𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝐗𝐕
— S O U S L E S C A R T E S —
郷に入っては郷に従え
— C’EST UN HONNEUR de vous rencontrer, Imperecea.
Mes muscles se figent tandis que mes yeux s’écarquillent, demeurant fixés sur le sol quelques instants. Ce titre, rares sont ceux le connaissant. Et encore moins nombreux se comptent les personnes sachant qu’il me revient.
Là, au-dessus de moi, tandis que le restant des corsaires a déjà pénétré la taverne sans un regard en ma direction, que je demeure seule, les fesses sur le sol, mes yeux sont écarquillés. Un instant, mon côté rationnel met ce que je viens d’entendre sur le compte de mon imagination débordante. Cependant, bien vite, je réalise qu’à la lueur orangée provenant du bar se découpe une ombre me surplombant.
Celle d’un homme debout derrière moi.
Précautionneusement, je lève la tête, déglutissant péniblement. Dans mon dos, sa présence demeure. Tangible. Obscure. Grandissante. Sa silhouette noirâtre sur le sol est si étirée qu’il me semble immense.
Mes mouvements sont lents, mes muscles sont raides. Je ne bouge qu’à une vitesse très tenue. Et il semble le remarquer car, bientôt, il insiste :
— Imperecea ? Puis-je vous aider à vous relever ?
Me tournant enfin, je découvre dans mon dos un visage fin et harmonieux. Là, à un mètre au-dessus de ma personne, un homme me surplombe. De son pourpoint noir cintré de lianes de cuir tressées jaillit un visage délicatement travaillé où brillent deux yeux bleus comme des saphir, encadrés de longs cils noirs.
Au-dessus d’eux, quelques boucles brunes chutent sur le front du garçon qui doit être un peu plus vieux que moi, peut-être une ou deux années. Elles adoucissent davantage ses traits bienveillants sur lesquels sont tendue une peau brune, légèrement hâlée.
Sa main est posée sur le gracieux pommeau de son épée.
Bientôt, son genou trouve le sol et il penche la tête en avant, me montrant sa nuque. Prise de cours, il me faut quelques instants avant de réaliser qu’il exécute une révérence, ses quelques mèches chutant en avant. Et, relevant la tête, il m’offre un sourire doux et profondément gentil.
— Mon nom est Théodor, je suis un proche du Cercle Impérial, bien que n’en étant pas membre. Encore une fois, c’est un honneur de vous rencontrer.
Encore sonnée, quelques secondes s’écoulent avant que je ne parvienne à pleinement réaliser la situation. Un homme est agenouillé devant moi qui suis étalée sur le sol, se présentant comme un membre de mon peuple et me traitant avec bien des égards.
Mes yeux s’écarquillent soudain. Je me relève précipitamment.
— Oh ! je m’exclame. Navrée, j’ai mis du temps à vous comprendre ! Enchantée !
— Mais je suis le plus enchanté des deux, répond-t-il en se relevant, le dos toujours courbé en avant et sa paume posée sur son cœur. Ma proximité avec le Cercle Impérial m’a mené en ces lieux. Je souhaitais rencontrer mon Impératrice afin de lui présenter mes hommages.
Mes sourcils se haussent. Contrairement à Olympe et Edward, ce Theodor se montre particulièrement formel, respectant les codes de ce que je devine comme étant l’étiquette de la noblesse de son peuple. Son regard ne trouve jamais le mien, un sourire élégant habille ses traits et il demeure courbé en avant de sorte à ne pas paraitre plus grand que moi, ses doigts toujours posés sur sa poitrine.
De plus, le carcan gravé de son épée ainsi que son pourpoint finement bridé me laissent à penser qu’il s’agit-là d’un homme assez aisé.
A vrai dire, il ressemble à un prince.
— Mais quel lèche-cul, celui-là, retentit soudain une voix dans mon dos.
Je tressaille, reconnaissant celle d’Olympe. Elle et Edward doivent avoir atteint la taverne, maintenant. Mais, contrairement au restant de l’équipage, ils n’ont pas fait le choix d’y entrer directement.
Me tournant, je la découvre en effet. Ses cheveux ont été amenés en un chignon d’où s’échappent quelques mèches et, sous son visage carré se dessine son habituelle robe blanche cintrée d’un tissu noir.
Elle pourrait avoir l’air gracieuse. Si son sourcil n’était pas haussé en une moue absolument méprisante, je suis même sûre qu’elle donnerait l’impression d’être d’une douceur angélique.
Mais, présentement, je ne vois d’elle que le visage d’une femme peu agréable.
— Olympe, salue la voix de Theodor dans mon dos.
— Boucle-la, le lèche-cul, rétorque-t-elle en le fusillant du regard.
— Je suis venu présenter mes hommages à notre Imperecea, commente l’intéressé en se plantant à côté de moi, cette fois-ci entièrement relevé. Comme le veut l’étiquette de…
— L’étiquette veut rien. Seuls les membres du Cercle Impérial sont tenus de se présenter à l’Impératrice et la moitié d’entre nous s’en foutent. Le Forgeron m’a même dit que l’Impératrice pouvait aller se faire mettre.
Je hausse les sourcils. Charmant.
Le Cercle Impérial est un groupe de douze Voyageurs chargés de protéger les deux empereurs mais aussi de veiller à ce que ceux-là ne transforment pas notre Empire en un régime dictatorial. Olympe, Bosuard, Dan, Edward en sont membres mais la plupart de ces personnes demeurent inconnues à mes yeux.
Je ne connais que quelques noms de guerriers membres de cet ordre mais ne les ai pas encore rencontrés. La Louve, la Vipère et le Forgeron sont trois femmes censées être extrêmement puissantes et aussi faisant parti du Cercle Impérial.
Mais ils semblent qu’elles soient trop bien pour venir me voir.
— Le Forgeron a dit quoi ? s’époumone aussitôt Theodor en serrant le poing avant de se tourner vers moi et s’incliner. Je suis vraiment navré, Imperecea, que vous ayez dû entendre telles paroles. Le Forgeron n’a jamais été une guerrière très stable et…
— Theodor, ta gueule, le coupe Olympe. T’es même pas membre du Cercle Impérial, tu devrais pas aller voir l’Impératrice.
—Je devrais pas mais j’en ai le droit. J’ai donc pensé que venir lui proposer de me mettre à son service pourrait l’aider, objecte-t-il.
Il demeure raide comme un piquet à côté de moi. Mes yeux s’attardent un instant sur lui. Il n’a pas vraiment une tête de premier de la classe mais sa façon de s’exprimer et prendre ma défense laisse penser qu’il est profondément loyal envers l’empire lui-même — il ne me connait pas, son respect n’est lié qu’à mon titre.
Me tournant à nouveau vers Olympe, je la vois hausser un sourcil moqueur.
— T’es vraiment un lèche-cul. Et pour la énième fois, c’est pas les Impereceis qui choisissent les membres du Cercle Impérial mais les Silences. S’ils t’ont pas choisi c’est que t’en seras jamais membre. Lui faire de la lèche sert à rien.
A ma droite, l’homme se tend. Un point sensible a été touché…
Ainsi, il ne voue pas réellement de respect à mon titre, au fait que je sois impératrice mais s’intéresse davantage à l’idée d’intégrer le Cercle Impérial ? Remarque, il n’a pas vraiment tort. A en juger par la façon d’agir de la Louve, la Vipère et le Forgeron, je ne suis pas celle qui a le plus de pouvoir.
Et en effet, ces douze personnes sont plus puissantes que moi, peuvent contester mes décisions et même convaincre l’autre Impereceis de me destituer de mes fonctions. Ils savent pertinemment que je ne fais pas vraiment le poids devant eux.
Là est la raison pour laquelle, à l’exception de Dan et Bosuard, nul parmi eux ne semble nourrir à mon égard une forme quelconque de respect.
Mais la plupart sont tout de même d’accord sur le fait qu’ils me doivent obéissance.
— Je ne lui fait pas de la lèche, comme tu dis, rétorque-t-il. Les membres du Cercle ne sont pas présents pour protéger l’Impératrice alors je me propose de prendre la relève.
— Je suis présente, rétorque-t-elle d’une voix ferme.
— Génial, du coup en plus de devoir trouver des soldats pour l’Impératrice il faut aussi se dégoter un babysitter pour ton gros cul.
— Ferme ta gueule, bouffon.
— Que de répartie, je suis subjugué !
— La répartie n’est pas l’arme permettant de remporter la guerre et c’est d’ailleurs pour ça que t’es un aussi mauvais soldat.
— Je suis excellent.
— Ma main gauche fait mieux que toi.
— Tu veux voir la mienne de près !?
Je soupire, décontenancée par le tournant que prend les évènements. En face de moi, les deux continuent de se regarder en chien de faïence, visiblement près à se jeter l’un sur l’autre. De toute évidence, ces deux-là se connaissent depuis un petit moment.
Et ils ne s’apprécient pas le moins du monde.
— Olympe, Theodor, ça suffit.
Aussitôt, leur dispute s’interrompt quand la voix chaude et grave d’Edward retentit, à quelques mètres de nous. Et, entre les quelques passants traversant la route pavée, à la lueur des lampes, la mâchoire carrée du blond se découpe soudain.
Une fois n’est pas coutume, ses cheveux sont noués en une queue-de-cheval basse, lui donnant un air étonnamment plus sérieux. Et la fermeté avec laquelle il vient de proférer son ordre montre que ce soir, il n’est pas décidé à jouer la carte de la patience.
Cela ne lui ressemble pas…
Peut-être la présence de ce nouveau venu l’incommode-t-il ?
— Bonsoir, Edward, je le salue.
Dans un faible acquiescement, il me répond. Puis, il se tourne à nouveau vers les deux Voyageurs qui s’observent en chiens de faïence.
— Theodor, Olympe t’es hiérarchiquement supérieure, tu devrais surveiller ta langue en t’adressant à lui. Olympe, Theodor est un soldat méritant, tu ne peux décemment pas le chasser comme cela. Et vous deux, l’étiquette stipule que vous ne devez pas prononcer de telles paroles devant l’Imperecea.
Je devine que les ordres du blond ne sont pas à leur goût. Néanmoins, après quelques secondes de silence, tous deux acquiescent d’un air ennuyé.
— Excellent, reprend Edward en les voyant faire. Vous allez tous les deux rentrer avec moi et l’Imperecea et participer à sa formation durant les quelques semaines que nous allons passer sur la terre ferme. Compris ?
— D’accord, répondent-ils en chœur.
Là-dessus, le blond tourne les talons. Aussitôt, je prends sa suite et pénètre l’établissement. La luminosité forte et jaunâtre emplie les lieux, faisant ressortir les teintes brunes du bois des tables, poutres et chaises.
De grands rires gras envahissent la taverne. Ceux des pirates du Red Force que je remarque bien vite, au fond de la salle.
Assis autour de diverses tables, ils ont déjà commandé. La tête basculée en arrière, Shanks boit d’ailleurs goulument une large pinte. Je l’observe un instant, médusée. Cet abruti m’a balancée en travers de son épaule comme un sac avant de me lâcher sur le sol et ne s’est même pas soucié de savoir si j’allais bien.
Une chose est sûre, je vais avoir bien du mal à lui pardonner.
Soudain, une présence se fait à ma droite. Me tournant, je remarque bien vite le visage hâlé affublé de boucles châtains de Theodor. Il me regarde déjà, visiblement attentif.
— Tout va bien, mon Impératrice ? J’ai vu le comportement du rouquin, tout à l’heure. Voulez-vous que je venge votre honneur ?
Interloquée, je fronce les sourcils, ne comprenant pas sa demande.
— Que je le provoque en duel ? insiste-t-il.
Aussitôt, mes yeux s’écarquillent.
— Non ! Non ! Pas du tout ! Ne t’en fais pas ! C’est… C’est un truc entre amis ! j’insiste.
Absolument pas, non.
Mais pousser quelqu’un à se battre en mon nom, qui plus est contre une personne aussi puissante que Shanks le Roux n’est sûrement pas quelque chose que je suis prête à faire. Les capacités de Theodor ne me sont pas familière mais je suis convaincue qu’il se fera manger tout cru.
Il me fixe, suspicieux.
— Bon, allons-nous assoir ! je lance en le saisissant par le bras, déterminée.
Il se laisse faire tandis que j’avance de quelques pas. Mais, bientôt, ma route se retrouve barrée par un large torse et des épaules développées habillées d’un long manteau noir que je connais bien.
Mes pas se figent puis je lève les yeux vers Shanks qui vient de s’arrêter devant moi. Sa posture est droite, ferme. Et, à ma grande surprise, quand je lève les yeux vers les siens, ceux-là ne se font pas joueurs derrière ses trois cicatrices.
Ils n’ont rien à voir avec son habituelle amabilité.
— Et c’est qui, lui ? tonne-t-il fermement.
郷に入っては郷に従え
2062 mots
désolée de publier si
tard
on part sur un
peu de jalousie hehe
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