𝟏.









𝐸𝑡 𝑗𝑒 𝑛𝑜𝑢𝑠 𝑟𝑒𝑣𝑜𝑦𝑎𝑖𝑠
𝑑𝑎𝑛𝑠𝑒𝑟 𝑠𝑜𝑢𝑠 𝑙𝑎 𝑝𝑙𝑢𝑖𝑒...




Je détestais ça, mais tu m'emportais toujours pour une valse. Quelque soit le temps, quelque soit l'humeur, nos pieds vaquaient sur ton balcon. La vue était étourdissante et chagrinante, non par la hauteur mais par ce coin qui symbolisait également le seul lieu de notre ferveur. Notre unique nid d'amour. Les briques de l'immeuble d'en face était le seul paysage qui nous dévisageait, je détestais. Toi, tu ne voyais que le bon coté. Et quand du positif t'altérais et bien je ployais. Je laissais ma vison s'élargir au-delà de l'horizon pour emprunter ton regard et éprouver ton constat.

Personne ne pouvait nous voir, effectivement, interrompre nos rires et deviner l'adulation qui unissait nos âmes. C'était vrai. Je me rends compte maintenant, des années plus tard. On en avait eu de la chance. Même la pluie qui débordait des nuages se formaient comme des petits astres sur nos visages. Illuminant nos pas, bénissant nos ballets, elle rendait glissante notre piste secrète de toute protestation, et chatouillait nos tissus froissés par nos baisers pressés de tendresse.

On avait été à l'abris des orbes en défaveur de notre passion languissante, à l'abris des démons qui nous charbonneraient s'ils devinaient ne serait-ce le tiers de la délicatesse logée dans nos rétines rougies. On valsait d'ailleurs sous les disques de ton voisin de l'étage d'en dessous. Celui qui avait compris, mais qui n'avait rien dit. Dépourvues de mélodies joyeuses, sans le savoir, notre clément allié nous avait préparé aux notes finals de notre si malheureuse tragédie.

Trop insouciant pour te préoccuper de ses horreurs, pour toi, le plus important était ma posture. Le dos droit, tu t'emportais parfois. C'était les seules fois où tu daignais à élever la voix. Pour me dire de me tenir, de danser mieux, de prendre plus au sérieux le rôle du fabuleux cavalier. Je claquais la langue à chaque fois que tu me sermonnais, mais je procédais toujours à accroître mes efforts pour voir ton sourire engouffrer tes joues. Tu tenais à ses danses, à me faire virevolter. Et moi je tenais à ton allégresse, à te faire sentir comblé.

Cessant de trouver justifications à mesure du temps, toutes les raisons avaient été bonnes pour nous faire tourner sous le ciel cimmérien. Tu me prenais la main pour me serrer contre toi sans occasion spéciale. Malgré tout et rien, il te fallait cette danse, il te fallait nicher ton esprit brisé au creux de mon cou. Même le jour avant ton engagement à l'armée, même celui de ton retour où tu avais pleuré avec l'orage. Et surtout le moment où tu avais pris que ta famille avait été victime des bombes. On avait dansé sous les lumières de la lune, des étoiles de ta rétine et les feux de mes pupilles.

Parfois, le sentiment que tes larmes s'échouent encore sur ma peau me fait frissonner.

Alors que tu avais vécu tes pires années sans ma compagnie, j'avais échappé à la guerre, fuit le combat à l'abri avec mes pairs. Je me rappelle que tu avais pris ce destin comme une bénédiction, reconnaissant que j'échappe à ton funeste voyage à tel point de t'oublier toi et le sort qui patientait au coté de la faucheuse. Écrivant des lettres, moi, je me souviens encore de ce conflit interne qui m'avait calciné les nerfs. Te visualisant déjà assoupi dans une tombe, j'avais voulu prendre les armes pour t'assurer la vie, mais j'avais voulu aussi te faire poésie pour que ton âme ne soit pas évanouie. Si la mort t'avait déjà trouver, quelqu'un devait se rappeler de toi, quelqu'un devait témoigner de ton sourire et le timbre de ta voix. Et si ce n'était pas moi comment pourrais-je être considéré comme tien ?

Donc j'avais écrit. Écrit jusqu'à que les mots peines à sortir, que les combinaisons de mon amas de syllabes soient acculées par mon envie de t'entendre rire. Pour toi, pour moi. J'avais tout décrit, tout ce que je pouvais décrire. Tout ce dont je devais me souvenir.

Et un jour, on s'était retrouvé après la guerre comme si tous ça n'avait été qu'un cauchemar et que notre séparation n'avait duré qu'un acte de théâtre. Je me rappellerai toujours de l'air qui avait insufflé mes poumons lorsque j'avais aperçu ta chevelure carminée. Comme si cela avait fait des mois, sans me rendre compte, que je n'avais pas laissé d'oxygen abreuver mes orifices, j'en avais été retourné. Notre amour en était ressorti plus grand, même si tes sourires, eux, furent différent.


Ensuite on s'était remis à danser, doucement et toujours sur ton balcon. Ton voisin n'avait pas survécu, alors on fredonnait ensemble. Tu boitais après la guerre, et tu aimais dire que si tu chantais mal que c'était à cause de ça. Menteur, tu n'avais jamais chanté une seule fois juste.



Et un autre jour, malgré les discordes qui tortionnaient déjà notre amour, j'avais réellement débuté notre cataclysme. J'avais repoussé ce moment jusque la culpabilité elle-même me fasse vomir, tordre le ventre et égruger l'âme. Je me souviens t'avoir embrassé trop de fois, beaucoup de fois. Et tu t'étais rendu compte de mon mal-être, tu avais vu dans mon regard ce que j'avais tenté de te dissimuler. Qu'est-ce qu'il y a, Katsuki ? tu m'avais alors chuchoté.

J'avais continué à tourner, et tu t'étais laissé emporter. Je voyais dans tes yeux que tu voulais aspirer mon chagrin. Mais ce fut au moment où je m'étais finalement exprimé que j'avais entamé le tien.

« Ils veulent que je me marie. »

Et tandis que tes yeux avaient écrié leur sentiment blessé, tu m'avais juste souris pour me consoler. C'est rien, tu m'avais rassuré.






Mais tu t'en souviens, n'est-ce pas ? On ne s'était plus jamais remis à danser après ça.

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