𝐂𝐇𝐀𝐏𝐈𝐓𝐑𝐄 𝟒𝟓
𖤓
ET DANS LES LARMES DE CEUX QUI
VIVENT, JE LAVE LE SANG DES
▬▬ MARTYRS ▬▬
‣ S03E11
aucun spoiler
Il n’y eut pas de cérémonie. Historia avait insisté durant longtemps pour en imposer une, voulant produire le premier évènement de son règne au plus vite mais Emeraude lui avait tout simplement dit que si elle s’avisait de préparer une sorte de spectacle où tous seraient conviés, elle ne viendrait pas.
Naturellement, la souveraine avait accédé à la requête de son sujet et décidé de commettre l’un de ses premiers actes royaux dans la plus grande discrétion. Sans même convier l’escouade Levi. Surtout sans la convier.
La plupart des soldats ne la connaissait pas et ceux qui la connaissaient ne l’appréciaient pas. Elle ne voyait donc pas vraiment l’intérêt de faire beaucoup de bruits pour une chose qui paraitrait insignifiante à tant. Et, aussi, elle ne voulait pas être le centre de l’attention.
Ainsi, ce jour-là, rentrant de l’administration dans le plus grand des silences, elle regagna sa chambre. Sa convalescence étant terminée, elle avait dû quitter l’infirmerie isolée dans laquelle elle avait logé lorsqu’elle était dans le coma. Dorénavant, elle et Bosuard avaient rejoint une piaule contingente à celle d’Hanji.
La jeune femme passa dans le couloir, faisant craquer le parquet sous ses pas. Autour d’elle, le reste de la cavité était sombre, sans fenêtre. Malgré l’heure avancée de la journée —il devait être aux alentours de midi— l’endroit n’était pas bien illuminé. C’était reposant pour les yeux.
Selon l’officier qui avait rédigé et signé le papier faisant officiellement d’elle une soldate, son nouvel uniforme avait été déposé dans sa chambre par le caporal Levi le matin-même. Etant donné qu’elle en portait déjà depuis quelques temps, qu’elle avait aussi déjà obtenu une chambre dans la base et qu’elle se battait déjà depuis un long moment, pas grand-chose ne changeait aujourd’hui.
Hormis le fait que ce petit bout de parchemin dans sa poche la faisant officiellement soldat était son rêve d’enfant qui s’accomplissait. Eddie, s’il avait été là, aurait sûrement été jusqu’à pleurer de fierté. Et cela la faisait sourire avec douleur et joie à chaque fois qu’elle y pensait.
Le contrat écrit était assez rapide et court, composé de mots suivis de deux points servant à renseigner les détails. Quelques champs avaient été laissés vides comme son nom de famille ou même le nom de l’escouade à laquelle elle avait été intégrée.
Le noiraud avait dit vrai, elle avait la possibilité de choisir le groupe qu’elle rejoindrait. Elle avait un délai de deux jours pour soumettre sa proposition avant que le gouvernement ne l’affecte contre son grès au chef d’une des nombreuses escouades. Or elle n’avait aucune idée de quoi sélectionner.
Elle ne tenait pas à s’intégrer à une escouade qu’elle ne connaissait pas du tout, sa peur de l’inconnu la forçant à fuir ce genre de situation. Mais elle ne voulait pas non plus demeurer aux côtés de personnes qu’elle n’aimait pas et qui ne l’aimaient pas en retour. Sur un champ de bataille, il fallait que les soldats puissent se faire confiance. Elle ne pouvait donc pas soumettre le nom de l’escouade Levi.
D’autant plus que, au vu du caractère plus que sulfureux de ses relations avec le noiraud, tout le monde considèrerait sans doute au bout d’une semaine qu’elle n’avait pas sa place parmi eux, n’apportant que des disputes. Et elle ne voulait pas vivre les regards pleins de reproches et murmures sur son passage. Ni même un épisode similaire à celui qui avait eu lieu en rentrant de la caverne Reiss.
Elle posa sa main sur la poignée de sa chambre qu’elle actionna. Avec surprise, elle constata que celle-ci était déverrouillée, ce qui n’était pas normal. Elle est Bosuard quittaient toujours leur lieu de vie tôt le matin et pas une seule seconde Emeraude n’oubliait de fermer à clé derrière elle.
— Bosuard ? appela-t-elle d’une douce voix.
Nul ne lui répondit. Elle ouvrit plus largement la porte en enfouissant sa main dans la cape verte de Petra, là où se trouvait le canif de son frère. Si un malheureux s’était avisé de pénétrer de force sa chambre, elle s’assurerait de le recevoir en bonne et due forme.
Sortant son arme, elle leva les yeux sur les deux lits simples et voisins posés de façon symétrique au centre de la pièce. A côté d’eux, une table de chevet, une commode et un bureau se faisaient face de chaque côté pour préserver esthétisme de l’endroit.
L’endroit était très largement illuminé par le soleil haut filtrant au travers des larges fenêtres. Ses rayons lui permirent de mieux distinguer une silhouette qu’elle connaissait bien, assise devant les bouts de papier posés sur son bureau.
Il semblait l’attendre.
— Erwin ?
Le major se redressa quelque peu. Jusqu’à ce qu’Emeraude l’appelle, il était demeuré dans ses pensées. Maintenant, elle avait toute son attention. Il haussa la tête et se tourna vers elle. Puis, il fit de même avec son corps de sorte à lui faire complètement face.
Il avait revêtu l’uniforme le plus officiel qui soit : la combinaison vert kaki des hauts gradé avec laquelle on voyait moins que l’un des bras de ses bras manquait. En remarquant ce vêtement, elle fronça les sourcils. Elle ne connaissait aucun évènement aujourd’hui nécessitant de tels accoutrements.
Mais elle n’eut pas besoin de faire part de ses interrogations qu’il l’éclaira.
— Tu te demandes sûrement la raison de ma tenue, sourit-il. Je voulais te féliciter proprement pour ce à quoi tu viens d’accéder. Je suis fier de toi.
La jeune femme se raidit en entendant ces derniers mots. Aussitôt, un sourire vint étirer ses lèvres de force et elle sentit la sérotonine se répandre dans ses veines. Si on jour on lui avait dit qu’un héros de son enfance viendrait personnellement la féliciter d’être devenue soldat, elle n’en aurait pas cru ses oreilles.
Mais c’était pourtant ce qui était en train de se passer. Et jamais elle ne s’était sentie si valeureuse.
— Où est Bosuard ? demanda-t-il pour changer de sujet, visiblement mal à l’aise avec le silence instauré.
Tout en se déplaçant jusqu’aux uniformes soigneusement pliés sur son lit, Emeraude expliqua au major qu’elle avait bataillé avec la fillette mais que celle-ci avait finalement accepté d’essayer d’aller à l’école. Elle était maintenant en cours pour la première fois de sa vie mais son ainée savait qu’elle n’y resterait pas. Lorsque Bosuard décidait de boycotter quelque chose, cette dite chose ne la revoyait jamais. Elle avait son petit caractère.
La première pile était les chemises pliées le moins possible afin de ne pas être froissée. Il y en avait quatre à côté desquelles avaient été soigneusement agencés des cintres.
— Je ne suis pas sûr qu’elle appréciera d’avoir manqué le moment où tu es devenu soldat, lança le blond d’une voix moqueuse, riant des prochains caprices de l’enfant.
Emeraude leva les yeux au ciel avec un rire, se concentrant ensuite sur les deux vestes de cuir posée l’une sur l’autre à côté de la première pile. Celle-là aussi était accompagnée de cintres.
— Je vais passer un saler quart d’heure, c’est sûr, pesta-t-elle.
Ne pouvant s’en empêcher et profitant du fait que, étant derrière elle, le major ne pouvait rien voir de ce qu’elle faisait, elle fit glisser ses doigts sur la broderie représentant le sigle des bataillons d’exploration. Ce motif était maintenant à elle autant qu’elle était à l’institution représentée.
Elle inspira fièrement.
— Tu sais à qui tu me fais penser ? demanda-t-il en fixant ses gestes.
Elle atteignit les pantalons en secouant négativement la tête. Elle eut un sourire face au bas, songeant à l’épisode plus que tumultueux qui l’avait opposée à Hanji lors de la prise de ses mesures. La scientifique avait bien failli la menotter.
— A Levi lorsque je l’ai pris en charge.
Emeraude se raidit, ne sachant quoi penser. D’un côté, le noiraud était un formidable soldat capable des plus grandes prouesses sur le champ de bataille. De l’autre, c’était aussi un sacré emmerdeur qu’elle ne supportait pas le moins du monde —même si ce dernier point tendait à s’arranger.
Par ailleurs, aux mots d’Erwin, ceux de Dan lui revinrent en tête. Le soldat lui avait appris une chose qu’elle n’avait jamais su : le noiraud était né et avait grandit dans les bas-fonds. Il s’agissait d’une ville souterraine mal famée avec le plus haut taux de criminalité de tout le territoire humain. Certains disaient même qu’y mettre un pied était une entrée aux enfers.
— Je te demande pardon ? lâcha-t-elle finalement d’une voix faussement indignée.
Le blond eut un faible sourire qu’elle ne remarqua pas, occupée à exécuter des allers-retours de son lit à l’armoire pour ranger ses vêtements. Après un faible raclement de gorge, il se décida à s’expliquer.
— Quand je te regarde, je ne vois sincèrement que de la rage dans tes yeux, commença-t-il.
Même si elle n’apprécia pas son préambule, elle ne le coupa pas et se contenta d’enfiler une des deux vestes sur un cintre.
— Tu es en colère contre le monde. A juste titre. Mais ta rage est telle que, à moins de te connaitre et te deviner, on ne la voit pas.
Emeraude l’écouta tout en continuant ses activités, un peu surprise par le ton que prenait cette conversation. Effectivement, elle savait très bien que sa propre colère ne la quittait jamais. Mais de là à la comparer à quelqu’un sortant à peine des bas-fonds, elle trouvait le parallélisme un peu fort.
— Ce n’est ni un compliment ni un reproche que je te fais, assura l’homme. Je voulais simplement souligner ceci.
Elle hocha la tête pour lui montrer qu’elle ne lui en tenait pas rigueur. Elle connaissait assez Erwin pour savoir que son propos n’était pas motivé par de la simple méchanceté. Il était même sûrement persuadé que ce qu’il venait de lui faire était un compliment.
— Vous formeriez une superbe équipe, et il le sait.
Au moment où il déclara cela, elle tomba nez à nez avec une note laissée à côté des vêtements. Même si elle ne connaissait pas son écriture, elle devina qu’il s’agissait d’un mot de Levi. Elle arriva à le déchiffrer sans grande difficulté. Elle avait fait des progrès.
« Je ne t’apportes pas de capes longues. Il me semble que celle que tu portes est celle qui t’ira la mieux. »
Même s’il ne pouvait la voir, elle acquiesça faiblement, montrant son accord avec ce propos. Le vêtement dont il parlait était celui de Petra, son héritage. Elle ne souhaitait sûrement pas s’en séparer. D’autant plus qu’Hanji risquerait alors de lui en coller une.
Délicatement et dans un geste presque inconscient, Emeraude passa ses mains sur les lettres, pressant les mots de la pulpe de ses doigts comme pour mieux s’en imprégner. Elle sentait une force nouvelle l’envahir.
— Erwin ? l’interpella-t-elle d’une petite voix.
Il haussa la tête alors que, continuant son geste, elle semblait se nourrir des pensées du noiraud. Le blond disait vrai. Ils étaient pareils. Ou du moins, similaires. Et c’est précisément la raison pour laquelle ils s’aimaient et se haïssaient en même temps.
Là, sans même prendre conscience de ce qu’elle faisait, poussée par son instinct seulement, elle déclara d’une voix ferme :
— Ma place est aux côtés de lui. Je veux être affecter à l’escouade Levi.
⏂
on commence doucement l'ellipse !
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