𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟓𝟑
















𔘓

C  H  A  P  I  T  R  E    5 3

𔘓















— désolée de ne pas —
avoir publié samedi
j'étais avec ma
meilleure amie et j'ai
perdu la notion du temps





































           Quelque chose ne va pas.

           Hier, James m’a demandé de le rejoindre chez lui afin qu’il se détende avant de faire sa déposition. Cependant, épuisés, nous n’avons eu la force de sortir de mon appartement et avons préféré passer la journée ensemble, blottis l’un contre l’autre.

           Ce matin, je l’ai accompagnée au commissariat. Il m’a demandé de le laisser seul pour cette épreuve. Cela m’a coûté mais je lui ai obéi.

           Il serait malvenu de ma part de me plaindre alors qu’il est assurément celui qui vit la situation la plus douloureuse.

           Pour m’occuper l’esprit, je n’ai trouvé meilleure chose à faire qu’aller demander des explications à sa mère. Je ne sais trop ce que j’attendais de cette conversation. Rien, quelque part.

           Mais elle a trouvé le moyen de me décevoir.

— Bon, allez, (T/P)... T’es pas nerveuse quand même ?

           Tantôt, James m’a envoyé un texto. Une ligne.

           “42 avenue Edgar Morin. Bâtiment A. Appartement 58.  Cinquième étage.”

           Son adresse.

— Enfin… Vous êtes en couple, tu ne vas pas être gênée qu’il t’envoie son adresse sans contexte ? Après t…

           Je me fige soudain. Chacun de mes traits retombent.

           Oh merde.

           Assurément, j’ai mal agi. Une erreur a été commise et je sais que je vais en pâtir. Mon cœur se serre et je tente d’ignorer ma gorge qui fait de même. 

— Un problème, ma petite ?

           Une voix résonne, à ma droite.

           Tournant la tête, je découvre la silhouette d’une femme sans doute âgée d’une dizaine d’année de plus que moi. Enveloppée d’un tailleur particulièrement élégant, elle ne jure absolument pas avec le décor nous entourant.

           Sur les murs anthracite ressortent des motifs géométriques. Des cadres dorés s’imbriquent régulièrement, s’étendant entre chaque porte de maisons, lesquelles sont noires frappées de plaque d’or indiquant le numéro d'appartement.

           Elle se tient à côté du “47”, une pipe à la main. La fumée qu’elle recrache flotte autour d’une haute plante posée dans l’angle du couloir.

— Alors ? insiste-t-elle en tirant sur sa pipe dans un sourire malicieux.

           Un soupir me prend.

— Mon copain m’a demandé de venir ici.

           Elle lâche un rire sec, faisant couler son regard le long de ma silhouette.

— Et vous craignez que votre tenue ne corresponde pas au décor ?

— Ca, c’est sûr  ! je m’exclame d’un ton désespéré. Putain, mais pourquoi j’ai mis un slip à l’effigie de Pitbull ?

           Désespérée, je pousse un long couinement suivi  d’un râle.

           A ma décharge, je dois avouer qu’il s’agit du sous-vêtement le plus correct que je possède.

— Pitbull ? Le chien ?

— Mais non ! Le rappeur ! je m’exclame, atterrée.

           Tirant une taffe, elle médite un instant sur ma réponse. Je réalise qu’elle ne voit pas de qui je parle.

— “MISTER WORLWIDE, YOU KNOW ?”

           Mon hurlement le surprend. Elle sursaute et manque de se brûler avec sa pipe. Reprenant ses esprits, elle me fusille du regard.

— Mais enfin, ça ne va pas ?

— Quoi ? De chanter ?

— Non, de chanter faux.

           Je gonfle les joues, appréciant moyennement le commentaire. Toujours perchée sur son paillasson, elle ne dit rien.

— Méchante.

— Je préfère être méchante que porter un slip à l’effigie d’un rappeur.

           Pinçant les lèvres, je me vois obligée d’acquiescer à ses dires.

— Bien… Un partout, la balle au centre.

— Non, deux zéro.

           Pour toute réponse, je lui tire la langue. Elle hausse les épaules et retourne dans sa maison. La porte se ferme doucement derrière elle et je me décide à ouvrir celle me faisant face.

           Le verrou est défait. Là est ce qui m’a turlupinée, quand je suis arrivée.

— Euh… Bonjour ?

           Ma voix résonne à peine tant je suis intimidée.

           Je n’ose pas entrer. Je ne sais même pas s’il a laissé cet accès intentionnellement déverrouiller. Mais s’il dort, je m’en voudrais de le réveiller en sonnant.

           Alors, précautionneusement, j’avance. Hésitante, je pénètre la salle sombre. Mes paupières battent l’une contre l’autre, tentant de s’habituer à la luminosité. Il faut quelques secondes à ma rétine pour recomposer les contours des silhouettes qui se font presque indiscernables dans les ténèbres.

           Bientôt, je distingue de larges canapés blancs formant un “U”, au milieu d’un salon. Ils entourent une table basse, laquelle fait face à un écran plat. Entre leurs dossiers et un ilôt central faisant office de cuisine, un couloir mène à un escalier.

           J’hésite à l’emprunter, me doutant qu’il s’y trouve peut-être…

— Tu es là.

— AAAAAARGH !

           James se décale dans un soupir, évitant sans mal le téléphone que je viens de lui lancer. Mon corps se crispe en voyant l’engin tomber. Le son me fait grincer des dents.

           Joignant ses mains dans son dos, l’homme soupire. Puis, il le regarde.

— Tu en voudras un neuf ?

           Je ne réponds pas, consterné.

— Tu sais, je suis conscient que surgir dans ton dos dans cette pièce sombre t’as surprise mais ce n’est pas une raison pour m’envoyer un téléphone à la figure.

           Je grimace, embêtée.

           Il m’offre un rictus et se penche pour ramasser le cellulaire. Naturellement, il me le tend et je le saisis, le regardant s’avancer jusqu’à une télécommande.

— Ce sera mieux…, il la saisit avant d’appuyer sur un bouton, …ainsi.

           Aussitôt, les contours des meubles se font plus nette encore tandis qu’une lumière pâle, d’hiver froid, vient remplacer l’obscurité. Je réalise que ce que je croyais être des murs sont en réalité des baies vitrées opaques.

           Il vient de dissiper le voile qui les avait pénétré, dévoilant les immeubles de la ville alentour qui nous assiègent.

           Mon souffle se fait court à cette vision.

— Je… Woaw…

— Ca te plaît ?

           Ouvrant la bouche, je m’apprête à répondre que la vue est splendide. Mais mon regard s’arrête sur James.

           Il y a des choses que je n’avais pas vu dans l’obscurité…

           Ma bouche est soudain sèche.

           Large, ses épaules développées se décomposent en deux bras puissants et forts, lesquels encadrent un torse massif. Les reliefs de ses abdominaux semblent avoir été tracés en rêve. Par endroit, des traces blanches traversent la chaire hâlée. Des cicatrices.

           Ma lèvre tremble.

           Il ne porte qu’un jogging. La ceinture de ce dernier tombe lâchement sur le “V” marquant la chute de son torse.

           Je déglutis péniblement.

— Je sais qu’il est tard mais je vais me faire un café, tu en veux ?

           La lumière danse sur sa peau, s’éclatant en paillettes scintillantes le long de sa silhouette. Tout dans son essence semble vouloir montrer son corps. Comme si rien de plus superbe n’avait jamais été donné à voir.

           Éblouissant. Dans sa simple façon d’exister.

           Il se retourne dans un geste qui me fait frissonner, montrant ses omoplates saillantes. Traversé d’énormes balafres blanches, son dos s’articule, constitué de nombreux muscles qui s’activent sous la peau dans une chorégraphie légère et hypnotisante.

— (T/P) ? insiste-t-il en glissant une capsule dans la machine. Tu veux un café ?

— Je porte un slip Pitbull.

           Ses gestes se figent.

           Quelques instants, il ne dit rien. Puis, dans un long soupir, il place sa tasse dans la cafetière.

— Je… Je ne vais même pas prendre la peine de commenter.

           Je gonfle mes joues. Mon regard s’attarde sur la chute du creux de ses reins.

— Non mais si, en fait…, se reprend-t-il. Où est-ce que tu réussis à trouver des fringues pareils ?

— Ah, tu te poses des questions sur les mystères des femmes, hein ?

— Je dois avouer qu’étant propriétaire d’une compagnie de lingerie, non. Mais découvrant ta lingerie, oui.

           Je fais la moue, pinçant les lèvres. Ses yeux glissent alors sur le tee-shirt que je porte. Brutalement, il rougit.

           Je baisse les yeux et découvre le visage de Kylie Jenner.

— Tu… Tu le mets ?

— Bien sûr, que je le mets ! Pourquoi ?

           Il tente de lutter contre le sourire qui étire ses lèvres.

— Parce que, je… Enfin… Il te va bien.

           Mes joues se font soudainement chaudes et je détourne les yeux.

— Je… Merci.

           Il ne répond pas. Nous ne nous disons rien durant un moment. La machine à café a le temps de s’actionner deux fois et James prend celui de disposer les tasses sur un petit plateau. Je le regarde faire, la gorge nouée.

           Il se retourne bientôt, le saisissant à une main et plaçant son crochet en-dessous pour le sécuriser.

— On s’assoit ? me demande-t-il timidement, les rougeurs sur ses joues tranchant abruptement avec sa carrure imposante. J’aimerais te parler de quelque chose.

           Malgré son ton timide, je réalise aussitôt le sérieux de la situation. Si nous ne pouvons pas nous tenir debout, que nous avons besoin de chaleur et réconfort, cela signifie qu’il compte discuter de ce matin.

           De la déposition qu’il a faite, incriminant ses parents.

— D… D’accord, James. Parlons.





























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