Libération - Partie 3

Karanes, Mur Rose, 1er août 850

Treize jours étaient passés depuis que Marion était sortie des Bas-fonds. L'ennui était des plus mordants ; elle avait tout bonnement l'impression d'être aussi utile qu'un caillou immobile, noyé dans un océan d'activité. Et si tout travail lui était d'abord « dispensé », on finit plus radicalement par lui interdire à cause de ses feintes répétées.

Elle avait dans un premier temps insisté auprès de Hansi pour, au moins, assister aux quelques expériences menées sur Eren, jouant sur sa passion des Titans. Naturellement, elle avait reçu un oui catégorique, et commencé à la suivre... Pour être stoppée par Livaï, qui passait par là.

Abandonnant l'idée d'aider directement la chef d'escouade dans ses recherches, elle avait décidé de « jeter un œil à ce qu'elle écrivait ». Elle avait soigneusement choisi le jour où le petit homme était parti charcuter des Titans dans Maria pour s'installer dans une salle de la caserne militaire de la cité et lire les papiers que la femme lui avait prêtés.

Pendant quinze minutes, elle était parvenue à calmer légèrement les ardeurs de son cerveau, qui cherchait frénétiquement à s'occuper avec quoi que ce soit, allant de la meilleure façon d'optimiser l'apprentissage de son chaton à une manière de créer un mouvement perpétuel, en passant par la fabrication d'un éplucheur de patates automatique pour ne plus retenir les combattants en cuisine.

Seulement, son soulagement avait été de courte durée : Mike était apparu comme par magie pour lui demander ce qu'elle faisait. Hansi avait été convoquée chez Erwin, et depuis, la jeune fille avait la désagréable impression qu'on épiait chacun de ses mouvements.

Echapper au flair de l'homme et au regard du caporal-chef n'était pas une mince affaire. Mais rester à ne rien faire lui était insupportable ; si elle ne se tenait pas constamment occupée, les souvenirs des moments passés avec Rhys et Kenny lui emplissaient immédiatement le crâne pour la brûler à petit feu. Elle passa donc une semaine à élaborer le plan parfait pour, enfin, servir à quelque chose.

L'adolescente sortit de sa chambre en fredonnant. On était en début d'après-midi ; le soleil était ardent, et l'atmosphère, des plus lourdes. Elle descendit les escaliers de pierre menant au rez-de-chaussée et croisa, comme prévu, Conny, qui s'acharnait à laver le sol.

Livaï ne doit pas être loin. Elle s'approcha du jeune rasé et lui demanda où se trouvaient les cuisines ; il lui désigna une direction, qu'elle prit. Elle entra dans la pièce et aperçut Sasha, occupée à faire la vaisselle.

« Coucou ! lança la chercheuse. Est-ce que tu saurais qui est de corvée de patates ce soir ?

— Il y a moi, Armin, et Jean. Mais tu ne devrais pas...

— Ah, non, je ne ferai rien du tout, c'était une simple question. Merci ! »

Elle tourna les talons. « Donc, ils seront là à dix huit heures », soupira-t-elle un peu trop fort. « Je me demande si... » Elle repartit dans l'arrière-cuisine. Là, elle évita la sortie normale pour se glisser furtivement par la fenêtre, et avança dans la cour en terre battue, qui, comme elle s'y attendait, était déserte.

Aux aguets, la scientifique longea les murs et fit un détour par les terrains d'entraînement, où elle prit ostensiblement la direction des déchargements de marchandises. Une fois rendue, elle discerna la charrette à pommes de terre, qui était déjà arrivée.

Historia était en train de décharger les cageots avec difficulté.

« Tu veux de l'aide ? demanda immédiatement la lycéenne, l'air inquiète.

— Je pense que... Eh ! protesta l'autre, ses yeux bleus lançant des éclairs. Il est hors de question que tu fasses quoi que ce soit, va te reposer !

— C'est déjà fait, gémit Marion. S'il-te-plaît...

— J'ai dit non ! Allez, ouste, ou je préviens le caporal. »

Elle repartit, boudeuse. Dès qu'elle se trouva hors de la vue de la blonde, son regard se fit de nouveau concentré. Maintenant, l'ultime étape...

Elle fit un grand détour par le dortoir des filles pour se diriger vers les écuries. Elle pénétra l'un des bâtiments ; presque tous les boxes étaient vides, à l'exception de celui de Bartholo. Son cœur rata un battement. Personne ne l'avait suivie ; elle était seule, avec la paille et le crottin qui jonchaient le sol. Ces temps-ci, peu de soldats étaient disponibles pour les corvées.

Elle ferma discrètement les portes et se jeta sur un balai. « Tu m'as manqué », pleurnicha-t-elle en serrant le manche contre elle. Elle se mit à nettoyer les dalles de pierre. Personne ne saura que c'est moi, et tout le monde sera content que tout soit propre.

Une demi-heure passa. Comblée, elle prit tout son temps pour ramasser chaque petit brin de foin, ignorant la douleur qui lui assaillait les côtes et ses cicatrices qui lui cuisaient le bras droit. Barrez-vous, se répétait-elle. Foutez-moi la paix.

A chaque fois que son esprit échappait à son contrôle et que le visage de ses ravisseurs apparaissait, elle redoublait d'efforts pour se concentrer. La souffrance sous-jacente qui manquait à tout moment de l'envahir s'en voyait infatigablement chassée, malgré ses innombrables charges.

Au bout d'un temps indéfini, elle ramassa l'un de ses tas de déchets et le mit dans une brouette. Elle s'apprêta à faire de même avec les autres, lorsque des pas retentirent au-dehors. L'angoisse la prit à la gorge.

D'un bond, elle se cacha dans un compartiment vide, et jeta son balai de l'autre côté de l'écurie. Les portes s'ouvrirent ; un déluge de lumière inonda la bâtisse. Quelqu'un entra. Merde... Ma cachette est complètement à l'opposé de l'entrée ! Toute fuite lui était coupée.

L'intrus avança de quelques mètres, puis parut observer les lieux. Il se dirigea ensuite vers l'outil, négligemment jeté à côté de l'étalon alezan. Qui est-ce ? Son cœur s'accéléra. Elle l'entendit ramasser l'objet et le reposer droit.

Ça pourrait être n'importe-qui, gémit-elle. Mais je ne pense pas que cette personne me cherche... J'ai semé des leurres, après tout ; tout portait à croire que j'allais faire quelque chose en rapport avec la cuisine...

L'inconnu s'avança rapidement vers elle. Elle retint sa respiration ; ses pas la dépassèrent, pour se stopper devant le dernier box. Elle expira silencieusement, légèrement soulagée.

Le silence se fit de nouveau. La jeune fille fronça les sourcils. Il est parti ? Elle resta immobile un long moment, mais seul le cheval bougeait dans le bâtiment. Je suis de seule. Tranquille, elle se leva prudemment et sortit de sa cachette, tirant les brins de paille qui s'étaient fichus dans ses cheveux ondulés.

« Je peux savoir ce que tu fous ? » s'éleva subitement une voix. Elle cria et se retourna, affolée. Livaï, l'air blasé, se tenait juste derrière elle. Elle manqua de tomber, les jambes flageolantes.

« Euh... Je... Venais rendre visite à Bartholo... bafouilla-t-elle, effrayée.

— Avec un balai et une brouette ?

— Hein ? Non... Oui... Je veux dire, c'était déjà là quand je suis arrivée, débita-t-elle rapidement.

— Oh ? Dans ce cas, tu avais une très bonne raison de le jeter violemment contre le mur et de te terrer là comme une taupe. »

Elle ouvrit désespérément la bouche, mais ne trouva aucun mensonge à dire.

« Je voulais m'occuper à quelque chose, avoua-t-elle en baissant les yeux.

— Malgré les ordres d'Erwin, trancha-t-il. Donc tu as désobéi. Mais c'est assez pratique pour toi ; puisque tu es en convalescence, on ne peut pas te donner de corvée à faire. Et quand bien même on t'en filerait, tu les accepterais avec joie, et la punition perdrait toute son utilité. »

Elle serra les dents, honteuse. « Tu reprends demain. Tu es si désespérée que ça de foutre quelque chose de ta vie ? J'en connais des tonnes qui te les auraient achetés, tes quinze jours », fit-il remarquer d'un ton légèrement moins sec.

Elle pinça les lèvres. Depuis qu'elle était revenue, ils avaient tout essayé pour savoir ce que Rhys lui avait fait : lui mettre la pression ou, au contraire, la mettre à l'aise ; lui demander d'une manière très crue, ou jouer sur les mots. Mais à chaque fois, elle ne parvenait qu'à bégayer des choses incompréhensibles, pour ensuite se bloquer complètement. Là encore, le petit homme tentait une approche indirecte ; elle-même pouvait le percevoir.

Il faudra bien que je leur raconte un jour. Elle s'apprêta à parler, mais aucun son ne sortit. Une boule de dégoût remonta violemment sa gorge. Elle se mordit la lèvre et resta un moment silencieuse, luttant pour ne pas pleurer. Hors de question de se lâcher devant lui.

« Je déteste ça », lâcha-t-elle finalement. Il ne répondit pas. « Ne rien faire, je veux dire. » Il se contenta de la fixer. « Comment dire... Mon cerveau, il ne me lâche pas d'une semelle. » Silence. Ses yeux clairs se firent perçants.

« Il arrête pas, j'ai l'impression qu'il va exploser, enchaîna-t-elle, sous pression. Si je ne fais rien, il me ramène des images que j'aime pas, c'est insoutenable, je ne sais pas si vous voyez ce que je veux dire, lorsque je m'ennuie en général, c'est affreux, mais là, , c'est trop, de toutes façons, je suis un poids mort si je reste là à rien foutre, alors autant me bouger le cul, je p...

— Et tes jours de permission ?

— Mes jours de quoi ? »

Il plissa les yeux.

« Tes jours de repos. Tu en as un toutes les deux semaines.

— Sérieux ? bafouilla-t-elle. J'étais pas... Je savais pas...

— Avant que t'arrives là, alors, coupa-t-il.

— Ah, non, j'allais sur internet, ou j'allais faire du vélo, c'était plutôt bien rempli, sinon je voyais mes amis, ou bien... »

Sa voix s'éteignit. Le visage du caporal-chef était toujours parfaitement impassible. Gros con... Tu l'as fait exprès... Une souffrance sans nom lui déchira le cœur, et elle se retourna brusquement pour cacher sa figure.

« Si avant, c'était aussi facile, pourquoi maintenant, tu inventes des stratagèmes tordus ? » demanda-t-il de but en blanc. Elle se raidit.

« Car il n'y a pas autant de trucs à faire ici que là-bas, marmonna-t-elle entre ses dents serrées.

— Non.

— Comment ça, non ? s'étrangla-t-elle. Je le sais quand même mieux que... »

Il lui saisit brutalement l'épaule. Elle se dégagea immédiatement, apeurée, et recula précipitamment pour le regarder, l'œil rond et la respiration sifflante. « Personne ne viendra », articula-t-il d'une voix effrayante. « Ils pensent tous que tu es tranquillement dans ta chambre après que je t'y ai renvoyée, et que je suis dans mon bureau à traiter une affaire importante. »

Il s'approcha encore, et elle tomba par terre. Les yeux de l'homme étaient des plus menaçants ; son visage était tordu en une expression dangereuse. « Non... », balbutia-t-elle. « Ne... ne vous approchez pas... » Une terreur affreuse la submergea alors qu'il tendait une main vers elle.

Elle la repoussa d'une fragile tape et se releva d'un bond, mais il l'immobilisa dos au mur d'une force et d'une adresse impressionnantes. La tête de Rhys remplaça momentanément celle de Livaï. « Non ! » hurla-t-elle. Elle se démena avec violence et parvint à le frapper au tibia, mais il ne bougea pas d'un millimètre. En proie à un désespoir sans nom, elle fondit en larmes.

A cet instant précis, le petit homme la lâcha. Elle glissa au sol, le corps secoué de brusques sanglots. Il s'accroupit devant elle et lui tendit un mouchoir, qu'elle prit d'une main tremblante. « Ton obsession pour le travail s'est drastiquement accrue depuis ton enlèvement. » Elle hocha faiblement la tête, bouleversée.

« Vous aviez... », souffla-t-elle. Il l'écouta, la figure impénétrable. Vous aviez la même tête que Rhys. Le même regard. Vous vous foutez de moi ? Vous le saviez, non ? « J'avais ? » finit-il par lâcher. Elle serra les dents.

« C'était pareil que... Que l'autre... L'autre, là... » L'adolescente cacha son visage derrière le morceau de tissus. « Vous savez... » Elle n'avait pas prononcé le nom du blond une seule fois depuis son retour. « Le dégénéré... »

L'absence de réponse qui suivit lui fut insupportable. « Il arrêtait pas. J'entrais dans la cuisine, il affichait un joli sourire tout mignon ; je ne finissais pas mon assiette, il... » Elle s'étrangla. « Il... Avec... Merde... » Sa voix s'éteignit.

« Je ne vois pas quel mal il y a à afficher un joli sourire tout mignon », jeta brusquement Livaï. Elle se releva d'un bond, horrifiée. « Vous... Vous vous foutez de moi ? Il était affreux, son sourire... Il présageait juste qu'il... Après... Putain ! »

Elle frappa un battant en bois, s'écorchant le poing. « Dès que je suis arrivée... Déjà, après... Il m'a tabassée, merde ! » hurla-t-elle, furieuse. « Partout... Sauf mon visage, bien sûr... Il avait besoin... Il voulait... » Elle tapota son crâne.

« Mais ça, on s'en fout... », articula-t-elle d'une voix tremblante. Elle tomba sur ses genoux. L'autre se releva et s'adossa au mur. Son air tranquille l'offusqua. « Putain, vous avez aucune idée de ce qu'il a fait ?! Non, vous avez dû en voir d'autres, en fait... C'est de la pacotille, moi », rit-elle nerveusement.

« Je ne lui ai rien dit. Vous pouvez être rassuré, hein ? Je n'ai rien lâché. » Elle étouffa un violent pleur. « Ils ont bien tenté. Intimidation, violence, humiliation... » Ses mots lui arrachèrent la gorge. « Mais j'avais déjà oublié, vous voyez ? C'était plus supportable. Mon enlèvement était sans gravité ; j'étais bonne à rien ! »

Marion se releva, vacillante, et tourna le dos au caporal-chef. « Putain... A en devenir fou... Vous vous en foutez, vous avez vu des gens se faire bouffer... Je suis vivante, moi, au moins, hein ? » Elle se plaqua les mains contre son visage.

Une abominable souffrance lui poignarda le cœur. Elle ferma les yeux, noyée dans un océan de détresse. Plus rien n'existait autour d'elle. Elle parlait dans le vide. Personne ne l'entendait, personne ne la voyait, personne n'en avait rien à faire.

« Ils m'ont attachée à une chaise... », gémit-elle, aveugle. « M'ont gravée le bras... Et m'ont étouffée... » Une brusque nausée lui vint. Elle se recroquevilla convulsivement sur elle-même, les yeux écarquillés. Des images écœurantes tournoyèrent autour d'elle.

« Maintenant que ma vie est ruinée... » Un rictus se dessina sur ses traits crispés. « Kenny l'a dit... J'aurais dû crever au fond d'un égout... Sans faire d'histoire... Ça aurait été vachement plus agréable... » Son sourire disparut brutalement. « Je voudrais crever la gueule ouverte plutôt que de me remémorer ça ! » s'époumona-t-elle.

Une main se posa sur son épaule, la tirant brusquement de son illusion. Elle remarqua des ciseaux à ses pieds. Elle venait de parcourir l'écurie comme un automate, à la recherche du premier objet tranchant qui se trouverait à sa portée.

Le petit homme passa devant elle et rangea l'outil. « Pour résumer », dit-il en revenant. Il se planta devant elle. « Tu t'es fait frapper, torturer et mutiler. » Elle chancela sous le coup de ses paroles. « Je... J'ai... » Il la fixa, attendant vraisemblablement une réponse. « Oui », lâcha-t-elle avec difficulté.

Il ferma les yeux un moment.

« Qu'est-ce que tu leur as dit ?

— Que j'avais étudié la faune et la flore des environs, murmura-t-elle. Mais je leur ai ensuite précisé que je n'avais rien découvert de nouveau. Je suis désolée... »

Livaï fronça les sourcils. « On n'est certainement pas en position de recevoir tes excuses. » Elle le regarda sans comprendre. Ce que j'ai fait était impardonnable...?

« Dans le sens où on aurait dû te placer sous une meilleure protection », précisa-t-il en voyant son expression. « Ce genre de choses n'aurait pas dû arriver. » Elle haussa les épaules. « Peut-être », souffla-t-elle.

Il esquissa un mouvement, puis parut se raviser pour tourner les talons. « Suis-moi. » Il la raccompagna jusqu'à la caserne. « La prochaine fois que tu désobéis, tu devras aller dans les cachots pendant quelques jours. » Elle se raidit, peu enthousiaste à cette idée.

Elle rejoignit son lit à l'infirmerie, où elle passa quelques heures, étendue, à broyer du noir. Armin se trouvait non loin, la jambe plâtrée. Ils parlaient à l'occasion, et elle avait également un peu discuté avec Mikasa et Eren lorsqu'ils venaient ; mais cette fois-ci, le jeune homme dormait.

Il sera rétabli demain, soupira-t-elle. Le même jour de ma reprise... Elle sourit légèrement, puis enfouit la tête dans son oreiller. Putain, j'ai tout lâché... C'était la dernière personne à qui je voulais dire autant de trucs...

La porte s'ouvrit subitement, la faisant sursauter. Le doux visage d'Emilie apparut ; elle repéra l'adolescente et s'approcha, sourire aux lèvres, une tasse dans la main. « Qu'est-ce que c'est ? » demanda Marion en saisissant la boisson. Son visage s'illumina en voyant un liquide fumant et foncé.

« Le caporal a prévu trop de thé, expliqua l'autre.

— Hein ? Mais tu vas te faire tuer !

— Mais non ! rit-elle. Je te l'assure. Allez, bois. »

Elle s'assit à côté d'elle. Une ombre passa sur son visage. « Bah, y a quoi ? » Elle se raidit imperceptiblement, avant de reprendre son expression affable dont elle la gratifiait toujours. « Rien », sourit-elle. « Je suis contente de voir que tu vas un peu mieux. »

La chercheuse rougit et avala une gorgée. Un goût fort et doux à la fois lui envahit la bouche. Elle soupira longuement. J'aime pas le thé noir... Mais celui-là est vachement bon, songea-t-elle.

La guerrière se leva et lui ébouriffa délicatement les cheveux de ses longs doigts fins. « J'y vais ! Je vais batailler, demain, faut que je me prépare », annonça-t-elle. « On n'a pas tout à fait fini... Bon, on n'est pas trop loin quand même. Heureusement qu'on se relaie. Enfin... Je suis surprise que le taux de pertes soit aussi bas. »

La scientifique hocha la tête. Son amie bloqua alors un instant ; ses prunelles bleues se plongèrent dans celles de la lycéenne. Celle-ci la gratifia d'un air surpris, pour tenter vainement de ne plus détailler ses traits délicats. Quelque chose pointa alors de nouveau, chez elle. De longues secondes coulèrent, Emilie se pencha vers la chercheuse et posa une main sur son épaule, le cœur de celle-ci rata un battement.

Leurs visages n'étaient qu'à quelques centimètres. Leurs visages n'étaient qu'à quelques centimètres, et le souffle de Marion se saccada à l'extrême. Tout son corps l'urgeait à bouger ; mais, cette fois-ci, ce n'était pas une douleur vicieuse qui la torturait. Et, alors qu'elle détaillait sa bouche fines et rosée, l'autre ferma les paupières, leva le menton, et posa tendrement ses lèvres douces et chaudes sur sa joue. « Je te dis à tout à l'heure », murmura-t-elle d'un ton étrangement mitigé.

Elle brisa ce contact sur cette simple phrase. Marion ne put que regarder son amie partir, bouche bée. Ne me dites pas que c'est un au-revoir, pensa-t-elle subitement. Non. Non, elle a dit à tout à l'heure...

Elle se leva pour aller discrètement la poser dans la cuisine. Ça fait des tonnes de fois qu'elle y va, et elle est toujours vivante. Je n'ai pas vraiment de souci à me faire, tenta-t-elle de se rassurer. Et puis... Une fois que ça sera fini... Son pouls s'accéléra encore. Elle se raidit légèrement. J'irai me faire foutre, oui.

Lien vers l'image : https://www.pinterest.jp/pin/466122630170239330/

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top