11 : Confrontations (1/3)
Dans son bureau de Bordeaux, Arionis lisait les dernières nouvelles sur un journal numérique. Les informations n'étaient pas bonnes, et des journaux parallèles, hors du contrôle de l'état central s'étaient développés. Certains étaient défaitistes, d'autres accusaient nommément le gouvernement de chaque défaite et remettaient en cause la souveraineté de l'état. Ces sites d'informations étaient stockés sur des serveurs dans les zones dévastées, et, prévenus par Happy Summers, celles-ci avaient relevé leur niveau d'alerte. Les échauffourées avaient augmentées, leurs violences aussi.
Bande d'idiots... Vous faites le jeu des Silridriss... Et ce fichu Carré d'argent surveille et défends les serveurs... Quel horrible gâchis...
Le téléphone sonna.
Il appuya sur un nonchalamment bouton tout en continuant la lecture de ces informations engagées dans le besoin contraire au bien de l'Humanité.
« - Arionis, se présenta-t-il.
- Nous avons en communication un certain commandant Higas sur le canal trois. Il demande à vous parler.
- Bien, j'espère qu'il a de bonnes nouvelles à m'annoncer.
- Consul ? Fit la voix du soldat dans l'interphone.
- Alors commandant ?... Comment ça se passe près de l'Arche ?
- Pas très bien : nous n'arrivons pas à nous approcher. Ils capturent les troupes que l'on leur envoi et repoussent les AMC à coups d'artillerie de gros calibre.
- Des pertes ?
- Non, mais je me demande s'il est vraiment utile de forcer l'accès de l'Arche.
- Que voulez-vous dire ?
- La princesse chimère, vous vous souvenez d'elle ? Eh bien elle est devenue une Reine et elle m'a garanti la restitution de l'Arche et des prisonniers dans cinq jours.
- Et Mylène Ferreira ?
- Ça m'étonnerait beaucoup qu'ils la livre : c'est la sœur du Roi.
- Quoi ? Attendez une minute... Le Roi ? Mais le Roi c'est Hillgearim !
- Oui, en partie, mais j'ai l'impression qu'il y a eu une scission chez les chimères. Une partie reconnaît Salida en tant que Reine. Ils n'ont pas l'air plus agressifs que ça si on les laisse tranquille. Moi, celui qui m'inquiète le plus, c'est leur Roi... »
Le frère de Mylène Ferreira... Oh Non ! Pas lui ! C'est une catastrophe !
« - L'expérience... coupa Arionis dans un soupir.
- Exactement : Vous savez comme moi que ce type est capable de tout, du meilleur comme du pire.
- Minute ! J'ai trouvé ! Occupez-vous de l'Arche, je m'occupe du reste. »
*
* *
*
« - Manuel ? » Demanda Shershalla dans l'encadrement de la cabine un garde chimérique a ses côtés. Le jeune roi avait dû se plier à l'obligation d'être gardé nuits et jours. Salida s'inquiétait qui lui arrive malheur après la dernière alerte, et avait imposé leurs présences. Celui qui était de garde s'appelait Tonsstou et ressemblait à s'y méprendre à un fennec jaune aux yeux orange. Manuel n'avait pas réussi à savoir s'il s'agissait d'un mâle ou d'une femelle.
« - Hum ? Demanda l'intéressé et écartant la photo de Salida qu'il avait devant les yeux.
- J'aimerai que tu sois un peu moins expéditif avec mes congénères. »
Allongé sur le lit, le jeune homme se redressa pour s'asseoir avant de répondre.
« - Désolé, c'est la guerre.
- Non, c'est toi. Je n'aime pas beaucoup l'intolérance de mon espèce, mais je n'irai pas éclater la tête de l'un d'entre-eux. En particulier s'il n'est pas en mesure de se défendre.
- Viens, assieds-toi. Qu'aurais-je dû faire selon toi ?
- Je ne sais pas, dit la sauriennne en entrant. Mais pas ça... C'est... barbare !
- Si c'est quelqu'un de la famille qui me demande ça...Je vais chercher une autre manière d'obtenir des informations.
- Merci.
- Mais tu n'es pas dispensée de chercher toi aussi.
- J'ai compris le message. J'ai autre chose à te demander : est-ce que tu aurais vu Calianne ? Demanda la capitaine inquiète.
- Non. Pourquoi ?
- Je l'ai cherchée partout dans le navire et elle n'y est pas. J'ai demandé à tout le monde à bord, mais personne ne l'a vue.
- Elle est peut-être sur un autre navire, suggéra Manuel.
- Je ne crois pas : elle m'aurait prévenue.
- On l'aurait laissée là-bas ? Tu veux faire demi-tour ?
-Je ne pense pas que ce soit une bonne idée Sire, intervint la chimère de garde.
- Et pourquoi ça ? Demanda Manuel.
- Une flotte Silridriss assiège actuellement la Cité d'Argent, et rien ne dit qu'ils n'enverrons pas des navires enquêter.
- Pour la cité, vous comptiez me le dire quand ?
- La Reine a prit les choses en main, les Silridriss ne nous ont pas encore repérés. Elle a demandé à ce que vous puissiez vous concentrer sur votre mission en priorité.
- Manuel ?... » Interrogea Shershalla inquiète.
Le jeune homme réfléchit en se massant le front pendant quelques instants avant de répondre :
« - Je suis désolé Shershalla, même si c'est peu probable, je ne peux pas risquer un navire pour savoir si on a oublié quelqu'un. Je suis certain qu'elle est dans un autre navire.
- Qu'est-ce qui te fait dire ça ?
- Elle n'est pas idiote... Et elle me court après.
- C'est justement ce qui m'inquiète Manuel, fit la capitaine. Chez les Dryades, le ressentiment peut mener à des actions folles et auto-destructrices. Elle est mon amie, mais j'ai peur de ce qui pourrait lui arriver, fit Shershalla.
- Si c'est auto-destructeur, je peux encore moins risquer un navire et tout son équipage. Comprends-le.
- Je ne suis pas d'accord.
- Bon, Ok. Je vais demander à Fernand d'aller voir si l'on l'a pas oubliée là-bas.
- Merci. »
Shershalla prit alors la tête de Manuel entre ses mains et colla doucement son front contre le sien. Le geste, fait avec toute la grâce du naturel, ne déclencha qu'une réaction tardive et minime chez le jeune homme. Il leva à peine les mains, mais la Silridriss se contentait de rester ainsi. Le garde chimérique montra des dents pour exprimer son désaccord.
« - Shershalla, c'est très gênant...
- C'est ainsi que l'on dit ''merci'' chez nous, s'excusa la capitaine.
- C'est surtout comme ça que les chimères disent ''Je t'aime'', précisa-il.
- Ha ? Zut alors... De toute façon, Salida sait qu'elle n'a rien à craindre de moi, fit-elle avec un sourire. Bon, je retourne à mon poste. Préviens-moi si tu as des nouvelles.
- Bien sûr. »
La capitaine sortit sans un regard pour le garde à l'entrée de la chambre. Celui-ci, l'observa de manière insistante durant toute sa sortie avant de reporter son attention sur celui qui était considéré comme le Roi. Manuel vit immédiatement qu'il désapprouvait ce qui venait de se passer ici, et il cru bon d'expliquer :
« - Elle préfère les femmes. »
Le garde plissa des yeux et abaissa les oreilles, choqué par cette information.
Chez les chimères aussi va y avoir du boulot sur la tolérance...
*
* *
*
- Ma reine, les Silridriss viennent de passer au-dessus de nous, fit Sellgan à Salida.
- Ont-ils attaqués ?
- Non. Ils se sont contentés de ramasser les sphères avant de partir en direction du nord.
- Est-ce que vous pouvez les suivre sur le satellite ?
- Oui, ma Reine, mais tous n'ont pas été lancés.
- Bien, attendez un peu, puis reprenez les travaux. Pas de lancement avant que l'on soit sûr de ce qu'ils sont venu faire ici.
- Bien ma Reine.
*
Le véhicule hybride se déplaçait à grande vitesse sur le sol accidenté et désertique. Le mélange des technologies humaines et Silridriss était réellement enivrant, peu importe le nombre de fois qu'il montait à bord, c'était toujours aussi plaisant. Arsear s'était discrètement laissé tomber depuis son navire avant la manœuvre vers le nord puis de se cacher dans une petite crevasse. Il avait secrètement espéré ne pas avoir été repéré. Il attendit pendant deux jours, discutant longtemps avec Rig-rid par l'intermédiaire de la broche en attendant de sortir.
Mais il était temps, et le paysage courait sous ses pieds à une vitesse folle tandis qu'il se dirigeait vers la montagne de tous les mystères.
Que peuvent-ils bien faire ici ?
Il n'eut pas le temps de s'interroger plus à ce sujet : les optiques de sa machine lui permirent de détecter un groupe d'engins sur sa gauche. Il se cacha immédiatement derrière un rocher, puis, il sortit la tête de derrière sa cachette. Quelques réglages plus tard, Arsear voyait sous ses yeux se déplacer un étrange convoi. Des camions, des armures de combat humaines, des tanks, des transports de troupes blindés, des camions citernes...Mais les quelques conducteurs qu'il pu voir au travers des pare-brise, peu étaient Humains. Une grande majorité rappelait plus les chimères, avec une forme bizarre.
Qu'est-ce qui se passe encore...
« - Monseigneur, vous vous êtes stoppé, il se passe quelque chose ?
- Rien de bien important Rig-rid. »
Arsear manœuvra pour suivre la colonne d'engins à bonne distance tout en espérant ne pas se faire remarquer.
*
Du haut de la montagne, un guetteur chimère, caché par une tenue de camouflage le fondant dans le décor, observait le convoi s'approcher lentement. Mais un dégagement de poussière derrière eux retint son attention.
Qu'est-ce que c'est que ça ? On dirait une armure humaine... mais pourquoi se cache-t-elle ?
Le combattant prit la pare de jumelle à sa gauche et les porta à ses yeux. L'engin qu'il avait devant lui ressemblait à s'y méprendre à une AMC, mais ces machines n'avaient pas de structures apparentes en laiton. Et les engins que les chimères avaient modifiées portaient le bismuth à l'intérieur du blindage, et non à l'extérieur comme celle-ci.
Non, ça ne ressemble à rien de connu.
Par l'intermédiaire de la mémoire, il prévint immédiatement le convoi.
*
* *
*
- Je t'écoute Hillgearim, fit Salida dans la mémoire devenue silencieuse.
- Je n'ai rien à te dire.
- Oh si, tu vas parler. Tout le monde attend maintenant des explications, et des preuves.
Une grande quantité de chimères s'étaient regroupés autour des deux souverains proclamés au sein de la mémoire. Salida n'avait demandé qu'à trois chimères particulières d'être présentes : Sellgan, Kouiros et Tégos. Tout les trois avaient compris que la Reine ne laisserait pas son cousin tranquille tant qu'elle n'aurait pas eu ses réponses. L'ambiance était grave, pour soutenir Hillgearim, des esprits chimériques l'accompagnaient également. Mais, au fur et à mesure que le temps passait, d'autres chimères s'intéressaient à la discussion qui se transformait de plus en plus en rapport de force.
- Je n'ai rien à prouver à qui que ce soit : Je suis le seul et unique Roi des chimères. Ce n'est pas une demi-créature qui a fuit ses responsabilités comme toi qui va me faire la morale.
- J'ai reconnu mes erreurs, et j'en ai déjà payé le prix. J'attends que tu énonces les tiennes.
- Je n'ai rien à énoncer : je n'ai rien à me reprocher.
- Hillgearim, fit calmement Salida. Ne me force pas à démontrer ce que j'attends de toi : tu sais pertinemment de quoi je parle, mais je veux te l'entendre dire.
- Quoi donc ? Que veux-tu que je dise donc ?
- Parle-moi de tes trahisons, envers le Roi Shershen, mon père,pour commencer,... Les esprits chimériques se figèrent, choqués, Quelques uns murmurèrent entre eux.
- ... envers moi ensuite,... Les murmures s'amplifièrent au point de devenir assourdissants
- ...et pour finir, envers le peuple chimère tout entier ! Hurla-t-elle par-dessus le brouhaha.
Le silence fut immédiat. Salida savait qu'elle jouait gros, elle avait appris le bluff avec l'escadron papillon lors de parties de poker. Mais là, les risques étaient bien réels : si elle n'arrivait pas à acculer Hillgearim, les chimères pourraient se retourner contre elle.
- Comment oses-tu m'accuser de la sorte ? Grogna l'esprit du pégase. Tu n'as plus rien d'une chimère, ni la forme, ni l'esprit, et encore mon l'honneur. Tu as épousé un Humain, le premier venu capable de te protéger a fait l'affaire... Tu n'es plus une chimère Salida, tu souilles de ta présence la mémoire où réside l'Histoire de nos ancêtres... Tu as fait honte à ton père bien des fois, et tu me fais honte aujourd'hui : m'accuser de trahison... En as-tu seulement le droit ?
- J'en ai le devoir, répondit-elle. J'aurais préféré rester une paria, vivre ma vie aux cotés de cet humain dont tu détestes tant l'espèce... Mais qui à réveillé mon pouvoir. Vivre ma vie sans jamais avoir de comptes à rendre...Oublier les responsabilités et les protocoles... Mais je n'en ai plus ce loisir. Ce que tu as fait, ce que tu fait, et ce que tu projettes de faire est impardonnable.
- Et qu'ai-je donc fait de si répréhensible ?
- Des fantômes. Que tu utilises en instrument de terreur, et qui t'ont servi pour asseoir ta domination... Dont Matluisin, qui renseignait les Silridriss.
- Alors je n'ai rien à voir, c'est Matluisin le coupable, se défendit Hillgearim
- C'était un fantôme, et il était à tes ordres.
Dans la mémoire, le peu d'information sur la vie de Matluisin fit vibrer l'atmosphère. Chaque spectateur cherchant à se fournir son propre avis. Pourtant, il n'y avait rien qui permettait de le relier au pégase hormis le fatras qu'il avait montré à Salida avant sa mort. Puis virent les aveux de Dioclès, mais les souvenirs, très érodés par le temps ne pouvaient servir d'accusation véritable.
- Mensonge. Si c'est là tout ce dont tu disposes tu peux retourner auprès de ton Humain : c'est pathétique de vouloir...
- Vérité, coupa une voix douce.
L'ensemble des esprits s'écartèrent pour laisser passer celui qui s'était incrusté dans la conversation.
- Silence, lui imposa Hillgearim, j'ignore qui tu es mais cette conversation ne te concerne en rien.
Sous l'ordre, l'esprit de la chimère se recroquevilla, mais Salida ne le laissa pas disparaître dans la multitude des spectateurs.
- Qui es-tu ? Et qu'as-tu à dire ?
La chimère qui venait de parler ne dit plus rien, impressionnée d'être ainsi au centre de toutes les attentions de son espèce. Le silence dura ainsi de longues minutes avant qu'il ne se décide à parler.
- Je suis Talbot, le petit frère de Matluisin.
- Et ? C'est ton frère qui est mis en cause, pas toi, déclara Hillgearim. Si tu n'as rien d'intéressant à dire, garde le silence.
- Mais il ne peut plus se défendre, et... fit-elle timidement.
- Dois-je me répéter ?
- Non, mais te taire et écouter, intervint Salida. Que sais-tu Talbot ?
- Eh bien... Mon frère était bien un fantôme. Mais il espérait pouvoir reprendre sa vie d'avant une fois la guerre finie. Alors il m'a demandé de conserver ses souvenirs. Les plus simples, mais aussi les plus horribles.
- Raconte-nous, demanda Salida.
- Matluisin a bien été envoyé chez les Silridriss en tant que fantôme pour négocier une paix...Mais sur les ordres du Roi Shershen.
L'effroi que généra l'information dans les rangs des chimères fut terrible. Le souvenir vivace de ce que Shershen avait demandé fut alors ajouté dans la mémoire en tant que preuve. Celle-ci, conservée intacte dans l'esprit de Talbot, était indiscutable.
- Quelque chose à dire Salida ? Demanda Hillgearim
- Si mon père a fait cela, il devait avoir ses raisons. Continue Talbot.
- Pour moi, c'est suffisant. Fit le pégase en se préparant à partir comme un grand seigneur.
- Durant toute la période où il a risqué sa vie pour le Roi, il a servi de relais au pouvoir d'Hillgearim qui jouait les ambassadeurs...
- Et ? Qu'est-ce que ça prouve ? Que je cherche à arrêter cette guerre ?
- Non, bien au contraire, fit Talbot qui prenait de l'assurance. Sur tes conseils, il a volontairement transmis des informations aux Silridriss, soi-disant pour préparer la paix, en demandant de ne pas attaquer ces endroits. Mais avec le recul, chaque information donnée se finissait par une frappe précise et bien préparée de nos ennemis...
Comme pour appuyer ses dires, les souvenirs de Matluisin furent présentés. Les deux attaques près de Pau, celle de Clermont-Ferrand, et... l'assassinat de Shershen.
... Mon frère a alors comprit qu'il avait été berné. Mais vers qui devait-il se tourner ? La princesse ne pouvait gouverner, et quand bien-même, aurait-elle accepté ce qu'il avait fait ?
- C'est suffisant Talbot. Tu en as assez dit, gronda Hillgearim.
- Non, défia-t-il avec tristesse et colère. Mon frère était quelqu'un de bien qui a fait de son mieux avec le peu de chose qu'il savait. Vous seul Hillgearim, étiez près à prendre la responsabilité de nous diriger, de plus, il pensait vraiment que vous aviez un plan, une stratégie... Alors il a gardé le silence, cachant l'horreur à laquelle il avait involontairement participé pour ne pas déstabiliser encore plus notre espèce. Il a suivit la déchéance de notre espèce tout en se sentant coupable...
La profonde peine de Talbot transpirait dans la mémoire. Mélangé à la colère, le ressentiment qui le brûlait à l'encontre du pégase, se transmettait lentement à l'assemblée. Il continua, phrase après phrase à décrire la fin de vie de Matluisin.
... Patiemment, il attendait la venue d'une personne qui serait en mesure de servir le bien commun. Mais personne ne se déclarait, alors il continuait de servir celui qui se proclamait Roi ! Jusqu'à ce que Salida devienne une Reine... Mais aurait-il pu se présenter devant elle sachant ce qu'il avait fait ? Il ne le pu. Mais il stoppa toute négociation avec les Silridriss, forçant Hillgearim à utiliser son pouvoir pour le faire lui-même !
- Faut-il que je te fasse taire !? Hurla le pégase.
- Non ! Imposa Salida. Plus de silence ! Plus de menaces !
- Tu lui avais promis de le sortir de là ! Hurla à son tour Talbot. Mais tu l'as abandonné ! Alors il est allé voir la princesse en espérant une aide de la dernière chance. Mais il n'a pas eu le temps de lui demander ou de lui avouer quoi que ce soit !
A chaque accusation, la mémoire personnelle de Matluisin était ajoutée à la mémoire commune pour créer une preuve aussi irréfutable qu'implacable.
Un silence aussi morbide qu'accusateur entoura l'assemblée formée par la multitude des esprits chimériques. La mémoire était saturée de discussions personnelles comme autant de murmures secrets sur ce qui venait de se passer. Dans toute cette agitation, elle accola son esprit à celui, sombre, triste et blessé de Talbot. Elle tenta de le réconforter, mais il se dégagea violemment.
- Merci, fit-elle simplement.
- Je ne l'ai pas fait pour vous... Mais la mémoire de Matluisin ne doit pas être salie. Surtout pas après tous les sacrifices qu'il a fait.
- Hillgearim va te pourchasser, est-ce que tu veux venir à la cité d'Argent ?
- Non, je suis Chimère. La forme que vous prenez pour vivre avec les Humains me répugne. Et je ne parle pas de ce que vous faites avec votre mari.
- Oui, mais ça, ça ne te regarde pas. Fait comme tu le sens pour la suite. Je n'oblige à rien. Matluisin n'est plus là pour le dire... Mais merci pour lui.
Dans la mémoire, les discussions allaient bon train, et Hillgearim s'adressa à Salida. Dès les premiers mots un silence religieux s'imposa naturellement. Les deux cousins savaient pertinemment qu'ils étaient écoutés. Le dernier échange serait déterminant vis-à-vis des spectateurs.
- Ça y est ? Tu es contente ? J'ai perdu toute crédibilité, et tu n'en as pas... Qui va diriger maintenant ?
- Celui ou celle qu'ils voudront suivre... Moi, j'ai déjà choisi ma voie et beaucoup de monde veut tenter l'expérience. Sera-t-elle bonne ? Sera-t-elle mauvaise ? Je l'ignore... Tout ce que je sais, Hillgearim, c'est que tu es responsable de la mort du Roi Shershen et que je te dois ma forme actuelle par tes multiples tentatives de meurtre. Nombreux ont été blessés et tués par tes agissements. Le seul pouvoir que je te reconnais, c'est le pouvoir de nuisance. Cela handicape notre société entière... Hillgearim, si je viens à te croiser. Que ce soit de manière voulue ou par inadvertance, je te tuerais.
- Je ne me priverais pas de ce plaisir non plus. Je considère que tu es responsable de la crise dans laquelle nous sommes aujourd'hui plongés. Non content de la provoquer, tu continues ce travail de sape en cherchant à me décrédibiliser. Tu entraînes notre espèce dans une déviance qui nous sera certainement fatale. Je me considère en droit de t'éliminer pour assurer notre survie... Cela vaut aussi pour tout ceux qui t'appellent ''Reine'', qu'ils soient Chimères ou Humain, cela importe peu.
Les derniers mots échangés la mémoire commune aux chimères entra dans un intense bouillonnement. Les discussions allaient dans tout les sens, mais Hillgearim et Salida continuaient de se surveiller.
- Tu vas regretter de t'être opposée à moi. Lui murmura-t-il.
Pour toute réponse, la tigresse quitta la mémoire.
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