frontières de mon royaume et celui d'Eddilas. Bien-sûr, je n'ai rien à reprocher à mes soldats, ils n'ont fait que se protéger face à l'attaque de ces incompétents. »

Poussant un soupire, j'imaginais déjà l'état de mon frère.

« ... voilà pourquoi je ne m'excuserais pas et je ne dirais rien de plus à ce sujet, la responsabilité revient au gamin qui dirige cette armée » continua il cachant un léger sourire.

Thésée n'avait que dix-neuf ans, comme moi, et le roi de Caelfall en riait bien. Pour lui mon frère n'était pas fait pour ça et était simplement une porte ouverte pour détruire notre royaume.