Chapitre 3

Les sirènes des pompiers, les cris, les gerbes d'eau, les soubresauts de la civière. Tout cela reste encore flou.

Je me réveille aux urgences, perfusions branchées dans le bras et masque à oxygène scellé à ma bouche pour me permettre de respirer.

Pourtant, chaque goulées d'air me fait l'effet d'une bénédiction et me brûle la gorge. Peu à peu, les souvenirs des derniers évènements me reviennent en mémoire. Je me contorsionne sur le lit en gémissant de douleur. Où est ma mère ?! Que lui a-t-on fait ? Je serais prête à parier qu'elle n'est plus là à cause de moi. Mon pouvoir est vraiment la pire des malédictions... Peu m'importe désormais qu'il ait pu m'émerveiller, m'aider, me rassurer. Ma mère était tout. Tout.

Deux médecins arrivent alors dans la pièce pour prendre connaissance de mon état.

« Accumulation du liquide dans les poumons, pneumonie... récite le premier au second, insuffisance respiratoire dûe à l'incendie de la quatrième rue. Franchement, elle s'en ai bien sortit. Aucune brûlure : c'est un miracle ».

J'ouvre de grands yeux effrayés.

Les médecins restent encore un peu, règlent les machines, vérifient mes perfusions puis repartent.

J'attends que leurs pas s'éloignent pour me relever sur les coudes. Avec précautions, je retire mes perfusions puis avec regret, arrache le masque.

Je ressens tout de suite le manque de facilité à respirer. Je suffoque, crache un peu de sang que j'essuie rapidement puis tente de me lever sur mes jambes encore fragiles.

Le souffle court, je tremble de la tête aux pieds, mes membres m'obéissent difficilement mais je m'oblige à canaliser ma force dans mes mouvements.

De toute façon, si je reste ici sagement pour guérir, ils me placeront ensuite en famille d'accueil ou pire. Je n'ose y penser...

Je suis forcée de m'enfuir, sans plus personne sur qui compter.

Je ne veux pas perdre ma détermination, ni ma puissance explosive. Je veux rester aussi forte qu'avant. Il le faut. Pour ma mère. Je me dois de la retrouver.

Mes vêtements ont dû brûler dans l'incendie car je me retrouve vêtue d'une longue blouse blanche à motifs bleutés. Horrible et inconfortable.

Je marche à mon rythme vers le placard pour constater que celui-ci n'est rempli que de couvertures et de draps. Aucun habit normal dans les parages...

J'ouvre la porte de ma chambre pour découvrir un couloir traversé par quelques infirmiers.

Je patiente, attendant un nombre minimal de médecins pour sortir hâtivement. Je marche lentement avec la tête haute et l'air assuré. Ne pas attirer la suspicion des employés est ma priorité.

Je marche pieds nus sur le sol lisse et froid pour arriver à un genre de salle d'accueil bondé.

Une horloge accrochée en hauteur indique 20 heure moins 12. Je suis restée combien de temps dans ces urgences !!? J'ai déjà perdu trop de temps !

J'avance nonchalamment entre les divers patients, tentant de montrer un visage serein, confiant et impassible, souriant aux personnes qui m'observent.

Soudain, je suis agrippée par le bras et tiré en arrière. En une fraction de secondes, j'ai le temps de penser que je me fais kidnapper à mon tour avant de reconnaître mon « ravisseur ». Qu'est-ce qu'il fait ici ?!

« Florian !?

Il m'entraîne un peu à l'écart pour ensuite me gronder :

- Tu devrais être dans ta chambre, Arya !

- Quoi ? Attends une seconde... Comment t'as su que j'étais là ?!

- J'habites dans la même rue que toi, explique-t-il, l'incendie de ta maison a fait beaucoup de bruit : les pompiers, les cris des voisins. Je me suis renseigné auprès d'un pompier. Il m'a dit que tu étais aux urgences. Je voulais savoir si tu allais bien mais on m'a dit que tu ne pouvais pas encore recevoir de visite. Et maintenant, je te trouve à l'extérieur de ta chambre ! Viens, je vais te ramener.

- Non !

Il me regarde, interloqué.

- Je ne peux pas y retourner, je bredouille, je peux vraiment pas t'expliquer mais tu dois me laisser sortir d'ici !

Il me dévisage sans comprendre, ses yeux clairs rivés aux miens.

- Fais-moi sortir d'ici, s'il te plaît ».

Il fronce les sourcils mais je compte bien le convaincre.

Je ne retournerais pas dans cette chambre d'hôpital.

*

« Dans quel plan foireux tu m'embarque ?... Grogne Florian mal à l'aise.

- Merci, je rétorque sur la défensive.

Ce dernier m'a refilé son sweat à capuche, donc seul mes jambes ne sont pas couvertes. Seul le haut de mes cuisses est abrité par ma blouse blanche.

Nous avançons dans la rue sur le qui-vive, inquiets à l'idée que l'on nous remarque.

- Pourquoi voulais-tu partir d'un endroit qui te guérissais ? Me demande alors Florian, je pourrais entendre ta respiration sifflante à des kilomètres.

- Pose pas de question, Sherlock, je soupire, t'en sais déjà assez.

Il s'arrête soudain pour me fixer dans les yeux.

- C'est peut-être de la curiosité mal placée, mais j'aimerai bien en savoir un peu plus sur les secrets de la fille que j'accompagne.

- Je ne vais pas me répéter, je fulmine, j'ai des raisons de me taire, n'essaye pas de comprendre.

- T'es pas net, Arya, déclare-t-il enfin, c'est quoi que tu veux tellement cacher ? T'as des parents ?

Sans le savoir, il vient de toucher une corde sensible. Mes parents... Je n'avais que ma mère et il a fallu qu'elle disparaisse. Si on devait faire une liste de mes problèmes, elle serait longue bien longue...

J'ai soudain envie de vider mon sac, de dire la vérité à une autre personne que ma mère. Mais je ne peux pas me livrer à lui alors que je ne lui ai parlé que quelques fois !

Une bataille intérieure se livre alors en moi. Je ne peux rester seule indéfiniment... Mais mon pouvoir est un secret depuis tellement longtemps que je ne me vois pas en parler...

Je le fixe du coin de l'œil.

- Si je te dis la vérité, promet-moi de ne pas déguerpir en hurlant.

- Ce n'est pas mon genre, assure-t-il en souriant.

Je l'entraîne dans un ruelle sombre où personne n'aurait l'envie d'y jeter un regard.

- C'est moi qui ai déclenché l'incendie, je marmonne en le fixant.

Il reste un moment étonné avant de passer une main sur sa nuque.

- Une de tes expériences a mal tourné, c'est ça ?

- Non ! Tu ne comprends pas ! je soupire désemparée, je n'ai eu besoin de rien.

- C'est-à-dire ? Demande-t-il perdu.

Je vérifie une dernière fois les alentours puis met mes mains en coupe pour faire jaillir une flammèche. La longue flamme vacille et frétille pour s'éteindre progressivement.

Florian ne bouge plus.

Il reste bloqué sur mes mains où il ne reste plus rien.

Puis il relève la tête vers moi et je n'arrive pas à savoir s'il est admiratif ou terrorisé. Il me fixe de ses grands yeux clairs, éberlué.

- Tu n'as pas intérêt à répéter ce que tu viens de voir, compris ? Tu es le premier à qui je montre ça et certainement le dernier.

- Ouais, ouais, t'en fait pas... balbutie-t-il, je suis juste... surpris.

- Pas étonnant, je murmure. Bref, maintenant autant tout te dire. Des personnes ont enlevé ma mère alors que c'est moi qu'ils veulent. Je dois absolument la retrouver. Je ne sais pas qui me traque, qui sont mes ennemis, ni mes amis. Ma mère m'avait ordonné de ne pas me servir de mes pouvoirs mais je vais devoir mettre cette règle de côté pour l'instant...

- Wow... Calme toi Arya... me stoppe Florian, ça va trop vite pour moi ! Pourquoi tu contrôles le feu !? C'est dans tes gènes ?

- Je n'en sais rien ! Ma mère n'y ait pour rien et mon père s'est barré un peu après ma naissance. Aucun de mes parents n'y sont pour quelque chose, je ne sais absolument pas pourquoi je suis comme ça !

- Les gens qui te recherchent... débute-t-il, ce sont sûrement des scientifiques qui veulent savoir ce qui t'es arrivée... Tu ne voudrais pas savoir pourquoi tu es comme ça ?

- Florian ! Je m'offusque, tu te rends compte de ce que tu dis !? Jamais je ne me rendrais à ces salopards de scientifiques, t'as saisi ? Si ces gens me retrouvent, ils vont m'utiliser, me disséquer ou me faire je ne sais quelles autres horreurs ! Il est impératif qu'il ne me retrouve jamais. Je libère ma mère et c'est terminé.

- Comment tu peux en être sûre ? me demande Florian, pourquoi voudrait-ils t'utiliser ? Ça pourrait faire avancer la science. Et puis comment tu comptes libérer ta mère ? T'as un plan ? Qu'est-ce que tu connais de ces scientifiques ? Tu ne sais même pas où est leur labo je suis sûr !

Là, il marque un point.

- Ecoute, je soupire, si ces scientifiques ont enlevé ma mère, leurs intentions ne peuvent pas être bienveillantes à mon égard. Et je dois agir ! C'est ma mère, tu comprends ?!

Cette fois, je ne peux pas me lancer dans la bataille sans réfléchir. Il faut que je pense à un plan et que je prenne beaucoup de choses en compte... Tous ces événements qui s'enchaînent vont finir par me rendre folle !

Il faut, avant toute chose, que je réussisse à me calmer. Sans cela, je ne pourrais pas réfléchir correctement.

- J'ai peut-être une piste, commence le jeune brun, mais ça ne va pas te plaire... »

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