𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟏𝟕






















𔘓

C  H  A  P  I  T  R  E    1 7

𔘓













































































           Les lueurs blafardes des néons blancs tapent sur ma rétine. Assise sur le sol, le dos contre le mur, je fixe celui me faisant face. Mes insomnies récurrentes m’ont gagnée et des cernes se creusent sans doute sous mes yeux.

           A côté, quelques femmes sont assises côté à côté sur le même lit, quasiment endormies. Des conversations vont de bon train, tout autour de moi. Je n’y fais pas vraiment attention.

           A ma gauche, un mouvement attire mon attention, là où se trouve la porte qui n’est en réalité qu’une grille. Derrière les barreaux de la cellule, un policier arrive, m’observant. A côté de lui se trouve une silhouette que je ne connais que trop bien.

— Salut, mon petit Jamesounet, je souris dans un clin d’œil.

           L’homme pousse un soupir et pince l’arête de son nez de sa main. Son crochet fend l’air lorsqu’il fait un geste au policier.

           Ce dernier ouvre d’ailleurs la porte de la cellule, avant de me faire signe de me lever. Je m’exécute en me tenant maladroitement au mur, les jambes tremblantes car endolories après tout ce temps dans cette position.

— Merci de m’avoir prévenu, déclare James d’un ton dépité.

— Hé ! s’exclame soudain l’une de mes codétenues en me voyant sortir. Elle est arrivée après moi ! Ça fait moins de vingt-quatre heures qu’elle est là ! Elle a pas le droit…

— Boucle-la, toi.

           Après ces trois mots, le policier referme la porte. Cela ne suffit pas à faire taire la détenue qui hurle de plus belle. Cependant nous nous éloignons dans le couloir.

           Les plafonds parcourus de néons illuminent notre chemin. Nous avançons tous les trois, moi plus lentement, étant passablement éreintée.

           Déboulant dans un openspace traversé de policiers allants et venants et personne déposant plainte, je dépasse un bureau. James et le policier, eux, s’y arrêtent.

— Tenez, dis l’homme en tendant à James une boîte en carton. Elle avait ça sur elle en venant. Je vais faire en sorte que ça ne figure pas dans son dossier.

— Merci.

           L’homme soulève le couvercle de la boite et jauge l’intérieur quelques instants. Comme en suspens, il contemple son contenu avant de pousser un très long soupir exaspéré.

           Dans un silence de plomb, sans un regard pour moi, James commence à marcher. Je le suis, le fixant intensément tandis qu’il gratte sa tête de son crochet en soupirant.

           Bientôt, nous sortons. Je m’arrête un instant pour humer l’air frais de cette nuit noire. Des lampadaires sont allumés et me permettent de localiser la voiture aux vitres teintées noires de l’homme.

           Il ne m’a d’ailleurs pas attendue et je dois courir pour le rattraper. Il ouvre la portière côté passager avant de me dépasser sans un regard, regagnant celle du conducteur.

           Debout à côté de mon siège, j’hésite un peu avant d’entrer. Cependant, lorsqu’il s’assoit, je l’imite et referme aussitôt. L’air se fait plus doux, maintenant.

— Il me semble que ceci vous appartient, tonne-t-il en posant la boite sur mes genoux. Attachez-vous. Hors de question que vous vous fassiez arrêter deux fois en une nuit.

— C’est marrant mais je sens que vous n’êtes pas content.

           Tournant la tête, je croise son regard noir. Aussitôt, je détourne le mien, ne voulant éclater de rire devant lui mais trouvant sa rage particulièrement drôle. Attachant ma ceinture, je me remets droite.

— Ecoutez, ce n’est vraiment pas ce que vous croy…

— Pas ce que je crois ? Vous n’avez pas pénétré un laboratoire par effraction à minuit puis volé deux rats ?

           Je zieute la boite ouverte et les deux rongeurs posés dedans.

— Evidement, si on présente les choses comme ça…

— Est-ce que vous avez la moindre idée de ce que ça fait d’être interrompu en plein diné par un appel du poste de police disant qu’une détraquée a donné votre numéro et qu’ils ne comptaient pas vous appeler à l’origine mais qu’elle les a tellement fait chier qu’ils ont craquer !?

           J’ai toujours su me montrer convaincante. Cela requiert une technique élaborée et soigneusement pensée que nul ne saurait jamais égaler…

           En réalité, j’ai juste crié pendant plusieurs heures d’affilées et mes codétenues m’ont imitée. Un policier est bien entré pour tenter de mettre de l’ordre mais il s’est vite arrêté en croisant le regard d’une femme qui faisait quatre têtes de plus que lui et sans doute trois fois son poids.

— Quel genre d’hommes mange à minuit ?

— N’essayez pas de changer de sujet de conversation, tonne-t-il. Ce que vous avez fait est particulièrement grave, (T/N) !

— Mais surtout, avec qui dine-t-on à minuit… C’était un diner galant ? Vous avez rencontré quelqu’un ? Votre ex ? Comment el…

— Non mais je rêve ! Vous avez enfreint la loi et je subis l’interrogatoire ? Vous n’avez donc aucune limite ! s’exclame-t-il.

           Mes épaules se haussent. Cet homme a tout de même le don de pleurer pour un rien. A moins qu’il ne réagisse si mal pour la simple raison que j’étais sur la bonne voie… Cela mérite une enquête plus approfondie.

           Me redressant, je prends une profonde inspiration.

— Vous direz à votre amante que je suis désolée.

— Vous me fatiguez, (T/N), soupire-t-il en démarrant la voiture.

— Votre amant ? je tente.

           Levant les yeux au ciel, il prend la première sortie à droite. Les rues sont désertes, à cette heure de la nuit — ou de la matinée — alors nous ne craignons aucun bouchon.

— Vous allez où ? je demande en voyant que nous ne nous dirigeons pas vraiment vers ma maison.

— Je crève de faim puisque je n’ai pas pu manger. Il y a une épicerie ouverte vingt-quatre heures sur vingt-quatre, dans le coin. Je vais m’acheter à manger puis je vous raccompagne.

— Vous voulez dire que vous allez nous acheter à manger, je le corrige.

           Il me fusille du regard. Je soutiens ce contact visuel sans sourciller. Quelques instants, il me dévisage. Puis, il finit par lâcher un soupir.

— Vous êtes décidément irrécupérable, (T/N).

           Un sourire étire mes lèvres en comprenant qu’il capitule. Il finit par se garer devant ladite enseigne, reconnaissable grâce à ses grandes baies vitrées brillant dans la nuit.

           James coupe le moteur et ouvre sa portière. Je l’imite et frissonne. Il fait particulièrement froid. Cependant, fort heureusement, nous allons bientôt rentrer.

           Je n’ai pourtant le temps de faire que deux pas qu’il m’arrête :

— Vous ne vous imaginez quand même pas rentrer là-dedans avec eux ?

           Il désigne la boite que je porte. J’observe la boutique qui fait l’angle et le logo placardé au-dessus de la porte. Mes épaules se haussent.

— Qui ira vérifier ?

           Sans doute las d’argumenter, James lève les yeux au ciel avant de me suivre. Nous entrons en saluant le caissier qui réagit à peine, bayant à s’en décrocher la mâchoire.

           Quelques rayons s’étalent devant nous et, surtout, des tables sont fixées aux vitres, à la manière de bars. Quelques tabourets sont d’ailleurs posés devant.

— Prenez ce qui vous fait plaisir, marmonne James Harold en saisissant l’un des paniers. De toute façon, je suppose que je n’ai plus le choix.

           Quelques minutes plus tard, attablés devant quelques onigris, deux sandwichs et un paquet de chips, nous mangeons en silence. James mâchonne avec insistance le morceau de poulet qu’il a arraché au pain.

           Je souris en le voyant déglutir. Il exécute alors un geste de la tête, comme s’il marquait une phrase qu’il venait de penser.

— Cela fait un sacré paquet de temps que je n’ai pas mangé ni vu autant de malbouffes.

— Monsieur trouve que ces mets ne sont pas assez raffinés ? je demande dans un sourire.

— Mâchez plus, vous allez avoir des aigreurs d’estomac.

— Vous, il n’y a pas que votre estomac qui a des aigreurs.

           A ma grande surprise, ma pique le fait sourire. Il avale une bouchée de son sandwich.

— Au lycée, mes repas n’étaient quasiment constitués que de ce genre de nourritures. Et ma santé en a pâties, croyez-moi. Non, c’est bien de temps en temps mais sûrement pas tous les jours…

— C’est au lycée que vous avez connu votre femme ?

           Il laisse tomber sa tête dans un soupir avant de se redresser, me lançant un regard consterné :

— Bon sang, mais vous n’allez jamais lâcher l’affaire, vous !

           Il secoue la tête face à mon sourire. Comprenant que ma technique d’approche n’a pas porté ses fruits, je retourne à mon sandwich. En retirant un légume, je le dépose dans la boîte et mes rats se jettent aussitôt dessus.

— Pour tout vous dire, elle était ma supérieure hiérarchique.

          Surprise, je me retourne vivement. Il contemple son onigri en silence, réfléchissant.

— Qu’est-ce qu’il s’est passé ? j’ose demander.

           James me lance un regard. Seulement aucune animosité n’habite ce dernier. Il soupire.

— Nous n’avions pas le même regard sur le monde. Parfois, ce peut être rafraichissant. Là, c’était juste décevant. Elle ne comprenait pas… certaines choses qui m’étaient essentielles.

           Mon regard se pose sur son crochet.

           Jamais je ne l’aurais cru du genre à s’ouvrir à moi. D’autant plus qu’il ne m’apprécie pas vraiment. Peut-être suis-je juste là au bon moment. Sans doute souhaitait-t-il simplement parler, s’exprimer.

— J’arrêterai de vous parler d’elle, je comprends.

— Vous ne devriez même pas avoir besoin d’entendre une telle histoire pour arrêter de vous montrer désobligeante comme vous vous plaisez à le faire.

           Je ris face à son exaspération. Un sourire étire ses lèvres et il mange une autre bouchée de son sandwich. Mon téléphone vibre dans ma poche.

           Je mets quelques instants avant de l’en sortir et regarder l’écran. Il s’agit d’un appel de Dumas.

— Décrochez. A cette heure, ce doit être important.

           Seulement, je préfère ranger le cellulaire en secouant la tête.

— Non, c’est un spam.

— A cette heure-là ? Ils sont nés avant la honte.

           J’acquiesce en mangeant une nouvelle bouchée.

           Je ne sais pas vraiment pour quelle raison je viens de mentir. Je suis juste certaine d’une chose.

           Le moment que nous partageons, là, j’aimerais qu’il dure à jamais.








































𔘓

il ne se passe
pas grand chose
mais croyez-moi,
c'est le calme avant
la tempête

j'espère que ce
chapitre vous aura
plu !!

𔘓


















































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