Chapitre 5 : La photo d'Ilvermorny


Une semaine s'était écoulée, et Alycia se sentait enfin comme chez elle. Après trois nuits de vagabondage réussies, elle avait trouvé ses repères, et on pouvait croire qu'elle avait toujours été là. Au contraire de ce qu'elle pensait au début, les jumeaux ne posaient pas trop de questions. Jamais ils ne lui avaient demandé pourquoi elle n'avait toujours pas reçu de nouvelles de sa famille, pourquoi Nox avait le droit d'être ici, pourquoi elle refusait d'enlever sa bague pour dormir, pourquoi elle était aussi secrète sur sa vie d'avant...Et elle leur en était très reconnaissante.

Pourtant, elle en apprenait tout les jours sur eux, et elle voyait en eux de véritables amis. Ils étaient joyeux, rieurs, et chacun apportait à sa façon une part de bonheur en elle. Evan avait même été supplier Dumbledore de la laisser aller à Près au Lards avec eux, mais ce qu'il ne savait pas c'est que le directeur lui même avait des ordres formels de sa mère quant à sa sécurité, Près au Lard n'était pas Poudlard, et tout ce qui n'était pas Poudlard, était potentiellement dangereux. Il avait donc refusé et les jumeaux étaient partis seuls, la laissant entre les murs de l'école.

Elle s'était attachée aux Jenkins, et maintenant qu'elle était seule, elle s'ennuyait. Ainsi avait-elle décidé de s'occuper de Nox. Dans la cours, sous le regard admiratifs de certains, elle le faisait voler et revenir sur son bras. Ses ailes majestueuses battaient l'air gracieusement, il produisait cet effet de noblesse pure, qui attire les regards, tout le monde contemplait son manteau marron et blanc dessiner des cercles dans le ciel. Et en même temps elle songeait. Tout ici, lui rappelait ce qui était arrivé à Ilvermorny. Et ce n'était pas forcément bien.

Au bout d'une heure, elle ramena son aigle dans la volière. Il avait l'habitude de se poser sur son épaule et de mordre les doigts de ceux qui osaient l'approcher curieusement. En le posant sur son perchoir, elle sentit quelque chose glisser de son manteau et tomber lentement sur le sol. Elle se pencha et ramassa l'objet en question. C'était une photo d'un garçon, sa peau était foncé et ses yeux verts comme l'herbe des plaines d'Écosse.

Elle sursauta et ferma les yeux, dissimulant le portrait dans sa poche. Son cœur se serra et elle se mordit les lèvre. Elle courut à l'extérieur et respira l'air frais à plein poumon. Elle sentait son cœur battre plus vite, des sanglots désiraient franchir ses lèvres et restaient coincés dans sa gorge, elle ne voulait pas se laisser aller aux crises de larmes. Ilvermorny c'était du passé. Elle se répéta ce mot en boucle dans sa tête. Du passé. Passé. Passé. Poudlard c'est l'avenir. L'avenir.

« Hey ça va ? »

Elle bondit, sursautant une nouvelle fois. Son sang battait dans ses tempes et la tête lui tournait. Une main se posa sur son épaule, et automatiquement elle se ressaisit. Cette voix elle l'avait entendu quelques fois, rarement, mais assez pour qu'elle marque son esprit.

« Ca va...Je...je...pensais...je...réfléchissais..., mentit-elle en bégayant.

― Tu es sûre, tu es toute pâle, assura la voix en se rapprochant. »

C'était Remus Lupin, le garçon à la cicatrice, au visage doux et réconfortant. Alycia resta un long moment de marbre à le regarder dans les yeux. Il ne semblait pas comprendre ce qu'elle faisait là, et dans son regard, il lui paraissait y apercevoir une once d'inquiétude également. Autant avec Sirius Black, elle arrivait à sortir une insulte à la seconde, autant là, elle cherchait désespéramment quoi dire.

« Non...enfin si ! Je vais très bien, j'ai juste pas...pas assez mangé ce midi, j'aurai peut être dû écouter Evan quand il me disait de manger mon yaourt..., mentit-elle de nouveau en jouant avec ses doigts nerveusement.

― Tu veux du chocolat ? Lui demanda t-il après une minute de réflexion. »

Alycia fronça les sourcils, ne s'attendant pas du tout à cette réponse.

« Du chocolat ?

― Oui du chocolat, j'ai toujours quelques carrés de chocolat sur moi, lui dit-il en sortant de sa veste un tablette de cet aliment. Ma grand-mère disait qu'il n'y a rien de mieux pour redonner des forces. »

Décontenancée, elle accepta sans broncher ce que lui offrait le troisième maraudeur. Elle mordit à pleine dent dans le chocolat sous le regard bienveillant de Remus. En bonne gourmande qu'elle était , elle sentit son estomac approuver les paroles du jeune homme.

« Tu reprends des couleurs, quand je disais que c'était une recette miracle..., se réjouit-il en croquant lui aussi un bout qu'il avait cassé. »

Il portait un pull usé, trop long pour lui, et un pantalon troué aux genoux, ses chaussures en toiles n'avaient plus la couleur claire d'origine, et il y avait des cernes qui couvraient le dessous de ses yeux. Instinctivement, une voix dans sa tête, lui disait qu'il n'y avait aucune personne en Amérique qui ressemblait un tant soit peu à Remus Lupin, et cela lui faisait du bien.

« Tu n'es pas à Près au Lard ? s'enquit-il en fixant un brin d'herbe sur le sol de pierres.

― Je pourrais te poser la même question, je croyais que tu n'étais jamais sans le reste des maraudeurs...Et je les ai vu partir en direction du village.

― J'avais envie de rester. »

Ils se turent. Écoutant le silence. Elle ne saurait dire s'il était gêné ou s'il s'agissait de timidité, la seule chose qu'elle remarquait, c'était qu'elle venait d'oublier la photo et tous les souvenirs qu'elle avait fait ressurgir sans prévenir. Peut être était-ce vraiment le chocolat, mais un doute persistait. Il faisait parti des personnes en qui, sans qu'elle ne sache précisément expliquer pourquoi, lui inspirait confiance, un peu comme Lily Evans, avec qui elle avait reparlé une ou deux fois.

« Alycia ! »

Emily, les bras remplis de sacs en tout genre, lui désignait Evan, qui lui même lui faisait de grands signes de la main. Ils avaient dit, que par égard pour elle, ils ne seraient pas longs et ils avaient tenu parole. Retrouvant son sourire, elle s'apprêtait à courir les rejoindre quand, Remus l'interpella.

« Tiens prends le reste de la tablette, si jamais tu te sens de nouveau mal..., lui proposa t-il en le lui tendant.

― Merci, lui dit-elle simplement. »

Et elle s'en alla vers ses amis, l'esprit pourtant rempli de questions sur le jeune homme.

***

« C'était bien ? Vous vous êtes amusés ?, leur demanda Alycia alors qu'ils s'asseyaient tous les trois sur un arbre abattu, près du lac, un de leurs endroits favoris.

― On a pas fait grand-chose, tu sais, depuis le temps qu'on y va, on connaît tout par cœur, lui avoua Evan. Dis nous plutôt pourquoi tu parlais à Lupin, ne me dis pas qu'il te plaît quand même ?

― Je ne me sentais pas bien, il l'a vu et il m'a demandé ce qui n'allait pas, rien de plus, rien de moins, répondit-elle en jouant avec l'écorce du bois.

―Comment ça ça n'allait pas ? s'inquiéta Emily en la prenant par les épaules.

― Rien, juste un peu de fatigue rien de grave, leur fit-elle en se mordant les joue pour paraître convaincante. »

A leur tête perplexe, elle savait qu'ils ne la croyaient pas, mais de nouveau, ils ne dirent rien. Souvent, il lui arrivait de penser, que les jumeaux eux non plus ne disaient pas tout, pour qu'elle raison sinon comprendraient-ils cette nécessité d'attendre le bon moment pour raconter son histoire ? Elle n'était la seule à dissimuler des vérités, en temps de guerre, les secrets sont nombreux.

« Tu savais que Lucie sortait avec Sirius Black ? Lui dit Emily pour essayer de briser le silence qui menaçait de s'installer. Je les ai vu s'embrasser au détour d'une rue.

― Tu vas pas en faire toute une histoire si ? Grogna Evan en levant les yeux au ciel.

― Elle mérite d'être avec un gars laid, siffla Emily. Comme elle !

― Je suis bien d'accord, acquiesça Alycia. Mais tout de même, si je tiens compte de ce que tu m'as dit, il a déjà fait tout Poudlard ou presque...Il rabat ses dernières cartes.

― Ils forment une belle paire d'imbéciles, continua Evan en serrant les dents, comprenant très bien que sa sœur était plus émue qu'elle ne le laissait paraître. »

Emily lui envoya une belle grimace pour unique réponse. Alycia les laissa régler leurs comptes, en famille. Elle ne bougea pas, toujours entre les deux, attendant que ceux ci se décident à laisser tomber.

« Arrête de te prendre pour papa ! Tu es mon frère, pas mon père, je fais ce que je veux, je pense ce que je veux, laisse moi respirer, s'insurgea Emily. Si j'ai envie de penser qu'ils ne vont pas ensembles, c'est mon problème, occupes toi de tes affaires !

― Souviens toi de comment ça a finis avec le Poufsouffle ! Tu as pleuré pendant un mois, et qui devait prendre soin de toi ? Moi !

― Mais c'était y a longtemps maintenant, on a tous grandis, ça ne sert à rien de remuer le passé Evan ! »

C'est à cet instant, qu'Alycia eut une idée. Une idée qui allait tout changer. Elle se leva, et plongea sa main dans la poche de son manteau, serrant dans son poing la photo du garçon d'Ilvermorny. Elle s'élança à toute allure, sans prêter attention aux cris des jumeaux, à travers les arbres et la végétation. Elle ne s'arrêta pas, y compris quand elle bouscula involontairement deux premières années, ou quand Lily l'interpella pour discuter avec elle, elle avait beaucoup plus important à faire : effacer toutes traces de ce qui était arrivé à Ilvermorny. Depuis une semaine, les souvenirs du garçon avec qui elle était sorti la hantaient, et elle ne devait pas les laisser s'installer en elle comme cela.

Une fois dans son dortoir, elle mit sans dessus dessous l'ensemble de ses baguages, éparpillant ses vêtements et ses livres dans toutes la pièce. Enfin après quelques minutes, elle rassembla un paquet de lettres, de photos, tout ce qui avait un rapport avec ce jeune homme qui vivait encore dans ses souvenirs. Il était une des multiples raisons qui l'amenaient à Poudlard, elle ne devait pas penser à lui chaque minute, cela la rendrait malheureuse.

Cette nuit, elle irait jeter la boîte dans laquelle elle avait tout disposé, dans le lac noir. Personne n'aurait l'idée d'aller fouiller les profondeurs à la recherche d'une simple boîte.

***

Elle attendit longtemps que toutes les filles du dortoir s'endorment, il devait être plus de minuit quand Lucie se leva pour boire, Alycia se força donc à veiller encore plus tard. Ce ne fut que quand elle n'entendit plus que des respirations régulières qu'elle décida de se lever, se chaussant et s'habillant à la va vite. Elle saisit le coffret qui contenait les dernières traces du garçon d'Ilvermorny.

Depuis quelques jours, elle savait exactement par où passer pour éviter les rondes de Miss Teigne. Elle contourna donc aisément le parcours habituel du félin et arriva en quelques minutes à l'extérieur du château. L'air était froid et une légère brise soufflait, faisant onduler ses cheveux. Elle serra son manteau autour d'elle par réflexe plus que par réelle sensation de froid. Les étoiles la regardaient se diriger vers le lac, comme une ombre gracieuse. Et la lune, qui était pleine, illuminait assez bien le chemin pour qu'elle n'ait pas besoin de sortir sa baguette.

Une fois au bord de l'eau, elle soupira longuement, comme pour se donner du courage, se convaincre que c'était la meilleure chose à faire... Puis d'une main tremblante, elle attrapa une branche pour se pencher et jeta de toute ses forces le coffret. Il entra en contact avec l'eau glacée du lac avec bruit, et quelques éclaboussures atteignirent le visage de la jeune fille. Mais bientôt, elle ne vit plus aucune trace de son acte, il avait coulé, le lac avait fait son travail, enterrant parmi les Ténèbres des profondeurs, l'un de ses plus lourds secrets. Malheureusement ce n'était pas le seul.

Elle se redressa et, se dirigea vers le château sans se retourner. Elle délaissait là, une partie de sa vie, qu'elle ne voulait plus jamais voir. C'était son choix.

Mais au moment de passer devant la cabane de Hagrid, un hurlement retentit dans le noir de la nuit. Son coeur s'arrêta pendant quelques secondes, se sentant comme observée. Elle se retourna juste à temps pour entrevoir une ombre, une ombre en forme de cerf. 

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