chapitre quatorze
CHARLES MET UN PIED SUR LE SOL ANGLAIS POUR LA PREMIÈRE FOIS depuis plus de trois semaines. Il a l'impression que cela fait une éternité et pourtant, le voici déjà aux abords de l'aéroport, patientant pour un taxi qui voudrait bien l'emmener jusque la résidence de Willow qui doit l'attendre patiemment. Le monégasque jure en observant la pluie tomber abondamment sur le sol de la capitale. Un temps bien anglais.
Les nuages semblent aussi noircis que son cœur à présent, et la foudre n'est pas loin de s'abattre sur l'Angleterre en cet instant précis. Grelottant sous la bruine incessante, le brun prie pour qu'un taxi lui parvienne assez rapidement. Charles se demande comment va se dérouler cette soirée. Il a atterri il y a une trentaine de minutes et le voici en train de s'impatienter alors que la nuit tombe bien rapidement. Ce n'est que pratiquemment une demie-heure plus tard qu'un taxi ait daigné s'occuper de son cas et le pilote de la Scuderia jure en constatant que ses vêtements sont trempés, voire même à ce stade, imbibés d'eau.
Le paysage défile à vitesse grand V et le monégasque se perd dans ses pensées. La situation le pèse légèrement, il tente de se persuader que ce n'est pas forcément rationnel de retrouver Willow simplement pour son petit plaisir personnel. Ce n'est pas ce qu'il souhaite faire de sa vie et le brun commence à songer à tout arrêter. Néanmoins, il se souvient du bien-être que sa présence lui a autrefois procuré. Il parvenait à oublier les quelques galères présentes dans sa vie, bien que la liqueur ingurgitée aidait grandement aussi. Mais aujourd'hui, il sera d'une sobriété sans égal, alors, peut-être que Willow aura le même effet bénéfique ?
Il n'en sait rien, son esprit se torture tout seul sans crier garde. Charles descend du taxi et paie le chauffeur en le remerciant brièvement. Il se précipite à l'intérieur de la résidence en essayant de passer à travers les gouttelettes de pluie, sans succès. Il souffle avant de prendre l'ascenseur, en secouant ses cheveux ébouriffés par l'eau et le vent s'entremêlant dans ceux-ci. Le brun n'avait pas le courage de gravir six étages après l'heure qu'il venait de passer, à patienter pour pas grand chose.
Arrivé sur le palier, il songe à toutes ses pensées qui sont venues s'entremêler durant le trajet. Il essaie d'y faire abstraction en toquant à la porte, pourtant elles reviennent inlassablement au galop. Toutefois, à la seconde où ses prunelles claires croisent la noirceur de celles de la blonde, il semble avoir oublié même son propre prénom. Pas même un sourire pourtant afin de l'accueillir, juste un simple 'bonjour' qui frôle la barrière de ses lèvres.
Willow ne parvient pas à rompre ce contact alors qu'ils se dévorent du regard comme des lions restés en cage trop longtemps, prêts à bondir sur une proie fragilisée. La jeune femme observe le brun poser son sac et se dévêtir de son manteau avant de s'avancer sans un mot vers elle, effleurant sa peau de son souffle saccadé, alors qu'à présent, elle doit lever la tête pour le regarder.
— J'aurais besoin de prendre une douche, il murmure.
Son regard brûlant sa peau fait comprendre à Willow qu'elle est la bienvenue, alors qu'elle désigne la salle de bain d'une main, faisant comprendre au brun qu'elle ne souhaite pas s'aventurer là-bas, avec lui. Pourtant elle en mourrait d'envie, mais sous la douche, il l'aurait aperçu. Elle n'aurait pas pu éteindre la lumière comme ils avaient l'habitude de le faire à chaque fois qu'ils se voyaient.
— Je préfère le lit, dit-elle sans grande conviction, prétendant n'en avoir rien à faire.
Charles analyse la situation et il sent la peur et l'appréhension envahir toute l'âme de la blonde. Il voudrait supprimer ces sentiments négatifs de son esprit simplement en lui souriant, mais cette carapace qu'elle se crée l'empêche d'y parvenir correctement.
— Alors la douche attendra, il hausse les épaules.
Et Willow semble aussitôt soulagée. Si soulagée qu'automatiquement, ses lèvres se posent sur celles du monégasque avec ardeur. Rapidement, ses jambes s'enroulent autour de sa taille et Charles semble s'être rappelé du chemin les menant jusque la chambre de la jeune femme qui presse son corps contre celui du brun. Cette sensation de bien-être l'avait tant manqué, se sentir désirée également. Cette capacité d'oublier tous ses maux en un instant lorsqu'elle croise son regard est imparable et elle souhaiterait que cela recommence indéfiniment afin que sa douleur parte.
Charles laisse glisser ses baisers le long de son cou pour continuer jusque son épaule à présent dénudée. Il remonte tout doucement en venant reprendre possession de ses lèvres et ce qu'il ressent est indescriptible. En cet instant, il ne pense plus à ces maux douloureux qui le tiraillent. Ne pense plus à les masquer à l'aide d'une liqueur trop puissante afin que son esprit soit tourmenté durant des heures. Il n'y a qu'elle et ce désir qu'il ressent pour suffir à combler ce trou béant dans sa poitrine. Il l'observe une dernière fois avant de venir éteindre la lumière pour laisser l'obscurité s'emparer de la pièce.
□□□
Willow se revêtit d'un t-shirt après avoir été aux toilettes ; la pénombre lui permet de ne pas avoir peur de ce que pourrait voir le pilote, elle qui couvre son corps au maximum afin de se camoufler. L'eau de la douche parvient à ses oreilles et la jeune femme comprend que le monégasque est parti se laver comme il en avait besoin depuis quelques heures. L'anglaise se glisse de nouveau dans les draps et patiente un instant, luttant contre l'envie de se procurer une énième cigarette de la journée, ruinant sa santé.
Elle pèse le pour et le contre mais elle n'a pas le temps de prendre une décision concrète puisque le brun est de retour dans la chambre, un peu plus vêtu que quelques minutes auparavant. Cette fois, il semble déterminé à rester dormir ici, n'ayant pas la force de commander un taxi et de trouver un hôtel qui puisse l'accueillir sans réservation au préalable. Il sait que ce n'est pas raisonnable, et qu'au final, il repousse la discussion qu'il aurait souhaité avoir avec la jeune femme, mais en ce moment-même, il évite d'y penser.
Et se contente de se glisser dans les draps que l'anglaise occupe déjà, sans un mot. Ils ne se parlent pas, ils se cantonnent à de simples gestes, de simples touchers qui ne valent rien. Somnolante, Willow sent à peine le bras de Charles venir l'entourer machinalement. Pour la première fois depuis un moment, l'un comme l'autre s'endorment rapidement.
Le lendemain, la jeune femme a l'agréable sensation d'un sommeil réparateur. Du mouvement se fait sentir dans le lit et Willow ouvre les yeux, l'esprit encore embrumé par le sommeil dont elle a été tirée. Elle se surprend jours après jours, surtout qu'aujourd'hui, elle est perturbée de ne pas avoir rêvé des événements de l'année dernière. D'habitude, ses réveils sont violents. Ce matin, il n'y avait que la douceur pour la réveiller.
La sensation de chaleur sur son ventre la perturbe énormément et la blonde soulève la couverture et reste stoïque en découvrant le bras du monégasque entourant sa taille. Willow est confuse et se demande si ce n'est pas, finalement, ce qui lui a permis de passer une merveilleuse nuit. Elle chasse précipitamment cette pensée de son esprit et gigote un peu, faisant geindre le pilote qui émerge à son tour. Prenant conscience de la situation, il ramène son bras contre lui en s'excusant maladroitement. La jeune femme ne répond rien, continuant à lui tourner le dos comme elle sait si bien le faire.
Elle sent alors le lit s'affaisser et la fraîcheur envahir ses draps, et Willow n'aime pas cette sensation. Sans un mot, elle observe le monégasque se rhabiller de manière plus correcte et ramasser ses affaires éparpillées dans la pièce. Il paraît soudainement pressé. L'anglaise pose ses yeux sur son réveil ; il est pratiquemment l'heure de déjeuner.
— Écoute Willow, démarre le brun l'air embarrassé, je pense que c'est mieux que l'on arrête de se voir, ça va être compliqué avec toutes les échéances que j'ai, je ne vais pas pouvoir me permettre tous les allers-retours ici.
— D'accord.
Willow reste de marbre face aux paroles du monégasque qui la frustrent plus qu'autre chose. Cette parenthèse lui permettait de se divertir et d'oublier qu'elle souffrait le martyre. La voilà replongée subitement dans toute cette satire.
— D'accord... il semble attendre quelque chose, et la blonde soupire.
— Je ne vais pas te retenir si tu ne veux plus venir, je peux parfaitement le comprendre.
— Ne te vexe pas.
— Je ne suis en aucun cas vexée Charles, d'autres viendront toquer à la porte à la seconde où tu t'en iras.
Cette pique atteint profondément le monégasque, plus qu'il ne l'aurait pensé. Il déteste se faire avoir de la sorte et déteste encore plus ne pas avoir le dernier mot.
— Ne me supplie pas de revenir alors, parce que moi aussi j'ai du monde qui m'attend.
Un sourire narquois trône sur le visage de la blonde, déstabilisant le brun plus que de raison.
— Je ne vais pas te supplier, c'est toi qui prends la décision d'arrêter et je la respecte.
— Bien, alors bonne continuation.
Elle lui fait un signe de la main et le brun quitte la chambre, frustré par cet échange. Il semble vexé que la jeune femme n'ait pas accordé autant d'importance à ce semblant de relation qu'ils avaient, alors que ces mots afin de couper les ponts écorchaient ses cordes vocales. Il dévale les escaliers en se demandant si cette décision prise hâtivement était la bonne, mais il en est rapidement convaincu ; Willow n'en a rien à faire de lui, puis ce n'est pas dans ses bras qu'il se sentira mieux. Elle était trop mystérieuse, et lui avait trop besoin de se confier.
Willow, elle, ne comprend pas forcément la réaction du monégasque. Eux qui ne s'étaient jamais disputés auparavant, les voici à se dire adieu avant même qu'une relation ait commencé. La jeune femme ne s'attendait pas à ce qu'il coupe court à cet échange si rapidement, et la blonde en est presque déçue.
Déception qu'elle masque tant bien que mal dans le fin fond de son esprit. Ce n'est pas plus mal que cela s'arrête. Elle plongera dans les bras d'un autre afin d'oublier. Telle est leur destinée.
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hellooo, donc petite "séparation" du duo, il fallait bien rajouter du piment dans cette histoire et surtout, on verra comment est-ce qu'ils s'en sortent l'un sans l'autre ;)
les grosses "échéances" de l'histoire vont arriver alors accrochez-vous bien <3
à lundi !
-alcools
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