Chapitre 3: Intimidation
Odessa
Quand on passe la porte de chez moi, ma plaie me brûle encore et j'écarquille les yeux, lorsqu'en allumant je vois deux valises et un sac. Ça ne peut pas être plus vrai. Combien de temps il va rester avec tout ça? Je couvre ma bouche à nouveau tremblante. Il va vraiment rester. Il pourrait me faire n'importe quoi d'autre en plus. C'est réel. Mars demande derrière moi:
-Je dors où?
Je ne réponds pas et les oreilles bourdonnantes, je pose les yeux sur le mini bar fermant en partie le petit carré que forme la micro cuisine de chez moi. Mon appartement, mon putain d'appartement. C'était. C'était le mien. Je me tourne vers Mars et me fige aussitôt. Il a enlevé son masque. Il a un visage maintenant. Il a bien l'air d'avoir la vingtaine.
Ses cheveux bruns foncés lui arrivent vers le cou et contrastent avec ses yeux bruns et verts. Pour son visage il m'évoque un air insolent, comme un elfe insolent. Ou même comme Peter Pan dans ce vieux film d'animation, car Mars a ce nez rond relevé et des oreilles un peu pointues. Ses longs sourcils arqués accentuent cet air. Il ne lui manque que le sourire diabolique, mais il ne sourit pas. Il a des lèvres un peu larges. Ces lèvres à l'air boudeur ajoutent une aura hostile à son expression naturelle, tout comme ses pommettes hautes et sa mâchoire bien dessinée.
Ok, le démon masqué est...il n'est pas moche. Encore moins que son acolyte aux yeux glacés. Je ne pourrais pas les insulter là-dessus. Je suis en danger et le danger se dissimule sous des traits conventionnellement attirants. Le mal se cache sous toutes les formes.Mars me réveille en demandant ennuyé:
-J'ai dis, où est-ce que je dors, putain?
Je le fixe. Je pourrais lui dire de se débrouiller ou un truc du genre, mais ma blessure à la douleur battante me rappelle pourquoi je devrais me retenir. Je marmonne rapidement:
-Je sais pas. J'ai juste ma chambre, le couloir, la cuisine et la salle de bain et ce petit canapé.
Je désigne l'espace creusé cubique me servant de salon. J'ajoute:
-Comme tu peux le voir c'est un appartement assez simple.
Il ricane et dit:
-Comment t'as fini dans cette ville pour vivre dans un espace aussi petit?
Je dis piquée:
-Les employés vivent quelque part, tout le monde n'est pas riche ici tu sais.
-Oh je sais, t'as juste l'air d'être venue ici pour rien.
-Je suis pas venue ici, on m'y a emmenée.
Il semble intrigué puis dit:
-J'en connais une partie. Je voulais dire de quitter tes parents pour finir dans cette boîte.
Ayant un nuage douloureux à la poitrine et la gorge serrée, je ne dis rien. Il ajoute avec un sourire cruel:
-Pardon. Parents d'accueil, qui sont sûrement pires que ce que je pensais.
Je ne dis rien et serre les dents. Ils ont l'air de tout savoir sur moi. Il continue de me chercher en demandant:
-Quoi? Je t'ai blessée?
-Non.
-Je sais que j'ai bousillé ta jolie petite fesse et que tu dois nous faire du stress post traumatique, mais parle plus clairement. Comme quand tu jactais là-bas. Parce que je suis pas là pour décoder tes marmonnements. Parle. Je vais pas te frapper, j'espère pour toi.
Sur ce, il se met à ramener ses affaires dans la chambre. Je m'arrête de le fixer pour me réveiller et dire:
-Attends, qu'est-ce que tu fais?!
Il me lance:
-Je fais comme chez moi.
-J'ai pas d'autre lit.
-Je m'en fous.
Je lui dis:
-Je dormirai pas avec toi...
-Débrouille-toi.
Je le suis et après avoir mis ses affaires sous mon lit et dans un coin, il prend sa valise restante et l'ouvre. Il en sort de quoi se laver et ouvre la porte sur le côté de ma chambre. Comment il a su où se trouvait la salle de bain? C'est lui qui a ramené ses affaires ici? Quand il est dans la salle de bain, je m'assieds sur mon lit en sentant mes yeux se réchauffer. Je retiens mes larmes. Ma peau me fait mal et me gratte, mais pire, je suis profondément dans la merde. Au moins avant quand c'était juste moi qui vendais je pouvais arrêter quand je voulais , mais maintenant...pourquoi est-ce que je suis aussi bête? Je ne peux même pas m'échapper.
Le truc avec cette cité c'est qu'il n'y a pas de squat ou pas que je connaisse. Même l'endroit où je récupérais mes "ingrédients" auprès de mon fournisseur aurait pu être plus dissimulé. Il n'y a nulle part que je connaisse où se cacher et ces gens semblent avoir des accès spéciaux dans la structure. Il y a de grandes chances pour qu'ils me retrouvent.
Je dois me détendre. Paniquer ne me servira à rien. Je prends mes écouteurs et mets de la musique qui brise la tension dans la majorité de mon corps, même si mon nuage d'angoisse reste au fond. Je saisis ma couverture, prête à me rendre dans le petit espace que j'appelle mon salon.
D'un coup ma bouche manque de s'ouvrir de stupeur en voyant Mars sortir de la salle de bain avec rien d'autre qu'une serviette autour de la taille. Mars est peut-être un dieu romain, mais lui il a le corps musclé d'une statue grecque classique, avec toutes ces lignes dessinant ses muscles. Je ne l'avais pas imaginé aussi...je ne l'avais pas imaginé tout court en fait et pour de bonnes raisons. Il m'ignore en séchant ses cheveux et s'approche du côté du lit adjacent à moi. Toujours en m'ignorant, il commence à approcher ses mains de sa serviette.
À une vitesse folle, avant que je ne puisse voir la serviette tomber, je me lève et sors de la chambre. Je m'assied sur le canapé et expire longuement en essayant de me relaxer.
J'allume la télé et vois le maire avec son air tout gentil. Oui, l'homme grâce auquel je pourrais finir en prison beaucoup plus longtemps que dans d'autres états. Ça c'est parce qu'il a commencé sa guerre contre le crime il y a des années. Ils continuent de l'élire en plus de ça et il lui reste des mandats possibles. Je ne suis pas au bout de mes problèmes. Je grimace et serre les dents, ma plaie brûle. Je vais m'y habituer, j'espère. Au bout d'un moment, je vais toquer à la porte de ma chambre. J'appréhende une éventuelle crise de colère pendant un moment. Mais la voix grave de mon tortionnaire s'élève:
-Entre!
Je demande à entrer dans ma propre chambre. C'est pas possible. Mars est assis sur mon lit contre le mur avec le regard vers son téléphone. Je prends mes affaires et vais me doucher. Sous l'eau, ma blessure brûle d'abord me faisant serrer les dents, puis l'eau tiède me soulage en partie. J'aimerais pouvoir rester là pour toujours, car derrière la porte il y a la réalité. Après ma douche en m'habillant je me demande pourquoi il ne s'est pas lui-même habillé ici. C'est petit, mais quand même. Une fois mes tresses sèches il est temps de sortir. J'inspire et ouvre. Mars est toujours sur le lit avec son téléphone. J'hésite et après avoir réfléchi contrairement à tout à l'heure, je décide d'éviter de potentiels problèmes en lui laissant la couverture. J'en prends une dans l'armoire et me dirige vers la porte, mais il m'ordonne:
-Tu restes ici.
Je réponds:
-Quoi?
-Tu dois vraiment améliorer ton vocabulaire avec tes putain de "quoi".
Je ne réponds pas et il ajoute:
-Tu restes avec moi. J'ai pris les clés et verrouillé les fenêtres au cas où il te pousserait des ailes. Mais je vais pas te laisser hors de cette pièce, pour que tu puisses trouver le moyen de t'enfuir au milieu de la nuit. J'ai pas envie de devoir te retrouver à moitié endormi.
-Je vais pas m'enfuir.
Il lève un de ses sourcils arqués pas convaincu avant de me dire:
-Le truc drôle c'est que je te crois pas, donc ramène ton cul au lit.
Cherchant à éviter de me retrouver là-dessus avec lui, je réponds:
-J'ai faim.
-Ben vas manger, t'es pas un putain de Tamagotchi que je dois nourrir.
-Mais tu viens de dire q...
Face à son regard aux tâches me brûlant, je me tais et dis même:
-J'ai pas vraiment faim.
Je range la couverture puis m'approche du lit. J'évalue la situation et me mets presque au bord du matelas, à distance de Mars qui est maintenant couché à l'envers de moi, occupé sur son téléphone. Je dois cohabiter avec ses pieds pour ne pas avoir mes fesses de son côté. C'est pas super, mais au moins ils ne sentent pas. Sous la couverture je déverrouille mon téléphone qu'il m'a laissé. Super malin. Je pourrais appeler la police ou chercher une solution en demandant à une IA. En fait c'est moi l'idiote.
La police va m'enfermer avec joie sûrement aux ordres de Sirius et une IA n'est pas assez puissante pour ce genre de problème complexe. Sans parler du côté illégal qu'elle va bloquer. Voilà pourquoi j'ai toujours mon téléphone. Pourtant toute la police ne peut pas être à leur botte, pas avec le maire. Je le vois très mal à leurs ordres. Il a même fait exécuter des membres de The world. Bref, je dois trouver une solution. Je me redresse un peu malgré les picotements sur ma fesse et demande:
-Ce serait combien pour démissionner?
Soudain j'entends quelque chose d'anormal, un rire. Le rire de Mars. Un peu plus clair que sa voix, mais toujours grave. Il n'est pas aussi moche que sa personnalité. Toujours sans bouger il dit de sa voix portante:
-On ne démissionne pas, imbécile.
Je suis touchée à cause de son insulte et en plus ma blessure me nargue. Je réplique donc trop agressivement:
-M'appelle pas imbécile.
Il se met aussi sur son coude et malgré la taille du lit qui était trop grande pour moi seule, je vois bien son regard. Il a cet air qui te supplie presque de continuer à le provoquer pour qu'il puisse te démolir. Il me demande:
-Tu vas faire quoi sinon?
Une de mes fausses sœurs avait souvent ce regard et donc ça m'énerve encore plus. J'ai qu'à mourir à ce stade, je m'en fous. Emplie d'un courage explosif je réponds:
-Me cherche pas.
Il s'assied. Je saute hors du lit et cours, mais je n'ai même pas l'occasion d'ouvrir la porte que mes pieds trainent par terre. Le cœur battant fort, je me fais jeter sur le lit. Avant que je ne puisse fuir Mars me plaque contre le matelas. Au-dessus de moi il tient mes poignets si fort que je n'arrive pas à les bouger. Ma blessure me lance et mon cœur s'emballe. Dans ses iris, les paillettes brunes sont comme des météorites qui m'attaquent tandis qu'il me menace:
-Apprends le respect et joue pas avec mes nerfs.
Son visage est si près que je devine qu'il a mangé un truc sucré. Putain je veux qu'il dégage. Il est trop proche. Je ne peux m'empêcher de répliquer:
-Le respect, on l'obtient.
Avec son sourire diabolique il demande:
-Tu veux que je te casse la gueule pour l'obtenir?
-C'est tout ce que tu peux faire? Me frapper? C'est comme ça que t'obtiens le respect?
-Non moi je sais faire autre chose que des putain de gâteaux.
Piquée, je réplique:
-Va te faire enculer.
Ses lèvres s'étirent doucement et il réplique:
-C'est pas trop mon truc, mais toi je pourrais bien te la mettre.
-Tu le feras pas.
Soudain il me retourne sur le ventre et me maintient en appuyant dans mon dos. Il écarte mes jambes avec son genou. J'ai du mal à respirer à cause de la panique. Qu'est-ce qu'il fout? D'un coup, je sens sa main glisser de plus en plus haut sur ma cuisse et essaie de bouger. En échange, il enfonce un peu plus son coude dans mon dos et je gémis de douleur. Ses mains se baladent près du côté de ma blessure sans trop la toucher. Il me caresse très légèrement et des fois il s'arrête, mais je frémis. Ses doigts effleurent à peine mes fesses couvertes de mon short léger, que j'ai à nouveau cette chaleur et ces picotements au bas-ventre. J'ai de plus en plus chaud et des palpitations. Je ressens aussi l'envie de pousser un peu plus mon corps vers son toucher. Je déteste ces réponses physiques totalement anormales. Ce type a attaqué mon corps et maintenant mon tas de chair trop bête réagit différemment. Je suis censée avoir un instinct cherchant à éviter le danger.
Ma respiration s'arrête presque quand son corps se baisse près du mien et je sens sa chaleur. Son entrejambe touche mes fesses, mais je n'ose pas bouger ni me débattre. J'essaie d'ignorer le plus possible la forme épaisse que j'ai senti. Mon cœur bat à tout rompre et je suis crispée. Je ne sais pas si c'est de la peur qu'il touche ma blessure qui s'est mise à dormir ou...non. Maintenant, tandis que mon corps est tendu je sens sa chaleur quand il dit dans mon oreille:
-Me cherche pas.
Soudain il se relève et j'ai une sensation de froid, mais respire à nouveau normalement. Mon cœur bat toujours la chamade et je me réfugie dans un coin du lit, sous les couvertures. Je me contente de fixer le vide un moment pour me calmer. Je me mets ensuite à écouter de la musique dans le noir quand il a éteint la lumière. Je laisse les basses me distraire de mes craintes par rapport à cet homme inconnu dans mon lit et ce qu'il vient de faire.
Au bout d'un moment je crois que c'est bon. C'est maintenant que je peux tenter quelque chose. En immobilisant mes poumons, je m'assieds doucement. Pas de réaction. Ce connard dort profondément, bonne tolérance c'est ça oui. Merci les macarons. Je me lève doucement et m'approche d'une de mes vestes sur ma chaise, avec le corps en alerte. Je cherche ma lacrymo dans les poches, mais sursaute en entendant:
-Je l'ai. Je suis pas d'humeur pour tes conneries à la lacrymo...
Sur un ton plus dur et intense malgré son niveau bas, il continue:
-Maintenant, ramène ton cul au lit.
Il doit être énervé que je l'aie réveillé. Il pourrait se venger. Je dis doucement:
-Je vais dormir par terre.
-Lit ou par terre, si je veux te faire n'importe lequel des trucs tordus que t'imagines il y aura pas de différence. Donc arrête tes conneries et viens ici.
Je tremble intérieurement et hésite. Je suis bien à sa merci. Il ajoute plus calmement:
-Je vais rien te faire, je suis pas un obsédé en manque.
Il ordonne:
-Maintenant, tu montes.
Je me résigne à le faire et me recroqueville sur moi-même, le plus loin possible de lui qui me dit:
-Dors.
Facile à dire.
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