chapitre seize

HARRY SE TROUVE À LA PORTE ET WILLOW SOUPIRE. Elle sait pertinemment ce qui l'amène ici, et si elle avait pu le laisser en plan sur le palier, elle l'aurait fait volontiers. Pourtant, machinalement, la jeune femme vient lui ouvrir en le saluant brièvement. Cela fait longtemps qu'ils ne se sont pas vus, lui qui a eu de nombreux déplacements au cours de ces dernières semaines. Le père observe, effaré, l'état de l'appartement de la blonde qui n'ose même plus se cacher. La vaisselle empilée dans l'évier, les vêtements jonchant le sol pas lavé, et une odeur de cigarettes venant l'agresser.

Cette situation le désempare et Willow comprend que, se brisent, ses remparts.

Son regard vaut mille mots et l'anglaise pourrait presque culpabiliser d'habiter un tel taudis. Mais Willow n'a plus la force d'effectuer le moindre mouvement. Se lamenter sur son sofa est d'une simplicité déconcertante, et une solution bien plus avenante. Ses prunelles sombres croisent les yeux couleur océan de son père qui ne sait que faire, au beau milieu de ce salon dérangé.

- Ma puce, pourquoi est-ce que tu ne m'appelles pas quand ça ne va pas ?

- Je n'en ai pas besoin, j'ai juste oublié de faire le ménage.

- Ne me mens pas.

- Papa arrête, je suis grande, je peux me débrouiller toute seule.

- Te débrouiller seule ? Tu vis grâce à mes revenus, cet appartement m'appartient et c'est comme ça que tu en prends soin ?!

La jeune femme ne sait que répondre. Cela doit bien faire des années qu'il n'a pas levé ainsi la voix, et cette rage coulant dans ses veines la fait réellement s'inquiéter. Une colère noire gronde en lui et Willow sait qu'elle a dépassé les limites. La dernière dois qu'elle l'a vu dans cet état, cela devait être la fois où elle avait fait le mur afin de sortir, au début de son lycée. Période compliquée où elle a commencé à sortir avec ses amis avant de se concentrer pleinement sur son avenir.

- Je te jure que c'est juste un quiproquo, d'habitude ce n'est pas comme ça.

- Bien sûr, et je vais te croire. Wil', ce surnom rend ses yeux humides, je sais que tu souffres et je le conçois, j'en suis pleinement conscient et je comprends ta douleur. Mais cette situation ne peut plus durer.

- Papa...

- Je veux que tu trouves un travail, que tu me prouves que tu peux t'en sortir et que tu sortes la tête de l'eau. Je te donne trois mois, sans ça, je te coupe les vivres.

- Tu ne peux pas faire ça !

- Tu te mets minable tous les week-ends afin d'oublier ce qu'il s'est malheureusement passé l'année dernière, tu crois que je ne l'ai pas compris ?! Il s'énerve alors. J'ai peur pour toi Willow ! J'en ai mal tellement j'ai peur qu'il t'arrive la même chose ! Alors reprends-toi en main.

Elle a envie d'une cigarette.

- Trois mois pour reprendre ta vie en main et avancer, tu as carte blanche. Je sais que tu peux y arriver et je serai présent pour t'épauler quoi qu'il en coûte. Mais je ne veux plus que tu te reposes sur mes revenus afin de sortir en boîte de nuit le plus souvent possible. Trouve un stage, un travail, un CDD, un CDI, propose un projet concret... je n'en ai rien à faire, mais montre-toi digne de cette entreprise que tu veux manager dans quelques années.

Et sur ces mots prononcés d'une voix éraillée, Harry quitte l'appartement tel un mirage, comme s'il n'avait jamais été présent pour la menacer. Les yeux gorgés d'eau, Willow se précipite vers sa table basse afin de récupérer son paquet de cigarettes. Elle sort sur sa terrasse et dégaine son briquet afin d'allumer sa clope pour se détendre un maximum. La jeune femme a pleinement conscience de ses erreurs. Mais elle ne se sent pas digne d'avoir une vie normale après tout ça. Pourquoi vivre alors qu'elle aurait dû y rester ?

Seulement, son père a raison. Willow ne peut pas rester ainsi, à se lamenter péniblement. Ce n'est pas tant le fait de reprendre l'entreprise qui pose problème, c'est toujours un objectif qui trottait au fond de son esprit. Toutefois, la personne qui devait prendre les rênes, ce n'était pas elle.

Et elle en a bien conscience. C'est ce qui la fait dérailler complètement. La fumée s'évapore dans l'air et Willow voudrait s'en aller comme elle. Lentement, se consumer. Pour ne plus avoir à subir les blessures du passé.

Afin de faire plaisir à son père, la jeune femme se force à ranger un peu son appartement qui est dans un désordre sans nom. Son casque sur les oreilles, la musique émane et elle chantonne l'air de the adults are talking, de the strokes. Cette chanson lui rappelle un souvenir en particulier, qui fait apparaître un maigre sourire sur son visage tiraillé par la fatigue accumulée.

Taylor et elle avaient respectivement vingt-et un et vingt-six ans à la sortie de cette musique et lorsque Willow venait squatter l'appartement de sa sœur, elles préparaient toujours de délicieux cookies en chantant à tue-tête cette les paroles, sous le regard désespéré du copain de sa sœur, Mason. Elles transformaient les spatules, tantôt en micro, tantôt en guitare et hurlaient le refrain comme si le risque d'une extinction de voix n'existait pas. L'anglaise essuie rapidement une larme venant se loger sur sa joue.

La vie est injuste, terriblement injuste.

Il est tard, le soir, lorsque la blonde termine son immense ménage. Ce n'est pas pour autant qu'elle va se mettre à chercher un travail tout de suite, mais elle est tout de même fière d'elle pour avoir lavé l'appartement. Installée dans son lit, le sommeil ne vient toutefois pas. Impossible de s'endormir alors qu'à chaque fois que ses yeux se ferment, les souvenirs l'assaillent. Sa hantise l'accompagne dans ses nuits plus que tristes. Elle tourne et vire inlassablement, se demandant quand est-ce que l'épuisement viendra frapper son corps.

Une notification sur son téléphone attire soudainement son attention. Elle détourne son attention avec précipitation et pose son regard sur ce message qu'elle vient de recevoir.

Et un sourire narquois trône à présent sur son doux visage.

□□□

- Au programme demain, départ huit heures pour la prochaine étape.

Charles hoche la tête en retenant un bâillement, épuisé par la journée qu'il vient de passer. Joris sourit en lui intimant d'aller se reposer, et Éric acquiesce. Le brun se retient de lui lancer une remarque désagréable, il sait que sinon, cela se retournera forcément contre lui. L'entraîneur se lève alors en prévenant tout le monde que lui aussi allait se coucher, et le monégasque déglutit discrètement, sachant pertinemment qu'il allait certainement se prendre quelques réflexions à la figure.

- Tu devrais bosser un peu plus les abdos Charles, parce que là ça ne va pas du tout, t'as du ventre.

- Je ne vois pas en quoi ça change quelque chose, j'ai quand même une bonne forme.

- Disons que c'est quand même mieux, puis c'est pas comme ça que tu rendras fier ton père ou Jules, je te rappelle que eux ne sont plus là. Donc faudrait que tu te bouges un peu.

Et le monégasque ferme les yeux. Une énième remarque dévoilant son sourire malicieux. Le brun s'en veut.

S'en veut de croire qu'il y a du bon en cet homme.

- Bonne nuit Charles, et ne te réveille pas en retard cette fois, râle Éric en lui souhaitant une bonne nuit.

- À demain, il marmonne à peine.

Il salue ceux qui l'accompagnent et part se réfugier dans sa chambre, soulagé d'être enfin esseulé. Éric a encore été exécrable, et a encore fait semblant de passer pour le préparateur physique parfait devant ses deux amis l'accompagnant pour les sessions d'entraînement dans les Alpes italiennes.

Charles se sent momentanément submergé, et l'envie de liqueur lui broie les entrailles et le fait se sentir coupable. Il jure en essayant de démêler sans cesse ses pensées, mais rien n'y fait. L'envie est puissante, et il ne peut l'assouvir. Charles cherche désespérément une solution, que faire ? Que faire pour ne pas se foutre en l'air ? Il déraille totalement et résiste de tout son être pour ne pas hurler. Il est retombé dans ses sombres travers. Le nécessité en cet instant précis : seulement un alcool fort qui puisse apaiser son esprit.

La pluie s'abat violemment sur ses joues rosées, dépourvues de ses fossettes apparantes lorsqu'il sourit.

Métaphoriquement, sa vie s'était éprise d'un séisme violent et sans crier garde il s'était retrouvé pris sous les débris. Sans la possibilité de s'échapper. La lueur du soleil n'est plus visible sous les décombres de son cœur ensevelis, et l'obscurité gagne du terrain petit à petit.

Il aimerait arracher son cœur de son emplacement, afin de savoir si la douleur serait toute autre par la suite. Sans conviction, il s'allonge sur son lit. Ses amis doivent dormir à présent, depuis un bon bout de temps.

Trois heures du matin.

Le voici à fixer le plafond de cette chambre dans laquelle il loge pour quelques jours. Dans quatre heures, il devra se lever et affronter une énième journée dans les montagnes italiennes afin de se préparer pour la saison qui arrive à grands pas. Il n'a pas la courage d'affronter une énième journée sous l'emprise de son entraîneur. Charles ne comprend pas ce changement soudain de comportement. Comme si l'orage s'était abattu sur lui sans prévenir, le faisant devenir une personne odieuse. Mais Charles a besoin de lui. C'est une spirale infernale dans laquelle il est enfermé et il a besoin de s'exiler un moment.

Alors, bien qu'il s'était promis de ne plus la contacter, mécaniquement, sa main vient agripper son téléphone. La luminosité agresse ses yeux pris par l'épuisement, mais il n'en a que faire. Il se précipite dans ses contacts et glisse inexorablement vers la conversation qu'il entretient avec Willow. Aucune nouvelle depuis des semaines, sous sa demande. Le brun espère qu'elle n'a pas bloqué son numéro, elle est sa dernière chance.

- j'ai besoin de te voir.

Est-ce une erreur ? Probablement, pourtant le monégasque ne regrette pas cette décision. Il a besoin de se perdre dans ses bras une énième fois, a besoin de ressentir cette sensation de plénitude. Ce monde qui devient miraculeusement silencieux.

Il fronce les sourcils en sentant son téléphone vibrer. Une notification, un message. Qu'est-ce qu'elle fait levée à cette heure si tardive, elle aussi ?

- je me demandais quand est-ce que tu allais craquer.

□□□

hey hey hey, j'espère que vous allez bien !! moi ça va, j'ai hâte que vous decouvriez la suite (je le dis à chaque chapitre mais c'est qu'un détail)

tellement hâte aussi que vous découvriez ma prochaine fiction sur arthur leclerc, elle est spéciale et raconte quelque chose de spécifique dont on parlera dans l'épilogue :)

merci d'être aussi nombreux, je ne sais pas comment vous remercier encore +

-alcools

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