𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐗𝐗𝐗𝐈𝐈














A    R    T       D    U
—      C      R      I      M      E      —




























— (T/P) ?

             Assise en tailleur sur la moquette, je me détourne de ma fille pour regarder le nouveau venu. Les yeux glacés de Livai brillent dans la lumière tamisée de cette soirée. Je déglutis péniblement en le voyant. Son regard est sans équivoque.

— Nous sommes prêts.

             J’acquiesce et me tourne à nouveau vers Lila qui m’observe. Ses poupées à la main, elle fronce les sourcils.

— Allez, au lit, ma puce, je murmure.

             Etrangement, elle ne proteste pas. Contrairement aux autres soirs, elle ne négocie pas pour pouvoir jouer encore un peu. Sans un mot, elle dépose ses jouets dans le bac prévu à cet effet. Peut-être ressent-elle la tension dans l’air. Peut-être sait-t-elle que cette soirée est importante. Qui sait ? Je la saisis dans mes bras et la dépose dans son lit. Son père reste dans l’encadrement de la porte.

             Nettoyée et déjà en pyjama, elle est fin prête à s’endormir. Je l’observe quelques instants, un sourire aux lèvres. Ses yeux brillants me fixent tandis que je remonte la couverture jusqu’à son menton. La journée a été compliquée, elle n’a eu de cesse de se débattre pour la moindre petite remarque que je lui faisais — de l’interdiction de manger des bonbons juste après s’être lavé les dents à celle de boire du soda. Mais, maintenant, elle s’est calmée.

             Posant une main sur sa joue, je caresse sa pommette.

— Sache que je t’aime, ma puce. De tout mon cœur.

— Moi aussi je t’aime, maman.

             Mes yeux s’humidifient. Elle ne m’appelle ainsi que depuis très peu de temps. Bien que nous ayons eu la conversation sur ma véritable identité avant-hier, elle a eu du mal à s’habituer à ce nouveau titre. A vrai dire, aujourd’hui encore et à plein de moment, elle m’a appelée par mon prénom.

             Alors mon cœur bat à toute vitesse et je lutte contre l’envie de pleurer. Posant simplement mes lèvres sur son front, je l’embrasse et elle fait de même sur ma joue.

— Bonne nuit, mon cœur.

             Je me lève tandis qu’elle murmure, ses paupières se fermant toute seule :

— Bonne nuit, maman.

             Je souris et m’efforce de ne pas la regarder. Sinon, je n’arriverais plus à sortir de cette pièce et resterais blottie contre elle. Alors je rejoins Livai en quelques pas et il ferme la porte derrière moi.

             A peine a-t-il actionné le loquet qu’il me tend un beretta. J’observe ce dernier quelques instants avant de le saisir, ôtant le chargeur pour vérifier le nombre de balles puis le rangeant dans ma poche arrière tout en veillant à ce que le cran de sureté soit actionné.

             Nous deux marchons en direction du salon.

— Elle est arrivée ici mais ne sait pas pourquoi nous l’appelons. Evidemment, elle doit avoir des doutes. Elle est la meilleure enquêtrice de ton organisation et, depuis que tu as été enlevée, elle n’a pas tenté de te retrouver.

— Qu’elle ait des doutes, je vais lui demander des comptes. Toutes les issues sont fermées ?

— Verrouillées et surveillées. Sieg et moi serons avec toi dans la pièce. Des gars de confiance sont aux alentours. Elle ne pourra pas s’en sortir, je te le garantis.

             J’acquiesce, amère. J’ai fait confiance à Mikasa. Sans elle, je me serais suicidée après le « décès » de Lila. Apprendre qu’elle m’a trahi, mais surtout qu’elle savait que ma fille était vivante mais n’a jamais tenté de me prévenir me remplit d’une colère noire.

             Nous arrivons dans le salon. Elle s’y tient. Ses courts cheveux noirs lui donnent une allure élégante, soulignée par la robe noire qu’elle porte. Bien que maquillée, elle n’a pas dissimulé la cicatrice zébrant sa pommette droite.

             Elle s’incline dès qu’elle me voit, comme le veut le protocole. Je soupire intérieure en la voyant faire. Quelle superbe actrice.

— Madame. Je suis honorée de constater que vous vous portez bien, déclare-t-elle.

             Derrière elle s’étend l’écran plat. Dans l’encadrement de la porte menant à la cuisine, Sieg se tient, un verre de bourbon à la main. Il nous jauge silencieusement tandis que Livai, lui, vient se placer au niveau de l’autre issu.

             Elle est cernée. Et nous tous dans cette pièce savons qu’elle est assez observatrice pour s’en rendre compte.

— Puis-je savoir ce qu’il se passe ? demande-t-elle en se redressant.

             Je souris, m’approchant de la table basse où se trouve le paquet de cigarette de Sieg Jäger. Je ne fume pas à l’ordinaire mais Mikasa non plus. Elle déteste cette odeur qui lui rappelle un tortionnaire qui brûlait des cigarettes sur ses avant-bras, en Russie.

             Je veux simplement lui faire comprendre que ceci n’est pas une discussion polie et courtoise.

             Glissant une cigarette entre mes lèvres, je place la flamme en son bout et allume la mèche, inspirant une bouffée. Elle se crispe en me voyant faire. Puis ferme les yeux quand je recrache la fumée, tentant de passer outre l’odeur forte que je relâche dans l’air.

— Puis-je savoir de quoi on m’accuse ? balance-t-elle aussitôt, comprenant que je ne suis pas enchantée de la revoir.

— Mais je ne t’accuse de rien, mon amour, je souris en m’asseyant sur le canapé tandis qu’elle observe le moindre de mes mouvements. Je peine juste à comprendre certaines choses, pour être honnête. Des détails insignifiants qui ont pourtant leur importance.

— Comme ?

             Elle relève fièrement le menton, tentant d’ignorer l’odeur tandis que je tire une nouvelle taffe.

— J’avoue ne pas comprendre ce qu’a bien pu faire ma jolie enquêtrice attitré, mon bras droit, mon majestueux cœur pour ne pas réussir à comprendre que j’étais en danger et venir me chercher ?

— Je pensais que cela faisait parti de votre plan pour arrêter Sieg Jäger, madame.

— Ah oui ? je susurre dans un sourire malicieux.

             Tirant une nouvelle taffe, j’inspire le tabac que je recrache en direction de la femme. Elle n’est pas assez près de moi pour que je puisse me faire le plaisir de lui recracher cela en plein visage. Mais la façon qu’elle a de se crisper me plait toujours autant.

             Dans le silence tendue qui s’installe, je murmure soudain :

— Sers-moi un verre.

             Aussitôt, elle saisit la bouteille de bourbon et en remplit le fond d’un verre avant de me le tendre. Voyant que je ne tends pas la main en retour, ses joues rosissent et elle pose un genoux à terre, s’asseyant juste devant moi et inclinant la tête tout en posant la verre sur ma main.

             Je saisis ce verre à mon tour. Puis, me penchant en avant, murmure dans le creux de son oreille :

— « 하양, 카마, 귀 ».

             Soudain, ses yeux s’écarquillent. Je la sens se crisper et me délecte de son visage atterré tandis que je me recule.

— Mikasa, tu me déçois… Tu aurais au moins pu faire semblant de ne pas comprendre ce que je venais de dire, je lâche avant de boire une gorgée de bourbon. Cela dit, je ne t’aurais pas cru. Après tout, tu es celle qui m’a encouragée à me faire appeler le Corbeau Blanc.

             Elle tremble presque. Elle sait que c’est la fin. Les issues sont cernées et je sais la vérité. Tapotant ma cigarette, je laisse la cendre tomber à ses pieds. Elle fixe cette dernière, les yeux écarquillés.

— J’aurais dû me douter plus tôt de ton implication dans cette histoire. Toi, fille d’une Azumabito et d’un Ackerman décide de te tourner vers moi, le Corbeau Blanc ? Est-ce un hasard que nous soyons les trois noms les plus importants du crimes organisés ? Et que de cette façon, tu as un accès privilégié au sein de ces trois organisations ?

             Ses mains se crispent.

— Continuellement, nos trois clans s’opposent pour savoir laquelle des trois dirigeantes à leurs têtes est la plus puissante. Mais nous avons eu tort de nous imaginer que l’une d’entre nous pouvait faire le poids face à une femme qui a littéralement toutes les informations sur ces familles à porter de main.

             J’inspire une nouvelle taffe avant de boire un peu de bourbon.

— Parce que ça n’a jamais été que ça, n’est-ce pas ? Le pouvoir. Tout est question de pouvoir, avec toi.

             Elle ne me regarde pas, à genoux sur le sol et fixant ses mains posées sur ses genoux.

— Avant que je n’entre en scène, tu travaillais pour Foucault. Tout comme l’ancienne coéquipière de Sieg. Et cela se devine au fait que vous deux utilisiez le mot de passe « 하양, 카마, 귀 » que certains comprenaient comme « Corbeau Blanc ». Si j’ai un enregistrement clair de Félicie, juste avant sa mort, qui prononce ces mots, je n’ai de preuve pour toi que des déductions. Pourquoi m’aurais-tu poussée à prendre ce nom si ce n’est pour me saboter ?

             Livai me fixe depuis sa position ainsi que Sieg. Je sens leur regard brûlant sur moi. Ils me donnent de la force.

— Tu n’as jamais voulu que le pouvoir. Et tu savais comment l’obtenir en t’infiltrant dans des organisations. Devenant agent double ou même triple. Tu étais naturellement issue des organisations Azumabito et Ackerman mais tu t’es glissée dans celle de Foucault. Puis tu t’es servie de moi pour organiser sa chute.

— (T/P) ne m’a pas dénoncé au FBI, contrairement à ce qu’on pensait. C’était toi. Tu l’as fait pour m’écarter d’elle. Puis, tu as enlevé Lila. Tu savais que, comme je n’étais plus là-bas, je ne pourrais plus la protéger, lance Livai. Le seul vrai rempart entre toi et ma fille était moi. Alors tu m’as écarté.

             Mikasa se redresse brutalement et le fusille du regard.

— Je ne vois pas pourquoi j’aurais fait une chose pareille.

— Mais pour écarter Foucault, bien sûr, je lance.

— Lila est la fille de (T/P), mais elle est aussi et surtout la mienne. Le clan Ackerman aurait fait n’importe quoi pour la récupérer. Tu as conseillé à Foucault d’organiser une rencontre mais a fait sauter le bâtiment en espérant tuer le restant du clan Ackerman et la bande de Foucault sur le coup. Je suppose que tu n’avais pas prévu que (T/P) viendrait.

             Mikasa sert les poings.

— Mais tu y as vu une opportunité. Je me suis réveillée, amnésique, et tu t’es imaginée pouvoir faire de moi un outil de pouvoir. Refusant de me dire la vérité, à savoir que ma fille était encore vivante, tu t’es servie de ma peine pour me pousser jusque dans l’illégalité, faire de moi le Corbeau Blanc. Tu pensais que tu allais pouvoir me manipuler aisément.

— Nos rapports étaient tous formels. Partout où des hommes de Foucault étaient tués, on entendait des mots : « 하양, 카마, 귀 », lance Sieg. Qui signifient : Hayang, karma et oreille mais peuvent aussi être interprétés comme « Corbeau Blanc ». Et tu savais que nous avions tous déjà émis l’hypothèse que la personne qui avait faite sauter cette bombe, l’ennemi de Foucault, était le Corbeau Blanc. Tous ses hommes mourant prononçaient ce nom et un attentat manquait de lui ôter la vie : c’était l’explication logique.

             Je finis mon verre.

— Il y avait trois familles importantes du crime : Foucault, Azumabito, Ackerman. Tu faisais parti des trois et avais essayé d’écarter la première mais cela avait échoué. Tous ont mis l’explosion de la bombe sur le compte d’une chimère, un criminel qui n’existait pas réellement, le Corbeau Blanc, je lance.

— Tu ne pouvais pas devenir le Corbeau Blanc. Il fallait que tu préserves ta couverture auprès de Foucault. Mais tu t’es dit que tu pourrais créer le Corbeau Blanc. Alors tu t’es jetée sur l’amnésique de service, a exploité sa peine pour devenir sa seule raison de vivre en pensant que tu pourrais la manipuler facilement pour prendre d’une certaine façon la tête d’un nouveau grand nom du crime organisé, lance Livai.

— Mais (T/P) est bien plus intelligente que tu ne le crois. Tu n’as jamais réussi à contrôler l’organisation au travers d’elle. Elle a écarté Foucault toute seule, prenant sa place dans le big tree et tu t’es contentée de rester à ses côtés pour garder ton statut d’agent triple.

— Puis, quand le « Corbeau Noir » m’a enlevé sur ordre de Foucault, tu as saisi cette opportunité pour me voler secrètement ma place au sein de mon organisation. Et c’est pour ça que tu n’as pas chercher à me retrouver. Tu préférais me savoir absente.

             Elle ne dit plus rien, percée à jour. Son silence vaut toute les approbations du monde. Ecrasant ma cigarette, je me lève donc simplement et pose une question. Une seule.















— Pourquoi avoir tué la coéquipière de Sieg ?































2083 mots

quelques révélations...

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