𝐂𝐡𝐚𝐩𝐢𝐭𝐫𝐞 𝟒 - Exᴄᴜsᴇs
⸺ Malefoy ? Malefoy ?
Une voix lointaine me parvenait. Je ne savais pas à qui elle appartenait. Le monde autour de moi était flou, et je souhaitais qu'il le reste pour toujours. Je voulais me pelotonner dans les couvertures de ce grand lit et y rester à jamais. Je ne voulais pas me rappeler de la réalité. De ce qu'il s'était passé pendant ces dernières vingt-quatre heures.
⸺ Malefoy ? appela une nouvelle fois la voix d'une manière calme et douce.
Je ne bronchai pas. Je ne voulais pas me rappeler. Pas du tout.
⸺ Malefoy, es-tu réveillé ? demanda la voix.
Je laissai échapper un léger grognement. Je voulais que l'arrivant cesse de me déranger et me laisse dormir jusqu'au moment de ma mort.
⸺ Malefoy, lève-toi, s'il te plaît.
J'entendis des pas. Puis je sentis un poids froid contre mon bras nu. Le garçon me secoua très légèrement.
⸺ Malefoy, arrête-toi donc de m'ignorer. Lève-toi, il est dix heures et demie du matin.
Quelle heure était-il ? Je m'en fichais éperdument. Je n'avais pas l'intention de bouger, mais lorsque je sentis les doigts de Potter m'enserrer le bras, autour de la Marque gravée dans ma peau, je m'activai soudainement et je pris peur. Je me reculai très brutalement en retirant mon bras contre ma poitrine haletante.
⸺ Ne me touche pas, Potter. Pas ma Marque.
L'homme en face de moi semblait surpris : Son front barré d'une cicatrice en forme d'éclair venait de se couvrir de rides d'inquiétude, et ses lèvres formant un sourire suffisant venaient de se rabattre vers le bas, formant une moue vexée.
⸺ D'accord, Malefoy. Maintenant que tu as cessé de faire le mort, peux-tu descendre ? Je t'attends dans le salon.
Je le fusillai du regard, ce qu'il ignora superbement.
⸺ Potter, on va tout de suite mettre les choses au clair.
Je repoussai les couvertures et me levai pour me planter devant lui, une lueur de défi dans le regard.
⸺ Ce n'est pas parce que j'ai pu choisir ma sentence à l'issue de ce foutu procès, que tu as été désigné comme mon tuteur et que je suis coincé chez toi pour une année entière à mon plus grand déplaisir que tu as le droit de me traiter comme un enfant ! Je suis majeur, je suis adulte, alors considère-moi comme ton égal. Ne me donne pas d'ordres, compris ?
Son sourire revint se dessiner sur son visage anguleux. Mon faciès n'était qu'à quelques centimètres du sien, et il me fixait, imperturbable. Je ne comprenais pas comment mon regard meurtrier ne le faisait pas flancher.
⸺ Très bien, Malefoy. Calme-toi. Maintenant que tu as piqué ta petite crise, peux-tu te préparer et descendre dans le salon ? Tu ne vas pas me mener à la baguette. Nous allons mettre les choses au clair. Compris ?
Tandis qu'un florilège d'insultes commençait à fleurir dans mon esprit, Potter se détourna puis sortit de ma chambre.
⸺ Idiot, murmurai-je simplement.
Je me plaçai devant le miroir en faisant craquer mes doigts. Mon reflet s'était quelque peu amélioré depuis hier, mais je n'en étais pas satisfait. J'étais toujours maigre, et les habits me servant de pyjama étaient tous froissés. Je passai une main dans mes cheveux longs en soupirant. Bien que propres, ils étaient fins et filandreux, et me tombaient sur les épaules. Je devais sérieusement me les couper. Mes joues étaient creuses, et je ne parvenais même pas à sourire. Je me débarrassais d'abord de mon t-shirt, puis de mon pantalon. Je m'observai avec une attention anxieuse, craignant de voir ce que j'étais devenu. Comme hier, mes côtes semblaient presque vouloir transpercer ma peau, mon ventre était creux. Mes bras auparavant musclés étaient devenus très fins, et mes épaules carrées ressemblaient à celles d'un garçon prépubère. Je me retournai : mes omoplates ressortaient, et lorsque je me penchais, l'os au milieu de mon dos se faisait voir. Mes jambes étaient amaigries et je devais avoir perdu au moins trois tailles de pantalon. De gros cernes noirs se dessinaient sous mes yeux fatigués mais néanmoins plus reposés que le jour précédent.
⸺ Foutue vie, grommelai-je en attrapant la pile d'habits propres que le Survivant avait posé sur la chaise dans le coin de la pièce.
J'enfilai la paire de chaussettes noires puis le jean délavé qui se présentait à moi. Je crus reconnaître une affaire que portait Saint-Potter lors de sa quatrième année à Poudlard, mais je devais sans doute me tromper. Le t-shirt blanc était plutôt léger, mais je n'avais pas vraiment froid. Je mis plusieurs minutes avant de me décider à descendre.
Saint-Potter était dans la cuisine, et préparait ce qui ressemblait à du chocolat chaud.
⸺ Bonjour, Malefoy, me fit-il comme si notre altercation d'il y a quelques minutes n'avait jamais eu lieu.
De mauvaise humeur, je tirai la chaise et m'y assis dessus.
⸺ Rien ne sert de faire semblant d'être content, Potter. Je te déteste. Tu me détestes. Point à la ligne. Cesse donc de faire semblant.
Il leva les yeux au ciel mais ne trouva rien à répondre.
⸺ Que voudrais-tu faire aujourd'hui ?
Sa question me prit de court.
⸺ Pardon ?
⸺ Quelle activité aimerais-tu faire ce présent jour, Malefoy ? As-tu des questions ou des ressentis à me faire part ?
Je grognai.
⸺ Oui. Premièrement, cesse de me traiter comme un idiot écervelé. Deuxièmement, arrête de m'appeler « Malefoy » avec cette voix si dédaigneuse. Troisièmement, aurais-tu l'obligeance de te comporter normalement ? Une fois tu es énervé, et la seconde d'après tu arbores un grand sourire naïf ! Tu m'énerves, Potter. Je ne pense pas pouvoir tenir une année entière comme ceci.
⸺ Je ne te considère pas comme un idiot écervelé, Drago.
Entendre mon prénom dans sa bouche était une sensation... étrange. J'étais bien trop habitué aux habituels « Malefoy » et « Potter » lancés ironiquement dans les couloirs entre deux cours. Mais je devais bien admettre que... ceci me plaisait bien.
⸺ Et puis je me comporte le plus normalement du monde ! Pourquoi es-tu si paranoïaque ? C'est Azkaban qui t'a rendu comme cela ?
La dernière phrase fut la phrase de trop. Je vis rouge. Je le pris par le col et le plaquai contre le mur, une lueur meurtrière dans le regard.
⸺ La ferme, Potter. Tais-toi. Cesse de te moquer de moi. Je te hais. Laisse-moi donc tranquille, enfin ! Pourquoi fais-tu cela, hein ?
⸺ Je crois avoir déjà répondu à cette question, répliqua-t-il d'une voix sèche.
Je le tirai vers moi avant de le replaquer violemment contre le mur.
⸺ Cesse de faire le malin ! Arrête ça, Potter, ça ne m'amuse pas, mais alors pas du tout !
⸺ Ce n'est pas le but. Maintenant, si tu pouvais me lâcher, ça m'arrangerait.
Je ne lui obéis pas dans l'immédiat. Mon visage furieux n'était qu'à quelques centimètres du sien, et je pouvais voir encore plus nettement ses iris vert terne. Je le haïssais, je le haïssais si fort...
⸺ Lâche-moi, Malefoy.
⸺ Pourquoi agis-tu comme cela avec moi ? grinçai-je entre mes dents.
Je le vis soupirer. Comprenant que je n'obtiendrais pas de réponse, je le relâchai et m'éloignai de quelques pas, me mordant la lèvre afin de ne pas pleurer. Je me sentais si mal. Je le détestais de tout mon cœur.
⸺ Désolé, finit-il pourtant par dire.
⸺ Désolé de quoi ? De n'être qu'un sale petit abruti arrogant ? Moi aussi je suis désolé pour toi que tu le sois ! criai-je en me retournant violemment.
⸺ Non, sombre idiot.
Il se rapprocha de quelques pas, et sa voix plus forte vint frapper mes tympans.
⸺ Non, je suis désolé de me comporter si mal. Avec toi.
⸺ Tu aurais pu t'en rendre compte avant ! Tu es infect avec moi depuis que je suis venu en détention chez toi.
⸺ Détention... le mot est un peu exagéré, ne crois-tu pas ?
⸺ Tu serais surpris. N'as-tu pas encore compris que je te haïssais ? Vivre avec toi est plus un calvaire qu'autre chose, Potter.
⸺ Je sais. Et c'est en partie dû à mon attitude. Je te prie de m'excuser. Je sais que je ne devrais pas me comporter comme ceci, mais... je me suis rendu compte d'une chose après ma rupture avec Ginny. Cela me stresse, j'y pense jour et nuit. Je ne me souviens pas de la dernière fois que j'ai souri. Je suis irritable, et je m'en excuse.
⸺ Oh... ne t'inquiète pas, Potter. Je sais à quel point une rupture peut affecter. Et malheureusement, à la suite de ma propre rupture, qui a été une catastrophe, je n'ai trouvé personne d'autre pour tenter de l'oublier. Mais après tout, j'ai déjà tant de blessures à panser que je n'en ai même plus le compte en tête. Ce n'est qu'une de plus.
Et quelle blessure béante. Mais ça, je ne le partagerai jamais avec lui.
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