𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟔
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RYÛNOSUKE 波ヴ位
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Depuis l'incident survenu dans le bar, il y a quelques jours, l'atmosphère était tendue. Pas uniquement entre la merdeuse et moi, mais également avec Atsushi. Il avait désapprouvé que je sois aussi mauvaise langue avec Raion. Pourtant, je n'avais dit que des vérités à son sujet. Cette morveuse buvait beaucoup trop pour son âge, ce qui l'amenait à se faire grimpé dessus par des inconnus. J'imaginais très mal une fille comme elle avoir un petit ami et donc un partenaire fixe pour la baiser.
Alors pourquoi y avait-il cette gêne dans mon estomac chaque fois que j'y repensais ?
Entre cette fille et moi, il y avait eu, dès le premier jour, un sentiment d'aversion tacite. Bien que Raion semble ne nourrir que de la haine pour la majorité des êtres humains, à quelques exceptions près. Et, pourtant, ce soir-là dans la boîte de nuit, il s'était passé quelque chose. Une connexion inédite qui avait fait crépiter une flamme dans mes entrailles. L'image de son visage dans la lumière tamisée me revenait bien trop souvent à l'esprit.
Comme à cet instant.
Il fallait que je me la sorte de la tête, bon sang !
Surtout que cela commençait à me rendre de plus en plus irritable avec tous ceux qui m'entouraient. Même ma femme. C'était probablement avec elle que c'était l'intense, parce que chaque fois que je posais les yeux sur elle, ses traits me renvoyaient à sa foutue gosse. Ce fut les coups puissants d'Atsushi contre la porte d'un logement qui me permirent de revenir sur terre. Nous rendions une petite visite à un père de famille qui n'avait pas remboursé après avoir contracté une dette auprès du patron. Il imaginait certainement pouvoir se cacher, dommage pour lui. Le visage du concerné apparut quelques instants plus tard et ce dernier blêmit en nous voyant.
Son premier réflexe fut de refermer à toute vitesse. Je l'en empêchai en plaquant ma main sur la surface terne de la porte d'entrée. J'avais bien plus de force que ce quinquagénaire, il ne me fut donc pas difficile de repousser le panneau de bois en le faisant tomber à la renverse.
— Vous allez quelque part ? demanda Atsushi sur un ton moqueur.
— A-Attendez, s'il vous plait, je...
Mon meilleur ami leva son index à hauteur de lèvres pour lui faire passer le message que c'était inutile de se chercher des excuses. Il avait trop tiré sur la corde pour que l'on puisse encore accepter ce genre de conneries. Je refermai mes doigts sur le col de sa chemise et le traînais dans le petit appartement pour le balancer sur le canapé comme s'il ne s'agissait que d'un vulgaire torchon. Atsushi s'était octroyé le droit de s'asseoir dans un fauteuil et de s'allumer une cigarette alors qu'il souriait froidement à la victime du jour.
— Détendez-vous, nous n'allons pas vous torturer, si c'est ce qui vous inquiète. À vrai dire, ce n'est pas pour vous que nous nous sommes déplacés jusqu'ici.
La confusion se mêla alors à la terreur qui s'y était déjà imprimée. Je pris appui contre le mur près de l'entrée, mon regard braqué sur le mauvais payeur. Je pouvais l'admirer se décomposer à chaque seconde qui s'écoulait. Ne pas maîtriser ce qui allait arriver jusqu'au moment fatidique était, selon moi, l'une des pires tortures mentales que l'on puisse imposer à quelqu'un. Parce que ça lui laissait le temps de cogiter et de s'imaginer un millier de scénarios, sans jamais savoir lequel était le bon. Atsushi jeta un coup d'œil à sa montre en levant sa main droite.
— Cinq... quatre... trois, décompta-t-il les iris toujours rivés sur le cadrant, deux... et un !
Pile à cet instant, la porte s'ouvrit à nouveau pour que la quatrième et dernière actrice de cette scène fasse son entrée. Il s'agissait d'une lycéenne, tout juste dix-huit ans. Mon regard coula dans sa direction et s'arrêta directement sur sa longue chevelure noire et raide. Sans que je le veuille, la vision de Raion se superposa à celle de cette petite. Elles avaient, plus au moins, le même petit gabarit et la taille était en tout point similaire. Je n'avais jamais vu ma belle-fille dans un uniforme scolaire. Ce qui n'était pas étonnant, puisqu'elle avait abandonné l'école selon les propos de ma femme. L'idée de ce à quoi elle aurait pu ressembler dans ce genre d'ensemble se forma dans ma tête et ce n'était pas déplaisant comme image. Bien que cette fille ait une innocence sur le visage qui était inexistante chez Raion qui ressemblait plus à une personne qui avait déjà trop vécu.
— Parfait ! Elle est là ! Miwako-san, tout s'est bien passé au travail ? Désolé de t'embêter si tard, mais ton père nous a quelque peu forcé la main.
La concernée se retrouva perdue face à la situation. Il y avait de quoi lorsqu'on voyait deux inconnus dans sa maison à pas d'heure et qui n'avaient pas de bonnes intentions. Le père de famille parut enfin se réveiller et brailla à sa progéniture de s'enfuir. La jeune femme retomba sur terre et voulut obéir à la directive qui lui avait été donné, mais un chouia trop sur le tard malheureusement pour elle. Ma main se referma sur son épaisse tignasse é la teinte charbon en une saisie ferme qui l'empêcha de faire le moindre pas.
Elle se mit à gémir de douleur à cause de la traction que j'exerçais sur son cuir chevelu. J'entendis du désordre dans mon dos, signe qu'une pseudo-lutte s'était engagée entre mon ami et le patriarche. Je ne pris même pas la peine de me retourner en sachant que cet homme n'avait aucune chance de gagner. Il était complètement lésé face à Atsushi.
Je fléchis les genoux pour ramasser la lycéenne et la balancer sur une de mes épaules comme s'il ne s'agissait que d'un vulgaire sac d'ordures. Elle se débattit comme elle put, agitant ses bras et ses jambes, en poussant de petits cris qui furent bien vite entrecoupés par ses sanglots.
— Papa ! Papa ! Non, posez-moi par terre ! PAPA ! s'égosilla la pauvre fille.
Je levai les yeux au ciel face à toutes ces pleurnicheries.
Si elle devait en vouloir à quelqu'un, c'était bien son père.
Ce fut en agrippant fermement l'étudiante que je quittai les lieux, laissant le reste à Atsushi. L'envie de leur tordre le cou était déjà forte, pas la peine de prendre le risque de faire un mort inutile. La morveuse continua son boucan jusqu'à ce que je la balance dans le coffre de la bagnole. Coffre que je refermai sur elle pour étouffer le vacarme qu'elle provoquait.
Pourquoi les femmes devaient-elles toujours être si bruyantes ?
Ça ne les rendait que plus détestables.
Quelques minutes plus tard, je vis Atsushi revenir, un air satisfait sur ses traits.
Je remontai alors dans la voiture qui gigotait à cause de la fille qui se débattait comme une diablesse à l'arrière. Mais je ne me faisais pas de soucis, l'absence d'oxygène aurait rapidement raison d'elle si elle continuait ainsi. Mon meilleur ami s'installa à son tour et tapota sur le siège du chauffeur pour lui faire signe de démarrer.
— Une bonne chose de faite ! Elle est plutôt mignonne, on devrait réussir à en tirer gros !
— Si tu le dis, marmonnai-je d'un ton désintéressé.
Mon manque d'enthousiasme me valut un coup de poing dans le bras, ce qui m'arracha un grognement d'agacement.
— Tu ne veux pas arrêter d'être aigri ?! me sermonna Atsushi. Tu m'étonnes que ta belle-fille ne peut pas te blairer ! Et si on n'était pas meilleurs potes, je t'aurais déjà refait la gueule !
— Bordel, mais c'est quoi ton problème avec Raion, au juste ?
Il y eut un moment de silence avant qu'il ne hausse ses larges épaules.
— Je ne sais pas, elle dégage un truc que j'aime bien. Et ne te fais pas de fausses idées, je ne veux pas la baiser contrairement à ce que tu imagines. Elle a juste l'air intéressante.
Je ne savais pas si je devais croire ce qu'il racontait ou s'il essayait de noyer le poisson. Atsushi était malin, alors il était préférable de toujours être sur ses gardes avec lui. Le reste du trajet se passa plus au moins dans le silence, bien qu'Atsushi se fasse de temps à autre entendre pour dire des choses anecdotiques pour moi. Parfois, il m'arrivait de le plaindre d'avoir un meilleur ami comme moi. Je n'étais pas la personne la plus amusante que l'on puisse connaitre, même si je venais à lâcher prise de temps en temps.
Le chauffeur se gara en bas de l'immeuble et je quittai le véhicule après avoir fait un petit signe à mon ami. Ce fut d'un pas traînant que je regagnai l'appartement. Mais là où je m'attendais à retrouver le calme, le son de la télévision me fit tiquer.
Je l'avais pas assommée l'autre ?
J'étais pourtant certain qu'elle dormait quand j'étais parti.
Avais-je mal dosé le somnifère ?
Confus, je m'approchais à pas de loup pour voir si mon épouse se trouvait toujours dans le salon. Je n'aperçus personne dans le canapé, ce qui provoqua un froncement de sourcils. J'avançai jusqu'à me retrouver à proximité du meuble en cuir et j'eus la surprise de découvrir Raion assoupie dans celui-ci. Elle était la dernière personne que je m'attendais à trouver dans le salon, surtout à cette heure-là. Cette petite merdeuse s'appliquait à nous fuir comme la peste, ne sortant de sa tanière que pour venir fumer ou se mettre quelque chose dans l'estomac. J'étais plus habitué à l'entendre rentrer au petit matin d'un pas maladroit, à cause de l'alcool.
Je me frottai la nuque en la détaillant. La chose à faire aurait été de tourner les talons et de l'ignorer, mais je ne pouvais pas. C'était la première fois que je l'avais à ma portée sans qu'elle érige un mur de défense impénétrable. La voir si calme, si vulnérable, piquait ma curiosité. Elle n'avait pas de maquillage et sa tenue se composait que de vêtements confortables beaucoup trop grands pour elle. Je déposai mes avant-bras sur le dossier du canapé pour réduire la distance qui nous séparait et pouvoir l'analyser avec plus de facilité. Raion avait une peau de porcelaine sans défaut, soulignée par la noirceur de ses cheveux, et cela même sans fond de teint.
Mon attention migra en direction de ses bras qui se dévoilaient grâce aux manches courtes du T-shirt qu'elle arborait.
Je fus frappé par leur épaisseur.
Elle avait des bras tellement frêles.
Je pourrais les briser en faisant trop pression dessus. Avait-elle toujours été si maigre ? Il m'était assez difficile d'évaluer réellement son physique quand elle portait des choses si larges ou plus couvrantes. Et aussi, je ne m'y étais pas arrêté avant ce soir-là. Je tendis la main et tirai sur son col en prenant garde à ne pas la réveiller. Ses clavicules saillaient sous sa chair, ce qui me confirma qu'elle était vraiment mince. Je replaçai son vêtement et l'abandonnai dans le sofa pour faire un détour par la cuisine dans le but d'y dénicher quelque chose à me mettre sous la dent. Et ce qui m'attendait dans cette pièce fut d'autant plus surprenant que de trouver ma belle-fille endormie dans le salon.
C'était un véritable bordel !
Des emballages de gâteau jonchaient le plan de travail, des gobelets vides de nouilles instantanées envahissaient la table, tandis que l'évier était plein des conteneurs dans lesquels nous avions rangé les restes. Dans un coin, on pouvait voir deux bouteilles écrasées de jus de fruits, des canettes de bières et autres sodas les accompagnaient.
Face à cette montagne de déchets alimentaires, je ne savais pas quoi penser de ce spectacle presque dégoûtant. Même s'il n'était pas difficile de deviner qui avait fait ça. Elle était en train de roupiller sereinement devant la télé. Sauf que je ne comprenais pas. Raion avait toujours eu un appétit d'oiseau, alors pourquoi se gaver de la sorte ? La confusion me fit, d'instinct, passer ma main sur mon visage comme si cela allait éclairer ma lanterne. L'envie de la réveiller pour lui faire ranger le bazar qu'elle avait foutu était forte, mais une petite voix dans ma tête me chuchota de laisser tomber. Pour une fois, je me montrai raisonnable et ne fis pas de vagues. Je nettoyais la cuisine au mieux pour empêcher que ça ne crie dès que ma femme mettrait un pied hors de la chambre.
Avec ces deux-là, c'était inévitable.
Mais ce qui m'amena à me poser des questions, ce fut l'odeur de vomi par laquelle je fus accueilli dans la salle de bain ensuite.
Bordel, que s'était-il passé pendant ces dernières heures ?
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