La couleur du Ciel - SeiAtsu Soulmate AU 1/2

tw : mention de scarification, tentative de suicide


***


Seiya regardait toujours ses pieds quand il marchait. Jamais droit devant lui, jamais autour de lui... et encore moins au dessus de sa tête. Les rares fois où il décollait ses yeux du sol, c'était pour regarder Nosaka, qui marchait toujours devant lui. Il suivait toujours l'adolescent aux cheveux roses, et lui obéissait au doigt et à l'œil.

Oui, comme les autres membres de l'académie l'avaient surnommé, il était bien le chien de Nosaka.

Il était.

Seiya ne se souvenait pas exactement de quand il avait commencé à regarder autre chose que ses pieds et le sol gris, lorsqu'il marchait. Et encore moins de quand il s'était mit à regarder le ciel. Ce ciel si terne. L'adolescent ne comprenait pas pourquoi tout le monde aimait tant cette couleur. Pourquoi dans les livres qu'il étudiait il pouvait y avoir des métaphores de plus de trois ligne sur cette étendue bleue qui recouvrait leur tête.

Bleu.

Il ne comprenait pas ; le ciel ne lui semblait pas aussi bleu que ce qu'on disait. Le ciel lui semblait terne. Gris. Triste. Sans intérêt. Alors il avait vite fini par arrêter de regarder ce dernier. Se faire mal à la nuque pour lever la tête lui semblait inutile. Cependant, il n'avait pas reprit sa vieille habitude de regarder le sol. Quelqu'un l'en empêchait à vrai dire.

Une tête bleue, un bleu plutôt criard d'ailleurs, qu'on pouvait repérer à plusieurs mètres. Koushi Atsushi, qu'il avait retrouvé par hasard au lycée. Ce garçon l'empêchait presque de regarder à nouveau le gris du sol. Il lui présentait plutôt les couleurs de la vie. Le jaune des fleurs, le vert des arbres, le orange du chat roux du lycée qu'il nourrissait... ou encore le mauve de ses hématomes, ou le rouge de ses blessures.

La vivacité de Atsushi était inatteignable. Pour Seiya, il avait l'impression que jamais il n'atteindrait ce garçon, et pourtant il le suivait de prêt : il était juste à ses côtés. Il ne le regardait pas de loin, et Atsushi l'invitait gré à entrer dans sa joyeuse folie maniaque.

Tout avait commencé en se retrouvant dans le même club de foot, dans le même lycée. Ils ne se parlaient que pendant lesdites activités au début, puis avaient finit par manger ensemble. Puis il y eut la seconde année, où ils finirent camarade de classe. Et finirent inséparable.

Atsushi n'était pas sans défauts, Seiya l'avait vite comprit - et à l'instar de Nosaka, il ne s'en cachait pas. Pourtant, cela ne gênait pas Seiya cette fois. Il avait apprit à vivre avec ceux de Atsushi : avec sa mauvaise gestion de la colère, avec son égoïsme quand il s'agissait de nourriture, avec son attitude de sale gamin, de faussement imbus de lui-même...et son côté manipulateur.

Le brun cendré l'avait remarqué, son ami était bien plus sombre qu'un gris simple. Il se rapprochait parfois du noir. Atsushi manipulait les autres comme bon lui semblait, pour arriver à ses fins. Quand il ne voulait pas finir un devoir de groupe, quand il voulait quelque chose, quand il fallait amadouer les professeurs... ou quand il s'agissait de ne pas lui poser des questions sur sa vie privée .

Atsushi lui rappelait ce ciel terne, que tout le monde voyait différemment.

C'est ce qu'il se disait, jusqu'à voir ce même ciel dans le dos de Atsushi, alors qu'il devait lever la tête bien plus haut que d'habitude pour le regarder. Ce garçon qu'il admirait - qu'il aimait par dessus tout. Celui qui lui avait apprit à regarder - admirer - les couleurs. Qui lui avait apprit à rire, à s'énerver, à se confier, mais aussi à pleurer s'il en ressentait le besoin.

Ce même garçon qu'il devait supplier en hurlant de ne pas bouger, à cet instant présent. Ce même garçon qui était sur le toit, de l'autre côté de la barrière, à s'accrocher à cette dernière, semblant encore réfléchir s'il devait sauter ou non.

"Atsushi ! "

Mais il y avait bien trop peu de chance pour qu'il puisse l'entendre. Seiya était mélangé à la foule d'élèves, tétanisé. Celui pour qui il ferait tout cesserait d'exister s'il bougeait encore d'un pas. Un seul pas le séparait de la Vie et la Mort.

Un seul pas les séparerait à jamais.

La foule autour de lui était horriblement bruyante. Certains hurlaient, d'autre avaient sortit leur téléphone. Seiya ne savait que faire. Il devait faire quelque chose ! Mais quoi ? Et Atsushi sembla le regarder.

Non.

Il ne semblait pas.

Il le regardait lui. Uniquement lui. Uniquement Seiya.

Et quelque chose fut le déclic pour l'adolescent.

Ses yeux s'ouvrirent en grand. Le gardien de but ne croyait pas ce qu'il voyait. Le ciel, dans le dos de Atsushi, semblait avoir exactement la même couleur que ses yeux. Un bleu si clair qu'on se croyait dans un autre monde - hors de la Terre. Des yeux que Seiya souhaitait voir encore rire demain. Et après-demain. Et encore de nombreuses années. Un regard qu'il souhaitait protéger.

Son corps bougea avant sa pensée. Jamais il ne se serait cru suffisamment rapide pour monter les marches des quatre étages aussi vite. Il était à bout de souffle, mais il ne pouvait abandonner. L'adolescent bouscula les professeurs devant lui, se fichant de leurs commentaires ou de leurs interdictions. Il repoussa ceux qui tentèrent de le rattraper, et déboula sur le toit de l'école. Atsushi se retourna à ce moment-là.

Il semblait au bord du gouffre. Totalement désemparé. Depuis le sol, Seiya ne pouvait le voir, mais Atsushi était en larmes. Des gouttes d'eau dévalaient sur ses joues, et tombait à ses pieds, sur l'asphalte. Ses cernes étaient plus creusées encore que d'habitude, ses cheveux encore moins coiffés. Seiya remarqua l'hématome sur le visage de celui qu'il aimait. Sur ce garçon qu'il souhaitait protéger.

Et comme il l'avait vu depuis le bas du lycée, le ciel dans le dos de Atsushi avait exactement la même couleur que ses iris. Il voyait enfin la couleur de ce ciel dont tout le monde chantait les louanges.

"Atsushi..."

Aucun mots ne sortaient des lèvres du plus petit, à part des sanglots, alors que Seiya approchait à pas lents. Les mains blessées s'accrochaient désespérément à la barrière de sécurité, et en baissant les yeux, Seiya remarqua le rouge à travers les manches du pull. Lui qui avait arrêté de regarder le sol... ses yeux se reconcentrèrent vite sur Atsushi.

D'une douceur dont il ne faisait preuve que pour celui aux cheveux bleus, Seiya posa ses mains sur les épaules de ce dernier. Le plus petit sursauta, tout en s'étouffant dans un ultime sanglot, et laissa Seiya le guider. Il le laissa l'aider à remonter la balustrade, alors que ses bras entourèrent le cou du brun cendré. Lorsque Atsushi finit d'enjamber cette fichue barrière, son corps le lâcha, et Seiya referma sa prise contre lui, alors qu'il se laissait aussi tomber au sol.

Il le serrait du plus fort qu'il pouvait contre lui, comme pour l'empêcher de s'échapper, mais aussi pour le protéger du reste du monde.

"Seiya... Je suis... Je suis désolé..."

"Je sais. Ne t'excuse pas. Je t'en pris, ne t'excuse pas..."

Atsushi ne put aligner d'autres mots, tant sa gorge se nouait en mille sanglot. Ses larmes dévalaient abondamment de son visage, alors qu'il enfouit son visage contre le torse du plus grand. Seiya referma sa prise, passant sa main dans les cheveux teint du garçon qu'il tenait tout contre lui. Ses lèvres se posèrent sur le sommet de son crâne, avant qu'il ne chuchote tout bas.

"Merci. Merci Atsushi. Merci de m'avoir montré la couleur du ciel."

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