Cʜᴀᴘɪᴛʀᴇ 9 - ᴶᵃᵈᵉᶰ - Année 1940

♫ : Soap&Skin - Me and the devil

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Chapitre 9
Point de vue de Jaden

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Année 1940.

Je suis né orphelin. Mes parents n'ont visiblement jamais voulu de moi. Je ne les ai jamais connus et je ne sais même pas leurs noms.

J'ai vécu l'arrivée d'Hitler en 1933 en Allemagne et même sa montée en puissance avant l'année précitée.

Je n'ai jamais vraiment adhéré au parti nazi. Cependant, comme tous les Allemands, j'y suis obligé sous peine d'être un traître de la Nation.

J'ai appris à me fondre dans la masse et à simplement obéir pour survivre. Leurs idéaux sont ancrés en moi, et bien que je ne les partage pas tous, je suis contraint de faire semblant.

Enrollé de force, j'entre avec les miens dans la ville de Paris que nous enhavissons - ou plutôt que nous occupons d'après l'accord conclu avec le Maréchal Pétain. Nous avons fières allures avec nos véhicules, nos drapeaux  et le nombre de nos soldats. C'est une démonstration de puissance.

Lorsque j'apprends que je vais loger chez une famille française avec d'autres, je m'y dirige alors avec ma valise à la main qui contient le strict nécessaire.

Je frappe à la porte d'entrée et celle-ci s'ouvre rapidement sur un homme avec des lunettes, les cheveux noirs et gris un peu dégarnis. Une femme avec des cheveux roux, que je suppose être son épouse, se tient derrière, un peu inquiète.

Bonjour. Nous sommes bien chez la famille Kirschen ?

Oui, pourquoi ?

Nous réquisitionnons votre maison, expliqué-je en tendant les papiers officiels.

Il s'écarte doucement de l'encadrement de la porte afin de nous laisser passer. Nous nous présentons tous brièvement.

L'accueil est plutôt froid mais poli des deux côtés. Le foyer se compose d'un homme, Jarod, avec son épouse nommée Anabelle, d'une fille appelée Rachel et de deux fils André et Joseph.

Le domaine ne contient pas suffisamment de chambres alors le plus grand des deux gars me cède la sienne, même si cela se voit qu'il n'en est pas ravi. Je ne peux cacher mon sourire amusé.

Il m'accompagne jusqu'à la dite pièce et se dépêche de reprendre ses vêtements de l'armoire en bois ainsi que ses livres dans sa bibliothèque, afin de la débarrasser. Je pose en attendant ma valise sur le lit et l'ouvre, prêt à m'installer.

***

Les Kirshen sont restés discrets un moment. Lors du recensement obligatoire des Juifs, nous apprenons qu'ils en font partie.

Cela me choque un peu, je dois le dire. On m'a inculqué que les Juifs sont des voleurs et profiteurs. J'ai donc un apriori... Cependant, ils n'ont pas l'air d'être si mauvais, eux.

Le sous-lieutenant Hans Hoffman, qui vit également sous ce toit, a quant à lui un regard horrifié. S'il pouvait, il les tuerait sur le champ ; mais ce n'est pas mon cas.

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C'est en sortant d'un bâtiment réservé aux nazis, là où se trouve mon bureau désormais officiel - même si je travaille aussi un peu dans la demeure des Kirshen puisque j'ai aménagé un espace dédié dans la chambre-, que j'aperçois une foule de personnes dans la rue.

Inquiet, je m'y dirige presque en courant, mais prudemment, car je ne sais pas ce que je vais y trouver. Après m'être faufilé entre les personnes, je découvre enfin ce qu'il se passe.

Je suis presque choqué d'y voir André, attaché et torse-nu en train de se faire battre sous les ordres d'Hoffman. Le premier soutient le regard du deuxième. Le plus jeune ne manque pas de courage face au soldat Allemand mais il est fou de l'affronter ainsi.

Je fais signe pour que tout ceci cesse et pose une question afin de comprendre tout ce remue-ménage. J'apprends alors la petite manigance, la punition...

Poursuivez, relancé-je alors l'ordre de continuer.

Je ne peux que choisir cette option. Il faut montrer l'exemple aux habitants récalcitrants. Nous ne devons pas nous montrer faibles.

Je préfère en outre diriger ce châtiment et en contrôler afin d'éviter que le sous-lieutenant fasse pire. Je ne souhaite aucun débordement. Nous avons eu des directives très claires en arrivant en France : ne pas semer de troubles importants et se comporter correctement.

***

Tu es muté ailleurs, Hoffman, annoncé-je calmement.

Il attrape le mot que je tiens, en me l'arrachant des mains tout en me lâchant un regard noir au passage.

Comment est-ce possible ? Je n'ai rien fait ! Conteste-t-il.

Tu commences à te faire trop remarquer. Et les ordres sont les ordres.

Je suis certain que c'est de ta faute ! M'accuse-t-il de manière agressive.

Il se pourrait en effet que j'ai envoyé une lettre à quelqu'un de haut placé... Commencé-je, un peu pour le narguer.

Il se jete sur moi pour me frapper, complètement énervé mais je l'en empêche. Je lui attrape le col pour le menacer.

Ce n'est pas pas en aggravant la situation qu'elle va s'arranger. Maintenant, calme-toi et prépare tes bagages.

Reculant après que je l'ai lâché, il me fusille des yeux. Je ressens toute la haine en lui envers moi. Il m'en veut. Cependant, il est trop dangereux pour rester.

Je me vengerai. Je t'en fais la promesse,  me crache-t-il méchamment avant de partir.

Je n'ai pas peur de lui. Il n'a jamais eu suffisamment de couilles pour se faire respecter par qui que ce soit. Et puis, il me doit le respect car je possède un grade militaire plus élevé.

***

En dîner avec d'autres soldats Allemands pour des affaires, de belles jeunes femmes nous accompagnent et ne réclament que notre attention - sans doute espèrent-elles des faveurs notamment du pouvoir et de l'argent.

Pourtant, lorsque je remarque la présence d'André Kirshen dans le restaurant, je ne peux m'empêcher de le fixer, complètement distrait des discussions qui m'entourent. Je le trouve fascinant lorsqu'il joue du piano.

Après quelques minutes, je m'excuse auprès des autres puis je marche tranquillement vers lui pour le rejoindre.

J'agis comme un abruti avec lui à chaque action et parole. Même quand j'ai essayé de me racheter en lui apportant de la crème cicatrisante, je me suis mal comporté.

Étant ennemis, je ne devrais pas me soucier de tout cela - d'autant plus qu'il me déteste - et de ce qu'il pense de moi. Je ne peux cependant pas m'en empêcher. Je haïs cette faiblesse non expliquée.

Le soir-même, je perds tout contrôle en le forçant à monter dans mon véhicule allant jusqu'à lui casser sa bicyclette.

J'aurais pu repartir avec des jolies femmes et pourtant me voilà en voiture avec lui...

Je ne me comprends pas moi-même.

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Un chapitre sur le point de vue de Jäden, ça vous a plu ?

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