𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟐𝟐



















— U  L  T  I  M  E    S  O  U  H  A  I  T —
































             L’AIR EST FRAIS et je frotte mes bras de mes mains en regardant autour de nous. Aucune voiture ne s’arrête à notre hauteur, songeant sans doute que nous avons appelé une dépanneuse. Et Ace l’a effectivement fait mais il a aussi passé un coup de fil à son caméraman — propriétaire du véhicule puisque le noiraud, et je viens de le découvrir, n’a pas le permis — qui lui a demandé d’annuler la course et l’a prévenu qu’il arrivait.

             Ace a tout de même tenu à ouvrir le capot comme s’il avait la moindre connaissance de ces engins et soupire depuis dix minutes maintenant en inspectant son ventre. Je lève les yeux au ciel face au spectacle déprimant.

Ecoute, pas besoin de te casser la tête, Marc va arriver.

— Ouais, mais pas avant une heure, lance le noiraud. Et ensuite il en faudra une autre pour régler le problème.

             Mais yeux s’écarquillent. Je n’ai sûrement pas envie de rester une heure dans le froid mordant de la nuit, mes dents claquant l’une contre l’autre. Il semble lire clairement mes pensées sur mon expression faciale car, haussant les épaules, il lance simplement :

— On a qu’à finir à pied. Marc m’a dit que je pouvais la laisser là où elle était si je fermais et emportait les clés puisqu’il en a un double.

             Mes sourcils se froncent.

— Je pense pas, je lâche simplement.

— Et pourquoi ça ? Tu tiens vraiment à rester debout dans le froid pendant deux heures ?

— Je peux toujours rester dans la voiture. Je préfère être assise au chaud pendant deux heures et m’ennuyer formellement que debout, marchant en grelottant pendant trois heures.

             Les sourcils d’Ace se haussent violemment.

— Trois heures !? s’exclame-t-il. Mais t’habite super loin !

— Tu l’as bien vu sur le GPS ! je m’exclame.

— Non, je sais à peine me servir de ce truc alors j’ignore tout ce qui concerne les calculs d’itinéraire et longueur.

             Poussant un soupir, je penche tout de même la tête sur le côté dans un geste approbateur. Ce monde est entièrement nouveau pour le noiraud alors je ne peux décemment pas lui reprocher d’être dépassé par tout ce qu’il s’y produit, ses règles et technologies. D’autant plus que, dans l’ensemble, il s’en sort extrêmement bien.

             Haussant les épaules, il prend une profonde inspiration avant d’exécuter divers bruits de bouches. Mes oreilles tiltent à ce bruit. Il me rappelle le comportement de Jake Peralta dans la série Brooklyn Nine-Nine lorsqu’il se sent embarrassé.

             Je réalise aussitôt qu’il se retient de dire quelque chose.

— Crache le morceau, j’ordonne brutalement.

— Quoi ? Mais de quoi tu parles ? J’ai vraiment aucun truc à dire ! Non, mais (T/P), sérieusement, tout n’est pas toujours cachoterie et mystères ! Apprends à te calmer un peu et te contrôler et…

— Ace.

— J’habite à dix minutes d’ici.

             Les mains sur les hanches et la tête baissée, il entreprend de creuser le sol de béton de la pointe de ses pieds, sans doute habitué à faire ce geste sur les plages de sable blanc qu’il a foulé. Mon sourcil se hausse face à ce flagrant aveu d’embarras.

             Dans ma poitrine, mon cœur bat à toute vitesse. Je crains de me ridiculiser en ayant mal compris. J’ai la sensation qu’il m’invite chez lui mais il peut tout aussi bien me faire savoir qu’il n’a aucune envie de s’éterniser longuement et préfèrerait que je prenne un taxi puisque, lui, n’a plus beaucoup de route à faire.

— Je… Je ne sais pas si un taxi acceptera de me raccompagner à cette heure-là et…

— En fait, je te proposais de passer la nuit chez moi, me coupe-t-il, toujours en fuyant mon regard.

             Mes yeux s’écarquillent et il lève les siens vers moi. Mon rythme cardiaque effréné rend ma capacité à respirer compliquée et de denses vapeurs enlisent mon esprit. Je ne parviens pas à réfléchir correctement.

             Cependant, remarquant mon trouble évident et constatant mon silence, Ace s’empresse de lever les deux paumes en l’air en gage de paix :

— Je te jure qu’il n’y avait aucun sous-entendu sexuel, (T/P). Mon nouvel appartement est assez grand, y’a une chambre d’ami et il est entièrement meublé puisque j’ai moi-même aucune affaire. Donc, t’inquiètes. Rien de personnel, pas d’odeur de moi, juste une sorte d’hôtel gratuit pour la nuit !

             Un léger rire me prend face à son air embarrassé et, aussitôt entend-il ma voix qu’il s’adoucit. Ses paroles meurent dans sa gorge et il sourit légèrement.

— Alors ? T’es d’accord ? demande-t-il d’un air anxieux. Au pire, aucun souci ! Je comprendrais que tu sois mal à l’aise à l’idée de passer la nuit dans la maison d’un garçon alors je peux t’appeler un taxi ! Ou un uber ! Ou même louer une voiture, si tu préfères connaitre le chauf

— Ace, Ace, Ace, je l’appelle d’une voix douce en posant deux mains sur ses épaules.

             Ses sourcils se haussent et il me regarde, apaisé par mon contact. La chaleur de son corps me réconforte et m’apaise en cette nuit fraiche. Lui souriant doucement, je secoue la tête pour lui faire comprendre qu’il ne doit pas se prendre autant la tête.

             Tandis qu’il me rend mon rictus, les joues adorablement rosées, je réalise combien la soirée a été étrange. Ce matin encore, nous nous détestions et ne voulions plus rien savoir l’un de l’autre. Mais, à présent, la même prise invisible semble se refermer sur mon cœur avant qu’un lien similaire à un fil se tende depuis mon organe vital, essayant de m’attirer vers le torse du noiraud.

             Tout a changé. Le poids qui pèse sur mes épaules depuis Marineford s’est envolé et je suis moins voutée. L’idée que nous ne soyons plus en froid me libère.

— Tu es loin d’être un inconnu, Ace. Et aucune dispute ne m’empêchera jamais d’avoir confiance en toi ! je m’exclame d’une voix douce. Qu’importe les froids et les cris, je sais que tu es quelqu’un de bien et que tu ne profiterais jamais d’une femme à la rue pour trois heures !

— Tu sais que ça me fait du bien d’entendre ça ? souffle-t-il.

             La douceur dans sa voix me prend de court. Il m’observe avec une telle tendresse que mon estomac remue.

— On a eu tellement de différends que j’ai eu peur que t’oublie que…

             Mes mains toujours sur ses épaules me permettent de le sentir se raidir quand sa voix meurt dans sa gorge et qu’il lance un regard sur le côté, visiblement embarrassé. Il fuit le contact visuel que nous avons établi et toussote pour s’éclaircir maladroitement la gorge.

— …Que tu comptes pour moi, (T/P).

             Mes entrailles remuent et un feu dense s’allument parmi elles. Mon souffle se bloque brièvement dans ma poitrine et mon cœur bat à une telle rapidité que mon esprit s’embrume le temps de quelques instants. Ma gorge se fait sèche.

             A nouveau, ses yeux se posent sur moi. Ses pupilles dilatées écrasent l’anneau sombre de ses iris qui brille sous les lampadaires. Parfois, j’oublie combien il est beau.

             Puis je le regarde.

— Je suis tellement désolée, Ace, je craque. Tu comptes aussi beaucoup pour moi et je regrette tellement ce que je t’ai dit ce matin ! Et pour l’autre fois, j’étais tellement surprise que j’ai pas trouvé les mots mais la vérité c’est que la seule raison pour laquelle je n’ai pas songé à te parler de ta vie d’après c’est que j’étais trop occupé à penser au présent, que l’avenir pour moi se résumait à Marineford et à savoir si je réussirai. Je n’ai jamais voulu te nuire et…

             Mais ma voix s’éclipse à l’instant où son corps chaud se presse au mien. Ses bras forts et puissants se referment autour de ma silhouette tandis que son visage chaud se loge dans le creux de mon cou. Abasourdie, je mets quelques secondes à réaliser qu’il me fait un câlin. Et cette étreinte est si douce mais si soudaine, si réconfortante mais si désarçonnante qu’il me faut plusieurs instants avant d’y répondre.

             Hésitante, j’enroule son torse et pose ma joue sur sa tête, fermant les yeux. Une douce chaleur m’enlise et je déguste cette sensation si apaisante.

— Je sais, (T/P), je sais. Et même si je ne suis pas remis de tout cela, même s’il me faudra du temps avant de m’accoutumer à ce monde, au fond je n’ai jamais douté du fait que tu m’aidais.

             Mon cœur bat à tout rompre.

— J’ai été tellement stupide de t’ordonner de partir de ma vie.

— Non, t’étais pas du tout stupide. Tu étais juste dévasté.

— Mais te demander de partir était stupide car je sais maintenant que j’aurais pu guérir bien plus vite en te gardant à mes côtés, soupire-t-il. Tu m’as terriblement manqué, (T/P). Et j’ai l’impression d’avoir arrêté de vivre jusqu’à la première fois où on s’est revu, il y a quelques jours.

             Malgré le fait que nos corps soient collés l’un à l’autre, le lien à ma poitrine se tend. Je me laisse aller, cette fois-ci, ne pouvant me presser davantage contre Ace mais le serrant avec une force nouvelle dans mes bras.

             Je le sens rire à mon geste.

— Allez, murmure-t-il.

             Sa large main frotte mon dos.











— On va à la maison.










































— Voilà, voilà.

             La porte noire s’ouvre sur un salon vaste qui me fait écarquiller les yeux. Malgré la nuit obscure, la force des lampadaires suffit à illuminer la pièce dont l’un des murs est constitué d’une baie vitrée. Les autres cloisons sont blanches quoi qu’une longue banderole de lumières LED de couleur puissent apparemment changer l’aspect des lieux.

             Mais Ace ne l’allume pas, me laissant avancer sur le parquet brun jusqu’au tapis blanc sous-plombant une table basse de verre à l’armature noire. Autour d’elle, quelques pouffes sont étalés. Au fond, un ilot central de bois donne sur une cuisine ouverte tandis que de l’autre côté, une arcade pratiquée dans le mur semble marquer l’accès à une autre partie de l’appartement.

— Pas mal du tout ! je lance.

— Tu trouves ? Je suis plutôt habitué aux bateaux, perso.

             Je me tourne vers lui tandis qu’il ôte son sweatshirt. Bien que l’ayant vu à moitié dénudé à de multiples occasions, je détourne brutalement le regard. Je sais qu’il attend simplement d’être chez lui pour réadopter ses vieilles habitudes mais, personnellement, le dernier mois passé à regarder ses vidéos m’a menée à m’attendre de lui qu’il soit entièrement vêtu.

— Ça te manque pas trop ? je lance. Parce qu’au pire, y’a aussi des personnes ici qui vivent sur des bateau, ici, il suf

— Je rêve ou t’es gênée ? me coupe-t-il.

             Prise de court, je sursaute avant de lui lancer un regard. Aussitôt, mes yeux trouvent ses pectoraux saillants hâlés et je les remonte jusqu’à son visage. Il remarque ce geste et sourie, moqueur.

— N… Non.

— Bien sûr que si, t’es gênée.

             Je toussote, mal à l’aise.

— Bah, disons que c’est habituel sur Grand Line, ce genre de tenue mais pas dans mon monde et…

             Ma gorge se fait sèche, je peine à poursuivre. Il vient de réduire la distance entre nous et je tourne la tête, éreintée par la chaleur. Aussitôt fais-je cela qu’il attrape mon menton entre ses doigts et tourne de force mon visage vers lui.

             Mon cœur rate un battement quand je le vois, là, tout proche de moi. Nos nez se frôlent et nos yeux se confondent l’un en l’autre.

— Mais ici, c’est différent ? demande-t-il doucement.

             Son aura est brûlante.

— J… Oui.

— Alors tu préfèrerais que je me rhabille ?

             Je n’ose pas répondre. Bien sûr que non, je ne veux pas le forcer à quoi que ce soit dans sa propre maison. Mais si je répondais cela, il ne perdrait pas cette opportunité de se moquer de moi.

             Cependant je n’ai même pas besoin d’ouvrir la bouche. Un rictus moqueur étire ses lèvres.

— Chad est vraiment le roi des cons.

             Mes yeux s’écarquillent et il murmure, juste avant de s’en aller dans sa chambre :
















— Laisser filer une fille comme ça…


























2016 mots

hehe ça s'arrange
doucement...

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