J'essuie mes larmes avec la manche de mon pull, rendant mes yeux un peu plus rouges qu'ils ne le sont déjà. Je remarque alors que j'ai oublié mes lunettes dans ma cabine. Au milieu de cette tempête de sentiments, je n'ai pas fait attention et je suis partie sans les prendre. Heureusement, elles ne me sont pas vitales pour voir, elles me servent simplement à lire mes romans préférés.
Je n'ai de tout manière pas besoin de mes yeux pour me diriger puisqu'Apollon me guide en tenant fermement ma main dans la sienne. Seule cette infime partie de nos peaux est en contact et cela ne me suffit pas. J'ai l'irrépressible besoin de l'avoir près de moi pour me sentir pleinement vivante. Alors j'accélère le pas afin d'attraper son bras auquel je m'accroche désespérément. Il ne relève pas mon geste soudain, gardant son regard droit devant lui.
Désormais, je peux sentir la douceur de son bras. Dit ainsi, j'ai l'impression d'être une groupie face à son idole le touchant pour la première fois de sa vie. Une folle pouvant trouver le moindre centimètre carré de sa peau attirant. Je crois que mes hormones me jouent des tours, elles me font penser à des choses étranges.
- Ne fais aucun bruit surtout, me met-il en garde.
J'ai beau regarder autour de moi, je ne vois personne qui serait susceptible de nous entendre. Alors pourquoi dois-je faire attention à ma discrétion ? Il sait d'autant plus que cela n'est pas mon fort. Si j'étais restée dans mon coin sans un bruit, jamais je ne l'aurais autant collé et de ce fait, nous n'en serions pas là à l'heure actuelle. Je n'aurais pas eu besoin de faire un choix entre lui et Charlee puisque jamais il n'aurait fait partie de mes possibilités.
Est-ce que je regrette d'avoir été entêtée à ce point pour qu'il accepte mon pardon ? Non. Malgré les tourments que cela me procure aujourd'hui, je referais les mêmes erreurs que par le passé. Je lui redonnerais par mégarde cette claque sur la joue et tenterais désespérément d'avoir son pardon. Tout ça pour finalement me retrouver là avec lui, comme c'est le cas en ce moment. Je suis heureuse d'avoir commis l'erreur de ne pas lâcher prise face à sa froideur.
- On n'a pas vraiment le droit de venir ici, m'avoue-t-il en ouvrant une grande porte couleur café.
En découvrant la piscine intérieure du navire, je comprends mieux pourquoi ma bouche doit rester bâillonnée. A l'heure qu'il est, elle est fermée au public. Mais ça, c'était sans compter sur Apollon et son jeu de clés pour entrer dans les endroits les moins soupçonnables.
- Rien de mieux que l'eau pour combattre un chagrin.
Je ne prête pas attention à ses mots, bien trop occupée à l'étudier retirer son t-shirt. Ses doigts agrippent le bas du vêtement et rapidement, il le fait passer par-dessus sa tête. Il n'est pas aussi musclé que Charlee, il n'a pas le corps des garçons que l'on peut voir sur les affiches publicitaires où ils sont taillés pour être conforme aux stéréotypes d'aujourd'hui. Non, il est différent. Ses abdominaux ne sont pas proéminents, ses pectoraux n'ont pas une forme de gros carrés massifs et ses épaules ne sont pas dignes d'un nageur. Pourtant, il m'attire indéniablement. Sans être dans l'excès, son corps est tout bonnement parfait à mon goût.
Je suis encore pire qu'une groupie face à son idole. J'ai conscience de la façon dont je le reluque et je n'en suis pas fière. On dirait une tigresse affamée. Depuis quand est-ce que je ressens ce genre d'attirance bestiale ? Flute Alix, tu n'es pas comme ça ! Reprends-toi bon sang !
Avant qu'il ne puisse remarquer mon regard oppressant, je détourne les yeux. J'admire l'eau calme de la piscine ayant une couleur d'un bleu me rappelant celui des yeux d'Apollon. C'est le fond de la piscine qui lui confère ce ton invitant à la baignade. Je ne me fais donc pas prier et retire mon pull. Cependant, je garde mon débardeur ainsi que mon short. Me mettre en sous-vêtements face à lui n'est pas une bonne idée, la soirée pourrait rapidement déraper.
Apollon plonge dans la piscine dans un « plouf » presque inaudible. Contrairement à moi, il a la technique pour pénétrer dans l'eau d'une face classe et élégante. Il n'a certes pas la carrure d'un grand nageur, il en a tout de même la technique.
- Tu viens ?
- J'arrive.
Timidement, je me dirige vers les marches descendant petit à petit dans l'eau à bonne température. Mes pieds nus rentrent dans la piscine sans aucune difficulté, tout comme mes jambes et mes cuisses.
- Pourquoi tu ne sautes pas ? Rigole-t-il.
- Parce que tu m'as demandé d'être discrète et comparé à toi, je ne connais que la bombe pour plonger dans une piscine.
- Je t'ai demandé de ne pas faire de bruit mais je sais très bien que tu en es incapable alors vas-y, fais toi plaisir. On est là pour ça.
Telle une enfant ayant eu l'autorisation par un adulte, je remonte les quelques marches que j'ai descendu et me place au bord de l'eau. Apollon s'écarte, posant ses bras sur le rebord d'en face. Il m'observe attentivement, il attend avec un immense sourire aux lèvres que je fasse enfin le grand saut. Celui qui me ridiculisera à jamais devant lui mais qui au fond, ne me gêne absolument pas. Je n'ai pas honte d'être aussi enfantine face à Apollon, sachant que je l'ai été depuis le début de notre rencontre. Quel adulte mature s'acharnerait pour avoir un « j'accepte tes excuses » ?
J'inspire une grande bouffée d'air puis bloque ma respiration. Mon nez pincé entre deux doigts de ma main droite, je m'élance dans l'eau. Au court du saut, mes jambes se fléchissent pour venir se coller à mon torse, ce sont donc mes fesses qui entrent les premières dans la piscine. Ces dernières éclaboussent tout sur leur passage, Apollon n'est pas épargné malgré la distance qu'il avait instauré pour se protéger.
Lorsque je sors ma tête de l'eau et replace mes cheveux en arrière, je le vois essuyer son visage éclaboussé par ma « bombe ». Son rire résonne dans l'immense salle vide. Il vient faire écho contre la paroi des murs d'un blanc immaculé, jusqu'à atteindre mes tympans qui se délectent de ce son mélodieux. A croire que son père, un ancien chanteur, lui a transmis son gène pour le chant.
- Le plus beau « plouf » de tous les temps, se moque-t-il.
- J'y ai mis tout mon cœur.
N'arrivant plus à s'arrêter de rire, je fais mine de bouder et commence à faire une longueur. Rapidement, je me retrouve à ne plus avoir pied alors quand j'arrive au bout, je pose mes bras sur le bord en carrelage de la piscine avant de repartir. Je ne suis pas une grande nageuse mais j'adore la sensation d'être dans l'eau.
Certains éprouvent un sentiment de liberté, d'autres de zénitude, quant à moi c'est tout autre chose. Je vois en ce liquide translucide un avenir. Ou tout du moins quelque chose me permettant d'atteindre l'avenir dont je rêve. C'est comme si l'eau me donnait des ailes, qu'elle me portait vers la réussite. Ici, j'ai l'impression d'avoir la force d'accomplir tout ce que je souhaite. Et en repensant à ce que je veux là tout de suite, mon cœur ne fait qu'un bon. J'aimerais embrasser Apollon.
- Tu te sens mieux ?
Sa question me fait sursauter et sa proximité soudaine, lorsqu'il se place juste à côté de moi, n'arrange rien à la situation. Avoir ses lèvres dans mon champ de vision me donne davantage envie de les gouter. J'adorerais connaitre leur saveur, savoir si elles sont douces ou au contraire rugueuses, si elles sont sucrées ou plutôt amer. Tant de possibilité qui m'attirent indéniablement.
Désormais c'est certain, l'eau me donne bel et bien des ailes. En temps normal jamais je n'aurais eu ce genre d'envie si soudaine. Je suis assez grande pour contrôler mes pulsions même si Apollon est d'une beauté renversante avec ses cheveux châtains mouillés.
- J'espère que l'eau a su combattre ton chagrin.
Les bras croisés sur le bord de la piscine, il pose son menton sur son poignet. Nos épaules s'effleurent, je sais que je suis suffisamment proche pour l'embrasser si je le souhaite.
- Ma mère m'emmenait toujours à la piscine quand j'étais triste pour me remonter le moral. Je trouvais que ça fonctionnait bien sur moi alors c'est la première idée qui m'est venu en t'entendant pleurer.
Toujours sans me regarder, il me parle pour mon plus grand plaisir. J'abandonne alors l'idée de l'embrasser pour le laisser continuer. Avoir le droit à autant de mots, de phrases de sa part, c'est tout simplement merveilleux. Je pourrais l'écouter déblatérer pendant des heures sans jamais m'en lasser. Je crois que sa voix m'ensorcèle à chaque fois que je l'entends, je suis hypnotisée comme un serpent par un charmeur.
- C'était surement un plan lamentable, excuse-moi, souffle-t-il en enfouissant sa tête dans ses bras.
Ce qui est désolant c'est plutôt mon manque de réaction face à la situation. Je devrais lui dire que je me sens beaucoup mieux grâce à sa petite attention et surtout, que je ressens la même chose que lui. Il croit encore que si je n'ai pas ouvert la porte de ma chambre, c'est uniquement parce que je n'avais aucun sentiment. Or c'est faux, complètement faux.
Je suis du regard une goute tombant d'une mèche de ses cheveux, glissant ensuite le long de son épaule pour suivre les courbes des muscles de son bras. Ainsi, je m'arrête sur chaque petit détaille le long de son chemin. Je remarque un petit grain de beauté perdu en arrière de son épaule et surtout une légère cicatrice nichée au creux de son cou. Ma curiosité maladive me pousse alors à lui demander d'où elle vient. Je n'ai plus peur de le voir se braquer, pas après tout ce qu'il m'a déjà confié.
Seulement il y a un problème, ma bouche ne semble pas être du même avis que moi. Elle se retient de s'ouvrir alors que la question me brûle les lèvres. Au lieu de cela, je rapproche automatiquement ma tête vers la sienne pour venir enfouir mon visage dans son cou, et ainsi embrasser tendrement le sujet de mes interrogations. Instantanément, il frémit quand mes lèvres rencontrent sa peau humide. Il tente de se reculer pour me faire face mais je reste blottie contre lui, je n'arrive plus à me détacher. Je me sens à ma place.
- Alix, qu'est-ce que tu fais ? Murmure-t-il en caressant mes cheveux.
Je reste muette, interdite. Je veux profiter encore un peu de cet instant qui chamboule tous mes sens. J'ai besoin de sentir sa peau contre la mienne, d'écouter son cœur battre au beau milieu de sa poitrine, d'entendre sa voix robuste mais mélodieuse, de savourer ses petits gestes affectifs.
- Depuis quand as-tu perdu ta langue ?
Je ris en entendant sa plaisanterie. Il me taquine et j'adore ça. L'époque où il se montrait froid, distant et peu bavard est révolue pour mon plus grand plaisir. Seulement j'ai l'impression que c'est moi qui l'ai remplacé. Je ne lui ai d'abord pas ouvert la porte, instaurant de ce fait un mur entre nous. Puis je suis restée silencieuse, préférant l'écouter avec la plus grande des attentions. Le monde s'est mis à tourner à l'envers sans que je ne le remarque jusqu'à maintenant.
C'est lui qui est venu me chercher, qui a voulu le premier me parler et qui s'en est entêté. C'est comme si j'avais déteint sur lui tandis que je prenais peu à peu sa personnalité. Tout cela pour une simple peur saugrenue de faire un mauvais choix. Et s'il n'y en avait pas de bon ou de moins bon ? Si écouter les envies de tout son être ne pouvait conduire qu'à faire un choix favorable ?
Parfois il est bon de ne pas se poser de question. Je ne dois pas aborder le sujet comme un problème de mathématique à résoudre, les gens ne se résument pas à des chiffres placés ici et là dans une équation. Il faut voir l'amour comme un jeu de carte où personne n'est gagnant ni perdant. Chacun a des atouts plus ou moins forts, une suite différente selon qui nous sommes mais in fine, nous avons tous le même nombre de carte. Apollon m'a dévoilé son jeu alors c'est à mon tour de lui présenter le mien.
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On commence à passer à la vitesse supérieure entre ces deux là attention ! Reste à connaitre le fameux jeu d'Alix, va-t-elle d'ailleurs le lui dévoiler ? Ou Charlee va débarquer pour remporter la partie ?
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