Chapitre Cinq {1}

    J'ouvre les yeux, encore bouffie de sommeil, je souris. Après avoir passé une de mes meilleures nuits. Je suis bien reposée. J'essaye de me lever mais je n'arrive pas à bouger. Je soulève la couverture avec ma seule main mobile. Je crie en découvrant un entrelacs de tiges vertes qui se sont enroulées autour de moi, me paralysant.

    Six visages se tournent vers moi, alertés par mon cri :

-    Qu'est ce qui se passe ? Pourquoi tu hurles ? demande Diane

-    Je ne peux plus bouger.

-    Arrête avec tes bêtises, lance Rebekah

    Cassiopée se retire de ses draps et s'approche de moi. Quand elle arrive à mon niveau, elle étouffe un cri et se précipite hors de la pièce en courant.

    Les autres filles apparaissent à mes côtés et ont la même réaction que Cassiopée.

-    Qu'est ce que... commence Alice

    Quelqu'un qui arrive en trombe dans la chambre, la coupe dans son élan, Morgan. Que fait-il là ? La présence de la petite brune à côté de lui, m'indique que c'est Cassiopée qui est allée le chercher.

    Il porte un pantalon informe retenu à la taille par un lacet et un simple débardeur blanc lui recouvre le torse laissant voir les muscles de ses bras. Il s'accroupit à ma hauteur, me laissant entrevoir ses cheveux ébouriffés, preuve qu'il vient de se réveiller, et ses yeux, vert profond.

    Il regarde les fils verts qui me serrent et avec un couteau, que je n'ai pas remarqué, il coupe les branches, me libérant. Je me redresse, soudain gênée de n'être couverte que de mes sous-vêtements. Je me recouvre avec le drap blanc.

-    Tu es précoce, on dirait, tu as réussi à faire croître cette plante, il désigne un pot posé sur la table de nuit de Juliette, qui plus est en dormant et avant ton anniversaire.

    Il a l'air vraiment impressionné même si ça ne se remarque pas vraiment. La plante s'est enroulée au moins trop fois autour de moi et j'en suis responsable.

-    Katelynn est une Élémentaire de la terre, alors ? demande Cassandre.

-    Apparemment, je vais aller prévenir Marc, je vous donne cinq minutes Kate.

    Il sort de la pièce. Je n'ai que le temps d'enfiler ma robe, qui me donne l'impression d'être déguisée mais je n'ai que ça. Une fois sortie, Morgan me prend le bras et m'entraîne hors de la pièce. Et je repense à ce qu'il a dit: " ... cinq minutes Kate."De quel droit a-t-il pour raccourcir mon nom ? Je lui fait la remarque et il rétorque :

-    C'est plus court et plus facile à dire que Katelynn.

-    Je ne vous permet pas.

-    Je n'ai pas besoin de votre accord pour ça.

    Il frappe à la porte du bureau de Marc, qui s'ouvre de suite.

Marc apparaît tout habillé, bien comme il faut, à croire qu'il n'a pas dormi.

-    Oui ?

-    Monsieur, Kate s'est manifestée cette nuit.

-    Comment ?!!

-    Oui, vous avez bien entendu, monsieur. Je peux vous dire qu'elle est assez précoce et qu'elle excelle chez les plantes.

-    Une Élémentaire de la terre ?

-    Oui.

-    J'en informe mes supérieurs. Allez lui trouver une tenue pendant ce temps et commencez ses cours dès maintenant.

-    Bien, monsieur.

    La porte se referme avec un claquement sourd. Morgan se retourne et me demande de le suivre.

    Nous arrivons dans un petit vestiaire où sont entreposés des tenues semblables à celles des filles. Morgan en choisit une, verte et noire et me la tend. Il m'indique une cabine, fermée d'un rideau.

    Je m'y introduis et enfile la tenue. Je fais glisser la fermeture Éclair qui se trouve sur le côté et sors. Je remarque que Morgan a lui aussi enfilé sa tenue, rouge et noire. La combinaison est peut-être extrêmement près du corps, elle n'en est pas moins très confortable et renforcée aux articulations. Je n'ai jamais porté une chose aussi agréable. Mes mouvements sont fluides à travers le tissu élastique contrairement aux jupons qui étaient un vrai calvaire. C'est la première fois que je met autre chose qu'une robe et ça me plaît.

    Nous regagnons la salle d'entraînement où les filles nous attendent.

Morgan nous rassemble et prend la parole :

-    Aujourd'hui vous allez travailler en binôme et seules, débrouillez-vous.

    Elles obéissent et s'éparpillent. Morgan se tourne vers moi :

-    Votre entraînement vient de commencer, première étape : méditation.

-    Pourquoi ?

    Il souffle de mécontentement, déjà agacé par mes questions :

-    Pour canaliser votre énergie et aiguiser votre concentration. Asseyez-vous.

Je m'exécute et il prend place en face de moi.

-    Fermez les yeux et détendez vous.

Après une longue inspiration, il continue, plus doucement :

-    Imaginez vous dans une plaine. Un arbre se présente devant vous, une de ses branches est cassée. Concentrez vous sur le petit bourgeon qui doit remplacer la branche. Respirez et pensez que le bourgeon s'ouvre et donne naissance à une tige. Cette tige grandit, devant vos yeux, grandit, jusqu'à devenir aussi forte que son prédécesseur. Elle donne de nouvelles branches qui donnent aussi de...

    Je l'ai écouté et ai imaginé tout ce qu'il décrivait mais maintenant il ne dit plus rien. J'ouvre les yeux, inquiète. Morgan regarde son avant-bras, rayé de vert, une plante. À côté, je découvre une petite fougère en pot, c'est elle qui enserre le bras de mon professeur. Je suis pétrifiée et chuchote :

-    C'est moi qui...

-    Oui, répond Morgan sans quitté des yeux le végétal.

-    Désolée...

-    Non, non... C'est extraordinaire, il ne faut pas s'excuser pour une telle prouesse.

-    Quoi ?! Ça m'échappe.

-    Vous pouvez l'enlever avec votre pouvoir ?

-    Je ne sais pas si j'en suis capable.

-    Essayez.

    Il s'est tourné vers moi, ses yeux verts étincellent de curiosité. Je ferme les yeux et imagine la fougère se déroulant de son bras et... Je ne sais pas pourquoi mais j'ai tout d'un coup envie qu'elle grandisse, grandisse et...

-    Kate, arrêtez ! Ouvrez vos yeux !

    Je bat des paupières, un peu sonnée. La fougère est deux fois plus grosse qu'au départ et je me rends compte que c'est moi qui ai fait ça. La peur me prend la gorge, je n'ai aucune raison mais j'angoisse face à mes capacités.

    Pourquoi moi ? Je recule, comme si m'éloigner de la plante allait me protéger. J'ai peur de moi-même...

-    Calmez vous, me rassure une voix masculine.

    Morgan me tend une main. Je l'accepte puis me redresse.

-    C'est normal, si ça vous choque, c'est comme ça pour tout le monde. Vous avez fait du très bon travail mais vous devez vous contrôler. Vous êtes puisante.

    Il ne me regarde plus de la même façon. Je lis un profond respect au fond de ses iris verts. Pour me faire accepter, je n'avais qu'à l'impressionner ? Quelle drôle de manière pour gagner la confiance de quelqu'un...

    Je regarde mes mains, il n'y a rien. Alors comment ai-je fais ça ? Le seule sensation ressentie était cet appel incontrôlable de faire grandir la fougère. Étrange...

-    C'est normal que je ne ressente rien ? Même pas de la fatigue, après ça ; je désigne le pot.

-    Je ne sais pas. Normalement tout le monde ressent quelque chose. Vous en êtes sûre ?

    Je lui fait part de l'envie qui m'a prise avant qu'il m'arrête. Et il répond :

-    C'est tout à fait courant, enfin je crois.

-    Vous croyez ?

-    Vous êtes la première Élémentaire de terre que je rencontre alors je ne sais pas comment gérer votre cas.

-    Je suis la seule spécialiste des plantes ?

-    Non, bien sûr que non, mais vous n'êtes pas nombreux, comme moi.

-    Comme vous ?

-    On ne vous a pas dit que je suis le dernier Élémentaire de feu ?

-    Le dernier ?

-    Oui, personne n'a survécu, répond-t-il, la mine sombre.

-    Pourquoi ?

-    Je préfère ne pas vous le dire.

-    Mais...

    Il tourne la tête et se dirige vers le binôme de Juliette et Cassiopée, esquivant la question. Pourquoi fait-on autant de secrets ici ?

Je reste quelques minutes seule avec mes pensées puis Morgan crie :

-    Déjeuner !

Je suis les filles dans ce qui ressemble à un réfectoire, il y a un self et une multitude de tables remplies de monde.

-    Qui sont toutes ces personnes ?

-    Des gens qui travaillent au Sous-Noyau et encore ce ne sont que ceux de cet étage, m'informe Cassiopée.

    Cela veut dire qu'il a six fois plus de personnes dans le bâtiment entier? Je ne suis pas vraiment étonnée, le Sous-Noyau, s'étendront de même  jusqu'au niveau mondial.

    Je prends un plateau et en voyant les plats se présenter sous mes yeux, je sens mon ventre se tordre. J'avais oublié que je n'avais pas mangé un vrai repas depuis le restaurant, d'avant hier, enfin je crois. Je suis toujours perdue. Je n'ai fait que grignoter, pendant l'entraînement des filles.

-    Quel jour sommes nous?

-    Le 12, je crois, me répond Cassandre, qui est derrière moi dans la file d'attente menant au self.

    Dans cinq jours, c'est mon anniversaire, le 17 août. J'ai cinq jours d'avance sur la manifestation de mon don. C'est énorme ! Morgan avait bien choisi, en me traitant de précoce. D'un côté, j'en suis assez heureuse. Je crois même que c'est la première fois que je ressens ça, aussi intensément. Nous arrivons devant les entrées et je me resserre deux fois. Je fais la même chose avec le plat et le dessert.

    Morgan qui est assis non loin de moi, me scrute et lance :

-    On voit tout de suite que vous ne mourrez pas de faim.

    Je recule le morceau de poulet de ma bouche et le transperce d'un regard de fer, il s'en moque et me défie de ses yeux verts. Il m'énerve, je me détourne et l'ignore m'attaquant à la volaille.

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top