𝗗𝗘𝗥𝗡𝗜𝗘𝗥 𝗔𝗖𝗧𝗘 ;; 𝐷𝑒𝑟𝑛𝑖𝑒𝑟𝑒 𝑣𝑎𝑙𝑠𝑒𓈒
【 𝕯𝖊𝖗𝖓𝖎𝖊𝖗 𝖆𝖈𝖙𝖊. 】
↓
━━ 𝘿𝙀𝙍𝙉𝙄𝙀𝙍 𝘼𝘾𝙏𝙀 - 𝙎𝘾𝙀𝙉𝙀 𝙁𝙄𝙉𝘼𝙇𝙀 ;;
𝘋𝘦𝘳𝘯𝘪𝘦𝘳𝘦 𝘷𝘢𝘭𝘴𝘦𓈒
「𝗔ℓℓ.」
🎶 ↬ Set fire to the rain - Adèle.
❝'Cause I knew that was the last time.❞
[POST EXPLICATIF.]
DISCLAIMERS ;;
↳ Mort.
↳ Viol (mentionné, pas décrit.)
Munissez-vous de mouchoirs.
Conseil (non-appliqué) de l'auteur.
[ANGEL KYRIOKU & SKYLAH LEYARAH.] - DERNIÈRE VALSE.
Le ciel est gris. Si triste. Privé de sa lumière.
Le vent est froid. Violent. Énervé.
Les nuages sont gris. Gris perle. Pleurent des larmes transparentes qui se regroupent et forment des flaques. Plaquent mes cheveux blancs dans les flaques et les mouillent.
Mouillent mes vêtements, mon corps entier.
Transparence éphémère.
Sa pureté se teint soudain de rouge qui dégouline, se distille et se mêle à la pâleur.
Elle reprend le dessus.
Les gouttes se font plus fortes.
Je suis incapable de me lever pour y échapper... pourtant j'arrive à en échapper.
Les longs cheveux blancs de ma sœur me chatouillent et ses yeux bleus se posent sur moi.
Sa voix est lointaine. Je peine à la discerner. Est-ce le tonnerre qui gronde ou bien sont-ce ses cris qui tonnent ?
Les contours de ma vue périphérique se noircissent.
Je ne sens plus mon corps.
Je ne sens plus mes bras. Mes jambes. Mes doigts. Mon visage. Plus rien.
SKY ;《‐Angel ! Angel, réponds-moi !》
Skylah, pourquoi te presses-tu ? Pourquoi te vois-je relever la tête en hurlant pour de l'aide ? Pourquoi te vois-je soudain si sentimentale, toi qui avais l'habitude de ne rien montrer lors de mes rares venues ? Pourquoi te vois-je perdre les pédales ?
Pourquoi te vois-je changer ?
Des bribes me reviennent.
Des bribes, des rares passages passés en ta compagnie.
Je réalise à quel point je n'ai jamais été présent pour toi. Jamais. Pas une seule fois.
À quel point ma distance était pour te protéger mais qu'elle n'a fait que nous éloigner. Elle n'a fait qu'instaurer une distance, un fossé entre nous.
Je ne te connais même pas.
ANGEL ;《‐Pardonne-moi...》
Murmure. Mais tu l'entends.
Je sens que ma tête quitte le sol et se pose sur la chair. Je devine que tu tentes de me garder un maximum auprès de toi. Tu grelottes, tu trembles, je ne sais pas si c'est de peur, de rage, de tristesse ou de froid et ça importe peu.
Je sens brièvement tes caresses sur mes joues. Je vois tes yeux s'embuer.
Non, s'il-te-plaît petite sœur, ne pleure pas. Ne te laisse pas aller aux sentiments toi non plus. Je t'en supplie, ne fais pas ça, pas maintenant.
SKY ;《‐Pourquoi t'excuses-tu ? Tu n'as rien à te faire pardonner, Angel... pourquoi cherches-tu à te repentir maintenant pour des erreurs que tu n'as pas commises ?》
Ce ne sont pas les paroles que j'attendais que tu me dises.
Je ne sais pas parler que par bribes.
Alors les seuls mots que je peux te dire, désormais, ne sont plus que la même litanie. J'espère que tu comprendras que je ne peux pas me justifier, maintenant.
ANGEL ;《‐Pardonne-moi... pardonne-moi... pardonne-moi... pardonne-moi...》
Je sens ma voix partir.
Le trouble s'installe, je ne perçois plus ton visage pâle sur lequel glissent des larmes des cieux. Ma vision se fait confuse, je te vois tantôt nettement, tantôt trouble. Le noir me happe, m'aspire et m'attrape pour me tirer hors de ce monde.
Seigneur, protégez-la.
Par pitié.
Protégez-les.
ANGEL ;《‐Pardonnez-moi... je vous ai aimés... pardonnez-moi...》
Le voile noir se pose tout à fait.
Je ne vois plus ton regard, ton visage.
Non, je te vois penchée au-dessus de mon corps.
Je te vois murmurer quelque chose, puis relever la tête.
La pluie te glisse dessus.
Tes yeux s'arrêtent sur moi.
Je ne sais pas si tu arrives à me voir, réellement, ou si c'est une hallucination que tu as.
Mais tu as posé les yeux sur moi.
??? ;《‐Angel...?》
Et puis, dans le fond, ça n'a pas d'importance.
Je tourne la tête vers la voix que je reconnais par cœur.
Jian.
Elle se tient là, aux côtés de maman et elles me sourient. Toutes les deux.
Jian court et se jette dans mes bras. Je l'étreins et la première chose que je fais, c'est humer son parfum, ce parfum qui m'a manqué durant tant de temps, tout le long de son absence.
Je la serre fort contre moi, comme si elle allait disparaître. Peut-être que dans le fond, c'est le cas. Peut-être qu'elle peut disparaître à tout moment.
MALIA ;《‐Tu t'es bien battu, mon ange... tu as fait du mieux que tu as pu.》me dit-elle.《Tu as fait assez, tu as été assez. Maintenant, il est temps que tu prennes un peu de repos. Viens.》
Jian enlace sa main avec la mienne.
Je te jette un dernier coup d'œil.
Puis je pars sans me retourner.
Je ne sais pas si tu m'as vu une dernière fois.
Mais je sais que désormais, je ne te reverrais plus jamais.
Et que je resterai avec pour seul regret.
De ne jamais t'avoir remercié ou dit que je t'aimais.
Merci Skylah.
Je t'aime.
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[MAXENCE YUUI & FROST KYRIOKU.] - DERNIÈRE VALSE.
J'ai jamais bien compris mon rôle de père auprès de toi, jamais été certain que ce que je ferais serait assez, suffisant, la bonne manière de procéder.
Pourtant, ce dont j'ai été certain dès les premières minutes de ton existence, c'était que je t'aimais.
Que je te protégerais, toujours, que tant que je serai vivant, rien ni personne ne te ferait de mal. Que ce putain de monde et les saloperies qui l'habite ne t'atteindrait pas.
Jamais.
Du mieux que je pouvais.
MAXENCE ;《‐Papa, papa ! Regarde, regarde, regarde ce que je sais faire !》
T'avais quoi ? Cinq ans ? Presque six ? T'étais haut comme trois pommes, ça je m'en souviens.
T'étais tout fier de me montrer les trois gouttes que t'avais faite avec tes mains.
Et t'étais tellement fier de toi.
J'étais fier de toi aussi.
Je l'ai toujours été.
Puis t'as grandi, il est venu le moment où t'es parti du nid familial pour faire ta vie. Fallait que je m'y attende, ce genre de chose dure jamais éternellement après tout.
Mais t'étais toujours en vie, alors je m'en suis pas trop fait. Parce que tant que t'allais bien, que t'étais en bonne santé, que t'étais vivant, tout m'allait. Parce que t'étais toujours là.
Et maintenant ?
Maintenant t'as juste l'air endormi.
T'as toujours dormi bizarrement.
FROST ;《‐Maxence ?》
Ton prénom m'échappe, glisse en même temps que les gouttes et claque comme le vent.
Il a fallu que je dise quelque chose, près de ton corps endormi, avec la main posée sur ton épaule, pour que je revienne à moi et que je réalise que tout ce que j'ai vu jusqu'à présent n'était que des souvenirs, qui continuent de se jouer devant mes yeux mais qui ne représentent pas la réalité.
La réalité c'est que tu réponds pas à l'appel, aux pressions que je fais pour que tu te réveilles.
T'as toujours rechigné à te lever. Fallait toujours que je fasse ça, quand t'étais petit.
Mais tu réponds pas.
FROST ;《‐Maxence, réveille-toi... il pleut là, tu vas attraper froid. C'était pas le moment de t'endormir là.》
Tu réponds toujours pas.
Ton œil rouge reste immobile, ta bouche, ouverte, le trou reste béant entre tes yeux.
T'as l'air con comme ça, alors je sais pas si c'est pour ça que je ris ou si c'est pour autre chose et, dans le fond, j'en ai rien à foutre.
FROST ;《‐Tu dors l'œil ouvert maintenant ? Tu fais flipper, Max. Allez, je sais que t'es bien mais faut te lever là, sérieux, je rigole pas.》
Je te pousse un peu.
Un peu plus fort.
Pas trop.
Mais assez pour que tu manques de tomber.
Je suis obligé de te rattraper et de te remettre correctement.
Tu réagis toujours pas.
Pas un rire pour me dire que c'est une blague.
Pas un son, pas un geste.
Je fronce les sourcils.
Ça m'amuse plus.
FROST ;《‐Maxence, ça me fait plus rire maintenant. Allez, relève-toi maintenant.》
Tu bouges pas.
Et soudain, la claque.
Au son d'un éclair, je réalise, je crois, que tu ne te relèveras pas.
Pas seulement maintenant.
Mais plus jamais.
Que tu vas rester là.
J'ai froid d'un coup.
Les blessures qui n'étaient jusque-là que de bêtes bobos d'enfant, ces si petites entailles enfantines causées par des ronces, se transforment juste devant mes yeux en blessures meurtrières, mortelles.
Humaines.
Je vois trouble soudain.
J'ai froid au thorax, au torse, aux doigts, au ventre.
Au cœur.
J'arrive plus à respirer.
Toi, t'arrives plus à vivre.
Je tremble.
Tu bouges pas.
De toi, il me restait ta présence, des moments, tes sourires.
Pour longtemps encore normalement.
De toi, il me reste désormais plus que des souvenirs.
Y aura plus de nouveaux souvenirs qui s'ajouteront.
Il me restera plus que ceux qui sont déjà passés et plus jamais de moment à passer avec toi.
Je peine à bouger.
À réaliser.
J'ai même pas pu te dire au revoir putain.
Je tends ma main vers toi, je ferme ton œil.
Là, là je pourrais vraiment penser que tu dors.
Si seulement.
Et puis, je te prends contre moi.
Une dernière fois.
Pour que toujours, ta présence me reste ancrée.
Ce sera la seule trace qu'il me restera de toi. Les souvenirs et le contact, qu'on n'aura plus jamais l'occasion de créer consciemment.
Seuls les souvenirs me tiendront compagnie.
À ton défaut.
Pour toujours, eux.
Et plus jamais, toi.
《‐HUMAINS DE MERDE, VOUS ALLEZ ME LE PAYER BANDE DE FILS DE PUTE.》
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[KYO & FROST KYRIOKU.] - DERNIÈRE VALSE.
J'ai des souvenirs qui défilent par centaine.
J'ai de toi des souvenirs heureux, du temps où tu étais encore mon papa et pas l'affreux monstre à deux visages que je t'ai attribué.
Pas l'affreuse personne qui a poussé papa à se tuer.
Pas l'affreuse personne qui lui a brisé le cœur.
Pas l'affreuse personne qui a décidé de briser notre famille.
Ma famille.
Papa, Yusu, Sasha.
Moi.
Tu as tout détruit sur ton passage.
Je me suis résigné à te haïr.
Tu n'as jamais rien fait pour arranger tout ça.
Pour arranger ces fissures que tu as laissées dans le cœur de tout le monde, sauf dans le tien.
Pour arranger cette haine que je t'ai portée.
Tu n'as rien arrangé, tu as tout laissé comme ça.
Parce que tu respectais mon choix ?
Celui de Yusu ?
Et pour papa alors ? Pourquoi tu n'as rien arrangé ?
Pour ne pas lui faire de peine ?
"Je te hais."
"Tu n'es pas mon papa."
"Je ne t'aime pas."
"J'espère que tu t'en veux."
Ce sont toutes des paroles que je t'ai lancées, par rancœur personnelle.
Paroles que tu as accueilli. Sans broncher.
Je n'ai pas remarqué d'émotions. De tristesse. De colère.
Parce que tu savais que j'avais raison.
"C'est de ta faute."
Alors pourquoi tu es là, à côté de moi ?
Pourquoi tu as décidé de te pointer ?
Pourquoi tu te mets en danger ?
Tu pourrais rester caché.
Tu pourrais te protéger.
Mais tu ne le fais pas.
À la place, tu t'agites.
Je sens tes mains froides sur moi, me prendre doucement, comme quand tu étais encore mon papa.
Tu essayes de ne pas me faire mal mais c'est raté.
Parce que ça me fait un mal de chien.
Je pense que j'en pleure.
FROST ;《‐Que quelqu'un m'aide plutôt que de regarder, putain ! S'il-vous-plaît !》
Je crois que tu n'as jamais fait ça. Demander de l'aide. Montrer tes émotions. T'occuper de nous.
Je pense que tu n'as jamais fait ça.
Je te vois relever les yeux, chercher. Je pense que tes yeux s'embrument.
Je tourne comme je peux la tête. Le mépris nous encercle. Ils te regardent, ils nous regardent, moi me vider et toi demander de l'aide, fouiller dans la foule.
La foule que tu as traversée pour venir près de moi.
En t'exposant au danger.
À ces Humains armés.
Pourquoi tu fais ça ?
Pourquoi tu as fait ça ?
Je relève les yeux vers toi.
Je garde mon regard sur toi et toi, tu reviens vers moi.
Je sens tes paumes froides m'enserrer, comprimer pour une la plaie d'où s'écoule le sang en grande quantité. Pour l'autre, me maintenir contre toi.
J'ai la tête contre ton épaule.
Tu sais, le refuge dans lequel j'avais l'habitude de venir me réfugier quand le monde était trop méchant.
Et j'ai l'œil posé sur toi.
Quelques instants, tu n'es plus ce monstre aux deux visages.
Quelques instants, tu redeviens un papa.
Mon papa.
Celui que tu as été, que tu aurais toujours dû être.
Que tu es.
KYO ;《‐J'ai mal...
── Je sais.》tu me réponds simplement.
Tu t'éreintes à colmater ma plaie. Mais elle ne se colmatera pas.
Les Humains savent qu'on n'est pas comme eux. Leurs dispositifs pour nous empêcher d'utiliser nos pouvoirs, ceux qui sont craints, sont actifs.
Je pense que tu le sais.
Je ne sens plus ta main sur mon ventre, je la vois juste pleine de sang quand tu la regardes, puis que tu la reposes.
Une fois de plus, tu appelles à l'aide dans la foule. Tu regardes autour de toi alors que moi, je ne bouge pas, je m'applique à respirer lentement, pour ne pas me faire trop mal. C'est peine perdue ; chaque respiration me fait mal, ça me donne envie de pleurer. Je crois même que je pleure de nouveau, en fait.
KYO ;《‐Je te déteste. Tu as tout brisé.》
Ce sont les paroles qui me reviennent.
Ces paroles que je t'ai dites.
Tu sais, même si continue de t'en vouloir, je crois que je suis juste triste. Énervé. Que tu n'aies pas agi comme je le voulais.
Triste que tu n'aies jamais montré que tu nous aimais. Que tu aurais pu faire passer ça pour une blague, que tu ne nous aurais jamais aimé, moi et mes frères et sœurs.
Et papa.
Surtout papa.
Si tu savais comme tu lui as fait mal.
Je crois que je t'ai rendu la monnaie de ta pièce, à leur place.
Je crois que tu t'en es assez voulu.
Ta voix part.
Non, ne pars pas s'il-te-plaît.
Reste encore un peu, j'ai quelque chose à te dire.
KYO ;《‐Papa...?》
Tu rabaisses ton visage vers moi. Tout comme moi, tu as l'air surpris que je t'appelle avec ce titre que j'avais refusé de te reconnaître.
Mais je pense que c'est vrai, maintenant.
Que tu l'es.
Que je suis prêt à ce que tu le sois à nouveau.
Mes paupières sont lourdes.
J'ai envie de dormir.
Respirer me fait encore plus mal.
Je ne sens presque plus mon corps.
Il me lâche, mes muscles m'abandonnent.
Eux aussi veulent dormir.
Mais je ne peux pas dormir maintenant.
Pas tout de suite.
KYO ;《‐Je suis désolé... Je te pardonne...》
J'ai du mal à respirer. À parler. À garder le regard sur toi.
J'étouffe.
Les larmes coulent.
KYO ;《‐Je... veux que tu dises à Yusu... que je l'aime... à Sasha... à papa... S'il-te-plaît... dis-leur... S'il-te-plaît-...》
J'étouffe.
Je sanglote.
KYO ;《‐Te... pard... onne... vous... aime...》
Mes muscles me lâchent.
Je sens que mon cœur s'arrête.
Je parviens à souffler une dernière fois.
KYO ;《‐Je veux... pas... mourir...》
La dernière chose que je vois, ce sont tes yeux qui trahissent toutes tes émotions.
Une larme qui coule sur ta joue.
Et les canons de leurs armes qui se pointent vers nous.
Et la dernière chose que j'ai entendu.
C'est toi, qui suppliais pour de l'aide.
Tes mains toujours contre moi, qui me serrait un peu plus fort.
Pas d'aide.
Puis le noir complet.
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[LIA LEYARAH & NIO LEYARAH.] - DERNIÈRE VALSE.
Je me dresse devant ma sœur, agitant la queue et étendant mes ailes pour les impressionner.
Elles sont abîmées, ils m'ont abîmé.
Ils l'ont abîmée aussi.
Elle respire peu.
Ma sœur.
Elle a du mal à respirer.
Ils ont essayé de la tuer.
Ma sœur.
Je reste campé devant le fauteuil dans lequel elle repose.
Je peine à rester debout, à rester sur mes jambes.
Il n'en faut pas plus pour que l'un d'eux ne me prenne de vitesse. J'ai les sens tellement embrouillés que je n'arrive pas à mener la danse, comme le faisait ma sœur pour me défendre.
Je sens l'os de son épaule me couper le souffle et me faire basculer.
Il m'écrase le poignet jusqu'à ce que j'entende l'os se casser. Ça m'arrache un cri de douleur. Il semble s'en satisfaire, puisqu'il n'enlève pas son pied de mon os.
NIO ;《‐Lâchez-moi !》
Il ne me lâche pas.
Quel con, pourquoi je lui dis ça ?
Il met son autre pied sur ma queue et l'écrase elle aussi, tout en venant m'attraper par les cornes. Je sens ma tête claquer plusieurs fois contre le sol, qui se teinte de noir.
Je suis sonné, j'ai affreusement mal.
Dans ce cas de figure, je me serai mis en boule. J'aurais repris le contrôle, parce que là, sur le ventre, je suis à leur merci et mon cerveau me hurle que je suis en danger.
Mais je suis incapable de bouger.
J'ai peur.
HUMAIN ;《‐Merde, c'est vrai qu'on peut pas vous tuer comme ça.》il dit.
Il délaisse ma queue, s'agenouille contre ma colonne vertébrale. Je sens mes yeux picoter, sa main me maintenir mes poignets endoloris pour que je ne me débatte pas.
Danger.
Danger.
Danger.
Ce sont les mots qui me percutent le crâne.
Je vois qu'ils déposent ma sœur juste devant moi.
J'essaye de me défaire de son emprise, pour la rejoindre. Il resserre sa prise, appuie plus fort, me fait geindre.
HUMAIN ;《‐Elle, on peut plus rien lui faire. Elle est en train de crever, ta petite-amie. Ou ta sœur ? On s'en fout, elle deviendra la même chose dans quelques secondes.》
Danger.
L'un d'eux attrape ma sœur.
Elle agite mollement sa queue, ses yeux sont mi-clos, elle respire comme si elle était encombrée.
Je vois ses yeux se poser sur moi. Je la regarde dans les yeux.
Danger.
Je vois qu'il sort comme une perceuse.
Une arme.
Danger.
Il la pointe sur son cœur.
Je vois sa main l'attraper, avec difficulté et serrer.
Elle détourne les yeux, les pose sur l'homme qui se met à vomir un liquide noir, s'étouffe.
Le liquide lui sort par la bouche, les yeux, le nez, il le vomit en grande quantité et le déverse comme si cela avait toujours fait partie de lui.
Ses yeux à elle sont noirs dans l'orbite.
Elle n'arrive pas à bouger.
Le corps s'écrase sur elle, totalement noir, vidé de sa vie.
Sa main est trop lourde, elle la rabaisse mollement et lâche la perceuse.
Elle n'a plus de force, elle tousse.
Elle n'arrive pas à décaler le corps.
Danger.
Un autre vient prendre sa place. Il shoote dans son camarade, épargnant le travail à ma sœur et reprend instantanément la perceuse qu'il repose à la même place.
Danger.
Danger.
J'essaye de ramper.
Je n'y parviens pas.
Elle tourne ses yeux vers moi, une nouvelle fois.
LIA ; J'ai perdu, qu'elle me dit dans l'esprit.
Danger.
Danger.
D
A
N
G
E
R.
Danger.
NIO ;《‐LIA !》
J'entends mon cri avant la perceuse.
Il l'actionne, perfore le côté droit de ma sœur.
Je l'entends hurler, ses yeux ne me quittent que pour tressauter.
Elle n'arrive pas à se défaire.
Je ne peux pas intervenir.
Raté.
La seule chose que je peux faire, c'est essayer de me débattre, d'essayer de partir.
Pourquoi mes joues sont mouillées tout à coup ? Il ne pleut pas pourtant.
NIO ;《‐LIA ! ARRÊTEZ ÇA ! LIA !》
Je sanglote entre mes phrases.
Le bruit s'arrête.
Terminé.
Ses yeux reviennent vers moi, vides.
Son sang noir se répand sur le sol, tout autour de son corps et forme une flaque.
Sur la perceuse, des gouttes noires font un bruit de "plic ploc" qui brise le silence et rejoint la flaque.
Elle est molle, comme une poupée de chiffon.
Elle ne me voit pas.
Elle ne me voit plus.
Elle ne me verra plus.
J'ai envie de vomir.
De hurler.
J'en suis incapable.
Ils l'ont éliminée.
L'homme agrandit le trou, attrape son cœur.
Je ne vois plus rien après. Je vois juste ma sœur, étendue là, dont la respiration encombrée s'est tue.
Dont le sang noir se déverse sur le carrelage et fait contraste avec ses cheveux violets.
Ses yeux rouges aux orbites noires toujours posés sur moi.
Qui me fixent.
"Tu as échoué."
Me dit mon cerveau.
Lui aussi, il décide de me faire mourir, pour un temps.
D'égrainer le temps, de me faire oublier.
De me faire fonctionner en automatique.
Si mes larmes continuent de couler, je ne suis déjà plus là quand l'autre me redresse, ou partiellement.
Les seuls souvenirs que j'ai sont ceux-là.
HUMAIN ;《‐Lui, on n'arrivera pas à le tuer. On peut en faire ce qu'on veut. Il finira bien par craquer sans qu'on n'ait rien à faire de plus.》
Puis plus rien, à part des sensations.
Des sensations de toucher permanent.
De déchirure, de douleur.
De brûlures, de larmes, de brisements d'os et de soupirs dont je connais le ton.
Je ne sais pas combien de temps ça a duré.
Ni quand est-ce que papa est rentré.
Comment il a réagi.
Qu'est-ce qu'il a dit, fait.
Et dans le fond, je pense que ça n'a pas d'importance.
Parce que rien ne sera plus jamais le même sans Lia.
Plus rien n'aura de sens sans elle.
Plus rien ne vaudra la peine sans elle.
Tu as échoué.
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[ARISTOTH NAKILATI & SAHARA NAKILATI.] - DERNIÈRE VALSE.
Je me souviens de comment t'étais, quand t'étais petit.
T'étais un peu dérangé, un brin bizarre mais un chouette gamin. Avec ta manière de nous montrer que tu nous aimais.
À la mort de maman, t'as changé. Je m'y suis attendue, la douleur, ça nous change tous, pas vrai ?
Mais je m'étais pas attendue à ce que ça te change si fort, si brutalement, toi, petite chose que jamais rien n'avait pu atteindre.
Tu t'es replié, renfermé dans le mutisme.
Dans les dessins.
Dans des expériences morbides.
Et puis on a perdu contact.
La guerre.
L'impossibilité de vous dégager sur terre vous aussi.
T'as été forcé de rester au royaume, alors que tout le monde là-bas mourrait.
Je sais pas ce qu'on t'a fait.
Je sais pas ce qui s'est passé.
Mais je sais que t'avais changé encore plus fort.
T'es devenu plus bizarre, plus en proie à des monstres invisibles qui, normalement, disparaissent après l'enfance.
Mais c'est peut-être parce que t'es resté un enfant que tes monstres se sont pas barrés, comme tout les autres.
Mais malgré tout, t'es resté mon frère.
Pourquoi toutes ces choses ne t'ont pas changé comme les Humains ont réussi à le faire ?
Pourquoi ce sont ces misérables êtres, faibles et avares, qui t'ont le plus impacté ?
T'as viré du côté des méchants.
Je te reconnaissais plus.
T'as décidé de te venger personnellement de tout ce qui s'était passé, auparavant. Je suppose.
Te faire justice toi-même.
Je sais pas ce qui t'a poussé à faire ça.
Au fond, je m'en fous totalement.
Le résultat est le même.
T'es devenu l'un de ceux que je craignais.
T'as viré du mauvais côté du chemin.
T'as pas emprunté les bonnes routes.
Et te voilà, fait comme un rat.
Pourtant, je me suis imposée.
J'ai tenté de faire en sorte qu'ils t'abiment pas.
Parce que c'est pas de ta faute, non ?
Tu peux pas être devenu comme ça par toi-même, mon frère.
Jamais.
GARDE ;《‐Ma Reine, décalez-vous. Ce vaut rien est un danger public !
── Ce vaut rien est également mon frère, au cas où vous l'auriez oublié. Je ne me décalerais pas ! Baissez vos armes, je vous dis !》
Ils les ont baissées.
Je te croyais sauvé.
Mais tu m'as trahi.
Tu m'as planté un couteau dans le dos, par surprise.
J'ai senti la lame me transpercer totalement, la douleur se diffuser rapidement au point où je ne pouvais plus tenir debout.
Tu as lâché ton couteau.
Il s'est écrasé dans un tintement sinistre.
J'ai gardé mes mains sur mon ventre, où le pourpre gouttait, couleur de la mort que tu avais essayé de m'infliger.
Je me suis écroulée sur le sol.
J'ai entendu les coups de feu.
Puis je t'ai vu, toi aussi, rejoindre le sol.
Toi aussi, tu avais la couleur de la mort.
Dans les yeux, dans le corps.
On t'avait transpercé.
Ils m'avaient désobéi.
Mon frère, dis-moi, pourquoi as-tu essayé de faire ça ?
Tu m'as pris la main, dans l'agitation générale alors que tous, ou presque, allaient chercher quelqu'un pour me soigner.
Ils n'ont jamais fait mention de t'aider toi.
Je croyais en ta repentance. Même après que tu aies tenté de m'assassiner.
Parce qu'encore une fois, ça pouvait pas être toi, non ?
T'avais forcément agi sous le contrôle de quelqu'un d'autre.
J'en ai eu la certitude quand, dans tes yeux, j'ai vu des larmes salées et, sur tes lèvres, une tentative désespérée de parler.
ARISTOTH ;《‐Je suis désolé, Sahara... Je n'ai pas voulu te tuer... Mais il fallait trouver un moyen pour qu'ils m'abattent...》
J'ai serré ta main dans la mienne.
J'ai vu tes yeux déverser toute leur tristesse, toute la rage que tu avais accumulé.
Toute la rage dirigée vers toi.
Si toi-même tu avais voulu qu'ils t'abattent, c'est que tu savais toi-même que tes monstres avaient finis par non plus se cacher dans ton placard mais ramper sous ta peau.
Jusqu'à t'aliéner et te faire l'un des leur.
Et ça, ça m'a fait mal.
J'ai pleuré moi aussi.
Je ne sais pas si j'ai souri ou froncé les sourcils.
Je sais juste que j'ai pleuré, quelques gouttes, contre le sol poussiéreux.
SAHARA ;《‐T'abattre... espèce de connard écervelé, pourquoi t'abattre...!?》
J'avais du mal à articuler à cause de la douleur.
Toi, t'avais du mal à respirer, à cause de la douleur aussi.
Des remords.
Tu n'as jamais répondu à ma question, où l'énervement s'est probablement entendu.
Où la tristesse a perlé en gouttes translucides.
J'ai dû regarder tes yeux rouges se vider de leur vie sans pouvoir rien faire.
Ton corps se détendre, la vie te quitter peu à peu.
Sans rien pouvoir faire.
Rien, mis à part essayer de te maintenir avec moi le plus longtemps possible.
J'ai secoué ta main, plusieurs fois, longtemps.
Ça a fonctionné, quelques temps.
Mais tu repartais toujours.
Alors je continuais.
Malgré les muscles qui s'étaient desserrés et la pression qui s'était défaite.
J'ai continué longtemps à agiter ta main en t'appelant, la voix coupée, la douleur fulgurante, le sang gouttant.
SAHARA ;《‐Aristoth... Aristoth...! Aristoth, bordel de ta mère, lève-toi...! Ou je te jure que je te lève moi-même et tu vas regretter d'être né... c'est moi qui te le dis...!》
J'ai continué longtemps, jusqu'à ce que les gardes ramènent le médecin.
Qu'il m'attrape contre mon gré et doive me faire lâcher par la force ta main, qui est retombée mollement sur le bitume crasseux.
J'ai vu une dernière fois tes yeux vitreux, de la même couleur que le sang qui t'entourait désormais.
On m'a éloigné de ton corps.
On m'a transporté, on a arrêté l'écoulement du sang.
J'ai pas pleuré durant le trajet.
Je pense que j'ai pas vraiment percuté.
Je pense pas avoir vraiment percuté non plus quand, sur le côté, là où j'étais obligée de garder la tête tournée, j'ai vu deux silhouettes.
J'ai cru voir celle de maman.
Et la tienne.
Qui m'observait.
J'ai vu que seule la tienne a osé remuer les lèvres.
Murmurer.
Me glisser quelque chose, de loin.
Tu savais que je parvenais à lire sur les lèvres.
"Désolé".
Tu t'es excusé.
C'est tout ce que t'as articulé.
Ta main s'est glissée dans celle de la silhouette de maman.
J'ai murmuré, entre mes lèvres, pas sûre que toi ou elle puissiez lire.
"Je vous aime."
J'ai pas pu te dire au revoir.
J'aurais jamais la confirmation que vous m'ayez entendu.
Parce que j'ai juste cligné des yeux.
Et vos silhouettes ont disparues.
À jamais.
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[NISHIMIYA NAKILATI & ARKAS NAKILATI.] - DERNIÈRE VALSE.
Tu n'as pas réussi à me rattraper à temps.
Ils m'ont attachée.
Battue.
Jetée.
Traitée comme une moins que rien.
Toi, ils t'ont forcé à regarder.
Je voyais tes lèvres remuer mais je n'entendais pas tes cris.
Ils m'ont explosé mes appareils, en même temps.
Jetés contre le sol.
Avec tes lunettes, qu'ils ont brisées aux côtés de mes appareils.
Puis ils nous ont traînés.
Toi, à chaque fois que tu te débattais, ils te rouaient de coups. Te crachaient dessus. Je devinais que tu leur rugissais dessus.
Tu ne t'es jamais laissé faire, même si tu n'en donnais pas l'air comme ça.
On t'a souvent traité comme un moins que rien, toi aussi.
Mais toi, tu n'as jamais cessé de te rebeller.
Un peu trop parfois.
Ça me faisait rire.
Ça me fait toujours rire.
Je t'ai admiré pour ta force de caractère.
Pour ta résistance tenace.
Je t'admire toujours.
Pour ça.
Pour toi.
Moi, à ton contraire, je suis loin d'être résistante.
Je me laisse faire, pour ne pas m'attirer d'ennuis.
Et ça a jusqu'ici bien fonctionné.
Peut-être trop.
Parce qu'ils m'ont balancée par terre, sur les genoux, comme une chienne.
M'ont rouée de coups.
Humiliée.
Obligée, en me les attrapant, d'enlever mes vêtements et de ne garder que mes sous-vêtement.
J'ai vu la rage dans tes yeux.
Je t'ai vu ouvrir la bouche et probablement hurler, encore.
Leur hurler dessus.
Leur rugir dessus.
Leur ordonner d'arrêter.
Les menacer.
Je ne sais pas.
N'importe laquelle de ces réactions auraient pu être la tienne.
Mais j'ai toujours du mal avec lesquelles sont les tiennes et lesquelles sont celles que tu as, par protection.
Je sais que tu t'es jeté contre moi quand ils t'ont lâché.
Que la première chose que tu as faite, c'est enlever ton pull déchiré.
Pour ensuite enlever ton t-shirt et me le poser, comme une couverture, seul moyen que tu avais pour me préserver du froid, je suppose.
Que la deuxième chose, ça a été de croiser tes bras au-dessus de ma tête, de te mettre au-dessus de moi, tout proche de mon corps et de courber le dos, pour me protéger.
Que la troisième chose, tu as chauffé ton corps. Pour que je ne meure pas de froid.
Mais Ka'...
Ils m'ont déjà tellement eue.
J'ai un affreux mal de crâne.
Des bleus partout.
Des hématomes qui se forment.
Des brûlures.
Des entailles fraîches.
Des traces de chaussure.
Des traces de coup.
Des traces de coup de crosse de leurs armes.
Des traces de morsures, de leurs dents, de leurs poings, de leurs pieds.
Des os cassés, des contusions.
Je ne vois plus rien d'un œil.
L'autre, tout est trouble.
Je te discerne mal.
J'ai mal.
Je vois tes lèvres remuer, une nouvelle fois.
Tu sais que je suis sourde, pourtant tu continues de me parler, je devine, à voix basse, comme si l'ouïe pouvait me revenir, comme par magie.
Comme par magie...
Ce serait drôle.
Ce qui l'est moins...
C'est quand, comme par magie, c'est à toi qu'ils s'en prennent.
Je vois ta silhouette floue se rétracter au-dessus de moi.
Tu ne pars pas.
Tu restes là.
Tu ne fuis pas.
Tu me protèges.
Encore.
Tu ne te défends pas.
Tu ne les mords pas.
Tu serres les dents.
Tu encaisses leurs coups.
Tu restes là, à te faire battre toi aussi.
Ton sens du sacrifice... il te tuera un jour.
Je ne veux pas que ce soit aujourd'hui.
J'essaye d'articuler.
Je sens mes lèvres bouger et articuler les quelques lettres nécessaires pour former ce mot.
NISHIMIYA ;《‐Pars.》
Je ne sais pas si je crie, si je parle normalement ou si je murmure.
Je sais juste que tes yeux rouges se posent sur moi. Que tu secoues la tête, pour me dire que non, tu ne partiras pas. Que tu fronces les sourcils, serres les dents, gardes la tête basse et parfois fermes les yeux pour encaisser correctement.
Je ne veux pas d'une vie où tu dois te dévouer pour me protéger, au péril de la tienne.
Je ne veux pas d'une vie où, parce que je ne me défends pas, tu dois le faire à ma place.
Ka', tu ne dois pas.
C'est mauvais, se sacrifier pour les autres.
Je grelotte, malgré la chaleur.
Je suis incapable de te repousser.
Mes mains sont hors-service.
Nos transformations, retenues par ces dispositifs dont j'ignore tout.
Ils sont intelligents, les Humains. Pour inventer des choses sur des gens qu'ils ne connaissent que depuis quelques années.
Pourquoi nous en veulent-ils Ka' ?
Ils nous en veulent d'exister ?
Ils nous en veulent de ne pas être Humains ?
Ils nous en veulent de ne pas être comme eux ?
J'aurais tellement aimé qu'on s'entende tous ensemble... qu'on apprenne chacun les uns des autres. Qu'on leur enseigne tout ce que leur culture nous a enseignés et permis de survivre parmi eux pendant tellement de temps.
Mais ils n'en ont pas l'air décidé.
Ils ont l'air décidé de nous rayer de la terre.
Toi.
Moi.
Eux.
Je ne veux pas qu'ils te rayent de la terre, qu'ils te fassent mal.
J'utilise les quelques forces qu'il me reste. Je dois les mobiliser, respirer par la bouche et non pas par le nez - ils me l'ont cassé, c'est douloureux - pour te mettre un coup de pied dans l'estomac.
Tu résistes.
Tu t'accroches.
Tu te recroquevilles encore plus étroitement au-dessus de moi et les empêche de m'atteindre un peu plus.
Tu encaisses les coups sans broncher.
Ka', je t'en prie, ta vie m'importe bien plus.
Je te remets un coup, dans la mâchoire cette fois, avec mon front.
Tu t'écartes.
Je retombe brutalement contre le sol.
Je te remets un coup, plus fort, dans les côtes.
Tu es encore plus éloigné de moi.
Tu te tiens le ventre.
Je ne peux pas entendre ce qui s'est produit juste après, ce qu'il s'est passé quelques instants après que je t'ai poussé.
Je n'ai pas pu anticiper.
J'ai bien perçu les vibrations de l'air.
Mais dans mon état, me rouler était peine perdue.
Le coup qui t'était destiné, c'est moi qui le prends.
Un coup dans la mâchoire.
Un autre dans les côtes, froissées, je crois qu'elles sont brisées en fait.
Un autre qui appuie sur mon bassin.
Un dans l'épaule.
Et puis, en dernier, qui appuie sur ma gorge.
Fort, très fort, trop fort.
Je n'arrive pas à m'extirper de son emprise.
Je suis trop faible.
J'étouffe.
Ma vue se brouille encore plus.
Il appuie plus fort.
Tu n'as pas le temps de réagir.
Je sens que quelque chose ne va pas, quand il enlève son pied.
Je n'arrive pas à reprendre mon souffle.
Je crois qu'il m'a brisé quelque chose.
Je n'arrive plus à respirer correctement, ni par la bouche, ni par le nez.
Je saccade ma respiration, dans l'espoir d'arriver à reprendre ma respiration normale.
Je sens soudain ta présence à côté de moi.
Tu m'attrapes, doucement.
Me pose contre toi, écarte mes cheveux de mon visage.
Tu m'as redressé, probablement pour m'aider.
Je pose les yeux sur toi.
Je te vois me parler.
Je te vois être affolé.
Je te sens chauffer.
Je te sens trembler.
Ka', pourquoi trembles-tu ?
Je suis fatiguée.
Mon œil brouillé parvient à voir le détachement de tes mots.
Mon prénom que tu prononces.
ARKAS ;《‐Nishimiya, reste avec moi, s'il-te-plaît. Ne ferme pas les yeux !》
Tu as un œil fermé toi aussi.
Tu as le visage blessé, profondément entaillé.
Probablement qu'ils t'ont balafré.
J'ai souri, malgré toute la douleur que cela provoquait.
Une grimace a remplacé mon sourire, la douleur.
J'étouffais toujours.
C'est douloureux, la mort.
C'est long, trois minutes.
J'ai repensé à tous nos moments.
À notre famille.
Aux étapes importantes de notre vie.
J'ai pensé à toi.
À Aristoth.
À Sahara.
À maman.
À papa.
À Frost.
À Ashley.
À Carah.
À Shô.
Je les aime.
Ils m'ont aimé.
Vous m'avez aimé.
Et je vous remercie de m'avoir aimé.
Je les remercie d'avoir aimé une personne comme moi.
J'ai tourné l'œil.
Deux silhouettes floues se tenaient.
J'ai souri, malgré la douleur, malgré la suffocation.
J'ai tenté de t'articuler quelque chose.
NISHIMIYA ;《‐T'aime... Mer...ci...》
Vous aimer ne m'a pas suffit pour rester en vie.
J'en ai eu la confirmation lorsque je t'ai vu, de dos, mon corps désarticulé et mou entre les bras, la tête pendante.
Corps que tu essayais de ramener tant bien que mal, que tu secouais.
Je pense que j'ai recouvré l'ouïe.
Parce que j'ai entendu tes "non non non non non, c'est pas possible, non, pas toi" très nettement.
Aristoth s'est posé près de moi.
J'ai tourné la tête avec surprise vers lui.
Lui aussi était mort.
Il m'a doucement enlacé par les épaules.
ARISTOTH ;《‐Tu t'es bien battue, petite lionne.》il m'a dit.《Viens, maman nous attend.》
Il m'a pris la main.
J'ai tourné la tête vers toi, une fois.
Puis j'ai rejoint maman à l'autre bout, là où elle se tenait.
Je l'ai enlacé.
Puis ils m'ont fait savoir qu'il fallait y aller.
Ça m'a fait mal de te laisser, Arkas.
J'ai tourné la tête vers toi, une dernière fois.
J'ai vu que tu m'étreignais avec désespoir en hurlant.
J'avoue, j'ai pleuré. J'ai laissé quelques larmes couler.
Je ne te reverrais jamais de mon vivant.
Et il fallait que je te laisse là.
Ta place était là.
Alors, j'ai essuyé mes larmes.
Et je suis partie avec eux.
Le cœur lourd.
Mais libérée.
Merci pour tout, Arkas.
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[SILKA MAHUZO & YUZE MAHUZO.] - DERNIÈRE VALSE.
YUZE ;《‐EH, VOUS APPROCHEZ PAS !》
L'argent me percute et me brûle.
Je ne peux que lâcher un cri de souffrance.
Ce fils de pute.
Je lui mordrais bien le bras.
La gorge pareillement.
Voir la vie le quitter, ses yeux se vider, suffoquer.
Ça serait un plaisir incroyable.
C'est ce que j'essaye de faire.
J'essaye de l'attraper avec mes dents.
Mais je suis maintenue par des chaînes qui me privent de mouvement.
Me brûlent.
Partout à la fois.
Je suppose qu'il en est de même pour toi.
Pour l'instant, ils se sont concentrés sur moi mais ils nous ont bien amochés tous les deux.
Ils t'ont brûlé un œil, t'ont forcé à le refermer.
Ils t'ont brûlé à plusieurs reprises.
Probablement rouvert tes blessures.
Privés de certains de tes sens.
Pour avoir l'avantage.
Parce qu'ils nous craignent.
Moi, ils m'ont brûlée aussi.
Les hanches.
Les jambes.
Les chevilles.
Les poignets.
Le visage.
Les seins.
Ces pervers d'Humains.
Ces salopards faibles et peureux.
Ils m'ont attachée aussi.
À côté de toi.
Je suis forcée de rester avec les mains prises, incapable de rester debout à cause de mes chevilles.
Chaque fois que j'essaye, je m'effondre.
Plus fort.
Plus soudainement.
Je ne tiens plus.
Nouvelle brûlure.
Je hurle.
Il fait ça au niveau de ma ceinture.
J'essaye de lui échapper, de le mordre.
Je n'y arrive pas.
La douleur est trop forte.
J'entends tes chaînes s'agiter.
Ne bouge pas, espèce d'abruti écervelé.
Tu vas te faire mal.
Pour rien en plus.
Qu'est-ce que tu veux faire ?
Tu ne saurais rien faire.
Même si tu le voulais.
Combien de temps ça a duré ?
Je ne sais pas.
Je n'en sais rien.
Je ne sais même pas quand est-ce que j'ai arrêté de voir et de juste ressentir la douleur, en continu.
Une vive douleur.
Déchirement dans la longueur, de ma poitrine jusqu'à la ceinture.
Il est repassé, plusieurs fois.
Jusqu'à ce que le sang ne s'écoule de manière importante.
Jusqu'à ce qu'il en ait marre.
Les Humains ne sont pas patients, ils aiment jouer mais pendant un temps.
Il a nettoyé sa lame.
Puis j'ai entendu ses pas s'éloigner.
La porte se refermer.
J'ai entendu tes chaînes.
Encore.
Puis ta voix.
Coupée.
YUZE ;《‐Si', relève la tête...!》
SILKA ;《‐Je... Je n'y arrive pas...》
Ma tête est affreusement lourde.
Je n'arrive plus à la relever pour te regarder.
Je ne vois même plus.
J'arrive juste à sentir la douleur.
C'est un miracle que j'arrive encore à parler.
Je crois.
Je recrache une gerbe de sang.
Elle s'étale à mes pieds, je le sens.
Mon corps est tellement lourd.
Mes poignets touchent tout à fait les chaînes, je sens que je chute sur les genoux et que mes bras se tendent totalement.
La putain de ta mère, ça fait tellement mal.
Mais déjà, la douleur me semble lointaine.
Ta voix aussi.
YUZE ;《‐Silka ! Silka, relève-toi, s'il-te-plaît ! Si tu restes comme ça, tu vas mourir !》
Je ne vois plus.
Je ne sens plus.
Je n'entends plus.
Je ne te vois désormais plus que du coin de la pièce.
Mon corps, enchaîné, à côté de toi.
Et toi, qui hurle mon prénom.
Me supplie de me relever.
Je vois les larmes dévaler tes joues.
Te piquer et te choper tes brûlures.
Je te vois regarder partout, hurler des paroles que je ne comprends pas.
Que je ne comprends plus.
Déjà, tu disparais de ma vue.
Moi, je disparais de la vie.
《‐PRENEZ-MOI À SA PLACE.》
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[YUKI YIRAHI & SÉOANN YIRAHI.] - DERNIÈRE VALSE.
Les jappements des chiens sont audibles, je les entends derrière moi.
Je te sens te raccrocher à moi.
Tu ne peux pas courir, tu es incapable de réutiliser tes jambes à cause de ce fumier de Yū.
Mais le résultat est le même.
On doit fuir.
Alors c'est moi qui t'entraîne dans les bois.
Je cours, j'évite les pièges, les branches, les chemins glissants et boueux.
Je dois bifurquer plusieurs fois, sous tes recommandations.
J'ai toujours eu du mal à voir quand il pleuvait, la nuit en plus, alors ici, tu es mes yeux.
Tu essayes de te rendre utile.
Je crois que tu te sens coupable.
Ça se sent.
Tu n'as pas à te sentir coupable, Yu', je t'assure.
Ce n'est pas de ta faute, tout ça.
Rien n'est de ta faute.
Mais je ne peux pas te le dire maintenant.
Pas sous forme lupine, pas dans le danger le plus total.
J'aimerais, pour que tu le comprennes, que tu sois plus confiante.
Mais je ne peux pas.
Les animaux ne parlent pas.
YUKI ;《‐À DROITE !》
Je t'entends hurler les instructions sous le vacarme incessant des averses.
Je les suis, je tourne, au son des jappements et des gouttes qui s'acharnent contre nous.
On avait réussi à s'en tirer.
Mais il a fallu qu'un homme surgisse, pour nous tendre un piège et que je doive m'écarter subitement, pour que je me prenne les pattes dans une racine mal placée.
Qu'on perde l'avantage.
Qu'on tombe, tous les deux, qu'on roule dans la boue d'un terrain bas, l'un à l'opposé de l'autre.
J'ai senti mes côtes cogner contre le tronc d'un arbre, de plein fouet.
J'ai serré les dents, je me suis relevé instantanément et j'ai parcouru les alentours des yeux pour te retrouver.
J'ai décidé de reprendre forme humaine pour venir vers toi.
Tu t'es redressée aussi.
Tu n'avais rien.
Tant mieux, j'ai pensé.
Jusqu'à ce que la réalité nous rattrape.
Ils ont débarqués.
Les chiens, enragés.
Les Humains, jubilants.
On a reculé, le plus loin possible d'eux, même si on savait que ça ne servait à rien.
À rien du tout.
Alors pourquoi on l'a fait ?
Je ne sais pas trop.
Je ne sais pas non plus pourquoi nos bras ont décidé de protéger l'autre, d'un même instinct.
J'ai vu tes yeux virer au bleu.
Tes crocs s'allonger et t'ai entendue japper.
Tu ne peux pas marcher.
Mais ça ne t'a pas empêché de te battre, de ce que j'ai vu.
De résister.
Ça m'aurait émerveillé si ta vie n'était pas menacée.
Si toi, tu as décidé d'utiliser directement la menace, j'ai préféré parler à la place.
J'ai dû hausser la voix pour me faire entendre.
L'éclair a déchiré le ciel en même temps que mes paroles.
SÉOANN ;《‐Pourquoi voulez-vous nous tuer...?》
Les Humains se sont regardés.
Ont ris à gorge déployée.
Je n'ai pas bien compris pourquoi.
Qu'avais-je dit de si drôle ?
Tu m'as regardé avec tristesse.
Peut-être que tu connaissais la réponse.
HUMAIN 1 ;《‐Tu demandes pourquoi on tue les erreurs ? On ne reste pas avec des dangers comme vous dans la société, ce serait du suicide. On se mettrait en danger.》
J'ai observé.
Je le savais.
J'ai juste tendu mes muscles, en gardant mon bras près de toi, tout comme tu gardais le tien près de moi.
Ils ont du le voir.
Tout est allé très vite.
Ils ont lâché les chiens.
Les aboiements avaient le même son que le tonnerre.
Je ne sais pas qui de nous deux a fait le premier pas.
Lequel a crié.
Lequel s'est dévoué.
Lequel a voulu protéger l'autre.
Je sais juste que l'issue a été la même.
On a tué.
Les chiens.
Certains Humains.
Pour ne pas être tués.
C'est nous qui avons dû le faire.
Je sais aussi qu'on a été blessés.
Que ton bras était plein de sang, ton crâne, tes côtes.
Que des morceaux de tes vêtements étaient déchirés.
Qu'ils t'ont déchiré la peau par endroits.
Ils t'avaient mise hors-service.
J'ai essayé d'outrepasser ma propre douleur, pour t'attraper.
Mais mes chevilles avaient été endommagées.
Mordues à plusieurs reprises et me lançaient.
Je n'ai pas pu t'attraper.
Ça m'a empêché de nous aider quand des ombres sont venues.
Je me suis au moins mis devant.
Comme ça ils ne t'attrapaient pas.
C'est moi qu'ils ont attrapé.
??? ;《‐Laissez l'autre là, elle survivra pas.》
Et toi, ils t'ont laissée là.
J'ai essayé de me débattre.
Pour ne pas te laisser là, seule.
Mais il n'a fallu qu'un coup pour que le noir ne m'engloutisse.
Et que lorsque je me réveille, tu ne sois plus là.
《‐Sé...o...ann...》
MENTIONNÉ.E.X.S ;
『akicow』.
『-_-LisaJ-_-』.
『-e_a_r-』.
『_-Euphorie-』.
Merci.
_DXM0NIUM_
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