- 𝙹𝙰𝙽𝚅𝙸𝙴𝚁 2086 -
La nouvelle année venait tout juste de commencer, mais les vœux de bonheurs étaient déjà mal placés. Mic enchaînait les interventions de plus en plus risquées, et ce, malgré les ordres de son ORL. Suite à un énième séjour à l'hôpital ainsi qu'une osculation approfondie, le héros vocal fut tout simplement privé de ce qui lui était le plus cher : sa voix.
Il n'y avait pas de négociation possible, il était interdit de parler jusqu'à nouvel ordre. La douleur du silence était telle qu'il avait envie de se cogner la tête contre un mur, juste pour sentir l'horrible migraine bourdonner bruyamment dans son cerveau. Il avait besoin de parler, de hurler, de chanter ; il avait besoin de s'entendre et d'entendre le monde.
Mais il n'en avait pas le droit et c'était de son entière faute.
Il savait pourtant bien qu'il se faisait du mal, il avait conscience de foncer dans le mur à pleine vitesse, alors pourquoi diable avait-il continué d'accélérer ? Et surtout, avec quelle impertinence se permettait-il de se plaindre aujourd'hui ? Il l'avait bien cherché, il fallait qu'il apprenne à prendre la responsabilité de ses actes.
Il serra les dents et fit de même avec ses poings. God, qu'il se détestait dans ces situations-là. La lâcheté qui coulait dans ses veines détruisait chaque jour un peu plus l'estime qu'il avait de lui-même. Mais le complaisant orgueil avec lequel il était né, ce traitre ami, s'amusait à le tourmenter en lui faisant sans cesse croire qu'il pouvait tout faire sans avoir de problèmes en retour. Que nenni ; son corps n'était que douleur et sa grande bouche habituée aux discours prétentieux se trouvait bien honteuse d'avoir tant parlé.
Yamada aurait sincèrement voulu être capable de se retenir. Il voulait réellement réussir à se maîtriser. Mais chaque fois qu'il tentait de contenir son énergie, il ne savait pas trop pourquoi ni comment, mais il finissait par s'abandonner à ses désirs profonds et se laissait complètement aller. La clope, la bouffe, l'alter... S'il croyait se contrôler là-dessus, ce n'étaient que mensonges illusoires.
Et, alors qu'il se morfondait sur sa propre incapacité à se gérer tout seul, la porte de la chambre s'ouvrit sur une silhouette tout de noir vêtue. Un homme à l'air renfrogné entra calmement dans la pièce, sans trop s'avancer, comme s'il avait peur d'empiéter sur l'espace vital du patient.
Hizashi osait à peine le regardait dans les yeux. Il savait qu'il allait se prendre des reproches, et il savait qu'il les méritaient entièrement. Mais il ne pouvait littéralement rien dire pour sa défense, alors il préfèrerait ne pas les entendre.
- Les médecins m'ont tout expliqué, lâcha finalement Eraser après une éternité de silence tendu.
Le DJ se pinça les lèvres, l'air d'un enfant pris la main dans le sac. Il utilisa ses mèches blondes pour camoufler la honte de son regard.
- Tu peux m'entendre, n'est ce pas ?
Oui, il le pouvait. Il avait encore ses oreilles, bien qu'endommagées par la surpuissance de sa Voice, mais elles étaient tout de même un minimum fonctionnelles. Mais il aurait préféré ne rien entendre, il aurait voulu ne pas avoir à écouter les conclusions des médecins et les interdictions qu'ils lui avaient imposées. Savoir que le monde autour de lui continuait de tourner alors qu'il était cloué au lit obligé au silence, ça le brisait.
- Je ne vais pas te demander ce qu'il s'est passé dans ta tête, de toute façon tu ne pourrais même pas l'expliquer.
Cette vérité lui fit atrocement mal. Aizawa venait de lui rappeler avec l'expression la plus froide existante que ses cordes vocales étaient verrouillées. Mais ça ne voulait pas dire qu'il ne pouvait pas s'exprimer, il avait toujours la langue des signes après tout, et il pourrait écrire sur son téléphone ou sur un calepin. Mais il n'en fit rien. Il n'avait pas envie de communiquer avec qui que ce soit.
- Hey.
Shota avait légèrement haussé le ton pour capter l'attention du blond sur lui. Il n'était pas habitué à faire la conversation tout seul, c'était le travail de Mic, ça. Et même s'il comprenait que son ami ne pouvait pas parler, il attendait quand même une réaction directe à ses propos, au lieu d'un regard fuyant et d'une ignorance totale de sa présence.
- Regarde-moi.
Mais Hizashi fit tout le contraire, il éloigna au maximum ses yeux du visage blasé de son interlocuteur. Il était honteux, ridicule et hautement critiquable. Il voulait retourner en arrière, remonter le temps, mais il n'était même pas sûr que si on lui donnait une nouvelle chance il ferait les choses correctement.
Après tout, ne l'avait-on pas déjà prévenu des risques qu'il encourait ? N'avait-il pas déjà été dans une situation plus ou moins similaire ? Ce jour-là, parce que les médecins avaient compris que le blond n'était pas capable d'arrêter de hurler, ils avaient mis en place cette procédure extrême : bloquer les cordes vocales de l'hyperactif le temps que son ouïe récupère totalement.
- Hizashi.
Il n'entendait presque plus rien de l'oreille gauche, mais encore suffisamment de l'oreille droite. Il allait récupérer, il était censé récupérer, mais il lui fallait du repos. Un repos forcé qu'il trouvait injustement violent.
- Je sais que tu peux m'entendre, ne m'ignore pas.
Yamada poussa un soupir déchirant. Il desserra ses poings et se tourna enfin pour se montrer à son ami. Mais il gardait les yeux baissés. Il voulait dire tellement de choses, mais est-ce qu'elles en valaient la peine ?
Il vit du coin de l'œil Eraser s'assoir dans le fauteuil situé à l'opposé du lit sur lequel le blond était assis. Le héros effaceur se passa mollement une main dans ses cheveux ébènes, l'air las. Aizawa jeta un regard circulaire à la pièce sans afficher la moindre émotion. Il était largement connu pour son flegme, mais là son meilleur ami était à l'hôpital avec un bandage sur le crâne, une entorse au poignet et surtout muet jusqu'à nouvel ordre, alors il pourrait montrer un minimum d'inquiétude ou bien de colère.
- Ça fait mal ? questionna l'homme d'un ton douloureusement calme.
Mic ne savait pas si son vis-à-vis faisait preuve de compréhension, de patience ou d'indifférence, mais dans tous les cas, il n'aimait pas ça. Plus tôt, il avait pensé qu'il aurait préféré perdre l'ouïe en même temps que la parole, mais il devait s'avouer que c'était profondément faux. Il n'aurait pas supporté le silence absolu ; le sien additionné à celui des autres.
Les bruits étaient le centre de son existence. Ils étaient la preuve qu'il vivait dans ce monde- là, et l'en priver c'était l'effacer.
Ça lui faisait mal d'entendre les voix des autres, mais ça le tuerait encore plus d'y être sourd. Les larmes lui montèrent aux yeux, les iris noyées par le désespoir, une vague nauséeuse souleva son cœur. Il n'arrivait même pas à se dire «Qu'ai-je fait pour mériter ça ?» parce qu'il savait que, justement, il le méritait. Mais il s'en foutait ; ou plutôt il aurait aimé s'en foutre. Il voulait récupérer sa voix.
- . . . C'est si douloureux que ça ?
Shota n'avait pas besoin d'une réponse orale pour reconnaître la diversité d'émotions qui transcendaient le corps blessé du DJ. Il devinait chaque pensée qui se cachait par tous ses gestes, ses regards et ses mimiques. Et de ce qu'il lisait par la réaction corporelle de l'anglophone était plus frappant que tout le vocabulaire qu'une bouche pourrais articuler.
«J'en mourrais tellement ça me fait mal».
Le héros effaceur n'ajouta rien. Il saisit un livre qui traînait sur la table —probablement un cadeau de rétablissement qu'un visiteur avait laissé au bilingue— et l'ouvrit nonchalamment. Il feuilleta les pages sans grand intérêt pour ce qu'il y était inscrit. Sans grand intérêt pour rien d'autre autour de lui.
- . . .
Hizashi ouvrit la bouche pour faire une remarque, mais seule l'effroyable absence de son se fit remarquer. Ce n'était pas comme s'il avait oublié, au contraire il avait plus que conscience de sa privation, mais il n'avait pas pu s'empêcher d'essayer, car c'était Shota en face de lui. Parce que Aizawa ne lui parlait pas, alors qu'il devrait avoir une infinité de choses à dire.
Le noiraud ne s'était jamais retenu de relever les comportements absurdes, irréfléchis et dangereux de Present Mic. Il était toujours le premier à rappeler le blond à l'ordre, mais là, rien. A peine un regard réprobateur, pas de gifle bien méritée, pas d'admonestation rationnelle. Juste, un silence encore plus assourdissant que le plus bruyant des cris.
- Quoi ? demanda Shota qui avait bien remarqué que le blond voulait dire quelque chose.
Le blessé se mordit la lèvre, l'air perdu. Il croisa enfin les orbes obsidiennes de son visiteur, et le fixa d'un regard qui voulait tout dire.
«Dis quelque chose, je t'en supplie. Insulte-moi, console-moi, moque-toi de moi ; n'importe quoi mais dis quelque chose. S'il te plait».
- Tu te demandes pourquoi je t'engueules pas ? devina l'éternel blasé.
Après une petite hésitation, Yamada hocha positivement la tête.
- Parce que je n'ai pas de raisons de le faire.
Le blond fronça les sourcils sans comprendre. Cette explication n'avait aucun sens. Il encouragea silencieusement son ami à continuer sur sa lancée. Ce dernier soupira et referma le livre qu'il tenait dans la main.
- Tu t'en veux suffisamment à toi-même, non ? Pourquoi je t'infligerai ma colère en plus ? Tout ce que je pourrais bien te reprocher ne sera jamais aussi violent que tout ce que tu t'infliges tout seul. Alors je vais pas dépenser une énergie inutile à hurler des mots que tu ressasses déjà. Ce serait irrationnel.
Mic fut frappé par ces paroles. Il s'attendait à franchement tout, sauf ça. Et il haïssait absolument ces moments où Aizawa le connaissait beaucoup trop bien. Il aurait aimé être moins évident, moins facile à lire.
- Mais si tu regrettes tant que ça, alors t'as qu'à faire attention à ce que ça n'arrive plus. Comme ça t'auras plus à revivre cette situation que tu détestes tellement.
C'était ce qu'il répétait à la suite de chaque visite chez le docteur Tamatoa, mais il trouvait toujours un moyen ou un autre de récidiver. C'était presque comme s'il le faisait exprès...
- Mais si tu recommences encore malgré tout, alors c'est ton problème. Tu fais ce que tu veux de ton corps Hizashi, mais ne viens pas te plaindre d'un choix que t'as toi-même fait.
«Blasé» n'était même plus un mot suffisant pour décrire l'inexpressivité totale de ses yeux noirs. On pourrait inventer une nouvelle émotion juste pour décrire la couleur fade de ces iris.
- Parce que c'est un choix, Hizashi. Pas juste utiliser ou non ton alter, mais ne pas appeler à l'aide c'est aussi un choix. T'es pas tout seul sur le champ de bataille, t'as pas à tout porter sur tes épaules juste parce que «c'est classe d'être un héros sur qui on peut compter». Et t'es pas tout seul dans ta vie non plus.
Un sanglot déchira le mutisme du héros vocal qui dut se mordre la lèvre pour noyer la boule de culpabilité qui remontait dans sa gorge. Demander de l'aide, c'était plus facile à dire qu'à faire, surtout quand il ne savait pas vraiment quel était son problème. Il ne pouvait juste pas s'empêcher de s'autodétruire, et il se voyait mal l'annoncer à qui que ce soit. Même Shota prétendrait que ce serait à lui de faire des efforts et que personne ne peut changer à sa place. Ouais, l'ébène était bien trop terre-à-terre pour le comprendre et le soutenir.
- Donc continue si tu ne veux pas arrêter, ou reprends-toi si tu te respectes un minimum. C'est ton problème, je me fiche de comment tu comptes le régler.
Il avait gardé le même ton monotone depuis l'instant où il était entré dans la pièce. On pourrait le comparer à un robot, mais même ces machines de métal paraitraient plus sentimentales que le regard froid que lui jetait le héros effaceur.
- Ça ne me fait plus rien, la manière dont tu gères ta vie. J'ai pas le temps de m'inquiéter pour ça, puisque tu n'écoutes que toi.
Il se dirigea vers la fenêtre et l'ouvrit. Il ne faisait pas beau dehors. Un nouveau silence prit place entre les deux protagonistes. Hizashi se dit que, mine de rien, Aizawa lui avait quand même fait un discours réprobateur...
- Mais, reprit alors ce-dernier, ça ne veut pas dire que j'en m'en fiche vraiment. C'est juste que je n'ai rien à te dire de plus que ce que tu ne penses déjà. Mais je ne vais pas partir. Je reste là... Même si tu fais comme si j'existais pas, je suis toujours là.
C'était sans doute parce que le héros effaceur savait à quel point ça faisait mal. Quand il avait perdu Oboro, quand ils avaient perdu Oboro, Shota avait sombré. Totalement sombré. Il ne supportait plus l'obscurité et la solitude, mais en même temps il ne savait plus regarder la lumière et parler aux gens. C'était un tourbillon infini de douleur, faire son deuil.
Alors comme Mic n'avait pas laissé Eraser seul dans le noir, ce dernier ne pouvait pas abandonner son ami seul dans le silence. Et ces derniers mots, cette dernière phrase qu'avait sortie le rationaliste, n'étaient pas entrée dans l'oreille d'un sourd.
Sans mauvais jeu de mot.
[ Merci ] signa en tremblant le blond alors qu'il cédait aux larmes.
Et, comme promis, Shota ne partit pas.
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[ 2229 mots ] — 06.06.2021
Ouais je sais on est dimanche midi.
Ouais je sais j'ai pas posé d'annonce.
Ouais je sais c'est la cinquième fois d'affilée que je suis en retard.
Ouais.
Je sais tout ça.
J'ai passé une semaine horriblement compliquée, et je suis épuisée. Je m'écroule de fatigue à 4h du matin tous les soirs, j'ai passé la moitié de mon samedi à pleurer, bref, j'avais pas le temps ni l'énergie de finaliser ce chapitre. Et je l'ai pas corrigé non plus, ça doit se voir.
J'suis KO physiquement et mentalement mais bon faut continuer d'écrire, et j'aime trop cette fic pour l'abandonner.
J'vous jure j'essaie d'me reprendre mais j'promets rien, j'contrôle pas ma vie là, c'est le bordel et j'ai envie de m'enterrer la tête sous le sol pour plus rien voir et plus rien entendre mais bref.
Même mes "brefs" sonnent fades, c'est n'importe quoi.
Allez, vous connaissez déjà la chanson :
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Cho.
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