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Assis en tailleur sur la surface moelleuse de mes couvertures, muni d'un carnet vierge que je viens de me procurer, je tente de faire le vide dans mon esprit.

"Je vous fais le don de six années Park Jimin. Un retour sur le plus triste événement de votre vie. Le temps n'est pas une ligne continue, et certaines personnes, comme vous, se retrouve figées, perdues, incapables d'avancer. Votre passé vous poursuit, et la solution vient à vous, quand il vous semble qu'il n'y en a plus aucune."

C'est en prenant une profonde inspiration que je retranscris les paroles de cette inconnue, rencontrée la veille au cimetière.

Six années... Si je ne me trompe pas, je suis de retour quelques semaines seulement avant l'accident, presque trois pour être exacte. Je vérifie la date sur mon portable. Tout juste deux semaines et deux jours avant la soirée de Meena, la petite amie de Seokjin, le mardi sept décembre deux-mille-dix-neuf. Dois-je empêcher Jungkook de s'y rendre ?

Triturant nerveusement ma lèvre, je me souviens alors de l'entièreté du discours de la jeune femme.

"À huit heure, le huit décembre deux-mille-dix-neuf, il vous faudra avoir trouvé celui qui fait battre son cœur et alors, ce dernier ne cessera pas de battre."

Celui qui fait battre son cœur...

Un rire nerveux s'échappe de mes lèvres. Je suis certain de connaître mon meilleur ami. Il me paraît évident qu'il n'entretenait aucune relation amoureuse avant de mourir. Et si, comme moi, il éprouvait des sentiments pour un autre homme, sans aucun doute, je serais le premier au courant.

C'est avec une certaine appréhension que j'entreprends d'appeler le sujet de mes interrogations, bien décidé à découvrir la vérité.

- Jimin, comme c'est étonnant. Ricane mon meilleur ami en décrochant.

- T'as un petit ami ? C'est qui ? Je rétorque sans aucune envie de plaisanter.

- C'est quoi encore ce délire ? Bougonne Jungkook, et je peux aisément déceler l'agacement qui le gagne.

Je soupire lourdement. J'imaginais innocemment que mon meilleur ami répondrait à mes interrogations en toute simplicité. Je me trompais.

- T'es amoureux ? Je veux savoir pourquoi j'ignore tout de cette histoire. Pourquoi tu ne m'as rien dis ?

- Effectivement. Mais Jimin, sache une chose. Je ne te ferai pas le plaisir de t'avouer de qui il s'agit. T'es grand bonhomme, trouve la réponse tout seul.

Je crois que quand on pleure trop longtemps la disparition d'un proche, on oublie bien vite ses défauts... C'est le triste constat qui s'impose à moi alors que Jungkook raccroche sans plus de cérémonie.

Un énième soupire quitte mes lèvres. Je me sens démuni. Mais également, un sentiment omniprésent ne semble pas vouloir me quitter. Celui, si étrange soit-il, de ressentir un besoin presque viscérale de me trouver dans la même pièce que mon meilleur ami. Je ne suis pas idiot. La peur de le perdre me paraît tout à fait raisonnable au vu de mon passé ou de mon futur, je ne suis plus très sûr.

C'est l'esprit embrumé que je lorgne sur les quelques pages griffonnées de mon carnet. Visiblement, je vais devoir jouer les enquêteurs. Et si mes talents restent à prouver, je peux d'ores et déjà me faire une idée du profil auquel Jungkook pourrai possiblement succomber.

Au lycée, il trouvait toujours le moyen de s'amouracher de types peu fréquentables. Je devrai peut être songer à analyser son entourage. À bien y réfléchir, nous partageons le même groupe d'amis depuis notre entrée à l'université et jamais je n'ai constaté un changement dans son comportement qui aurait pu m'alerter sur ses sentiments.

Je referme mon carnet d'un geste lasse, avant de me laisser lourdement retomber contre mon matelas. Quand j'y pense, je suis peut être fou finalement. Pourquoi je suis ici ? Comment c'est scientifiquement possible ? Je ne suis pas fermé d'esprit, je crois en bien des choses, mais le temps... Comment imaginer un instant pouvoir affronter l'avant, pour modifier l'après ? C'est une notion qui me dépasse. Et bien que je puisse constater de mes yeux qu'il est possible de voyager dans le temps, je ne parviens pas à comprendre. Pourquoi cette chance m'est offerte ? Je ne suis pas le seul, dans ce monde, à subir les conséquences d'un deuil. Si tout être humain se voyait offrir cette opportunité, les cimetières ne seraient plus et la mort se verrait obligée de délaisser sa longue cape et sa faux, victime de ce qu'on appelle communément, un chaumage technique.

Un rire lasse passe la barrière de mes lèvres. Je divague, mais j'excuse la tournure que prennent mes pensées. Cette histoire est complément dingue.

C'est en me laissant bercer par le cours de mes pensées que le sommeil m'emporte et que, terrassé par la fatigue, je me retrouve plongé dans les abîmes de mes pires démons, hanté par mes peurs jusque dans mes rêves.

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Mv̶ ❥