𝐗𝐗 | 𝐖𝐡𝐞𝐧 𝐚𝐥𝐥 𝐡𝐨𝐩𝐞 𝐬𝐞𝐞𝐦𝐞𝐝 𝐥𝐨𝐬𝐭* (𝐈𝐈)

*quand tout espoir semblait perdu.






Ceci est un double update !

N'oublie pas de lire le chapitre précédent, « When death lurks (I) » !








Soudain, Namjoon sentit comme une fissure dans la brume de sa torpeur.

Son esprit encore pris dans les rets du choc commença à émerger, chassant lentement les brumes opaques du traumatisme qui s'étaient abattues sur lui.

Les détails se faisaient plus précis, comme si ses sens engourdis reprenaient conscience de la scène abominable devant lui.

Il fixait le visage de Shin qui se tordait, figé dans une expression étrange, une grimace où se mêlaient douleur et choc.

Namjoon cligna des paupières, comprenant lentement ce qu'il voyait.

Puis ses yeux se baissèrent, attirés par un scintillement.

Là. Une arme le transperçant.

Une flèche fine et mortelle perçait le torse de Shin, sa pointe argentée rougie de sang, déchirant la chair. Autour de la plaie, le rouge s'étalait en une sombre floraison sur le tissu noir, se diluant lentement dans l'eau.

Shin expira dans un râle sourd, ses yeux écarquillés par la stupeur, la haine, la réalisation. Il fixait un point invisible au-delà de Namjoon. Son corps vacilla. Il tenta de s'accrocher à Namjoon qui le repoussa sèchement dans un sursaut de lucidité violent. Dans un dernier regard, Shin implorait silencieusement une miséricorde qui ne viendrait pas.

Puis, il se fit emporter par les flots indifférents du fleuve.

Namjoon resta là, figé, agenouillé, enserrant le corps inerte de Jungkook, son esprit s'éveillant brusquement, vacillant entre l'horreur et l'incrédulité.

Il demeurait néanmoins incapable de saisir comment tout avait pu se terminer en un clin d'œil.

Un instant plus tôt, il luttait pour sa vie et celle de Jungkook.

Puis il s'était vu complètement paralysé par la terreur.

Il s'était cru condamné. Il s'était livré à la mort. Il avait abandonné.

Et à présent, Shin gisait, vaincu par une force extérieure, balayé comme un fétu de paille par la force de la nature.

Une main invisible venait de les arracher des griffes de la mort.

C'était subit.

Trop subit pour son esprit encore prisonnier d'un mécanisme de survie qui peinait à s'éteindre.

Il s'effondra à genoux, scrutant les alentours, mais le fleuve continuait son cours.

Indifférent.

Comme si rien n'avait eu lieu.

Namjoon sentit sa gorge se resserrer, un nœud brutal, douloureux, tandis que sa raison luttait pour rassembler les morceaux épars de ce qu'il venait de vivre. Il cligna des yeux en une tentative désespérée d'effacer la scène qui s'était déroulée devant lui.

Mais la vision de Shin, percé par la flèche, restait immuable, indélébile.

Qui a tiré cette flèche ?

D'où vient-elle ?

Petit à petit, son esprit piqué par la brutalité de la réalité accéda à une lucidité vive. Il sentit alors un frisson glacé parcourir sa peau, l'arrachant à cette pénible paralysie.

Son cœur battait encore furieusement dans sa poitrine. Son sang pulsait toujours à ses tempes. Ses pensées demeuraient lourdes, ralenties par l'épuisement.

Le poids de Jungkook dans ses bras l'ancra soudainement dans le présent. Il affronta l'évidence. Il n'était plus question de fuir ce cauchemar.

Il réalisa soudain que sa prise sur le corps de Jungkook s'était relâchée. Horrifié, il haleta en découvrant le visage à moitié immergé de son amant. Pris de panique, ses doigts se crispèrent, ses jointures blanchirent sous l'effort tandis qu'il resserrait sa prise autour de Jungkook, le redressant correctement à la surface pour l'empêcher d'avaler l'eau – pourvu qu'il respire encore.

La vie de Jungkook dépendait de lui, ici et maintenant. Le contact avec son corps froid éveilla à nouveau son instinct de protection.

Dans un dernier élan, sa respiration se fit plus profonde, ses yeux se levèrent, désormais fixés vers l'horizon. Namjoon se releva péniblement, luttant pour se maintenir debout. La rive semblait si lointaine, presque inatteignable.

Mais il ne pouvait pas abandonner.

Pas maintenant.

Il ne le laisserait pas partir et il se battra pour lui.

Son visage changea. Son regard devint dur, clair, brisant les chaînes de l'horreur qui l'avaient retenu.

Alors, avec les dernières forces qui lui restaient, il marcha sur les galets vaseux avec toute la difficulté du monde. Il lutta contre le courant pourtant doux. Maintes fois, il manqua de glisser, trébuchant. C'était ardu, éprouvant. Il était si épuisé. Chaque mouvement devenait une épreuve de volonté.

« Tiens bon, mon amour. Tiens bon. C'est fini », murmura-t-il entre ses dents serrées.

Une prière dans le vent, une supplication adressée à une entité sourde.

Des voix lointaines criant son nom et celui de Jungkook percèrent sa bulle comme un coup de tonnerre, le tirant brutalement de son monde où il s'était cru seul face à la mort.

Encore hébété, Namjoon sentit le monde réel revenir à lui en un flot brutal et désordonné. Le souffle rauque, son esprit à la fois alerte et engourdi par la fatigue, il chercha à se concentrer, à comprendre d'où venaient ces appels. Les voix résonnaient comme des échos lointains, à peine perçus à travers le brouillard de sa conscience vacillante.

Pourtant, elles lui offraient une lueur d'espoir, un chemin à suivre.

Le corps inerte de Jungkook était lourd, si lourd. Ses bras tremblaient sous l'effort conséquent qu'il se forçait à maintenir. Il rassembla de nouveau ses dernières forces, déterminé à le sauver coûte que coûte.

Le courant continuait de les pousser, mais Namjoon l'affrontait, tirant Jungkook vers la rive aussi vite que son épuisement le permettait.

Chaque pulsation de son cœur lui était douloureuse. Il s'accrochait désespérément au corps froid de Jungkook, comme si en le serrant plus fort, il pouvait encore raviver la chaleur qui s'éteignait sous ses doigts tremblants.

Il émergea enfin de l'eau, avançant encore de quelques pas. Il s'agenouilla et pressa le visage de Jungkook contre son torse, positionnant son corps inerte sur ses genoux repliés.

Doucement, il écarta les mèches humides de son visage, tâchant d'ignorer la froideur saisissante de sa peau. Sa main glissa tendrement sur sa joue avant qu'il n'incline la tête pour déposer un baiser prolongé sur son front.

Glacé.

Son souffle vacilla.

La morsure du froid brûla ses lèvres chaudes.

« Jungkook... Allez, ouvre les yeux, mon doux. »

Sa voix était un murmure rauque, presque méconnaissable, déformé par l'angoisse et le froid mordant.

Soudain, il sursauta. Des bras étrangers l'agrippèrent vivement. Son esprit s'affola, lui soufflant qu'ils cherchaient à les séparer. Une terreur sourde s'empara de tout son être, le plongeant dans un état de panique pure, presque animale. Il hurla, son cri déchirant se mêlant au vent et à l'eau.

« NON ! »

Ses mains se crispèrent sur les vêtements de Jungkook, refusant de le lâcher. Chaque parcelle de son âme hurlait de le garder, de ne pas l'abandonner.

Des mains tentaient encore de l'éloigner, mais il résistait, ses pensées noyées dans un tourbillon d'horreur et d'impuissance. Des larmes qu'il n'avait même pas senties monter, coulaient maintenant librement sur ses joues, se mêlant aux dernières gouttes d'eau perlant sur son visage.

« LÂCHEZ-MOI ! »

Il réussit à se défaire de leur poigne. Il se précipita vers le corps de Jungkook, le secouant doucement.

« J... Jungkook, je t'en supplie, réveille-toi... ! »

Sa voix se brisa à chaque mot.

Il ne pouvait pas croire qu'il le perdait, pas après tout ce qu'il avait perdu. Pas ici. Pas ainsi.

Une force le tira de nouveau en arrière, loin du corps immobile de son amant. Son dos heurta une armure froide, peut-être un soldat, dont les bras plus robustes se refermaient autour de lui, essayant de le ramener en sécurité.

Namjoon se débattait, frappait, criait, mais sa propre faiblesse le trahissait. Les ténèbres dansaient à la périphérie de sa vision, mais il luttait férocement. Il voyait le corps de Jungkook se faire entourer de personnes.

Beaucoup trop de personnes.

L'angoisse l'étouffa.

« Laissez-le ! »

La force qui le tirait en arrière ne faiblissait pas. Les bras puissants étaient déterminés à le mettre à l'abri, le maintenant fermement. Namjoon se tordait pour échapper à leur étreinte.

« Non ! Lâchez-moi ! LAISSEZ-NOUS EN PAIX ! »

Sa voix, brisée par la panique. Par un mélange de rage et de supplication. Il frappait, ses poings heurtant inutilement la poitrine dure de celui qui tentant de le sauver de lui-même. Il criait à s'en irriter la gorge, mais son corps trahi par la fatigue et le froid ne répondait pas totalement à ses ordres.

Les ténèbres continuaient de se resserrer autour de sa vision, leur approche inexorable. Il pouvait sentir le monde s'éloigner, sa conscience vaciller sous le poids de l'épuisement. Pourtant, il refusait de lâcher prise, refusait de se laisser séparer de Jungkook. Son esprit embrumé par le choc et la terreur ne comprenait plus ce qui se passait autour de lui. Tout son univers se réduisait à ce corps glacé qui lui avait été arraché.

Il réussit de nouveau à se dégager. À moins qu'on l'ait relâché. Il gémit son prénom, poussant les quelques personnes penchées au-dessus de Jungkook, leur hurlant de s'éloigner.

Il ressemblait à une bête sauvage apeurée.

Les mains tremblantes, il le reprit délicatement dans ses bras, resserrant son étreinte comme s'il pouvait retenir la vie qui semblait le fuir, par pure volonté.

« Pourquoi tu ne te réveilles pas... ? »

Il serra davantage la tête de Jungkook contre son cœur.

« Je t'en supplie, ouvre les yeux, ouvre les yeux... Ouvre-les ! » répétait-il, sa voix se brisant en un sanglot désespéré.

Puis, il perdit patience. Il vociféra, sa fureur et sa peur se mêlant en un cri primal.

« Arrête ça ! Réveille-toi ! »

Avant que sa voix ne se mue en un murmure désespéré.

« Ne me laisse pas... »

Chaque fibre de son être semblait hurler de douleur à l'idée de se détacher de celui qu'il aimait, de celui qu'il ne voulait pas perdre. Ses doigts s'accrochaient désespérément aux vêtements trempés de Jungkook, cherchant la chaleur qui s'était évanouie.

Il n'avait pas conscience du spectacle qu'il offrait, perdu dans ce tourbillon d'émotions qui l'engloutissait.

Mais peu lui importait l'image qu'il renvoyait.

L'amour de sa vie se trouvait là, sur le fil ténu entre la vie et la mort. Peut-être même était-il...

Non !

« Non, non, non... »

Il lâcha un petit rire nerveux.

« Ce n'est pas possible. »

Il secoua vivement la tête.

« Ça ne peut pas être réel... »

Son corps se balança doucement d'avant en arrière, emportant dans ses mouvements celui de Jungkook.

« Toi, tu ne me laisseras pas. Jamais. Ouvre les yeux. »

Il était là, à prononcer des mots, à les ancrer dans son esprit afin de ne pas s'effondrer. Il n'eut pas même la présence d'esprit de vérifier son pouls, son souffle ou le si le soulèvement de sa poitrine était présent ou non. Tout ce qu'il espérait, c'était le frémissement de ses paupières.

L'ouverture de ses yeux.

« Ouvre-les... »

Sa voix mourut dans un étranglement aigu.

Ses appels résonnaient dans l'air nocturne en de sons bruts, déchirants, portés par le vent. Ses yeux agrandis par l'angoisse attendaient un miracle. Il n'avait plus conscience de rien. Les larmes ruisselaient en flots silencieux sur ses joues, rendant son regard fou de douleur, perdu dans le vague, bien qu'ancré sur le visage de Jungkook.

Il n'était plus qu'une âme brisée face au monde.

Un enfant marqué par un souvenir traumatique.

Un adulte qui en subissait violemment les répercussions.

Il oscillait entre ces deux âges, chacun emprisonné dans les strates de son esprit.

Sa mémoire était cruelle. Elle avait cristallisé le souvenir effroyable de la perte de son père, cet instant douloureux qui ravivait cette réponse traumatique face au corps inerte de Jungkook. Son corps et son esprit étaient plongés dans cet événement du passé par vagues d'émotions foudroyantes.

Ce souvenir se dissolvait, se disloquait, et réapparaissait avec le visage livide et gelé de Jungkook. C'était d'autant plus effrayant. Il était submergé par ces réflexes de survie : paralysie, solitude, impuissance à apaiser le déferlement incessant d'images qui transformaient chaque seconde en un supplice incessant.

Autour de lui, les silhouettes floues des citadins et des soldats s'affairaient, leurs visages sombres, graves, peinés. Ils murmuraient entre eux, des prières, des ordres. Des mots que Namjoon ne pouvait entendre. Des mains tentèrent à nouveau de le tirer en arrière, loin de Jungkook.

Namjoon était à présent dans un état léthargique. Il sentit ses propres forces l'abandonner, son corps cédant enfin sous la fatigue insupportable.

Pourtant, il se battit encore, même faible, même brisé. C'était un dernier acte de résistance contre l'inévitable.

Si Namjoon avait été lucide, s'il avait pu maîtriser le déchaînement en lui, il aurait compris qu'il devait laisser ces gens emporter d'urgence le corps de Jungkook. Ils savaient quoi faire. Pratiquer l'acupuncture, stimuler ses points d'énergie, rétablir le flux vital, expulser l'eau de ses poumons, et peut-être même le ramener du seuil de la mort.

Mais son esprit était déserté de toute pensée cohérente, dévasté par l'angoisse et la terreur.

Comment pourrait-il faire preuve de lucidité alors que l'homme pour qui il serait prêt à tuer sans hésiter gisait là, immobile et froid ? Comment le pourrait-il, lui qui portait en son sein des démons tenaces ayant un penchant inquiétant pour la désillusion, l'abattement, les ténèbres ?

Il aurait donné tout ce qu'il possédait, sa vie, son âme pour croiser la lueur étincelante de son regard, celle qui le faisait se sentir vivant. Pour revoir ce sourire qui illuminait son monde. Pour entendre à nouveau la mélodie apaisante de sa voix. Le son enchanteur de son rire, un ballet aux airs de paradis pour son ouïe. Pour sentir son doux et tendre toucher, ce contact qui suffisait à apaiser ses craintes. Pour se délecter à nouveau de ses réactions farouches lorsqu'il le rendait aussi pourpre qu'une rose rouge.

Pour l'aimer, tout simplement, sans la menace omniprésente de le perdre.

Il refusait de croire que tout cela lui était définitivement arraché.

Le laissant à nouveau seul.

Soudain, son esprit errant entre les ombres du passé et la réalité impitoyable du présent céda. Sa torpeur laissa place à une colère brute, dévastatrice.

« Bon sang, pourquoi tu ne te réveilles pas ?! JUNGKOOK ! », hurla-t-il, ses poings frappant violemment la terre.

Soldats et citadins se figèrent aussitôt, alertés par ce soudain éclat de voix déchiré par l'impuissance.

Dans une rage incontrôlable, il secoua vivement le corps inerte de Jungkook, la colère éclipsant la peur silencieuse qui le paralysait.

« Jeon, je te le jure par tous les dieux, si tu n'ouvres pas les yeux, je te tuerai de mes propres mains ! »

Sa voix, un écho puissant dans le silence de la nuit.

Brisée.

Comme du verre éclatant en mille fragments.

À l'image de son cœur.

Brisé.

Ce fut finalement Seungmin qui s'approcha, ses pas lourds et décidés. Il savait que Namjoon ne céderait pas facilement, pas sans se battre, même contre ceux qui essayaient de l'aider. Avec une fermeté douce, mais implacable, il réussit à briser à moitié l'étreinte désespérée de Namjoon qui émit de faibles sons de protestation.

« Namjoon. »

Ses mains solides se refermèrent sur les épaules de Namjoon qui s'obstinait à regarder Jungkook.

« Hé, mon grand. »

Doucement, il prit son visage en coupe, l'obligeant à le regarder, à l'écouter.

« Tu as fait tout ce que tu pouvais. »

Sa voix basse, mais autoritaire perça à travers les brumes de son esprit.

« Laisse-nous prendre soin de lui, maintenant. Nous pourrons le sauver qui si tu consens à le lâcher. Le temps lui est compté. »

Les mots de Seungmin étaient à la fois une promesse et un ordre, pénétrant le chaos mental de Namjoon comme une ancre dans une mer déchaînée. Il les entendait, mais ils semblaient lointains, comme s'ils traversaient un épais brouillard. Ses mains toujours accrochées au corps de Jungkook tremblaient.

« Namjoon. Il faut que tu le lâches. »

Il ne voulait pas le lâcher. Il ne pouvait pas le lâcher.

Pourtant, quelque part au fond de lui, une voix lui murmurait désespérément qu'il était celui qui tuait Jungkook.

Namjoon fouilla dans le regard de Seungmin, cherchant une certitude qu'il n'avait plus en lui. Les larmes continuaient de couler le long de ses joues, chaudes et brûlantes sur sa peau livide.

Seungmin essuya délicatement ses larmes.

« Je vais prendre soin de lui. Je te le ramènerai. »

Ce fut suffisant.

Lentement, douloureusement, les doigts de Namjoon se desserrèrent, aidé par ceux de Seungmin qui le guidait. Il lâcha enfin prise, laissant le corps de Jungkook glisser hors de sa portée, confié aux hommes autour de lui. Une sensation de vide s'empara de lui, un gouffre béant qui menaçait de l'engloutir tout entier.

L'angoisse revint au galop. Il ne lâchait plus le corps des yeux, ce corps qui venait de lui être définitivement arraché.

Les soldats placèrent Jungkook dans un brancard avec une efficacité rapide, le soulevant avec soin pour l'éloigner vers un endroit sûr. Namjoon les suivit du regard, son cœur se brisant un peu plus à chaque pas qu'ils faisaient, emportant son amour loin de lui.

« Il ne peut pas me laisser... »

Sa voix était presque inaudible, une prière étouffée par le sanglot qui menaçait de l'étrangler.

« Il faut qu'il... Il faut qu'il ouvre les yeux. »

Le cœur en miettes, Seungmin posa une main rassurante sur son épaule. Il ouvrit la bouche avant de la refermer. Il savait mieux que quiconque que même les meilleurs mots de réconfort qu'il prononcerait ne perceraient pas la muraille de douleur qui entourait le cœur de Namjoon.

Ce dernier se laissa diriger contre l'épaule de Seungmin, ses forces enfin épuisées, incapable de se relever.

Tout son être criait silencieusement pour Jungkook.

Dans la nuit sombre, sous la lueur pâle des étoiles, Namjoon resta là, enserré dans les bras de Seungmin, le regard fixant le vide, à attendre, priant pour un miracle, pour que la vie se manifeste.

Seungmin le hissa doucement dans ses bras jusqu'au sommet de la berge, traversa le sentier jonché de gravats, et pénétra dans le parc naturel aux alentours. Là, il prit place sur un large rocher, abrité par l'ombre d'un saule pleureur, et installa Namjoon avec précaution à ses côtés, un bras passé autour de ses épaules pour le garder près de lui.

Ils se trouvaient à une vingtaine de pas d'où reposait Jungkook, étendu sur l'herbe, offrant à Namjoon une vue nette de la scène. Malgré son état légèrement somnolent, absent, ses yeux restaient grands ouverts.

« Regarde, ils veillent sur lui, le père de Yoongi a été prévenu, il prépare sa venue. Ils l'emmèneront et tout ira bien. »

Lentement, Namjoon releva la tête de l'épaule du général, ses mains crispées sur le haut de celui-ci, les jointures blanches et tremblantes. Il avait si froid. Il luttait contre le sommeil. Mais il ne trouverait pas le repos avant d'avoir vu les yeux de Jungkook s'ouvrir.

Autour de Jungkook, plusieurs silhouettes s'agitaient frénétiquement, cherchant à apporter leur aide de premiers secours, avant de l'emporter voir le médecin de l'école, le père de Yoongi, qui l'attendait.

Namjoon les distinguait à peine, à demi conscient.

Il aperçut Haein, penchée avec inquiétude, sa main sur le bras de Jiwon, dont le visage était baigné de larmes, soutenue par Yoomi et Minseo qui échangeaient des mots rapides avec les soldats, les aidant à préparer des bandages de fortune en arrachant des pans de leurs hanboks hors de prix.

Yoongi, héritier d'une lignée de médecins, les accompagnait, aidant les soldats infirmiers. Il s'activait avec une détermination froide, ses mains expertes vérifiant les signes vitaux de Jungkook, traquant le moindre signe de vie. Namjoon crut voir des sillons de larmes séchées sur les joues de Yoongi. Derrière lui, Mingyu et Seokjin s'affolaient, leurs visages froissés par la terreur.

Non loin, Sunhi, le visage déformé par l'angoisse et baigné de larmes, se cramponnait à un Chan livide comme un spectre, le regard fixe, semblant hanté par ce qu'il voyait. Plus en retrait, Hoseok et Hye-Jin, ébranlés, observaient la scène en silence, leurs visages pâles trahissant leur peur et leur impuissance.

« Merci, papa. Je m'en occupe. »

Namjoon ne cilla guère. Il crut reconnaître la voix de Taehyung. Bientôt, il sentit Seungmin s'écarter, ses mains rugueuses, mais réconfortantes encadrant doucement son visage.

Il ancra ses yeux éteints dans ceux bienveillants, confiants et chaleureux de Seungmin.

« Il n'est pas parti. Ce n'est pas son heure. »

Il s'était gardé de lui dire il est revenu.

Seungmin n'attendit pas la réponse de Namjoon, sachant qu'il garderait le silence. Lui seul comprenait vraiment l'état dans lequel Namjoon se trouvait, se souvenant de la douleur ressentie, quatorze ans plus tôt, à la perte de Taejoon, puis de Dongwon.

Le cœur lourd de voir Namjoon ainsi, il détourna les yeux pour croiser le regard empli de peine de son fils. Taehyung lui fit signe qu'il veillerait sur lui, et Seungmin s'éloigna alors, pressé de rejoindre Jungkook et de s'enquérir des nouvelles récentes.

Taehyung drapa une large couverture chaude sur les épaules tremblantes de Namjoon, ses vêtements encore imbibés d'eau glacée. Il l'enveloppa chaudement, puis frotta doucement son dos en un geste réconfortant, tentant de lui transmettre un peu de sa chaleur. Doucement, il glissa son bras autour de son cou, serrant Namjoon contre lui dans une étreinte fraternelle, cherchant à apaiser le tremblement qui parcourait son corps.

Namjoon vit sans le voir Yoongi les approcher, vite suivi par Hoseok qui délaissa Hye-Jin.

« On l'ai examiné. »

Yoongi posa une main sur son épaule, attirant son attention.

« Par miracle, il respire, même s'il a encore les poumons encombrés d'eau. Ce n'est qu'un évanouissement et une épuisante lutte qui l'ont terrassé. Mon père saura lui prodiguer les soins nécessaires, sois-en rassuré. »

Ce que Yoongi omettait de dire, c'est que Jungkook n'avait repris son souffle qu'après d'inlassables pressions sur sa poitrine, jusqu'à ce qu'un mince filet d'air traverse enfin ses lèvres. Hoseok et Taehyung le regardèrent, le remerciant du regard.

Eux, savaient que Jungkook ne respirait plus.

Pas un mot ne franchit les lèvres de Namjoon. Il entendait les mots, mais leur sens restait hors de sa portée. Son regard distant et vide se posa de nouveau sur le corps inerte de Jungkook, que les hommes de Seungmin emportaient vers les appartements du guérisseur de l'école.

Le regard de Namjoon retomba alors sur le sol humide où Jungkook avait reposé. Une flaque d'eau mêlée de terre sombre imprégnait les gravats autour de l'herbe. Il fronça à peine les sourcils, incapable de comprendre l'évidence. Cette mare révélait l'âpre travail des soldats infirmiers pour extirper l'eau de ses poumons en toute urgence, commençant le travail avant de l'emporter.

Namjoon n'avait rien vu de tout cela. Pourtant, il avait tout observé.

Sa vision était floue, embuée par les larmes qu'il n'arrivait même plus à contrôler.

Il sentit un corps s'asseoir à sa gauche. Il reconnut le parfum de Hoseok, sentant ses doigts s'entrelacer avec les siens.

« Jungkook est vivant », souffla-t-il d'un ton encourageant.

Il tentait de ranimer un semblant d'espoir dans les yeux vides de Namjoon. Ces yeux dénués de toute vie, de toute chaleur l'angoissaient.

Taehyung en fit de même avec sa main libre.

« Joon, il faut que tu ailles te reposer. On t'emmène dans sa chambre ? »

Namjoon secoua légèrement la tête, comme s'il voulait chasser des pensées trop douloureuses.

« À son chevet. »

Sa voix n'était plus qu'un souffle éraillé, épuisé, vidé de toute émotion. Ses propres mots lui paraissaient étrangers, comme s'ils appartenaient à une autre personne, à un autre monde.

Il sentait que quelque chose en lui s'était brisé irrémédiablement.

Il était figé de l'intérieur, comme pétrifié par le poids d'émotions monstrueusement éreintantes qu'il avait dû porter seul.

Il ne parvenait plus à ressentir quoi que ce soit, sinon une immense fatigue, une lassitude qui l'étreignait tout entier.

Qu'on lui répète un « il est vivant » ne le percuterait en aucun cas, d'aucune manière. Il était comme mort. Tant que ses yeux demeuraient fermés, il ne croirait personne. Pas même la poitrine de Jungkook qui avait eu l'air de se soulever doucement, trop doucement à son goût, juste avant qu'ils l'emportent.

« De quoi tu as besoin, Joon ? Comment tu te sens ? demanda Hoseok, soucieux.

— Mort. »

Il répondit aussitôt. Il était sincère.

Ce n'était pas une menace, pas une déclaration dramatique, mais une simple vérité, brute et crue, qui sortait de ses lèvres.

Hoseok, Taehyung et Yoongi échangèrent un regard peiné, celui de Hoseok légèrement larmoyant.

« Garde espoir, il... »

Hoseok se tut aussitôt que Yoongi lui expliqua, d'une voix calme et basse, que toute tentative de persuasion serait vaine, tant qu'il était encore en état de choc.

Et Namjoon était plus qu'en état de choc.

Il s'immergeait déjà dans un futur macabre. Il ne voulait aucun espoir. Car si Jungkook venait à s'éteindre, Namjoon savait qu'il ne survivrait pas à cette perte. L'espoir tuait. Une vie sans lui serait une agonie insupportable, une douleur qu'il ne pourra pas subir une seconde fois.

Il se sentait déjà sombrer dans l'abîme d'une existence dénuée de sens.

Comme s'il se préparait déjà à vivre sans Jungkook.

À s'en aller à son tour.

« Ne parlons plus de ça, murmura Taehyung, attristé. Quoi qu'il en soit, tu as une grande dette envers ta mère. »

Perdu dans un tourbillon de pensées sombres et sans fin, Namjoon tourna lentement la tête vers Taehyung, laissant transparaître une lueur d'interrogation à travers la marée stoïque et insondable de son expression.

Sa mère ?

Qu'avait-elle à voir avec tout cela ?

Il peinait à comprendre, et il n'avait même plus la force d'être en colère à l'évocation de cette femme qu'il haïssait.

Sans un mot, Taehyung pivota et désigna du menton un point à l'horizon. Namjoon suivit son regard, ses yeux fatigués scrutant l'obscurité. À sa droite, une silhouette longiligne se fondait dans les ténèbres, à peine visible dans la lueur mourante de la lune.

Sooyeon les épiait, chevauchant son étalon noir, son arc fermement tenu en main, ses cheveux longs volant au vent.

L'âme de Namjoon se raviva. Il se pétrifia. Son cœur vacilla, comme suspendu dans du vide.

Puis il reprit une course effrénée, plus vif.

Un sursaut de conscience brutal le frappa.

C'était elle.

C'était elle qui avait tiré la flèche décisive.

C'était elle qui les avait sauvés à l'instant même où il s'était vu périr sous la main de Shin.

C'était elle.

Sa traîtresse de mère.


Ce fut le choc de trop.

Fatal.

Il sombra dans l'inconscience.


À suivre...


Voilààààààà ^^

J'espère que ça t'a plu ♡


Alors oui, JK était vraiment mort !

Enfin, jusqu'à ce qu'on lui fasse un massage cardiaque et une réanimation cardio-pulmonaire 😇

Il est resté environ 10 minutes sous l'eau. C'est rare, mais pas impossible de sauver quelqu'un après une noyade prolongée, surtout dans de l'eau très froide, car le froid peut ralentir les fonctions du corps et protéger partiellement le cerveau en réduisant ses besoins en oxygène. Dans ces cas-là, on a déjà vu des réanimations réussies, même si c'est super rare ! Bon, par contre, ça peut laisser des séquelles...

...ou pas, je sais pas trop, à voir ?  👀

À dimanche !

𝑾𝒊𝒕𝒉 𝑳𝒐𝒗𝒆, 𝑫𝒂𝒓𝒌 𝑬𝒚𝒆𝒍𝒆𝒕 🖤

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