→˚₊· ܴೈ 𝓙𝐨𝐮𝐫 𝟐𝟐 : 𝒔𝒉𝒐𝒕𝒐 𝒙 𝒓𝒆𝒂𝒅𝒆𝒓
ÉPISODE 22
— shoto x reader —
LES GARGOUILLES D’HALLOWEEN HIGH sont réputées pour être les pires harpies qui soient. Planquées au détour des couloirs, elles sifflent des injures ou se moquent de votre uniforme sans pudeur. Ce n’est pas une règle, juste leur manière de faire. Tant et si bien que les élèves les évitent et font de leur mieux pour ne pas les regarder.
Shoto Todoroki, un démon de glace et de feu, ne les regarde pas, par exemple. Jamais. Pas même lorsqu’il passe dans le couloir menant à la bibliothèque, celle-ci étant gardée par deux gargouilles. Non, il ne les regarde pas. Il se place devant elles et les laisse lui imposer des lectures.
Cette bibliothèque est bien connue, à Halloween High. Les élèves viennent devant les portes de cette dernière et n’ont pas le droit d’y rentrer. Les gargouilles sont celles qui leur donnent les livres et, si elles ne donnent pas le bon bouquin, tant pis.
Ces deux chipies sont les plus connues et sans nul doute celles qui ont scellé notre réputation.
Je suis une gargouille. J’ai été une humaine puis un sort a changé ma peau en pierre. Celle-ci est froide, rude et peu agréable. Elle ne donne pas envie de serrer la main ou prendre dans ses bras. Mes contacts avec autrui sont rares.
Cependant, je suis parvenue à me trouver une forme de distraction.
Figée dans le mur, mes yeux se sont un jour posés sur un étudiant qui marchait jusqu’à la bibliothèque. Habituellement, je ne leur dis rien, me contente de les regarder passer. Je n’apprécie pas trop notre rituel visant à insulter les personnes nous croisant. La première et seule fois que j’ai parlé à une élève, c’était parce que celle-ci avait traversé mon couloir en pleurant à chaudes larmes.
Je lui ai demandé si elle allait bien et elle m’a insulté, voletant jusqu’à moi dans sa forme fantomatique et essayant de me briser en me projetant sur le sol.
Je n’avais pas compris cet égard de violence jusqu’au jour où j’ai appris qu’une sale gargouille du premier étage s’amusait à lui faire des remarques sur son poids continuellement. Depuis, je me contente de ne rien dire. Le silence est sans doute mieux que mille mots, surtout quand les élèves craignent de se faire juger par nous.
Alors je les regardais. Et je n’ai fait que regarder Shoto Todoroki quand il est apparu sous mes yeux pour la première fois.
Jamais je n’oublierai sa chevelure blanche et rouge ni son air détendu. Rien ne fera sortir de mon esprit ses yeux bleus fixant avec détermination un poids au loin ni son uniforme épousant son corps et lui donnant une allure particulièrement élégante.
La première fois que je l’ai vu, il m’a semblé que la pierre de ma peau s’échauffait et que quelque chose se mettait à battre, sous le granit de ma personne. Depuis, je n’ai eu de cesse d’attendre de le voir.
Il passe ici chaque jour pour aller à la bibliothèque. Il revient souvent les mains vides. Je ne sais pas ce qu’il demande mais les gargouilles ne semblent pas déterminées à le lui donner.
Aujourd’hui encore, il revient, les mains dans les poches. J’hésite. Cela fait longtemps que je souhaite l’interpeller, trouver le courage de lui parler. Et je suis tout à fait consciente de détenir l’excuse idéal pour se faire — à savoir, lui demander ce qu’il vient chercher, chaque jour.
Mais s’il me rejetait sans même écouter ma question, convaincu que je ne suis de toute façon qu’une mégère à cause du comportement de mes congénères ? Comment ferais-je si ma seule distraction décidait de prendre un détour pour ne plus jamais me voir ?
Je peux quitter mon poste, déambuler dans les couloirs de l’université. Mais je n’ose pas le faire. Je ne veux pas le faire toute seule, je crains trop qu’on me prenne à part et me frappe à cause des actes des autres gargouilles.
— Quand est-ce que tu vas te décider à me dire ce que tu veux ?
Je sursaute presque. Le couloir est vide, je ne sais pas à qui Shoto parle. Regardant de chaque côté, je tente de comprendre qui est la personne à qui il vient de s’adresser. Mais, soudain, sa voix grave retentit à nouveau :
— C’est à toi que je parle.
Ma bouche se fait sèche malgré le fait qu’elle soit en pierre. Les deux yeux bleus et semblables à des saphirs de Shoto sont posés sur moi. L’un d’eux, encadrés d’une brûlure, semble me regarder avec plus d’intensité encore que l’autre.
Je déglutis péniblement, tournant la tête.
— Tu m’observe tous les jours. Qu’est-ce que tu me veux ? demande-t-il.
Sa voix est assez sèche. Il doit être sur la défensive. Comme tout le monde, lorsqu’il s’agit des gargouilles.
— Je…, j’hésite, embarrassée, je me demande simplement quel livre tu demandais aux gargouilles.
Ses sourcils se haussent. Il semble surpris. Regardant derrière lui, là où commence le couloir menant à la bibliothèque, il ne répond pas tout de suite. Puis, il se tourne à nouveau dans ma direction.
— Tu dois sacrément t’ennuyer pour poser ce genre de questions. Pourquoi tu ne m’as pas suivie pour regarder ? demande-t-il.
Je hausse les épaules. Je ne peux décemment pas lui dire que j’ai peur de marcher seule ici ! Si ?
Cependant, malgré mon mutisme, il semble comprendre et soupire.
— Je te propose un deal. Tu me trouves ce livre et je t’accompagne te promener. D’accord ? Personne ne s’en prendra à toi si tu es avec un démon de feu et de glace, je te le promets.
Un sourire étire mes lèvres et mes yeux s’écarquillent. Vraiment ? Vais-je réellement pouvoir accomplir mon rêve et déambuler ici ? Avec Shoto Todoroki, en plus ? Vais-je pouvoir me contrôler et ne pas laisser voir mon excitation ?
— Alors ? insiste-t-il.
— D’accord ! je réponds quasiment aussitôt.
Il acquiesce. Puis, s’éloignant d’un pas, désigne le sol sous ses pieds d’un geste du menton.
— Allez, viens.
— Maintenant ? je m’étonne.
— Comme ça se sera fait.
Excitée et mes organes de pierre palpitant, je saute hors de ma zone et atterris sur le sol, juste à côté de lui. Mes ailes de pierre se déploient, m’aidant à me réceptionner. Je me redresse et il se met à marcher. Nous progressons dans le couloir décoré de tableaux, des lustres au-dessus de nos têtes se balançant.
Tout cela est étrange. J’ai vécu ici mais cette pièce m’apparait sous un angle nouveau.
Le démon ne m’adresse pas le parole de toute la visite. Je ne fais que parler, excitée, tandis qu’il répond au travers de phrases courtes. Je crains parfois de l’ennuyer mais mes inquiétudes fondent dès que je vois une nouvelle chose amusante.
Je saute sur les escaliers, la main sur la rampe ouvragée, testant leur résistance.
— Tu vas te faire mal, arrête tes bêtises.
Plus tard, je traverse les bosquets de fleurs en courant sous le regard médusé des élèves.
— Tu piétines les fleurs, tu es un danger public.
Dans une salle parsemée de chaudron, j’ouvre une fiole pour la boire.
— Tu vas te retrouver couverte de chaire lépreuse, arrête.
Partout où je vais, Shoto semble dépassé par mes actions. Mais je n’y peux rien, je ne sais pas ce qu’il est bon ou non de faire, dans ce monde. Halloween High est ma maison mais je ne lui ai longtemps connu qu’un couloir.
Le palais est vaste et nous n’avons pas fini de tout voir lorsqu’il me mène dehors. Mes yeux s’écarquillent face au décor plongé sous les lueurs dorées du soleil. Un vaste lac s’étend, cerné d’une forêt de pins formant une muraille nous entourant.
Dans mon dos, je sens le regard de Shoto tandis que je pousse des cris d’ébahissement.
— Ne t’approches pas trop du l…
Je ne l’entends déjà plus, courant à toute vitesse et riant à gorge déployée. Je n’ai jamais su ce que cela faisant d’être imbibée d’eau lorsqu’on était une pierre. Exerce-t-elle la même pression sur ce matériau si dur que sur la chair ?
Arrivant au bord, je saute. Aussitôt, l’obscurité surgit devant mes yeux. Ceux-là s’écarquillent. Mon souffle est coupé. Comment est-ce possible ? Je suis une pierre. Et je n’arrive même pas à bouger pour nager.
Je tombe lentement jusqu’au bord. Je ne vois rien des dangers qui me guettent. Mais je sais qu’ils sont nombreux.
Soudain, de la chaleur. Partout autour de moi. Et de la lumière. Vive. Orangée. Comme si des flammes avaient été allumées sous l’eau. Mais cela est impossible ! A moins que les flammes soient d’origine…
…Démoniaque.
Deux bras s’enroulent a utour de moi, m’enserrant au ventre et me plaquant contre un torse chaud. Je suis tirée vers le haut. L’eau coule sur mon corps que je ne peux pas bouger. Quelques instants, je ressens une paix absolue, contre ce corps brûlant.
Je vois tout de l’intérieur du lac. Les sirènes fronçant les sourcils en me voyant ainsi, les différentes créatures sortant de leurs maisons pour regarder le remue-ménage et, surtout, le fait que des maisons en coraux et coquillages aient été construites.
Soudain, l’air pénètre mes poumons et j’arrive à bouger. Je prends une inspiration bruyante et sens que l’ont me titre jusqu’au bord du bassin avant de me déposer sur l’herbe. Tremblante, je respire bruyamment quand deux chaussures mouillées se posent devant moi.
Shoto. C’est lui qui est allé me chercher là-dedans.
— Je… Suis… Désolée… Je savais pas… que… les pierres réagissaient… comme… ça… Je…
— Du calme.
Surprise, je lève la tête vers lui au moment où il s’accroupit pour être à ma hauteur. Je l’aurais cru plus agacé par mon acte. Mais, pour la première fois, j’aperçois un sourire sur son visage, un rictus étirant légèrement ses lèvres. Je souris moi-même en le voyant faire.
Il frictionne mon crâne de sa main, me donnant chaud. Puis, il la fait glisser sur ma joue et déclare en me regardant droit dans les yeux :
— Je suis loin d’avoir détesté cette balade.
ꕥ
Après deux jours sans avoir de nouveau parlé à Shoto, pénétrer de force sa chambre n’était pas l’idée la plus saine et censée possible. Mais il voulait le Manuel des Potions Noires et je ne savais pas où le trouver. Alors, rampant le long de la façade, je suis entrée dans sa piaule que je connais grâce à une autre gargouille.
Celle-ci est vide et assez simple. Des armoires brunes bordent des lits à baldaquins. Une table se situe dans un coin, encadrée de chaises et trois bureaux sont visibles pour travailler. Du lierre noir orne les murs.
Le premier bureau semble être celui d’un loup-garou, à en juger par les talismans de contrôle sous pleine lune. Le deuxième est garni de photos de famille me laissant comprendre qu’il appartient à Izuku donc je me dirige vers le dernier.
Je m’apprête à poser le livre sur celui-ci lorsque mon regard est attiré par un ouvrage, glisser entre d’autres. Mes sourcils se froncent et je le tire, regardant sa couverture. Elle est noire et ont y voir un chaudron blanc. Son titre est limpide : « Le Manuel des Potions Noires ».
Je ne comprends rien.
— Qu’est-ce que tu fais là ?
Je sursaute en entendant la voix de Shoto. Debout dans l’encadrement de la porte de sa chambre, il fronce les sourcils en me regardant. Et quand son regard comprend ce que je tiens dans ses mains, il semble se prendre un coup tant il est désarçonné.
Ignorant sa question, je montre les deux livres identiques.
— Pourquoi tu voulais ce livre ? Tu l’as déjà.
Il m’observe quelques instants. Silencieux. Je sais qu’il cache quelque chose et ne veux pas me le dire. D’ordinaire, je respecterais son choix mais je suis bien trop curieuse. Les gargouilles savent ce que veulent les êtres vivants ainsi que ce dont ils ont besoin. C’est comme ça que celles de la bibliothèque trouvent tous ces livres.
Alors je ferme les yeux, écoutant ce que me dis son âme. Et je les écarquille.
Il semble comprendre ce que je viens de faire car rougit violemment et, marchant jusqu’à moi, m’arrache les livres des mains.
— Sors d’ici.
— Tu allais à la bibliothèque tous les jours juste pour passer devant moi ? Et tu as fais semblant d’avoir besoin d’un livre pour pouvoir me proposer une sortie ?
Il se fige. Oui. C’est cela. Je l’ai vue dans son âme.
— Pourquoi tu ne m’as pas simplement invitée à sortir, Shoto ? je demande.
— Toi non plus, tu ne l’as pas fait.
Il semble sur la défensive et ne me regarde même pas.
— Mais tu sais pertinemment que j’aurais aimé avoir le courage de le faire, je chuchote dans un sourire.
Là, il semble surpris. Ses épaules s’affaissent et il me regarde. Ses joues sont toujours rouges mais toute trace d’agacement a déserté ses traits. Il me regarde longuement, juste en face de moi. La pièce s’échauffe tandis qu’il me dévisage.
Ses yeux glissent jusqu’à mes lèvres.
— Tu sais ce que je veux, chuchote-t-il.
— Fais-le, je réponds.
Ses mains saisissent mon visage en coupe et il pose ses lèvres sur les miennes. Le contact est chaud, brûlant. J’agrippe sa chemise pour l’attirer contre moi et il caresse ma tête tandis que nos langues s’emmêlent. Ses mains glissent sur mon corps. Il me semble que ma pierre se ramollit et s’échauffe partout où il la touche.
Nos bouches s’entrechoquent, je mordille sa lèvre et il rit tout en m’embrassant.
Bientôt, nos paupières s’ouvrent et je lui offre un sourire. Mais lui, il écarquille les yeux. Je fronce les sourcils, surprise.
— Que se passe-t-il ?
Tendant la main vers moi, il fait jaillir de la glace. Une glace claire et pla ne qui me renvoie mon reflet. Et je réalise alors pourquoi il fait cette tête.
Ma peau n’est plus en pierre. Je suis redevenue humaine.
— Tu as conjuré le sort, je chuchote, hébétée.
Il acquiesce, encore sonné.
— Tu sais ce qu’on dit à propos de l’amour véritable, déclare-t-il.
Un sourire me prend et j’éclate d’un rire enivré.
Et, n’y tenant plus, je me jette à nouveau sur ses lèvres, l’embrassant passionnément.
...
A demain avec Toji !
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